En 1318, le Pape Jean XXII recevait une délégation venue solliciter cette canonisation, envoyée par des princes d’Italie. Il leur déclarait : « Nous croyons que le Frère Thomas est glorieux dans le Ciel car sa vie fut sainte et sa doctrine n’a pas pu être sans miracle. » [1] Puis lors du consistoire suivant, il déclarait aux cardinaux que saint Thomas « a plus illuminé l’Eglise que tous les autres Docteurs ; l’on apprend davantage en un an par ses ouvrages que par la doctrine des autres durant toute la durée d’une vie » [2].
Nous célébrons cette année le 700e anniversaire de ce document d’une importance majeure pour l’Eglise, par lequel le Pape Jean XXII, résidant à Avignon, canonisait saint Thomas d’Aquin. Cette canonisation n’est pas seulement importante en ce qui regarde l’exemple donné par la personnalité du saint mais plus encore pour sa doctrine qui n’a cessée d’être une lumière pour l’Eglise toujours plus recommandée par les papes.
Jean, évêque,
Serviteur des serviteurs de Dieu,
A tous les vénérables frères patriarches, archevêques et évêques, ainsi qu’à ses bien-aimés fils abbés, prieurs, doyens, archidiacres, archiprêtres, et autres prélats des églises auxquels la présente lettre parviendra, salut et bénédiction apostolique
Le Seigneur a envoyé la rédemption à son peuple [3], lorsqu’il a conçu le Verbe de Dieu avec la coopération de l’Esprit Saint, dans le sein de la Vierge, chambre nuptiale mystérieuse, et qu’il s’est fait chair et a habité parmi nous [4], nous instruisant par sa parole, nous enseignant par son exemple, nous manifestant les cieux, nous révélant ses mystères, corroborant sa doctrine par les miracles qu’il a accomplis, confirmant toutes choses par les témoignages de la Parole Sainte, qui avait annoncé que ces choses arriveraient ; Enfin, s’offrant à Dieu son Père sur l’autel de la Croix comme une victime d’agréable odeur [5], il a lavé nos péchés de son Sang sacré [6], il est descendu aux enfers et leur a arraché son butin, il est ressuscité des morts le troisième jour [7], il est apparu quarante jours à ses disciples et a parlé du Royaume de Dieu [8], il est monté au ciel sous les yeux admiratifs de ses disciples [9], il a conduit des captifs et a fait des dons aux hommes [10]. Il leur a fait savoir que la porte du Paradis, jusqu’alors fermée, était enfin ouverte dans le ciel à ceux qui croyaient en Lui. Le ciel est donc ouvert aux fidèles, aux humbles, et surtout à ceux qui se sont volontairement consacrés, par le vœu de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, à Dieu de qui les insensés se sont détournés. Le Royaume des Cieux se prend par violence et ce sont les violents qui s’en emparent [11], car ceux qui dominent leurs propres affections tendent avec quelque violence vers les réalités supérieures.
2. C’est ainsi que ce bienheureux Thomas d’Aquin, de l’Ordre des Frères Prêcheurs, docteur en théologie sacrée, homme de noble famille, mais d’une noblesse d’âme encore plus grande, d’une renommée illustre, d’une vie des plus dignes, capable, dès avant la puberté, de méditation attentive et de délibération, reçut l’habit de l’Ordre des Prêcheurs, restant encore plus ferme dans ce dessein, lorsqu’il résista aux obstacles que son propre père opposa à son heureuse décision, jusqu’à ce qu’il fasse enfin sa profession religieuse et fasse bientôt de tels progrès dans la science, la vie et les vertus qu’il fut ordonné prêtre tout jeune encore et qu’il se mit à enseigner la théologie à Paris, la ville la plus célèbre de toutes, où il occupa avec beaucoup d’estime, pendant plusieurs années de sa carrière, la chaire de Maître, ce qui fut un grand honneur pour lui-même, pour son Ordre et pour l’Université de Paris. En effet, par sa vie vertueuse, il a acquis une réputation, il a produit une doctrine sûre avec des œuvres écrites en si peu de temps, mais qui ont eu une grande diffusion et ont suscité une légitime admiration, de sorte que les paroles du Psaume s’appliquent vraiment à lui : Vous arrosez les montagnes des eaux qui tombent d’en haut ; la terre sera rassasiée du fruit de Vos œuvres [12]. C’est ce thème que le saint a choisi pour commencer son enseignement sur l’Écriture Sainte ; on dit qu’il lui a été donné par révélation, après qu’il eut fait sa prière, au moment où il se croyait inapte à l’enseignement à cause de sa jeunesse, alors qu’il se demandait ce qu’il allait proposer comme thème pour sa classe inaugurale.
