Pie XII

260ᵉ pape ; de 1939 à 1958

19 mai 1956

Discours à des médecins du deuxième congrès mondial pour la fécondité et la stérilité

Table des matières

Le same­di 19 mai, le Saint-​Père a reçu en audience un groupe impor­tant de méde­cins cli­ni­ciens et savants qui devaient prendre part au second congrès mon­dial de la fer­ti­li­té et de la sté­ri­li­té qui eut lieu à Naples. Il leur adres­sa en fran­çais le dis­cours suivant :

Vous Nous avez expri­mé. Messieurs, le désir de venir Nous pré­sen­ter vos hom­mages à l’oc­ca­sion du deuxième congrès mon­dial de la fer­ti­li­té et de la sté­ri­li­té que vous tenez mainte­nant à Naples. Nous répon­dons avec empres­se­ment à votre sou­hait et vous disons le plai­sir tout par­ti­cu­lier que Nous éprou­vons à rece­voir un groupe impo­sant de savants et de pra­ti­ciens de tant de pays divers. Vous vous apprê­tez à étu­dier un sujet dif­fi­cile et déli­cat, parce qu’il concerne l’une des fonc­tions prin­ci­pales du corps humain et parce que les résul­tats de vos tra­vaux peuvent entraî­ner des consé­quences lourdes de signi­fi­ca­tion pour la vie de beau­coup d’hommes et l’é­vo­lu­tion des sociétés.

La sté­ri­li­té conju­gale invo­lon­taire, à laquelle vous vous pro­posez de por­ter remède, fait obs­tacle à l’ob­ten­tion de la fin prin­ci­pale du mariage et pro­voque chez le couple un malaise pro­fond, voi­lé sou­vent par une pudeur ins­tinc­tive, mais dan­gereux pour la sta­bi­li­té du mariage lui-​même. C’est pour­quoi en face de l’im­puis­sance de la méde­cine moderne à trai­ter avec suc­cès bien des cas de ce genre, vous avez for­mé en 1951 cette « Association inter­na­tio­nale de la fer­ti­li­té » dont le pre­mier Congrès, tenu à New-​York en 1953, pro­po­sait dans son ordre du jour trois réso­lu­tions prin­ci­pales : aider par tous les moyens pos­sibles l’é­tude et la recherche concer­nant la fer­ti­li­té ; pro­mouvoir et répandre cette spé­cia­li­té chez les méde­cins, afin qu’un nombre suf­fi­sant d’entre eux puisse aider effi­ca­ce­ment les couples sté­riles ; insis­ter pour qu’on crée des cli­niques, des ser­vices et des centres de fer­ti­li­té dans les hôpi­taux, sous la direc­tion d’un per­son­nel com­pé­tent. Le pré­sent Congrès répond, comme le pré­cé­dent, à la volon­té de déve­lop­per au maxi­mum les connais­sances que l’on pos­sède, de les répandre par­mi les méde­cins de toutes les par­ties du monde, de déter­mi­ner aus­si une coor­di­na­tion des tra­vaux sur cer­tains points où la conver­gence des efforts per­met­tra d’ob­te­nir des résul­tats plus signi­ficatifs. Vous enten­drez un nombre remar­quable de rap­ports et de com­mu­ni­ca­tions qui exa­minent les fac­teurs endo­cri­niens et méta­bo­liques de la fer­ti­li­té et de la sté­ri­li­té, leurs fac­teurs pro­fes­sion­nels et toxiques, les méthodes nou­velles de diagnos­tic et de trai­te­ment de la sté­ri­li­té mas­cu­line et fémi­nine, le diag­nos­tic de l’o­vu­la­tion et de la sper­ma­to­gé­nèse et le traite­ment de leurs désordres, la chi­rur­gie de la sté­ri­li­té. Une série de mémoires consi­dé­re­ra aus­si les recherches expé­ri­men­tales menées en cette matière et les pro­blèmes rela­tifs à l’une des prin­ci­pales fonc­tions de l’homme. Cet ensemble d’é­tudes illustre brillam­ment l’in­té­rêt que ce Congrès sus­cite et la façon dont, de toutes parts, des spé­cia­listes émi­nents ont vou­lu appor­ter leur contri­bu­tion à l’ef­fort commun.

Il ne Nous appar­tient pas de por­ter un juge­ment sur les aspects pro­pre­ment tech­niques de vos tra­vaux ; Nous vou­drions, par contre, envi­sa­ger briè­ve­ment cer­taines impli­ca­tions morales des ques­tions que vous abor­dez du point de vue scientifique.

