Lettre de Mgr Benelli au nonce apostolique à Berne le 12 juin 1976

Monseigneur,

Au sujet de Mgr Marcel Lefebvre, le Souverain Pontife me demande de vous com­mu­ni­quer les trois points sui­vants, que je vous prie de por­ter vous-​même, dans les meilleurs délais, à la connais­sance du pré­lat, en lui trans­met­tant éga­le­ment la copie de cette lettre :

Vous remet­trez offi­ciel­le­ment à Mgr Lefebvre – qui sem­blait absent de Suisse à la date du 24 mai – le texte latin et sa tra­duc­tion fran­çaise de l’allocution que Sa Sainteté a pro­non­cée à l’occasion du récent consis­toire secret des car­di­naux et que tous les évêques ont déjà eu l’occasion de connaître.

Vous devrez en même temps faire savoir à Mgr Marcel Lefebvre que, de man­da­ta spe­cia­li Summi Pontificis, dans l’état actuel des choses et demeu­rant fermes les dis­po­si­tions du canon 2373, §1 du Code de droit cano­nique, il doit rigou­reu­se­ment s’abstenir de confé­rer les ordres à par­tir du moment où il aura reçu la pré­sente injonction.

3° Dans e dis­cours du consis­toire du 24 mai 1976, le Saint-​Père a tenu à rap­pe­ler lui-​même les démarches fra­ter­nelles qu’il avait ten­tées à plu­sieurs reprises auprès de Mgr Lefebvre. Il a redit et il redit aujourd’hui sa dis­po­ni­bi­li­té à accueillir celui-​ci, dès qu’il aura don­né un témoi­gnage public de son obéis­sance au suc­ces­seur actuel de saint Pierre et de son accep­ta­tion du concile Vatican II. Les condi­tions sont bien connues de Mgr Lefebvre : elles demeurent celles que je lui avais moi-​même pré­ci­sées, au nom de Sa Sainteté, lors de notre entre­tien du 19 mars et que je lui ai rap­pe­lées dans ma lettre du 21 avril der­nier.

Or le Saint-​Père a consta­té qu’un tel témoi­gnage ne lui était pas encore par­ve­nu, mal­gré les pro­messes qui en avaient été faites à plu­sieurs reprises. Le scan­dale public demeure tel que le sou­ve­rain pon­tife n’a pas pu attendre davan­tage pour prendre le Sacré Collège à témoin du main­tien de cette atti­tude non ecclé­siale. Et aujourd’hui même, il ne peut attendre davan­tage. Il adjure donc Mgr Lefebvre de ne pas se dur­cir dans une posi­tion qui le condui­rait de plus en plus à une véri­table impasse, alors qu’il peut encore, « dans l’humilité et l’édification », faire le geste que Sa Sainteté attend « avec une pater­nelle espé­rance ».

Veuillez agréer, Monseigneur, avec mes remer­cie­ments pour votre entre­mise en cette grave cir­cons­tance, l’assurance de mon fidèle et cor­dial dévoue­ment en N.S.

Mgr Benelli, sub­sti­tut à la secré­tai­re­rie d’Etat du Vatican