3. Et parce qu’il ne voulait pas rester oisif, mais cultiver la terre [13], il a écrit des ouvrages sur les premières sciences et sur les diverses parties de la philosophie, aussi sur la Sainte Écriture, tant le Nouveau que l’Ancien Testament, et beaucoup d’autres ouvrages pour la gloire de Dieu, pour l’accroissement de la foi et l’instruction des étudiants, tous clairs, avec la science, la réputation et la sagesse, non sans l’infusion d’un don spécial de la grâce. En effet, pour les hommes prudents, la science est chose facile [14], et le signe absolu de celui qui est sage est la capacité d’enseigner [15].
4. Ce sage a pu accomplir une telle œuvre parce qu’il s’est détourné de toute ambition pour les biens terrestres et a visé les biens célestes. Il employait certainement tout son temps à l’étude des choses de Dieu et renonçait aux biens terrestres pour obtenir les biens éternels ; et il commençait par les choses de Dieu pour se fortifier dans les choses de l’École, car, chaque jour, avant de monter sur la chaire pour donner sa leçon ou pour faire d’autres choses, il célébrait une messe et en entendait une autre, ou en entendait deux entières, s’il ne célébrait pas. Dans les messes et aussi dans les autres actes de prière, auxquels il était assidu, il révélait, par l’effusion de larmes, la docilité et la dévotion de son âme à Dieu, à qui rien n’est caché.
5. En tout cas, il a illuminé de l’éclat de sa chasteté, dans une pieuse modération, cette humilité qu’il gardait et cette même sobriété attentive qu’il entretenait, de telle sorte que beaucoup estimaient qu’il avait gardé intacte la virginité de la chair. C’est ce qu’affirma un pieux confesseur de l’Ordre susdit, après l’avoir longuement entendu en confession, qui rendit en public et en présence de tous, le jour de sa mort, ce témoignage crédible qui est parvenu jusqu’à nous : J’ai entendu la confession générale de ce saint homme, dont je témoigne, car il est venu à moi pur comme un enfant de cinq ans, parce qu’il n’a jamais connu la corruption dans sa chair. De plus, cet homme de Dieu, se contentait de la nourriture et des vêtements communs des religieux ; il était d’un caractère doux, d’une gentillesse délicate, d’une pieuse miséricorde, soumis à l’humilité et paré de tant d’autres vertus, qui n’avait pas le moindre égard pour les honneurs, et se tenait prudemment à l’écart de la cohabitation avec les femmes, il n’était pas hautain, et ne manifestait pas le désir de dominer, ni de disputer, car même dans les disputes il se gardait de la vantardise et se tenait tranquille dans les discussions, évitant le langage pédant, même lorsque la dispute syllogistique était utilisée comme ressource par les autres. C’est pourquoi ce serviteur de Dieu s’occupait des œuvres divines et était en tout exquis, il excellait dans l’érudition, émouvant dans la prédication, dévot dans la prière, profond dans l’écriture, et se consacrait à tout cela avec assiduité, de sorte qu’en dehors des nécessités naturelles, ou de l’heure du repos, il ne lui restait aucun temps libre.
