Concile de Trente

19ᵉ œcuménique ; 13 déc. 1545-4 déc. 1563

15 juillet 1563, 23e session

Doctrine et canons sur le sacrement de l’ordre

Table des matières

Institution du sacerdoce de la loi nouvelle.

Le sacri­fice et le sacer­doce sont si étroite­ment unis dans les des­seins de Dieu, qu’ils ont coexis­té sous la loi de nature et la loi écrite. L’Eglise catho­lique ayant donc reçu, dans le nou­veau Testa­ment, par l’institution du Sei­gneur, le sacri­fice visible de la sainte Eucharistie, il faut avouer qu’elle doit avoir un sacer­doce exté­rieur et visible qui rem­place le sacer­doce ancien. Or, que notre Sauveur l’ait ins­ti­tué lui-​même et qu’il ait don­né aux apôtres et à leurs suc­ces­seurs dans le sacer­doce le pou­voir de consa­crer, d’offrir et d’adminis­trer son corps et son sang, de remettre et de rete­nir les pé­chés, les saintes Lettre le témoignent, et la tra­di­tion de l’Eglise catho­lique l’a tou­jours enseigné.

Canon 1. Si quelqu’un dit qu’il n’y a, sous le nou­veau Testament, ni de sacer­doce visible et exté­rieur, ni de puis­sance de consa­crer, d’offrir le vrai corps et le vrai sang de Notre-​Seigneur, de remettre et de rete­nir les péchés, mais seule­ment l’office et le simple minis­tère de prê­cher l’E­vangile, ou que ceux qui ne prê­chent pas ne sont pas prêtres, qu’il soit anathème.

Des sept ordres.

Or, comme l’exercice d’un sacer­doce si saint est une chose toute divine, afin que les fonc­tions en fussent rem­plies avec plus de digni­té et de res­pect, il conve­nait que, dans la belle ordon­nance de l’Eglise, il y eût plu­sieurs et divers or­dres de ministres char­gés par office de ser­vir à l’autel, et gra­duels de manière que les clercs, déjà hono­rés et sépa­rés du monde par la ton­sure, mon­tassent des ordres mineurs aux ordres ma­jeurs. Car les saintes Ecritures font une men­tion expresse, non seule­ment des prêtres, mais encore des diacres, et énoncent en termes pré­cis ce qu’il faut avant tout obser­ver dans leur ordi­na­tion : et l’on trouve, dès les pre­miers temps de l’Eglise, les noms et les fonc­tions respec­tives des ordres de sous-​diacre, d’acolyte, d’exorciste, de lec­teur, de por­tier, à des degrés inégaux ; car le sous-​diaconat est mis au rang des ordres majeurs par les Pères et les saints conciles, qui parlent aus­si très fré­quem­ment des ordres inférieurs.

Canon 2. Si quelqu’un dit qu’il n’y a point dans l’Eglise catho­lique, outre le sacer­doce, d’autres or­dres majeurs et mineurs par les­quels, comme par autant de de­grés, on monte au sacer­doce, qu’il soit anathème.

Que l’ordre est un véritable sacrement.

Comme il est ma­nifeste par le témoi­gnage de l’E­criture, la tra­di­tion apos­to­lique et le consen­te­ment una­nime des Pères, que la sainte ordi­na­tion qui se fait par des paroles et des signes exté­rieurs, confère la grâce, per­sonne ne peut dou­ter que l’ordre ne soit un des sept sacre­ments de la sainte Eglise, Je vous aver­tis, écrit l’Apôtre, de res­sus­ci­ter la grâce qui est en vous par l’im­po­si­tion de mes mains ; car Dieu ne nous a pas don­né un esprit de pusillani­mité, mais de cou­rage, de dilec­tion et de sobriété.

Canon 3. Si quelqu’un dit que l’ordre ou l’ordination sacrée n’est pas vé­ritablement et pro­pre­ment un sacre­ment ins­ti­tué par Notre­-​Seigneur Jésus-​Christ ; ou que c’est une inven­tion humaine ima­gi­née par des gens dépour­vus de la science ecclé­sias­tique, ou que ce n’est autre chose qu’une céré­mo­nie obser­vée dans l’élec­tion des ministres de la parole et des sacre­ments, qu’il soit anathème.

Canon 4. Si quelqu’un dit que l’ordina­tion sacrée ne donne pas le Saint-​Esprit et que, par­tant, l’é­vêque dit à tort : Recevez le Saint-​Es­prit, ou qu’elle n’imprime pas de carac­tère, ou que celui qui a été une fuis prêtre peut rede­ve­nir laïque, qu’il soit anathème.