Le Saint-​Père approuve les efforts légitimes faits pour remédier à la stérilité involontaire.

Votre congrès pré­cé­dent signa­lait dans sa motion finale que la sté­ri­li­té conju­gale invo­lon­taire sou­lève un pro­blème écono­mique et social de grande impor­tance, qu’elle contri­bue à l’a­bais­se­ment de l’in­dice de fer­ti­li­té des popu­la­tions et peut influen­cer par là la vie et la des­ti­née des peuples. II arrive par­fois que l’on s’at­tarde à ce point de vue, plus appa­rent, plus faci­le­ment contrô­lable. On dira alors qu’il faut pro­mou­voir la nata­li­té pour assu­rer la vita­li­té d’une nation et son expan­sion dans tous les domaines. Il est vrai qu’une nata­li­té éle­vée mani­feste les éner­gies créa­trices d’un peuple ou d’une famille ; elle illustre le cou­rage des hommes devant la vie, ses risques, ses dif­fi­cul­tés ; elle sou­ligne leur volon­té de construire et de pro­gresser. On a rai­son de rele­ver que l’im­pos­si­bi­li­té phy­sique d’exer­cer la pater­ni­té et la mater­ni­té devient aisé­ment un motif de décou­ra­ge­ment, de replie­ment sur soi. La vie, qui sou­hai­tait ardem­ment se pro­lon­ger, se dépas­ser, retombe, pour ain­si dire, sur elle-​même et bien des foyers, hélas, suc­combent à cette épreuve.

C’est avec plai­sir que Nous vou­drions men­tion­ner ici une consi­dé­ra­tion, que vous avez vous-​mêmes mise en relief. Il est plei­ne­ment vrai que votre zèle à pour­suivre des recherches sur la sté­ri­li­té matri­mo­niale et le moyen de la vaincre, s’il pré­sente un aspect scien­ti­fique digne d’at­ten­tion, engage aus­si de hautes valeurs spi­ri­tuelles et éthiques, dont on devrait tenir compte. Nous les avons indi­quées ci-​dessus. Il est pro­fon­dé­ment humain que les époux voient et trouvent dans leur enfant l’ex­pres­sion véri­table et plé­nière de leur amour réci­proque et de leur don mutuel. Il n’est pas dif­fi­cile de com­prendre pour­quoi le désir insa­tis­fait de la pater­ni­té ou de la mater­ni­té est res­sen­ti comme un sacri­fice pénible et dou­lou­reux par les parents, qu’a­niment des sen­ti­ments nobles et sains. Bien plus, la sté­ri­li­té invo­lon­taire du mariage peut deve­nir un dan­ger sérieux pour l’u­nion et la sta­bi­li­té même de la famille.

Mais cet aspect social ne fait en réa­li­té que recou­vrir une réa­li­té plus intime et plus grave. Le mariage, en effet, unit deux per­sonnes dans une com­mu­nau­té de des­tin, dans leur marche vers la réa­li­sa­tion d’un idéal qui implique, non la plé­ni­tude d’un bon­heur ter­restre, mais la conquête de valeurs spi­ri­tuelles d’un ordre trans­cen­dant, que la Révélation chré­tienne en par­ti­cu­lier pro­pose dans toute leur gran­deur. Cet idéal, les époux le pour­suivent ensemble, en se consa­crant à l’obten­tion de la fin pre­mière du mariage, la géné­ra­tion et l’é­du­ca­tion des enfants.

Plusieurs fois déjà Nous avons cru néces­saire de rap­pe­ler com­ment les inten­tions par­ti­cu­lières des conjoints, leur vie com­mune, leur per­fec­tion­ne­ment per­son­nel, ne pou­vaient se con­cevoir que subor­don­nés au but qui les dépasse, la pater­ni­té et la mater­ni­té. « Non seule­ment l’œuvre com­mune de la vie exté­rieure, disions-​Nous dans une allo­cu­tion adres­sée aux sages- femmes le 29 octobre 1951, mais encore tout l’en­ri­chis­se­ment per­son­nel, même l’en­ri­chis­se­ment intel­lec­tuel et spi­ri­tuel, jus­qu’à ce qu’il y a de plus spi­ri­tuel et pro­fond dans l’a­mour conju­gal comme tel, a été mis par la volon­té de la nature et du Créateur au ser­vice de la des­cen­dance[1]. Tel est l’enseigne­ment constant de l’Eglise ; elle a reje­té toute concep­tion du mariage qui mena­ce­rait de le replier sur lui-​même, d’en faire une recherche égoïste de satis­fac­tions affec­tives et phy­siques dans l’in­té­rêt des seuls époux.

