Très Saint Père, Jean-Paul II,
Prosterné aux pieds de Votre Sainteté, j’implore la Bénédiction Apostolique.
A la fin du mois de mars de cette année 1982, j’ai reçu une lettre de Son Eminence le Cardinal D. Sebastian Baggio, Préfet du Sacré Collège des Evêques, dans laquelle, au nom de Votre Sainteté, son Eminence prononçait de graves accusations contre ma personne, dans le sens où j’aurais interféré dans l’administration du diocèse de Campos et compliqué la tâche de son évêque, Dom Carlos Alberto Navarro, au lieu de coopérer avec lui.
Avec beaucoup de respect et de déférence, je dois dire à Votre Sainteté que ces accusations sont sans fondement. En outre, la lettre de Son Eminence le Cardinal Baggio, en indiquant les fautes dont je suis accusé, n’apporte aucune preuve justifiant ces accusations. C’est un fait aussi, que dans le diocèse de Campos, le prêtre Lamar Barreto Calzolari, tenu en haute estime par l’évêque du diocèse, n’hésite en aucune manière à me diffamer devant tout le Brésil dans les colonnes de « O Globo », le journal le plus largement lu dans la région, avec de telles inexactitudes. Permettez-moi, Votre Sainteté, d’exprimer mon souhait de venir chercher refuge au Vatican contre de telles accusations sans preuve.
Une quelconque collaboration avec l’évêque, Dom Carlos Navarro, devint difficile à partir du moment où, dans la presse de Rio de Janeiro et de Sao Paulo, le conseiller juridique de l’évêque répandit dans tout le Brésil que les prêtres de Campos, de connivence avec l’ancien évêque, s’étaient montré malhonnêtes dans des négociations foncières frauduleuses du diocèse. Toute collaboration fut aussi impossible lorsque Monseigneur Carlos Navarro s’engagea à éliminer la Messe Tridentine et commença à imposer à Campos des mesures qui supprimèrent le sacré et créèrent une atmosphère profane dans la Maison de dieu. Dans de telles conditions, je ne pouvais en conscience donner mon soutien.
De telles mesures nous entraînent en outre dans la même vaste crise que Paul VI appelait l’auto-démolition de l’Eglise, et qui provoque la substitution de l’Eglise traditionnelle par une autre « fondée sur la psychologie et sur la sociologie ». (Acta Apostolicae Sedis AAS 63, P. 69).
Maintenant que je me suis ouvert à Votre Sainteté avec une franchise filiale, je demande à votre bonté de m’autoriser à dire avec beaucoup de respect et de vénération que l’œcuménisme, tel qu’il est mentionné par Votre Sainteté dans de nombreux documents fondés sur le second Concile de Vatican, s’oppose au dogme de Foi selon lequel hors de l’Eglise « nullus omnino salvatur » (Quatrième Concile de Latran, DS 802). Et qu’il constitue la négation de cet enseignement « ex professo » donné par Pie XI dans l’encyclique « Mortalium Animos » de janvier 1926 (AAS 20, p 5ff). De même, cette idée d’œcuménisme vient heurter la Doctrine Catholique de la Liberté Religieuse, exigée comme un droit naturel des hommes dans l’expression de leurs croyances, quelques qu’elles puisent être, même s’il n’en existe aucune comme cela arrive avec les athées (cf. AAS 58, p. 931). En ce sens, il est affirmé que le Saint Esprit utilise aussi les professions de Foi des non-Catholiques pour diriger les hommes vers leur salut éternel, ce qui annule la nécessité de l’Eglise Catholique comme unique moyen de salut.
Ces idées fondamentales de la vie religieuse ont des répercussions désastreuses pour le Catholicisme tout entier, depuis qu’elles donnent de la vigueur à la nouvelle Eglise psychologique et sociologique à laquelle Paul VI faisait référence.
Ayant déjà eu l’opportunité d’écrire à Votre Sainteté sur le même sujet (lettre du 7 avril 1981) je répète ce que j’avais déjà déclaré à Paul VI (lettre du 25 janvier 1974). Je ne suis pas en opposition, dés lors, avec le pontife romain, ni avec les autres prélats. J’adhère à la Foi sans laquelle il est impossible de plaire à Dieu et de sauver son âme.
A cause de cela, moi-même, et avec moi de nombreux prêtres et fidèles nous nous sentons oppressés face aux contradictions trouvées dans des documents émanant d’une source aussi excellente. Comprenez aussi, Votre Sainteté, que ce fait crée dans l’Eglise un profond malaise parmi les nombreux fidèles qui restent fermes dans leur Foi. Ce n’est pas que les fidèles soient réticents à respecter l’autorité pontificale, mais, au contraire, que ces prêtres et des fidèles tenant aux fondements de leur Foi, ont un attachement profond et inébranlable à l’Eglise de Saint Pierre.
Avec beaucoup de respect, j’ose dire à Votre Sainteté que ce malaise peut être dissipé d’un coup par des déclarations pontificales relatives aux sujets ci-dessus, et en général, sur les nombreuses affaires de Doctrine et de Morale, qui mettent en évidence d’une manière non équivoque, leur constance avec les enseignements que l’Eglise de Jésus-Christ donne depuis deux mille ans.
Je suis certain que Votre Sainteté dans sa bonté paternelle, acceptera bien volontiers cette supplique, et m’accordera Sa Bénédiction Apostolique.
De Votre Sainteté, l’humble et obéissant sujet.
Antonio de Castro Mayer, Evêque.
Le Pape Jean Paul II de répondit jamais.
(Extrait de « La gueule du Lion », Monseigneur de Castro Mayer et le Diocèse de Campos au Brésil, par le Dr David Allen White, traduit de l’américain par Michel Bur, Editions Sainte Jeanne d’Arc 2010, p.178 – 180)