Tu sanctifieras le jour du Seigneur

Abbé Pierre Barrère – Septembre 2009

Le mépris de la loi de Dieu n’est pas sans consé­quences dom­ma­geables sur les socié­tés comme sur les indi­vi­dus. « Nolite errare : Deus non irri­de­tur » (Gal. 6–7) « Ne vous y trom­pez pas, de Dieu on ne se moque pas. » 

Or, on le sait, Dieu s’est réser­vé un jour sur sept. « Memento.. » « Souvenez-​vous de sanc­ti­fier le jour du sei­gneur » (Exod.20.8)

Quel est ce jour ? Depuis les apôtres ce n’est plus le same­di mais le dimanche. Sous la loi ancienne qui était impar­faite et pro­vi­soire ce jour était le same­di (sab­bat). Mais Jésus est supé­rieur à Moïse et plus sage que Salomon (Matt.12–42) il est tout sim­ple­ment le Maître char­gé de nous gui­der vers le Salut, « bon Maître que dois-​je faire pour pos­sé­der la vie éter­nelle ? » (Marc 10–17).

Pour dis­cré­di­ter le Christ auprès du peuple, les scribes et les pha­ri­siens lui repro­che­ront sou­vent de ne pas res­pec­ter la loi du sab­bat. Un jour pour se défendre Jésus répon­dra sim­ple­ment « le Fils de l’homme est Maître même du Sabbat » (Matt.12–8). N’était-ce pas annon­cer que le jour du Seigneur pas­se­rait du same­di à un autre jour de par sa propre auto­ri­té ? De fait Jésus devait ame­ner la reli­gion à sa per­fec­tion et lui-​même dira qu’il est venu non abo­lir mais accom­plir la loi. Mais pour­quoi le dimanche serait-​il depuis le Christ meilleur que le same­di ou le ven­dre­di ou un autre jour de la semaine ? Dieu ne fait rien au hasard. Si le dimanche cor­res­pond au pre­mier jour c’est-à-dire à la créa­tion du monde car la Bible dit : « Au com­men­ce­ment Dieu créa le ciel et la terre », il cor­res­pond aus­si à la Résurrection qui est le signe mani­feste de la vic­toire sur le péché et la mort (rap­pel : c’est par le péché que la mort est entrée dans le monde). La Résurrection est donc le début de la res­tau­ra­tion du genre humain par le Christ. Ainsi c’est le dimanche que le monde a été créé par le Verbe et c’est aus­si le dimanche qu’il a été res­tau­ré par le Verbe fait chair.

Ne soyons donc pas éton­né s’il rem­place le same­di de l’ancien Testament qui n’était que pro­vi­soi­re­ment le jour du Seigneur pour le simple motif que « Dieu se repo­sa le sep­tième jour de toute son œuvre qu’il avait faite ». En fait, nous savons tous que Dieu n’est jamais fati­gué et n’a pas besoin de se repo­ser, mais il fal­lait bien don­ner au peuple juif une rai­son pour s’abstenir du tra­vail ser­vile et consa­crer un jour à Dieu. Le sep­tième jour s’imposait natu­rel­le­ment alors et l’expression « Dieu se repo­sa » veut sim­ple­ment signi­fier qu’après le sixième jour où il créa l’homme Il ces­sa d’agir en ne fai­sant plus de choses fon­ciè­re­ment nou­velles. Mais depuis Jésus est venu et c’est un autre ordre de choses qui est mis en place, « les choses anciennes sont pas­sées, voyez, tout est deve­nu nou­veau » dit st Paul (2 Cor 5–17). Pour répa­rer le péché, Dieu s’est remis à agir par l’Incarnation de son Fils et c’est lorsque vient la Résurrection qu’ il veut tout res­tau­rer toutes choses dans le Christ, même le jour du Seigneur.

Le jour du Seigneur désor­mais c’est et ce sera tou­jours le dimanche. Connaître cela est impor­tant. Cette tra­di­tion vient ou du Christ ou des apôtres ins­pi­rés par l’Esprit-Saint et voi­là pour­quoi aucune auto­ri­té pas même celle du Pape ne peut l’abolir. Aussi ce n’est pas un petit signe de rup­ture avec la tra­di­tion divine que d’avoir auto­ri­sé la messe « domi­ni­cale » anti­ci­pée au same­di (Paul VI 25–05-67 Eucharisticum mys­té­rium). Paul VI par cette « petite » modi­fi­ca­tion a de fait bou­le­ver­sé une spé­ci­fi­ci­té catho­lique tenue fidè­le­ment dans l’Eglise depuis deux mille ans. Certes ce n’était pas un refus radi­cal du dimanche, mais c’était intro­duire une idée pro­fon­dé­ment révo­lu­tion­naire que de pou­voir pra­ti­que­ment tro­quer la sanc­ti­fi­ca­tion du dimanche par la messe du same­di soir.

