Extraits. [Denzinger 1330–1353]
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La très sainte Église romaine, fondée par la voix de notre Seigneur et Sauveur, croit fermement, professe et prêche un seul vrai Dieu, tout-puissant, immuable et éternel ; le Père, le Fils et le Saint-Esprit ; un en essence, trine en personnes, le Père inengendré, le Fils engendré par le Père, le Saint-Esprit procédant du Père et du Fils ; le Père n’est pas le Fils ou le Saint-Esprit, le Saint-Esprit n’est pas le Père ou le Fils, mais le Père est seulement le Père, le Fils est seulement le Fils, le Saint-Esprit est seulement le Saint-Esprit. Le Père seul a engendré de sa substance le Fils. Le Fils seul est né du Père seul. Le Saint-Esprit seul procède à la fois du Père et du Fils. Ces trois personnes sont un seul Dieu, non trois dieux, parce que des trois une est la substance, une l’essence, une la nature, une la divinité, une l’infinité, une l’éternité, et toutes choses sont une, là où ne se rencontre pas l’opposition d’une relation.
« En raison de cette unité le Père est tout entier dans le Fils, tout entier dans le Saint-Esprit, le Fils est tout entier dans le Père, tout entier dans le Saint-Esprit, le Saint-Esprit tout entier dans le Père, tout entier dans le Fils. Aucun ne précède l’autre par son éternité ou ne l’excède en grandeur ou ne le surpasse en pouvoir. Car c’est éternellement et sans commencement que le Fils naît du Père, et éternellement et sans commencement que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. » Tout ce que le Père est ou a, il l’a non pas d’un autre, mais de soi et il est principe sans principe. Tout ce que le Fils est ou a, il l’a du Père, et il est principe issu d’un principe. Tout ce que le Saint-Esprit est ou a, il l’a à la fois du Père et du Fils. Mais le Père et le Fils ne sont pas deux principes du Saint-Esprit, mais un seul principe, de même que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne sont pas trois principes de la créature, mais un seul principe.
Donc tous ceux qui pensent des choses opposées ou contraires, l’Église les condamne, les réprouve, les anathématise et les dénonce comme étrangers au corps du Christ qu’est l’Église. Par suite elle condamne Sabellius qui confond les personnes et ôte complètement la distinction réelle entre elles, elle condamne les ariens, les eunomiens, les macédoniens qui disent que le Père est seul vrai Dieu et placent le Fils et le Saint-Esprit au rang des créatures. Elle condamne aussi tous les autres qui établissent des degrés ou une inégalité dans la Trinité.
Elle croit très fermement, professe et prêche que vrai Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit, est le créateur de toutes choses visibles et invisibles, qui, quand il l’a voulu a créé par bonté toutes les créatures tant spirituelles que corporelles, bonnes assurément parce qu’elles ont été faites par le souverain Bien, mais muables, parce qu’elles ont été faites à partir du néant, et elle affirme que le mal n’est pas de nature, parce que toute nature, en tant qu’elle est nature, est bonne.
Elle professe qu’un seul et même Dieu est l’auteur de l’Ancien et du Nouveau Testament, c’est-à-dire de la Loi et des prophètes, et des évangiles, car c’est par l’inspiration du même Esprit Saint qu’ont parlé les saints de l’un et l’autre Testament, dont l’Église reconnaît et vénère les livres qui sont contenus sous les titres suivants.
Cinq de Moïse, c’est-à-dire : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome ; Josué, Juges, Ruth, quatre livres des Rois, deux de Paralipomènes, Esdras, Néhémie, Tobie, Judith, Esther, Job, les Psaumes de David, les Paraboles, l’Ecclésiaste, les Cantiques des Cantiques, la Sagesse, l’Ecclésiastique, Isaïe, Jérémie, Baruch, Ézéchiel, Daniel, les douze petits prophètes, c’est-à-dire : Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie, les deux livres des Maccabées, les quatre évangiles de Matthieu, de Marc, de Luc, de Jean ; les quatorze épîtres de Paul, aux Romains, les deux aux Corinthiens, aux Galates, aux Éphésiens, aux Philippiens, les deux aux Thessaloniciens, aux Colossiens, les deux à Timothée et à Tite, à Philémon, aux Hébreux ; deux de Pierre ; trois de Jean ; une de Jacques ; une de Jude ; les Actes des Apôtres, et l’Apocalypse de Jean.