6. Enfin, le jour approchait où il devait passer de ce monde au Seigneur ; après avoir conquis et triomphé du monde, il était reçu dans la patrie, dans l’éternité perpétuelle [16], car glorieux est le fruit des bonnes œuvres [17]. Venant de Naples, où il enseignait alors comme Docteur, comme toujours avec grande renommée, il se rendit par la côte au Concile de Lyon, auquel, dit-on, il avait été invité, à cause de sa science éminente, par Notre Prédécesseur, d’heureuse mémoire, le Pape Grégoire X. Lorsque, quelques jours avant le Concile, il arrivait au Monastère de Fossanova, de l’Ordre cistercien, dans le diocèse de Terracine, il se sentit un peu mal et demanda pieusement à être conduit au Monastère. Entrant dans le monastère, rempli de l’Esprit de Dieu, il prononça alors ces mots : « C’est ici le lieu de mon repos pour les siècles des siècles ; c’est ici que j’habiterai, car c’est le lieu que j’ai choisi. » [18] Cela s’est révélé vrai, comme le prouve la tombe dans laquelle son saint corps a été enterré. C’est là que sa maladie a commencé à s’aggraver et à lui faire perdre progressivement ses forces. Bien que sa maladie ait duré de nombreux jours, il la supporta sans aucun signe d’impatience, mais avec une âme égale, gardant une totale humilité, supportant la maladie avec une sérénité qui allégeait son infirmité ; il s’efforçait de plaire à Dieu par l’obéissance, et remplissait lui-même ses devoirs ; Et cela attirait le respect de ceux qui ne le servaient pas, car il donnait à tous un exemple de patience à imiter ; c’est pourquoi les frères de ce même monastère de Fossanova, qui servaient Dieu avec une grande dévotion, voyant dans ce saint homme les vertus de la religion, lui offraient volontiers leurs services, parce qu’ils le voyaient les accomplir avec une totale résignation dans son infirmité corporelle. Les uns portaient volontiers sur leurs épaules des morceaux de bois de la forêt, les autres tout ce qui pouvait lui être utile, car ils ne trouvaient pas convenable que les animaux portassent les choses qui lui étaient nécessaires et afin qu’ils prêtassent cette assistance à celui qui avait l’apanage de tant de vertus.
7. Et lorsque, dans cette même infirmité dont il mourut, il prit pour nourriture de son âme, comme viatique, le très saint corps de notre Dieu et Seigneur Jésus-Christ, son âme, habituée à goûter la douceur de Dieu, se fondant avec lui dans un doux amour, versa une profusion de larmes ; et parmi les diverses belles paroles qu’il prononça, sa foi et sa dévotion lui inspirèrent la suivante, qu’il prononça devant toute la communauté de ce monastère et en présence de nombreux frères de l’Ordre des Prêcheurs et de l’Ordre des [frères] Mineurs, qui l’assistaient : J’ai enseigné beaucoup de choses sur le sujet du Très Saint Corps de Notre Dieu, Notre Seigneur Jésus-Christ et sur les autres sacrements, sur les nombreuses choses que j’ai écrites sur la foi en Jésus-Christ et sur la Sainte Église romaine, à laquelle je soumets et expose tout pour correction. Il reçut ensuite, à côté de ce même Sacrement vivant, les autres sacrements de l’Église, avec la vénération qui s’impose et avec une effusion de larmes, et trois jours après il s’endormit dans le Seigneur, en qui il croyait, qu’il aimait et chérissait de toute la tendresse de son âme. Le serviteur fidèle et prudent [19], ne s’obstine pas dans ses propres voies, ni dans ses propres sens ou dans sa prudence de débutant, et il n’est pas hautain avec sa connaissance qui vient de son opinion, car celui qui poursuit la majesté sera accablé par la gloire [20]. Le Docteur a également agi avec sagesse et humilité, lorsque dans la fidélité de sa dévotion, il a soumis, comme nous l’avons dit, toute sa doctrine, orale et écrite, à la règle de foi de l’Église elle-même, énoncée par la bouche de Pierre, dont il savait que la stabilité ne serait jamais ébranlée par les vents des agitations humaines ; car après avoir reconnu la Divinité du Christ en ces termes : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant [21], Pierre a mérité d’entendre ces paroles : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église [22] ; et dans un autre endroit : J’ai prié pour toi Pierre, afin que ta foi ne défaille pas [23] ; or, si le Christ prie pour Pierre, c’est pour son Église qu’il intercède.
Il peut être déclaré saint
8. Car il est vrai, digne et convenable que celui que Dieu a couvert en cette vie de tant de grâces et de dons, Il le déclare saint aux yeux des hommes une fois élevé au ciel, Il le fasse briller encore après son départ de cette vie, bien que même avant on ait gardé la mémoire de plus d’une merveille, par tant de si grands miracles, tant d’éclatants prodiges, que ces paroles du psaume peuvent à juste titre lui être appliquées : Sache que le Seigneur a mis en lumière son saint [24], et ainsi sa vie a été témoin de ses miracles, et ses miracles ont été témoins de sa vie [25]. Pour la gloire de Dieu, l’exaltation du Saint et l’édification des fidèles, Nous avons inscrit dans la présente Bulle, parmi les nombreux miracles, certains attestés par des témoins appropriés.