Canon 5. Si quel­qu’un dit que l’onc­tion sacrée dont use l’Eglise dans la sainte ordi­na­tion n’est pas re­quise, mais qu’elle est blâ­mable et pré­ju­di­ciable, aus­si bien que les autres céré­mo­nies de l’ordre, qu’il soit anathème.

De la hiérarchie ecclésiastique et du pouvoir d’ordonner.

Puisque le sacre­ment de l’or­dre imprime, comme le bap­tême et la confir­ma­tion, un carac­tère indé­lé­bile et inef­fa­çable, le saint concile a rai­son de condam­ner l’opinion de ceux qui affirment que les prêtres du nou­veau Tes­tament n’ont qu’une puis­sance tem­po­raire, et que leur ordina­tion eût-​elle été légi­time, ils peuvent rede­ve­nir laïques, en ces­sant d’exer­cer le minis­tère de la parole divine. Si on pré­tend que tous les chré­tiens indistinc­tement sont prêtres du nou­veau Testament, ou que tous sont inves­tis d’une égale puis­sance spi­ri­tuelle, c’est bou­le­ver­ser la hié­rar­chie ecclé­sias­tique, com­parée à une armée ran­gée en bataille, comme si, contraire­ment à la doc­trine de S. Paul, tous étaient apôtres, tous pro­phètes, tous évan­gé­listes, tous pas­teurs, tous doc­teurs. Aussi le saint concile déclare-​t-​il que, sans par­ler des autres ordres ecclé­sias­tiques, les évêques, en qua­li­té de suc­ces­seurs des apô­tres appar­tiennent principale­ment à l’ordre hié­rar­chique ; qu’ils ont été éta­blis par le Saint-​Esprit, comme dit S Paul, pour gou­ver­ner l’Eglise de Dieu ; qu’ils sont supé­rieurs aux prêtres ; qu’ils admi­nistrent le sacre­ment de confir­ma­tion, ordonnent les ministres de l’Eglise, et peuvent faire plu­sieurs autres fonc­tions que ceux d’un ordre infé­rieur n’ont pas le pou­voir d’exercer.

Le saint concile enseigne en outre que dans la pro­mo­tion des évêques, des prêtres et des au­tres ordres, le consen­te­ment, l’ap­pel ou l’autorité soit du peuple soit d’une puis­sance sécu­lière quel­conque et du magis­trat, ne sont pas tel­le­ment requis, que leur défaut rende nulle l’ordina­tion : loin de là, il décide que ceux qui, appe­lés et ins­ti­tués seule­ment par le peuple ou par la puis­sance sécu­lière et les magis­trats s’ingèrent d’exercer ces minis­tères, doivent être re­gardés, non comme des minis­tres de l’Eglise, mais comme des voleurs et des lar­rons qui ne sont point entrés par la porte. Voilà ce que le saint concile a cru de­voir ensei­gner aux fidèles sut le sacre­ment de l’ordre. Aussi, afin que ceux-​ci, aidés de Jésus-​Christ et sui­vant la règle de la foi, puissent, au milieu de tant d’erreurs, recon­naître et conser­ver plus faci­le­ment la véri­té ca­tholique, il a réso­lu de condam­ner toute opi­nion contraire par les canons suivants :

Canon 6. Si quelqu’un dit qu’il n’y a pas, dans l’Eglise catho­lique, une hié­rarchie éta­blie par dis­po­si­tion de Dieu, laquelle se com­pose d’évê­ques, de prêtres et de ministres, qu’il soit anathème.

Canon 7. Si quelqu’un dit que les évê­ques ne sont pas supé­rieurs aux prêtres, ou qu’ils n’ont pas la puis­sance de confir­mer et d’or­donner, ou que cette puis­sance leur est com­mune avec les prê­tres ; ou que les ordres confé­rés par eux sans le consen­te­ment et l’appel du peuple ou de l’au­to­ri­té sécu­lière sont nuls : ou que ceux qui n’ont été ni légi­ti­me­ment or­donnés ni envoyés par la puis­sance ecclé­sias­tique cano­nique, mais sont venus d’ailleurs, sont de légi­times ministres de la parole et des sacre­ments, qu’il soit anathème.

Canon 8. Si quelqu’un dit que les évê­ques qui sont choi­sis par l’autorité du Pontife romain ne sont pas de vrais et légi­times évêques, mais que c’est une inven­tion hu­maine, qu’il soit anathème.

Source : La Somme des Conciles géné­raux et par­ti­cu­liers, Tome II, Abbé Guyot, 1868.