C’est pourquoi elle anathématise la folie des manichéens qui ont posé deux premiers principes, l’un des choses visibles, l’autre des invisibles et ont dit qu’il y a un Dieu du Nouveau Testament et un autre de l’Ancien.
Elle croit fermement, professe et prêche qu’une seule personne de la Trinité, vrai Dieu Fils de Dieu né du Père, consubstantiel et coéternel au Père, dans la plénitude de temps disposée par l’inscrutable profondeur du dessein divin a pour le salut du genre humain assumé dans le ventre immaculé de la Vierge Marie la vraie et entière nature d’un homme et se l’est attachée dans l’unité d’une personne avec une si profonde unité que tout ce qui en elle est de Dieu n’est pas séparé de l’homme et tout ce qui est de l’homme n’est pas divisé de la divinité, mais qu’il est un seul et même indivisible, chacune des deux natures subsistant dans ses propriétés, Dieu et homme, Fils de Dieu et Fils de l’homme « égal au Père selon la divinité, inférieur au Père selon son humanité » [Profession de foi du Pseudo-Athanase : *76], immortel et éternel de par la nature de la divinité, passible et temporel de par la condition de l’humanité assumée.
Elle croit fermement, professe et prêche que le Fils de Dieu dans l’humanité assumée est véritablement né de la Vierge, a véritablement souffert, est véritablement mort et a été enseveli, est véritablement ressuscité d’entre les morts, est monté aux cieux, siège à la droite du Père, et viendra à la fin des siècles pour juger les vivants et les morts.
Elle anathématise, exècre et condamne toute hérésie soutenant des thèses contraires. Et d’abord elle condamne Ebio, Cérinthe, Marcion, Paul de Samosate, Photin et tous ceux qui blasphèment semblablement qui, ne pouvant comprendre l’union personnelle de l’humanité au Verbe Jésus Christ, notre Seigneur, ont nié qu’il soit vrai Dieu, le reconnaissant seulement comme homme qui, par une participation plus grande à la grâce divine qu’il avait reçue par le mérite de sa vie plus sainte, s’était appelé homme divin.
Elle anathématise aussi Mani et ses sectateurs qui, imaginant que le Fils de Dieu a assumé non point un vrai corps, mais un corps apparent, ont entièrement supprimé la vérité dans le Christ.
Et aussi Valentin qui prétend que le Fils de Dieu n’a rien pris de la Vierge Mère, mais a assumé un corps céleste et a traversé l’utérus de la Vierge comme s’écoule l’eau d’un aqueduc.
Arius aussi qui, prétendant que le corps assumé au sortir de la Vierge manquait d’âme, a voulu qu’au lieu d’une âme il y ait eu la divinité.
Apollinaire encore qui, comprenant que si l’on niait une âme qui informe le corps, il n’y avait pas non plus dans le Christ d’humanité véritable, a posé seulement une âme sensitive, mais dit que la divinité du Verbe tenait lieu d’âme rationnelle.
Elle anathématise aussi Théodore de Mopsueste et Nestorius qui prétendent que l’humanité a été unie au Fils de Dieu par la grâce, et que pour cela il y a dans le Christ deux personnes, de même qu’ils professent qu’il y a deux natures, car ils ne pouvaient comprendre qu’il y ait eu union hypostatique de l’humanité au Verbe et pour cette raison niaient qu’elle ait reçu la substance du Verbe. Car selon ce blasphème ce n’est pas le Verbe qui s’est fait chair, mais le Verbe par la grâce a habité dans la chair, c’est-à-dire que ce n’est pas le Fils de Dieu qui s’est fait homme, mais plutôt le Fils de Dieu qui a habité dans l’homme.
Elle anathématise aussi, exècre et condamne l’archimandrite Eutychès, qui, comprenant que selon le blasphème de Nestorius la vérité de l’Incarnation est exclue et que par conséquent il faut que l’humanité ait été unie au Verbe de Dieu de telle sorte qu’il y eût une seule et même personne de la divinité et de l’humanité et de plus ne pouvant concevoir l’unité de la personne si la pluralité des natures restait, de même qu’il a posé qu’il y a dans le Christ une seule personne de la divinité et de l’humanité, il a de même prétendu qu’il y a une seule nature, admettant avec un blasphème et une impiété extrêmes ou bien que l’humanité s’était changée en divinité ou bien la divinité en humanité.