Miracles à l’appui de sa canonisation
1. Du miracle de l’odeur et de l’intégrité de son corps.
9. Sept mois environ après le jour de la mort de saint Thomas d’Aquin lui-même, tandis que son corps était exposé dans la chapelle Saint-Étienne dudit monastère, il fut ensuite transféré par les moines du même monastère dans son premier sépulcre, à savoir près du maître-autel de ladite église du monastère. Par crainte que son corps ne soit enlevé de là ou entièrement enlevé de ce monastère, ils décidèrent de l’exhumer à nouveau, et lors de l’ouverture même de son sépulcre, toujours dans cette même chapelle de Saint-Étienne, il émana un parfum d’une odeur si agréable qu’il se répandit aussitôt, et toute la chapelle et le cloître même du monastère furent remplis de cette merveilleuse et douce odeur. Il fut prouvé par l’enquête attentive et approfondie des moines que cette effusion d’odeur miraculeuse s’exhalait du corps du Saint lui-même. A cause de cela, une plus grande dévotion s’éleva parmi les moines eux-mêmes, et leur prieur et certains d’entre eux se vêtirent de leurs vêtements liturgiques, et tout le couvent alla en procession pour transférer le corps avec honneur dans son premier sépulcre et, à cause de ce qu’ils virent, le jour suivant ils célébrèrent la Messe solennellement, comme pour un confesseur, car ils pensaient qu’il n’était pas convenable de célébrer la Messe de Requiem, comme si c’était pour un défunt ordinaire. De nombreux témoins racontent avoir perçu une odeur similaire, certains après sept ans, d’autres après presque quatorze ans, lorsque les moines, pour diverses causes et à diverses occasions, ont dû inspecter diligemment le corps. Certainement, cette odeur exprimait la pureté de sa chair qui était agréable à Dieu, elle représentait le parfum de ses prières, et elle révélait sa claire renommée et la diffusion de ses vertus et de leurs arômes.
2. De la guérison de la maladie de la goutte.
10. Un chirurgien, qui avait été malade de la goutte pendant une décennie au point qu’il ne pouvait en aucun cas se déplacer ou marcher par lui-même sans l’aide de béquilles ou l’aide d’autrui, se confia à Dieu et au bienheureux Thomas, se prosterna sur son tombeau et, après avoir dit sa prière, recouvra la santé, et se mit à sauter et courir en louant Dieu pour avoir été guéri par ses mérites d’une si longue et fatigante maladie.
3. Guéri d’une horrible vision.
11. Un autre, terrifié par la vision d’un horrible cauchemar, était paralysé des mains et des pieds, sa bouche et son visage étaient même déformés, il était privé de sensibilité et de toute force, si bien qu’il ne pouvait pas même parler, ressemblait à un mort, ne sentait rien, même lorsqu’on approchait ses membres du feu ; alors on le conduisit au tombeau du Saint et en peu de temps il fut complètement libre et sortit entièrement guéri dudit tombeau.
4. Le miracle de l’odorat.
12. Un autre, qui ne se sentait pas aucune dévotion au saint, expérimenta doublement en lui la puissance de Dieu : tandis qu’il le méprisait, il tomba malade, et au moment même où il se repentait de sa faute, il recouvra la santé. Cela se produisit lorsqu’un aumônier, pour favoriser la cause de la dévotion, lui montra sur un ostensoir plusieurs reliques à vénérer, et lui dit qu’il y en avait d’autres encore plus précieuses, à savoir la main du frère Thomas d’Aquin ; l’homme méprisa l’aumônier, se moqua de ses paroles, se moqua des reliques parce qu’il ne se souciait pas de les voir, et dit : Il n’est pas saint, mais seulement un frère de l’Ordre des Prêcheurs ; mais voici qu’il fut aussitôt saisi d’un tremblement, et sa tête lui sembla comme prise par un grand kyste, épais et très lourd ; Corrigé par cette infirmité, se repentant de son incrédulité, et regrettant en même temps ses paroles, il demanda et obtint le pardon du prêtre, et tout en baisant respectueusement la même main de saint Thomas, il se sentit aussitôt délivré du tremblement et de l’inflammation de sa tête ; et ce fut lui-même qui raconta comment il avait senti s’exhaler de cette main une odeur si forte et si douce. Au contact de cette main, sa tête et toute sa personne s’imprégnèrent de l’odeur, qui resta longtemps ; et beaucoup de ceux qui vinrent ensuite le trouver sentirent cette odeur et lui demandèrent des explications ; et, à cause de ce signe, il fut bien obligé de raconter, à contrecœur, le miracle qui s’était produit.