Le Saint-​Père affirme clairement qu’il n’est jamais permis dans la génération de séparer l’activité biologique de la relation personnelle des conjoints.

Mais l’Eglise a écar­té aus­si l’at­ti­tude oppo­sée qui pré­ten­drait sépa­rer, dans la géné­ra­tion, l’ac­ti­vi­té bio­lo­gique de la rela­tion per­son­nelle des conjoints. L’enfant est le fruit de l’u­nion con­jugale, lors­qu’elle s’ex­prime en plé­ni­tude, par la mise en œuvre des fonc­tions orga­niques, des émo­tions sen­sibles qui y sont liées, de l’a­mour spi­ri­tuel et dés­in­té­res­sé qui l’a­nime ; c’est dans l’u­ni­té de cet acte humain que doivent être posées les condi­tions bio­lo­giques de la géné­ra­tion. Jamais il n’est per­mis de sépa­rer ces divers aspects au point d’ex­clure posi­ti­ve­ment soit l’in­ten­tion pro-​créatrice, soit le rap­port conju­gal. La rela­tion qui unit le père et la mère à leur enfant, prend racine dans le fait orga­nique et plus encore dans la démarche déli­bé­rée des époux, qui se livrent l’un à l’autre et dont la volon­té de se don­ner s’é­pa­nouit et trouve son abou­tis­se­ment véri­table dans l’être qu’ils mettent au monde. Seule d’ailleurs cette consécra­tion de soi, géné­reuse dans son prin­cipe et ardue dans sa réali­sation, par l’ac­cep­ta­tion consciente des res­pon­sa­bi­li­tés qu’elle com­porte, peut garan­tir que l’œuvre d’é­du­ca­tion des enfants sera pour­sui­vie avec tout le soin, le cou­rage et la patience qu’elle exige. On peut donc affir­mer que la fécon­di­té humaine, au-​delà du plan phy­sique, revêt des aspects moraux essen­tiels, qu’il faut néces­sai­re­ment consi­dé­rer, même lors­qu’on traite le sujet du point de vue médical.

Il est bien évident que le savant et le méde­cin, lors­qu’ils abordent un pro­blème de leur spé­cia­li­té, ont le droit de concen­trer leur atten­tion sur ses élé­ments pro­pre­ment scien­ti­fiques et de le résoudre en fonc­tion de ces seules don­nées. Mais lors­qu’on entre dans la voie des appli­ca­tions pra­tiques à l’hom­me, il est impos­sible de ne pas tenir compte des réper­cus­sions que les méthodes pro­po­sées auront sur la per­sonne et son des­tin. La gran­deur de l’acte humain consiste pré­ci­sé­ment à dépas­ser le moment même où il se pose pour enga­ger toute l’o­rien­ta­tion d’une vie, pour l’a­me­ner à prendre posi­tion vis-​à-​vis de l’ab­so­lu. C’est vrai déjà de l’ac­ti­vi­té quo­ti­dienne : à com­bien plus forte rai­son d’un acte qui engage, avec l’a­mour réci­proque des époux, leur ave­nir et celui de leur descendance.

Il déclare illicite la génération artificielle parce que contraire à la loi naturelle, au droit et à la morale.

Aussi croyons-​Nous qu’il est capi­tal pour vous, Messieurs, de ne pas négli­ger cette pers­pec­tive, quand vous consi­dé­rez les méthodes de fécon­da­tion arti­fi­cielle. Le moyen, par lequel on tend à la pro­duc­tion d’une nou­velle vie, prend une signi­fi­ca­tion humaine essen­tielle, insé­pa­rable de la fin que l’on pour­suit et sus­cep­tible, s’il n’est pas conforme à la réa­li­té des choses et aux lois ins­crites dans la nature des êtres, de cau­ser un dom­mage grave à cette fin même.