L’Église anathématise aussi, exècre et condamne Macaire d’Antioche et tous ceux qui professent des thèses semblables, qui, tout en soutenant avec vérité la dualité des natures et l’unité de la personne, s’est pourtant démesurément trompé sur les opérations du Christ, disant que dans le Christ les deux natures n’avaient qu’une seule opération et une seule volonté. La sacro-sainte Église romaine anathématise tous ces hommes avec leurs hérésies, en affirmant qu’il y a dans le Christ deux volontés et deux opérations.
Elle croit fermement, professe et enseigne que jamais être conçu d’un homme et d’une femme n’a été délivré de la domination du diable, sinon par la foi en notre Seigneur Jésus Christ médiateur entre Dieu et les hommes [1 Tm 2, 5], qui, conçu, né et mort sans péché, a seul par sa mort abattu l’ennemi du genre humain, en détruisant nos péchés, qui a de nouveau ouvert l’entrée du Royaume céleste que le premier homme avait perdue par son propre péché avec toute sa descendance, et dont la future venue a été annoncée par tous les saints sacrifices, sacrements et cérémonies de l’Ancien Testament.
Elle croit fermement, professe et enseigne que les prescriptions légales de l’Ancien Testament qui se divisent en cérémonies, saints sacrifices, sacrements, parce qu’ils avaient été institués pour signifier quelque chose de futur, bien qu’en ce temps-là ils aient été adaptés au culte divin, une fois venu notre Seigneur Jésus Christ qui était signifié par eux, ont pris fin et qu’ont commencé les sacrements du Nouveau Testament. Quiconque encore après la Passion met son espoir dans les prescriptions légales et se soumet à elles en les croyant nécessaires au salut, comme si la foi dans le Christ ne pouvait sauver sans elles, a péché mortellement. Elle ne nie pas cependant que, depuis la Passion du Christ jusqu’à la promulgation de l’Évangile, elles ont pu être respectées du moins dans la mesure où on les croyait si peu que ce fût nécessaires au salut. Mais, après la promulgation de l’Évangile, l’Église affirme qu’elles ne peuvent être respectées sans l’anéantissement du salut éternel. Donc elle dénonce comme étrangers à la foi du Christ tous ceux qui depuis ce temps-là observent la circoncision, le sabbat et les autres prescriptions légales, et affirme qu’ils ne peuvent pas du tout avoir part au salut éternel, sauf si un jour ils reviennent de ces erreurs. Donc à tous ceux qui se glorifient du nom de chrétiens, elle prescrit de manière absolue qu’à n’importe quel moment soit avant soit après le baptême il faut renoncer à la circoncision, que l’on place en elle ou non son espoir, elle ne peut être respectée sans anéantissement du salut éternel.
Au sujet des enfants, en raison du péril de mort qui peut souvent se rencontrer, comme il n’est pas possible de leur porter secours par un autre remède que par le sacrement du baptême, par lequel ils sont arrachés à la domination du diable et sont adoptés comme enfants de Dieu, elle avertit qu’il ne faut pas différer le baptême pendant quarante ou quatre-vingts jours ou une autre durée, comme font certains, mais qu’il doit être conféré le plus tôt qu’il sera commodément possible, mais de telle sorte que, s’il y a péril de mort immédiat, ils soient baptisés sans aucun délai, même par un laïc ou une femme, dans la forme de l’Église, si un prêtre fait défaut, comme il est contenu plus complètement dans le décret des Arméniens.