5. Des personnes guéries de l’infirmité de l’angine.
13. Un certain commis en bonne santé, alors qu’il était assis à table, fut pris d’une angine sévère qui dura deux jours. À cause de cette maladie, il ne pouvait plus bouger sa langue et perdit la parole. Pendant que les médecins lui administraient de nombreux remèdes, la maladie progressait, mais elle augmentait de plus en plus, car les remèdes ne la faisaient pas reculer, mais l’exaspéraient plutôt ; ayant appris la dévotion au Saint, il se fit porter à son tombeau, et ce qu’il ne pouvait demander par la parole, il l’écrivit de sa main. Mais sa femme s’y opposa, parce qu’il était interdit aux femmes d’entrer dans l’église de ce monastère, alors, prévenu qu’il pouvait lui-même supplier d’être libéré de sa maladie, il le demanda lui-même affectueusement à ce saint homme. Dès cet instant, il a pu bouger sa langue, s’améliorer et se rétablir et a été parfaitement guéri en peu de temps.
6. La fièvre disparue.
14. Un autre, affligé de fièvres quotidiennes depuis plus de sept semaines, d’affections du foie et de l’estomac, ayant pris une mauvaise tournure un vendredi, entendit parler de miracles qui auraient été accomplis par l’homme de Dieu ; aussi le lendemain, samedi après-midi, suivant le conseil de sa femme de faire la dévotion, en sa présence, il se consacra dévotement au saint ; le lendemain, dimanche matin, il était déjà entièrement délivré de ses infirmités.
7. Une femme guérie de sa surdité.
15. Une femme craignait avec raison pour la vie de son fils, un bébé de deux mois encore dans son berceau, car depuis quatre mois sa surdité s’était tellement aggravée que, même si on l’appelait plusieurs fois en criant, elle entendait à peine les grands cris de son enfant ; à la suggestion de son mari, qui partageait sa tristesse et s’affligeait du danger qui pouvait arriver à leur enfant, avec une entière soumission, elle se voua au Saint de Dieu afin qu’il lui ôtât cette infirmité ; après avoir prononcé le vœu, la nuit tomba et elle s’endormit, et le lendemain, elle se trouva guérie par les mérites du Saint comme elle le souhaitait.
8. Une jeune fille guérie d’une tumeur de la gorge.
16. Une jeune fille avait la gorge affectée d’une infirmité qui la contractait tellement qu’elle n’avait pas le moindre passage et la moindre force pour prendre des aliments solides ou liquides, et elle se fermait de telle sorte qu’elle ne pouvait respirer qu’avec beaucoup de peine ; alors, convaincue par sa mère, elle se recommanda dévotement au Saint Homme ; le lendemain, conduite audit Monastère de Fossanova, on plaça sur sa gorge les reliques de ce Saint Homme enveloppées dans un linge, et aussitôt elle se sentit mieux, mangea du pain et recouvra parfaitement la santé.
9. Un frère convers guéri de fortes douleurs à l’épaule et au bras.
17. Un frère convers du monastère de Fossanova déjà cité, souffrait de si grandes douleurs dans le bras droit et l’épaule, que son bras, qu’il gardait suspendu depuis trois mois avec une écharpe, lui était inutile et le lançait violemment. Comme le médicament qu’il avait demandé aux médecins n’était pas disponible et que la douleur était de plus en plus forte, tandis qu’il faisait humblement un vœu au saint pour obtenir sa guérison et se prosternait sur sa tombe, il finit par s’y endormir ; il fut réveillé plus tard par un autre moine du même monastère et il trouva son bras, qui auparavant reposait dans une écharpe suspendue à son cou, retiré du linge. Comme l’on fait en se réveillant, il porta les deux mains à sa tête pour se gratter et comprit ainsi qu’il était guéri ; il le raconta à ses confrères et ne cacha pas aux personnes présentes ce miracle si remarquable.