Sur ce point éga­le­ment, on Nous a deman­dé de don­ner quelques direc­tives. Au sujet des ten­ta­tives de fécon­da­tion arti­fi­cielle humaine in vitro, qu’il Nous suf­fise d’ob­ser­ver qu’il faut les reje­ter comme immo­rales et abso­lu­ment illi­cites. Sur les diverses ques­tions de morale qui se posent à pro­pos de la fécon­da­tion arti­fi­cielle, au sens ordi­naire du mot, ou « insémi­nation arti­fi­cielle », Nous avons déjà expri­mé Notre pen­sée dans un dis­cours adres­sé aux méde­cins le 29 sep­tembre 1949 [2] ; aus­si Nous ren­voyons pour le détail à ce que Nous disions alors et Nous Nous limi­tons ici à répé­ter le juge­ment don­né pour conclure : « En ce qui touche la fécon­da­tion arti­fi­cielle, non seule­ment il y a lieu d’être extrê­me­ment réser­vé, mais il faut abso­lu­ment l’é­car­ter. En par­lant ain­si, on ne pros­crit pas néces­sai­re­ment l’emploi de cer­tains moyens arti­fi­ciels des­ti­nés uni­que­ment soit à faci­li­ter l’acte natu­rel, soit à faire atteindre sa fin à l’acte natu­rel nor­ma­le­ment accom­pli ». Mais étant don­né que l’u­sage de la fécon­da­tion arti­fi­cielle s’é­tend de plus en plus, et afin de cor­ri­ger quelques opi­nions erro­nées qui se répandent au sujet de ce que Nous avons ensei­gné, Nous y ajou­tons ce qui suit :

La fécon­da­tion arti­fi­cielle dépasse les limites du droit que les époux ont acquis par le contrat matri­mo­nial, à savoir, celui d’exer­cer plei­ne­ment leur capa­ci­té sexuelle natu­relle dans l’ac­complissement natu­rel de l’acte matri­mo­nial. Le contrat en ques­tion ne leur confère pas de droit à la fécon­da­tion artifi­cielle, car un tel droit n’est d’au­cune façon expri­mé dans le droit à l’acte conju­gal natu­rel et ne sau­rait en être déduit. Encore moins peut-​on le faire déri­ver du droit à l”«enfant », « fin » pre­mière du mariage. Le contrat matri­mo­nial ne donne pas ce droit, parce qu’il a pour objet non pas 1′« enfant », mais les « actes natu­rels » qui sont capables d’en­gen­drer une nou­velle vie et des­ti­nés à cela. Aussi doit-​on dire de la féconda­tion arti­fi­cielle qu’elle viole la loi natu­relle et qu’elle est con­traire au droit et à la morale.

Le Saint-​Père poursuivit en latin :

Alia nunc occur­rit quæs­tio, ad quam per­trac­tan­dam magis adde­cet lati­nam lin­guam adhibere.

Quemadmodum ratio­na­lis ani­mus nos­ter arti­fi­cia­li inse­mi­na­tio­ni adver­sa­tur, ita eadem ethi­ca ratio, a qua agen­di nor­ma sumen­da est, pari­ter vetat, quo­mi­nus huma­num semen, per­ito­rum exa­mi­ni subi­cien­dum, mas­tur­ba­tio­nis ope procuretur.

Hanc agen­di ratio­nem atti­gi­mus Nostra quoque allo­cu­tione coram Urologiæ doc­to­ri­bus cœtum par­ti­ci­pan­ti­bus, die VIII men­sis Octobris anno MDCCCCLIII pro­la­ta, in qua hæc habui­mus, ver­ba : « Du reste, le Saint-​Office a déci­dé le 2 août 1929[3]qu’une « mas­tur­ba­tio directe pro­cu­ra­ta ut obti­nea­tur sper­ma » n’est pas licite, ceci quel que soit le but de l’exa­men » [4]. Cum vero Nobis alla­tum sit, pra­vam huius­mo­di consue­tu­di­nem plu­ri­bus in locis inva­les­cere, oppor­tu­num duci­mus nunc etiam, quæ tunc monui­mus, com­me­mo­rare atque ite­rum inculcare.

Si actus huius­mo­di ad explen­dam libi­di­nem ponan­tur, eos vel ipse natu­ra­lis homi­nis sen­sus sua sponte respuit, ac mul­to magis men­tis indi­cium, quo­ties­cumque rem mature rec­teque consi­de­rat. Iidem actus tar­nen tunc quoque respuen­di sunt, cum graves rationes eos a culpa exi­mere viden­tur, uti sunt : reme­dia iis præs­tan­da qui nimia ner­vo­rum inten­tione vel abnor­mi­bus ani­mi spas­mis labo­rant ; medi­cis per­agen­da, ope micro­sco­pii, sper­ma­tis ins­pec­tio, quod vene­rei vel alius gene­ris mor­bi barc­triis infec­tum sit ; diver­sa­rum par­tium exa­men, ex qui­bus semen ordi­na­rie constat, ut vita­lium sper­ma­tis ele­men­to­rum præ­sen­tia, nume­rus quan­ti­tas, for­ma, vis habi­tus aliaque id genus dignoscuntur.