Elle croit fermement, professe et prêche que toute créature de Dieu est bonne « et que rien n’est à rejeter, si on le reçoit avec action de grâces » [1 Tm 4, 4], parce que selon la parole du Seigneur : « Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme » [Mt 15, 11], et elle affirme que la différence que fait la Loi de Moïse entre aliments purs et impurs appartient à ce qui est cérémoniel, qui avec l’apparition de l’Évangile s’est effacé et a cessé d’être efficace. Elle dit aussi que l’interdiction faite par les apôtres « des viandes immolées aux idoles, du sang, de la chair étouffée » [Ac 15, 29], convenait à ce temps-là où, des juifs et des gentils qui vivaient avec des cérémonies et des mœurs différentes, naissait une seule Église, de sorte que, les gentils aussi observaient certaines choses en commun avec les juifs, et que l’occasion était offerte de se rassembler dans un même culte de Dieu et la même foi, et qu’un sujet de dissension était supprimé, puisque les juifs en raison de leur antique tradition considéraient comme abominable le sang et la chair étouffée, et on pouvait penser qu’en mangeant la viande immolée les gentils reviendraient à l’idolâtrie. Mais quand la religion chrétienne se fut propagée jusqu’à un point tel qu’on ne voyait plus en elle un seul juif charnel, mais que tous ceux qui passaient à l’Église communiaient dans les mêmes rites et cérémonies de l’Évangile, croyant qu’« aux purs tout est pur » [Tt 1, 15] la cause de cette interdiction apostolique ayant cessé, elle prit fin. Elle proclame donc qu’aucune sorte de nourriture qu’accepte la société humaine ne doit être condamnée, et qu’aucune distinction ne doit être faite entre les animaux par qui que ce soit, homme ou femme, et de quelque genre de mort qu’ils périssent, bien que pour la santé du corps, pour l’entraînement à la vertu, pour la discipline régulière et ecclésiastique beaucoup d’entre eux qui ne sont pas interdits doivent être écartés ; car selon l’Apôtre « toutes sont permises, mais toutes ne sont pas avantageuses » [1 Co 6, 12 ; 1 Co 10, 23]
Elle croit fermement, professe et prêche qu’« aucun de ceux qui se trouvent en dehors de l’Église catholique, non seulement païens mais encore juifs ou hérétiques et schismatiques ne peuvent devenir participants à la vie éternelle, mais iront « dans le feu éternel qui est préparé par le diable et ses anges » [Mt 25, 41] à moins qu’avant la fin de leur vie ils ne lui aient été agrégés ; elle professe aussi que l’unité du corps de l’Église a un tel pouvoir que les sacrements de l’Église n’ont d’utilité en vue du salut que pour ceux qui demeurent en elle, pour eux seuls jeûnes, aumônes et tous les autres devoirs de la piété et exercices de la milice chrétienne enfantent les récompenses éternelles, et que « personne ne peut être sauvé, si grandes que soient ses aumônes, même s’il verse son sang pour le nom du Christ, s’il n’est pas demeuré dans le sein et dans l’unité de l’Église catholique. »
Mais parce que dans le décret des Arméniens rapporté ci-dessus n’a pas été expliquée la formule qu’a toujours eu coutume d’employer, dans la consécration du Corps et du Sang du Seigneur la sacro-sainte Église romaine, affermie par la doctrine et l’autorité des apôtres Pierre et Paul, nous pensons qu’il faut l’introduire dans les présentes. Dans la consécration du Corps du Seigneur elle utilise cette formule : « Ceci est mon corps » ; dans celle du Sang : « Car ceci est le calice de mon sang, nouvelle et éternelle alliance, mystère de foi, qui pour vous et pour beaucoup sera répandu en rémission des péchés. » Quant au pain de froment dans lequel s’accomplit le sacrement, il est absolument sans importance qu’il ait été cuit ce jour-là, ou plus tôt ; car pourvu que la substance du pain subsiste, il ne faut absolument pas douter que, après que les mots cités de la consécration du Corps ont été prononcés par le prêtre avec l’intention de l’accomplir, il sera aussitôt transsubstantié dans le vrai Corps du Christ.
Puisque, assure-t-on, certains rejettent comme condamnées des quatrièmes noces, pour qu’on ne croie pas qu’il y ait un péché là où il n’y en a pas, comme selon l’Apôtre quand le mari est mort l’épouse est libérée de sa loi et a la permission d’épouser qui elle veut dans le Seigneur [Rm 7, 2 ; 1 Co 7, 39] et qu’il ne distingue pas si le mort est son premier, son deuxième ou son troisième mari, nous déclarons que peuvent être licitement contractées non seulement des deuxièmes et des troisièmes, mais encore des quatrièmes et davantage, si n’y fait pas obstacle un empêchement canonique. Cependant nous disons que sont plus louables celles qui s’abstenant ensuite du mariage demeureront dans la chasteté, parce que nous estimons que si la virginité est préférable au veuvage, de même un chaste veuvage est loué, à juste titre comme préférable à des noces.
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