Les consé­quences ne se sont pas faites attendre. Peu à peu les le sens du jour du Seigneur s’est obs­cur­ci chez les fidèles et la pra­tique de l’assistance à la sainte Messe le dimanche n’a plus été per­çue comme étant si obli­ga­toire qu’on l’imaginait. Il ne faut tout de même pas exa­gé­rer ! Quels sont les catho­liques aujourd’hui qui conçoivent le dimanche comme un jour sacré et fon­da­men­ta­le­ment dif­fé­rent des autres car réser­vé en pre­mier à Dieu ? Qui parle encore de pro­fa­na­tion du Dimanche ? Mis à part les tra­di­tion­na­listes qui savent que c’est péché mor­tel à man­quer volon­tai­re­ment la messe en ce jour, qua­si­ment personne.

Ainsi le dimanche a per­du sa signi­fi­ca­tion et sa valeur car la com­mo­di­té per­son­nelle est deve­nue radi­ca­le­ment la pre­mière et si les pra­ti­quants conci­liaires sérieux veulent habi­tuel­le­ment faire du vélo le Dimanche ils iront à la messe la veille à 18h00 et s’imagineront être quittes de leurs obli­ga­tions envers Dieu pour le jour du Seigneur. Autre consé­quence, l’individualisme prend le des­sus. Chacun finit par choi­sir son jour du Seigneur et ceux qui ne peuvent pas rem­plir le pré­cepte le week-​end risquent faci­le­ment de prendre de leur propre chef un autre jour de la semaine pour le rem­pla­cer. Certains nous disent tran­quille­ment « Je ne peux pas aller à la messe le dimanche aus­si je rem­place en y allant en semaine ». Nous leur répon­dons « allez à la messe tous les jours de la semaine si vous vou­lez mais l’obligation grave de sanc­ti­fier le dimanche demeure ».

Autre chose. L’obligation qu’a toute la socié­té de se réunir pour rendre un culte public à Dieu n’est plus com­prise par les catho­liques, la reli­gion est deve­nu dans leur esprit une affaire pri­vée, elle concerne la conscience de cha­cun. C’en est fini du règne social de Notre Seigneur Jésus-​Christ qui se mani­feste sur­tout par la venue à la messe de tout le monde. De fait c’est le res­pect de la messe domi­ni­cale par tous qui est l’expression la plus visible du règne de Jésus dans une socié­té. C’est lorsque toutes les caté­go­ries sociales se retrouvent dans l’église pour recon­naître, prier et ado­rer leur Créateur, Rédempteur et Maître qui est là sous les appa­rences de l’humble hos­tie que se montre cette royau­té sociale du Christ . Mais au fait, quels sont les évêques aujourd’hui qui prêchent le droit de Jésus à régner, à être hono­ré par tous parce qu’il est seul Dieu, seul Très-​Haut ? A quoi bon chan­ter alors au glo­ria « Tu solus Deus, tu solus Altissimus Jesus Christus » quand on dit et répète que toutes les reli­gions se valent ? Ce dogme du Christ Roi, car c’en est un, n’est plus d’actualité pour eux. Ils l’ont décou­ron­né a dit Mgr Lefebvre.

Terminons par ces paroles fortes du car­di­nal Pie « Cette loi (du Dimanche), en effet, est à elle seule toute une légis­la­tion. L’observation de cet unique pré­cepte conduit direc­te­ment et comme néces­sai­re­ment à l’observation de tous les autres pré­ceptes. Le Dimanche est la clef de voûte de tout l’édifice reli­gieux et social. Pas une véri­té dog­ma­tique, pas une loi morale, pas une pra­tique utile qui ne soit liée à la sanc­ti­fi­ca­tion du Dimanche : en sorte que la pro­fa­na­tion du Dimanche est le ren­ver­se­ment abso­lu de toute l’économie chré­tienne. Déchirer ce com­man­de­ment, c’est déchi­rer la loi tout entière ; toutes les infrac­tions se ren­contre dans cette seule infrac­tion… » (Tome 3. 1866 « œuvres de Mgr de Poitiers » p.348)

Chers fidèles soyons fidèles à cette loi du Dimanche par l’assistance à la vraie messe bien sûr (pré­voyons dans nos dépla­ce­ments, nos vacances de trou­ver un lieu de culte à proxi­mi­té où est res­pec­tée la Liturgie.

Soyons à l’heure. Venons avec un mis­sel latin-​français (le latin car la vraie Eglise est romaine, le fran­çais pour com­prendre quelque chose). Ecoutons de notre mieux pos­sible la pré­di­ca­tion. Si nous com­mu­nions sachons res­pec­ter le jeûne Eucharistique et par­tons après l’action de grâce avec la réso­lu­tion d’être meilleur

Abbé Pierre Barrère, Prieur de Lanvallay

Extrait du Sainte-​Anne n° 212 d’oc­tobre 2009