10. Un enfant guérit d’une tumeur.
18. Un enfant de quatre ans, atteint d’une tumeur, avait été affligé d’une telle rougeur au dos, aux jambes et aux pieds, que ni sa mère ni personne ne pouvait toucher sa blessure sans qu’il se plaignît ; il n’avait pas pu bouger pendant un mois, parce qu’il avait tellement peur de la douleur ; et les médecins n’avaient aucun espoir de guérir l’enfant, sauf par la chirurgie, et si elle était pratiquée, l’idée persistait toujours qu’il aurait un avenir compromis, car dans l’esprit des gens la perspective était très sombre. Lorsque la nature handicapée ne trouve pas de secours dans le recours à la médecine, c’est en Dieu qu’elle le trouvera, car Il est glorieux et accomplit ses merveilles par ses saints. En effet, la mère de l’enfant qui l’aimait maternellement, le recommanda avec dévotion à Saint Thomas, afin que le Saint puisse le guérir de ladite maladie sur son propre mérite, sans opération. L’enfant fut alors emmené au monastère, placé sur la tombe du Saint, et bientôt se releva guéri de son infirmité.
Déclaration
19. Tels sont donc, ô Dieu, les témoignages que vous avez rendus par ce juste, et ils sont dignes de toute notre confiance [26]. Maintenant, si nous acceptons le témoignage des hommes, celui de Dieu est plus puissant [27]. Nous croyons que Dieu possède déjà son âme au ciel et nous attendons les fruits de son intercession, nous le croyons admis parmi la multitude des Saints et, comme une étoile du matin [28], nous croyons que c’est sa place. Ainsi, ô Bon Jésus, vous nourrissez notre foi, vous fortifiez notre espérance, vous allumez en nous le feu de la charité. Que la Mère Église se réjouisse, que l’Italie exulte, que ses parents de Campanie, sa terre natale, se réjouissent, que le saint Ordre des Prêcheurs se réjouisse, que la dévotion des religieux retentisse, que la multitude des médecins applaudisse, que les jeunes gens se raniment pour leurs études, que les hommes mûrs ne se relâchent pas ; que les vieillards se réjouissent en lui, que tous se perfectionnent dans l’humilité, qu’ils n’abandonnent pas la contemplation, qu’ils exécutent diligemment les ordres de Dieu. En effet, Il a donné à son cœur les préceptes, la loi de la vie et de la discipline [29], et la sagesse de l’humble relève la tête [30]. En effet, il l’a élevé au-dessus de ses compagnons, et au milieu de l’Église, il a ouvert sa bouche, et l’Esprit du Seigneur l’a rempli de sagesse et d’intelligence, et l’a revêtu de sa robe de gloire [31]. La Vérité, qui est le Christ, n’a certainement pas été proposée fictivement aux enseignants : Ceux qui me mettent en lumière auront la vie éternelle [32]. Puisque le Christ est le vrai et propre Soleil de Justice [33], il ne manque pas d’éclairer les étoiles et de leur faire rayonner sa lumière, car elles brillent parce qu’elles sont éclairées par lui. Il réside donc dans l’inaccessible lumière [34], qui est la splendeur de sa gloire et l’expression de sa substance [35]. C’est pourquoi les ténèbres n’ont pas été laissées dans l’obscurité, ni abandonnées, ni couvertes par les nuages, comme si elles ne diffusaient pas le rayon de Sa clarté.
