Saint Pie X

257ᵉ pape ; de 1903 à 1914

27 mars 1906

Lettre apostolique Quoniam in re biblica

Sur les règles qui doivent présider à l'enseignement de l'Écriture Sainte dans les Séminaires

PIE X, PAPE

Ad per­pe­tuam rei memo­riam.

La ques­tion biblique a revê­tu aujourd’­hui une impor­tance qu’elle n’a peut-​être jamais eue aupa­ra­vant : il est donc abso­lu­ment néces­saire d’i­ni­tier avec soin les jeunes clercs a la science des Ecritures ; il faut que non seule­ment ils aient eux-​mêmes plei­ne­ment com­pris la por­tée, la rai­son et la doc­trine des Livres Saints, mais qu’ils puissent, avec une science saine, se livrer au minis­tère de la parole sacrée et défendre les livres ins­pi­rés contre les attaques de ceux qui ne veulent y admettre aucune inter­ven­tion divine. Aussi est-​ce à bon droit que Notre illustre pré­dé­ces­seur s’est expri­mé en ces termes dans l’Ency­clique Providentissimus : « Votre pre­mier soin doit être d’as­su­rer dans les Séminaires et les Académies un ensei­gne­ment des Saintes Lettres qui réponde à l’im­por­tance de cette science et à la néces­si­té des temps. »

Sur le même sujet Nous for­mu­lons les pres­crip­tions sui­vantes, qui seront, Nous semble-​t-​il, d’une très grande utilité :

I. — L’enseignement de la Sainte Ecriture, qu’on a le devoir de don­ner dans chaque Séminaire, doit embras­ser ce pro­gramme : d’a­bord, les notions prin­ci­pales sur l’ins­pi­ra­tion, le Canon des Livres Saints, le texte ori­gi­nal et les prin­ci­pales ver­sions, les lois de 1l’herméneutique ; puis l’his­toire des deux Testaments, l’a­na­lyse et l’exé­gèse de chaque Livre, sui­vant son importance.

II. — Le cours de l’en­sei­gne­ment biblique com­pren­dra autant d’an­nées que les élèves ecclé­sias­tiques en doivent pas­ser au Séminaire pour étu­dier les sciences sacrées, de sorte qu’en ter­mi­nant ces années d’é­tudes tous les élèves aient ache­vé le cours com­plet d’Ecriture Sainte.

III. — Des chaires d’Ecriture Sainte seront éta­blies dans la mesure où le per­mettent les res­sources et la condi­tion de chaque Séminaire. Mais par­tout ou aura soin de four­nir aux élèves les moyens d’ac­qué­rir toutes les connais­sances qu’il n’est point per­mis à un prêtre d’ignorer.

IV. — Durant les études, il est impos­sible d’ex­pli­quer d’une façon détaillée toutes les Saintes Ecritures ; d’autre part, il est néces­saire que tous les Livres Saints soient connus du prêtre au moins dans une cer­taine mesure : il incom­be­ra donc au maître d’a­voir pour chaque Livre un trai­té par­ti­cu­lier ou « intro­duc­tion », d’en éta­blir l’au­to­ri­té histo­rique si la matière l’exige, et de l’a­na­ly­ser ; le pro­fes­seur insis­te­ra tou­tefois plus long­temps sur les livres ou par­ties de livres qui sont plus importants.

V. — Pour ce qui concerne l’Ancien Testament, le pro­fes­seur, tirant pro­fit des décou­vertes récentes, mon­tre­ra la suite des évé­ne­ments et les rap­ports que le peuple hébreu a eus avec les autres Orientaux ; il expo­se­ra en résu­mé in loi de Moïse ; il expli­que­ra les prin­ci­pales prophéties.

VI. — Il s’ap­pli­que­ra sur­tout à don­ner aux étu­diants l’in­tel­li­gence et le goût des psaumes qu’ils doivent réci­ter chaque jour dans l’of­fice divin : il com­men­te­ra, à titre d’exemple, quelques psaumes, et il appren­dra ain­si aux étu­diants à inter­pré­ter les autres eux-​mêmes, par leur tra­vail personnel.

VII. — Quant au Nouveau Testament, il ensei­gne­ra avec pré­ci­sion et avec clar­té quels sont les carac­tères propres des quatre Evangiles et com­ment s’é­ta­blit leur authen­ti­ci­té ; il expo­se­ra aus­si l’en­semble de toute l’his­toire évan­gé­lique , ain­si que la doc­trine conte­nue dans les épîtres et les autres Livres sacrés.