Eiusmodi pro­cu­ra­tio huma­ni semi­nis, per mas­tur­ba­tio­nem effec­ta, ad nihil aliud directe spec­tat, nisi ad natu­ra­lem in homine gene­ran­di facul­ta­tem plene exer­cen­dam ; quod qui­dem ple­num exer­ci­tium, extra coniu­ga­lem copu­lam per­ac­tum, secum fert direc­tum et inde­bite usur­pa­tum eius­dem facul­ta­tis usum. In hoc eius­mo­di inde­bi­to facul­ta­tis usu pro­prie sita est intrin­seca regulæ morum vio­la­tio. Haudquaquam enim homo ius ullum exer­cen­di facul­ta­tem sexua­lem iam inde habet, quod facul­ta­tem ean­dem a natu­ra rece­pit. Homini nempe (secus ac in cete­ris ani­man­ti­bus ratio­nis exper­ti­bus contin­git) ius et potes­tas uten­di atque exer­cen­di ean­dem facul­ta­tem tan­tum­mo­do in nup­tiis valide ini­tis tri­bui­tur, atque in iure matri­mo­nia­li conti­ne­tur, quod ipsis nup­tiis tra­di­tur et accep­ta­tur. Inde elu­cet homi­nem, ob solam hanc cau­sam quod facul­ta­tem sexua­lem a natu­ra rece­pit, non habere nisi poten­tiam et ius ad matri­mo­nium ineun­dum. Hoc ius tamen, ad obiec­tum et ambi­tum quod atti­net naturæ lege, non homi­num volun­tate dis­cri­bi­tur ; vi huius legis naturæ, homi­ni non com­pe­tit ius et potes­tas ad ple­num facul­ta­tis sexua­lis exer­ci­tium, directe inten­tum, nisi cum coniu­ga­lem copu­lam exer­cet ad nor­mam a natu­ra ipsa impe­ra­tam atque defi­ni­tam. Extra hunc natu­ra­lem actum, ne in ipso qui­dem matri­mo­nio ius datur ad sexua­li hac facul­tate piene fruen­dum. Hi sunt limites, qui­bus ius, de quo dixi­mus, eiusque exer­ci­tium a natu­ra cir­cum­scri­bun­tur. Ex eo quod ple­num sexua­lis facul­ta­tis exer­ci­tium hoc abso­lute copulæ coniu­ga­lis limite cir­cum­scri­bi­tur, eadem facul­tas intrin­sece apta effi­ci­tur ad ple­num matri­mo­nii natu­ra­lem finem asse­quen­dum (qui non modo est gene­ra­tio, sed etiam pro­lis edu­ca­tio), atque eius exer­ci­tium cum dic­to fine col­li­ga­tur. Quæ cum ita sint, mas­tur­ba­tio omni­no est extra memo­ra­tam pie­ni facul­ta­tis sexua­lis exer­ci­tii natu­ra­lem habi­li­ta­tem, ideoque etiam extra eius col­li­ga­tio­nem cum fine a natu­ra ordi­na­to ; qua­mo­brem eadem omni iuris titu­lo caret atque naturæ et ethices legi­bus contra­ria est, etiam­si inser­vire inten­dat uti­li­ta­ti per se iustæ rei improbandæ.

Quæ hac­te­nus dic­ta sunt de intrin­se­ca mali­tia cuius­li­bet ple­ni usus poten­tiæ gene­ran­di extra natu­ra­lem coniu­ga­lem copu­lam, valent eodem modo cum agi­tur de matri­mo­nio iunc­tis vel de matri­mo­nio solu­tis, sive ple­num exer­ci­tium appa­ra­tus geni­ta­lis fit a viro sive a muliere, sive ab utraque parte simul agente ; sive fit tac­ti­bus manua­li­bus sive coniu­ga­lis copulæ inter­rup­tione : hæc enim sem­per est actus naturæ contra­rius atque intrin­sece malus.

Il rappelle que la fécondité engage aussi le plan psychologique et moral.

