Dans une tribune datée du 22 juillet, la conférence épiscopale de France dénonce les réfractaires au passe sanitaire et leurs manifestations.
Les évêques reprochent en premier lieu aux manifestants d’avoir brandi l’étoile jaune, mais plus encore leur insoumission aux décisions jugées légitimes du gouvernement. Pour eux, ce passe est une chance, voire un sésame sacré : « Cette épidémie nous fait éprouver à tous combien nous sommes responsables les uns des autres. C’est comme une annonce de l’unité du genre humain et de l’union intime avec Dieu ». Le ton est donné, il sera celui de l’entière dhimmitude à la bien-pensance du moment.
Or l’idéologie est aujourd’hui à la vaccination pour tous : « Elle fait partie intégrante, dit le ministre de l’Éducation Nationale, du Contrat Social contemporain ». Quoi que l’on puisse penser du vaccin – c’est une chose – voici donc les évêques de France en faveur de la vaccination pour tous – ce qui est tout autre chose.
Nouveaux chantres du passe sanitaire, nos évêques n’ont sans doute pas mesuré la portée des propos du ministre de l’Éducation Nationale, simple relai parmi tant d’autres de la volonté dominante. Pour qui raisonne encore un tant soit peu, une telle phrase signifie que, sous peu, le non-vacciné sera comme exclu de toute vie sociale ; des cafés et transports tout d’abord, mais bientôt des centres commerciaux, et déjà en certains cas de son travail. Le réfractaire sera même considéré comme une menace pour la paix sociale. Aussi ce passe informatisé n’est-il rien d’autre que la mise en place d’une « note sociale » à la chinoise, et l’on est surpris de voir la Conférence Épiscopale de France l’adouber. Quand Jésus proposait son salut à tout homme, y compris au lépreux ; quand pour saint Paul, il n’y a plus au regard du Christ ni grec ni juif, ni maître ni esclave (Ga 3, 28), voici qu’au regard de nos évêques, il y aura désormais les vaccinés et les non vaccinés. Est-ce symptomatique ? Lors du voyage que le Pape effectuera en Slovaquie du 13 au 15 septembre, seuls les vaccinés pourront assister aux cérémonies[1].
Nouveaux chantres du passe sanitaire, nos évêques n’ont sans doute pas non plus mesuré tout l’égoïsme sous-jacent à la politique vaccinale actuelle. Celui-ci est souligné, entre autres, par le philosophe Martin Steffens : « Ce qu’il a de nouveau, c’est qu’on vaccine aujourd’hui les enfants, non pour leur survie, mais pour celle de leurs grands-parents. (…) Cela change tout. Un enfant qui attrape le tétanos meurt en quelques jours. Les enfants étaient les premières victimes de la polio. Mais un enfant qui attrape la Covid ne meurt pas. » Et le philosophe de s’interroger sur ce que l’Histoire retiendra de ces grands-parents qui auront livré leurs petits-enfants à un vaccin, toujours officiellement en voie d’expérimentation, et dont on ne découvrira que trop tard les effets. A titre d’exemple, aucune étude n’a été réalisée sur les risques d’infertilité que pourrait entraîner le vaccin, risques qui interrogent plusieurs spécialistes. Cela n’empêche en rien la vaccination massive des 12–17 ans, déjà largement éprouvés par les premiers confinements. Au confort des baby-boomers, on n’hésite pas à prendre le risque de sacrifier les générations à venir – si elles viennent. De cela, les évêques, semble-t-il, n’en ont cure, au contraire. Béats, ils concluent : « Cette épidémie nous fait éprouver à tous combien nous sommes responsables les uns des autres. C’est comme une annonce de l’unité du genre humain et de l’union intime avec Dieu. »
Certains mots réclament d’être répétés : « C’est comme une annonce de l’unité du genre humain et de l’union intime avec Dieu ». Pour qui sait l’entendre, cette dernière phrase est terrible. Piquez-vous vaccinez-vous, disent-ils, et vous serez une annonce tant de l’unité du genre humain que de l’union intime avec Dieu ! Si un rieur se demandait qui est piqué, l’homme de foi ne peut que déplorer deux incompatibilités graves avec le domaine de la grâce.
Tout d’abord, dans la ligne « pastorale » du concile Vatican II, nos hommes d’Église continuent à identifier artificiellement la recherche de l’unité du genre humain, supposément voulue par Dieu, et l’union intime avec Dieu. Rien pourtant ne justifie une telle identification, tout au contraire. Annoncé comme pierre d’achoppement (Is 8, 14) et posé en signe de contradiction (Lc 2, 34), le Christ est en effet l’incarnation même de l’inimitié originelle issue du premier péché : « Je poserai une inimitié entre toi et la Femme, entre ta descendance et sa descendance » (Ge 3, 15). Mais les évêques de Vatican II comme ceux d’aujourd’hui, épris de lendemains qui chantent, font fi de ces paroles divines. Au salut éternel que le Christ propose à ceux qui croient en lui, ils préfèrent l’unité temporelle du genre humain. Ce faisant, loin d’agir en serviteurs de Dieu, ils se posent de facto en vassaux du pouvoir temporel. Car c’est aux puissances politiques, et non aux hommes d’Église, qu’a été premièrement confié le soin de la paix temporelle. Apparaît alors le double crime inhérent à la nouvelle doctrine de la liberté religieuse : non seulement leurs tenants ont affranchi le pouvoir temporel de ses devoirs envers l’Église mais, en réduisant les droits de l’Église au droit commun, ils l’ont soumise au pouvoir politique. Et quand celui-ci prend ouvertement comme modèle la Chine communiste et sa « note sociale » contrôlée informatiquement, nos évêques bénissent, applaudissent et renchérissent. De quel dieu sont-ils donc les messagers ?
Piquez-vous, disent-ils donc en substance, et vous serez ainsi l’annonce vivante tant de l’unité du genre humain que de l’union intime avec Dieu. Dans le galimatias de leur nouvelle théologie, ils auraient tout autant pu dire, tellement les deux mots sont proches : Piquez-vous, et vous serez le sacrement de l’unité du genre humain. Apparaît alors le second fossé qui nous sépare de l’assertion épiscopale. Pfeizer ou Moderna sacralisés, le vaccin pour tous établi comme moyen actuel du salut voulu par Dieu ; l’homme de foi ne peut que s’interroger : quel est donc leur dieu ?
Si l’emploi de l’étoile jaune n’était pas forcément approprié, celui du carton rouge s’impose à l’endroit du communiqué de la Conférence Épiscopale de France.
- Cf. La Croix du 20 juillet 2021, « En Slovaquie, les fidèles appelés à se préparer pour la visite du pape François ».[↩]