Mise au point de Mgr Mamie du 11 décembre 1975

Dans une lettre aux amis et bien­fai­teurs de la Fraternité sacer­do­tale Saint-​Pie‑X (n° 9, datée de la fête de saint Pie X 1975 (*) – lettre lar­ge­ment dif­fu­sée –, Mgr Lefebvre écrit :

« Le moment me semble venu de por­ter à votre connais­sance les der­niers évé­ne­ments concer­nant Ecône, et l’at­ti­tude qu’en conscience, devant Dieu, nous croyons devoir prendre en ces graves circonstances. »

Dans cette même lettre, il dit ceci :

« C’est parce que nous esti­mons que toute notre foi est en dan­ger par les réformes et les orien­ta­tions post conci­liaires que nous avons le devoir de déso­béir et de gar­der les tra­di­tions. C’est le plus grand ser­vice que nous pou­vons rendre à l’Eglise catho­lique, au Successeur de Pierre, au salut des âmes et de notre âme, que de refu­ser l’Eglise réfor­mée et libé­rale, car nous croyons en Notre Seigneur Jésus-​Christ, fils de Dieu fait homme, ni n’est ni libé­ral, ni réformable » (**).

La Télévision suisse, dans une émis­sion du 6 novembre der­nier, a pré­sen­té une émis­sion sur l’in­té­grisme. Une très large place a été faite aux ini­tia­tives litur­giques pla­cées sous le patro­nage de messes célé­brées selon le rite de saint Pie V.

Le jour­nal le Monde, dans son numé­ro du 27 novembre, donne quelques infor­ma­tions sur le même sujet et publie en par­ti­cu­lier la lettre du Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit qui désa­voue publi­que­ment les posi­tions de Mgr Lefebvre.

Le jour­nal la Croix, dans son numé­ro du 27 novembre, sous le titre « Mgr Lefebvre refuse l’o­béis­sance à Paul VI », informe lui aus­si ses lecteurs.

En accord avec la Conférence des évêques suisses, nous avons tenu, pour notre part, publier les lettres qui consti­tuent ce nou­veau dos­sier. Quelques com­men­taires sont nécessaires.

1. II est sur­pre­nant que Mgr Lefebvre n’ait pas répon­du à la pre­mière lettre si claire et si pater­nelle du Souverain Pontife.

2. II a donc été néces­saire que le Pape écrive de sa main une nou­velle lettre pour que Mgr Lefebvre recon­naisse l’au­then­ti­ci­té de la première.

3. Dans sa réponse, Mgr Lefebvre exprime son « atta­che­ment sans réserve au Saint-​Siège et au Vicaire du Christ ».

4. Cependant, entre cette affir­ma­tion et la pour­suite de l’ac­ti­vi­té du sémi­naire d’Ecône, la fon­da­tion de nou­veaux Instituts, cer­taines prises de posi­tion contre le IIe Concile du Vatican et la lettre aux amis et bien­fai­teurs que nous venons de citer, il y a, à mes yeux, contra­dic­tion, puis­qu’on y invite au « devoir de désobéir ».

C’est avec une grande tris­tesse que nous don­nons ces infor­ma­tions. Nous avons tant espé­ré que Mgr Lefebvre accep­te­rait les demandes du Souverain Pontife. Il est plus urgent que jamais d’in­ten­si­fier nos prières pour que fidéles, prêtres et évêques res­tent atta­chés par leurs actes au Successeur de Pierre, car sans atta­che­ment et sou­mis­sion au Pape il n’y a plus d’Eglise catholique.

Nous rap­pe­lons :

a) Ce qu’é­cri­vait S. S. le Pape Paul VI à Mgr Lefebvre (lettre du 29 juin 1975) :

« Certes, des pro­blèmes d’un tout autre ordre nous pré­oc­cupent éga­le­ment. La super­fi­cia­li­té de cer­taines lec­tures des docu­ments conci­liaires, des ini­tia­tives indi­vi­duelles ou col­lec­tives rele­vant par­fois davan­tage du libre arbitre que de l’adhé­sion confiante à l’en­sei­gne­ment de l’Ecriture et de la Tradition, des démarches pour les­quelles la foi sert arbi­trai­re­ment de cau­tion, nous les connais­sons, nous en souf­frons et nous nous effor­çons d’y remé­dier pour notre part, à temps et à contre­temps. Mais com­ment s’en pré­va­loir pour s’au­to­ri­ser à des excès gra­ve­ment pré­ju­di­ciables ? Telle n’est pas la voie, puis­qu’elle emprunte en défi­ni­tive un iti­né­raire com­pa­rable à celui qui est dénoncé… »

b) Ce que nous a écrit S. Em, le car­di­nal Jean Villot, secré­taire d’Etat (lettre du 27 octobre1975) :

« La vigi­lance en matière doc­tri­nale et litur­gique, la clair­voyance dans le dis­cer­ne­ment des réformes à mettre en œuvre, la patience et le tact dans la conduite du Peuple de Dieu, le sou­ci des voca­tions sacer­do­tales et d’une pré­pa­ra­tion exi­geante aux taches du minis­tère, tout cela est sans nul doute le témoi­gnage le plus effi­cace qu’un Pasteur puisse donner. »

c) Ce que nous avons écrit (le 7 juin dernier) :

« Nous demeu­rons cepen­dant tristes (mais confiants), parce que nous avons dû dire publi­que­ment des dis­sen­sions dans la famille des enfants de Dieu et des fils de l’Eglise. Nous aurions aimé résoudre nos pro­blèmes entre nous, dans la dis­cré­tion et le silence. Nous n’y sommes pas par­ve­nus. Prions beau­coup, afin que la paix et la confiance reviennent. »

Que Dieu nous donne de res­ter fidèles à la véri­té dans une constante charité.

Fribourg, le 6 décembre 1975.

† Pierre MAMIE, évêque.