20. En outre – puisque l’ordre de la raison postule que l’Église triomphante dans le ciel doit être pieusement suivie par ceux qui militent sur la terre – qu’ils honorent avec une vénération appropriée celui qui a été placé dans la multitude du ciel et qui connaît la gloire de Dieu. Pour notre part, nous avons examiné et discuté la sainteté de la vie et l’authenticité des miracles de ce Confesseur, non seulement une fois, mais encore et encore, sans hâte, en demandant même l’aide de nos frères Cardinaux de la Sainte Église Romaine, dont les informations nous ont été soumises pour examen, avec autant de fermeté que de maturité, de certitude que de prudence, en enquêtant et en examinant ce qu’il y avait, en nous prévalant dans cette tâche d’une procédure ardue et également difficile. Car nous comprenons difficilement ce qui est sur la terre, et nous trouvons avec peine ce qui est sous nos yeux : qui donc découvrira ce qui est dans le ciel ? [36]. Grâce à Notre sollicitude et à celle de Nos Vénérables Frères, après avoir parfaitement vérifié la sainteté de sa vie et l’authenticité des miracles accomplis par son mérite, et après avoir répondu à tous ceux qui Nous ont humblement et pieusement supplié en présence de nombreux prélats présents auprès du Siège Apostolique, sous le conseil et l’assentiment de nos frères Cardinaux, et sous l’autorité de Dieu Tout-Puissant, du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et des Saints Apôtres Pierre et Paul, Nous le jugeons digne d’être inscrit dans le catalogue des Saints Confesseurs.
Décret
21. C’est pourquoi, par cette même Lettre apostolique, Nous vous exhortons tous et vous enjoignons de célébrer avec dévotion, solennité et une juste vénération la fête de ce Confesseur, le 7 mars, afin que sa pieuse intercession nous protège ici des dangers et nous permette à l’avenir d’obtenir la joie éternelle.
22. Pour rendre plus fervente la présence de tout le peuple chrétien au vénérable tombeau de ce très célèbre Confesseur afin d’y célébrer ensemble sa fête, à tous les fidèles vraiment contrits et confessants qui, chaque année en ce jour, se rendent pieusement au tombeau du Saint pour demander pardon, Nous accordons, par la miséricorde du Tout-Puissant et par l’autorité des bienheureux Pierre et Paul, les Apôtres, un an et quarante jours de pardon ; et ceux qui accomplissent vraiment ce même acte de piété dans les sept jours qui suivent la fête, Nous accordons même miséricordieusement cent jours d’indulgence qu’ils auraient encore à payer pour leurs péchés.
Donné à Avignon, le 18 juillet 1323, la septième année de notre pontificat.
Source : Traduite par nos soins.
- Acta Sanctorum, vol. I martii, p. 681, n° 81 : « Nos credimus quod Frater Thomas est gloriosus in coelo quia vita sua fuit sancta, et doctrina eius non potuit esse sine miraculo »[↩]
- Ibid, p. 682, n° 81. “Fratres, nos reputamus nobis ad magnam gloriam et nostrae Ecclesiae, si istum sanctum possumus Catalogo Sanctorum adscribere, dummodo aliqua miracula possint de eo inveniri : quia ipse plus illuminavit Ecclesiam quam omnes alii Doctores ; in cuius libris plus proficit homo uno anno, quam in aliorum doctrina toto tempore vitae suae”[↩]
- Ps 110, 9.[↩]
- Jn 1, 14.[↩]
- Cf. Eph 15, 2 et Ph 4, 28[↩]
- Cf. Chant de l’Exultet à la veillée pascale[↩]
- Cf. 1 Co 15, 4 et le Symbole des apôtres[↩]
- Ac 1, 3.[↩]
- Cf. Ac 1, 9.[↩]
- Eph 4, 8.[↩]
- Mt 11, 12 ; cf. Lc 16, 16[↩]
- Ps 103, 13[↩]
- Cf. Gn 2, 5.[↩]
- Pr 14, 6.[↩]
- De sancti Thomae prudentia in coniliis dandis cf. DE TOCCO, Vita, c. 35 ; A. M. JACQUIN O.P., Le prudentissime Frère Thomas, Fribourg 1924.[↩]
- Cf. Dn 12, 3.[↩]
- Sg 3, 15.[↩]
- Ps 131, 14[↩]
- Mt 24, 45[↩]
- Pr 25, 27.[↩]
- Mt 16, 16[↩]
- Mt 16, 18 ; Lc 22, 32[↩]
- Lc 22, 32[↩]
- Ps 4, 3[↩]
- Jn 1, 8[↩]
- Ps 92, 5[↩]
- 1 Jn 5, 9[↩]
- Si 50, 6[↩]
- Si 45, 6[↩]
- Si 11, 1[↩]
- Si 15, 5[↩]
- Si 24, 31[↩]
- Cf. Ml 4, 2[↩]
- 1 Tm 4, 16[↩]
- He 1, 3[↩]
- Sg 9, 16[↩]