Si la fécon­di­té répond à cer­taines exi­gences de l’or­ga­nisme et satis­fait des ins­tincts puis­sants, elle engage tout de suite, comme Nous l’a­vons dit, le plan psy­cho­lo­gique et moral. L’œu­vre de l’é­du­ca­tion dépasse encore par sa por­tée et ses consé­quences celle de la géné­ra­tion. Les échanges d’âme à âme, qui s’o­pèrent entre les parents et les enfants, avec tout le sérieux, la déli­ca­tesse, l’ou­bli de soi qu’ils requièrent, contraignent bien vite les parents à dépas­ser le stade de la pos­ses­sion affec­tive pour son­ger à la des­ti­née per­son­nelle de ceux qui leur sont confiés. Le plus sou­vent, quand ils atteignent l’âge adulte, les enfants quittent leur famille, s’en vont au loin pour répondre aux néces­si­tés de la vie ou aux appels d’une voca­tion plus haute. La pen­sée de ce déta­che­ment nor­mal, si coû­teux soit-​il pour eux, doit aider les parents à s’é­le­ver vers une concep­tion plus noble de leur mis­sion, vers une vision plus pure de la signi­fi­ca­tion de leurs efforts. Sous peine d’é­chec au moins par­tiel, la famille est appe­lée à s’in­té­grer dans la socié­té, à élar­gir le cercle des affec­tions et des inté­rêts, à orien­ter ses mem­bres vers des hori­zons plus larges, pour son­ger non seule­ment à eux-​mêmes, mais aux tâches de ser­vice social.

Le Saint-​Père termine en disant qu’il y a une fécondité transcen­dante : c’est celle des âmes consacrées à Dieu.

L’Eglise catho­lique enfin, dépo­si­taire des inten­tions divines, enseigne la fécon­di­té supé­rieure des vies entiè­re­ment consa­crées à Dieu et au pro­chain. Ici, le renon­ce­ment entier à la famille doit per­mettre Faction spi­ri­tuelle toute dés­in­té­res­sée et pro­cé­dant non d’une peur quel­conque de la vie et de ses enga­gements, mais de la per­cep­tion des véri­tables des­ti­nées de l’homme, créé à l’i­mage de Dieu et en quête d’un amour uni­ver­sel, qu’au­cun atta­che­ment char­nel ne vienne limi­ter. Telle est la plus sublime et la plus enviable fécon­di­té que l’homme puisse sou­hai­ter, celle qui trans­cende le plan bio­lo­gique pour entrer de plain-​pied dans celui de l’esprit.

Nous ne vou­lions pas, Messieurs, conclure cette allo­cu­tion sans ouvrir ces pers­pec­tives. A d’au­cuns, elles peuvent paraître assez éloi­gnées des objets qui vous occupent main­te­nant. Il n’en est rien cepen­dant. Elles seules, en effet, per­mettent de situer vos tra­vaux à la place qui leur revient et d’en aper­ce­voir la valeur. Ce que vous sou­hai­tez, ce n’est pas seule­ment d’augmen­ter le nombre des hommes, mais d’é­le­ver le niveau moral de l’hu­ma­ni­té, ses forces bien­fai­santes, sa volon­té de croître phy­siquement et spi­ri­tuel­le­ment. Vous vou­lez rendre une nou­velle fer­veur à l’af­fec­tion de tant d’é­poux qu’at­triste un foyer désert ; loin d’en­tra­ver leur épa­nouis­se­ment plé­nier, vous ambi­tion­nez de mettre à leur ser­vice tout votre savoir pour que se réveillent en eux ces res­sources admi­rables, que Dieu a cachées au cœur des pères et des mères pour les aider à mon­ter vers Lui, eux- mêmes et toute leur famille.

Pénétrés d’une telle res­pon­sa­bi­li­té, vous pour­sui­vrez avec une ardeur crois­sante, Nous osons l’es­pé­rer, votre labeur scien­tifique et les réa­li­sa­tions pra­tiques que vous vous pro­po­sez. En invo­quant sur vous-​mêmes, sur vos familles et tous ceux qui vous sont chers, les plus abon­dantes faveurs divines, Nous vous accor­dons de tout cœur Notre Bénédiction apostolique.

Source : Document Pontificaux de S. S. Pie XII, Editions Saint-​Augustin Saint Maurice – D’après le texte fran­çais des A. A. S., XXXXVII1, 1956, p. 467.

Notes de bas de page
  1. Cf. Documents Pontificaux 1951, p. 492.[]
  2. Cf. Documents Pontificaux 1949, p. 413.[]
  3. A. A. S., vol. XXI a., 1929, p. 490, II.[]
  4. Cf. Documents Pontificaux 1953, p. 492.[]