VIII. — Le pro­fes­seur s’ar­rê­te­ra avec un soin spé­cial à expli­quer les pas­sages des deux Testaments qui se rap­portent à la foi et aux mœurs chrétiennes.

IX. — Qu’il se sou­vienne tou­jours — et sur­tout quand il expli­que­ra le Nouveau Testament — que ceux qui devront plus tard ensei­gner au1 peuple, par la parole et par l’exemple, le che­min du salut éter­nel, se forment d’a­près ses pré­ceptes. En consé­quence, au cours de ses leçons il s’ap­pli­que­ra à ins­truire ses élèves de la meilleure façon de prê­cher l’Evangile ; et il pro­fi­te­ra de cette occa­sion pour le& ame­ner à suivre avec zèle les ensei­gne­ments du Christ et des apôtres.

X. — Les élèves qui don­ne­ront les meilleures espé­rances devront être for­més à l’é­tude de la langue hébraïque et du grec biblique, et aus­si — dans la mesure du pos­sible — à l’é­tude de quelque autre langue sémi­tique, comme le syriaque ou l’a­rabe. « Tl est néces­saire aux pro­fes­seurs d’Ecriture Sainte, et la même chose convient aux théo­lo­giens, de connaître les langues dans les­quelles les livres cano­niques ont été rédi­gés pri­mi­ti­ve­ment par les écri­vains sacrés, et il sera excellent que les étu­diants ecclé­sias­tiques acquièrent la même con­naissance, sur­tout ceux qui aspirent aux grades aca­dé­miques de théo­logie. Il fau­dra avoir soin aus­si qu’il y ait, dans toutes les Académies, des chaires de langues anciennes, sur­tout sémi­tiques. » (Encyclique Providentissimus.)

XI. — Dans les Séminaires qui jouissent de la facul­té de confé­rer les grades aca­dé­miques de théo­lo­gie, on devra aug­men­ter le nombre des leçons d’Ecriture Sainte ; il fau­dra donc trai­ter plus à fond les ques­tions géné­rales et spé­ciales, et don­ner plus de temps et de tra­vail à l’ar­chéo­lo­gie de la Bible, à sa géo­gra­phie, à sa chro­no­lo­gie, à sa théo­lo­gie et aus­si à l’his­toire de l’exégèse.

XII. — Conformément aux lois édic­tées par la Commission biblique, il fau­dra veiller à ce que des étu­diants choi­sisse pré­parent aux grades aca­dé­miques d’Ecriture Sainte, ce qui d’ailleurs faci­li­te­ra beau­coup le recru­te­ment des pro­fes­seurs d’Ecriture Sainte dans les Séminaires.

XIII. — Le pro­fes­seur d’Ecriture Sainte consi­dé­re­ra comme nu devoir sacré de ne jamais s’é­car­ter en rien de la doc­trine com­mune et de la tra­di­tion de l’Eglise : il s’as­si­mi­le­ra tous les pro­grès véri­tables de cette science et toutes les décou­vertes des modernes, mais il lais­se­ra de côté les com­men­taires témé­raires des nova­teurs ; il s’ar­rê­te­ra à trai­ter seule­ment les ques­tions dont l’é­tude aide à l’in­tel­li­gence et à la défense des Ecritures ; enfin il sui­vra dans son ensei­gne­ment les règles pleines de pru­dence, qui sont conte­nues dans l’Encyclique Providentis­si­mus.

XIV. — Il y aura lieu pour les élèves de sup­pléer par­leur tra­vail per­son­nel aux lacunes qui pour­raient se pro­duire à cet égard dans les cours aux­quels ils assistent. L’exiguïté du temps ne per­met­tant pas au maître d’ex­pli­quer en détail toute l’Ecriture, ils conti­nue­ront en leur par­ti­cu­lier la lec­ture atten­tive de l’Ancien et du Nouveau Testament, en y consa­crant chaque jour un moment déter­mi­né ; il serait excellent d’y joindre la lec­ture d’un com­men­taire des­ti­né à éclai­rer les pas­sages plus obs­curs, à expli­quer les plus difficiles.

XV. — Avant de pou­voir mon­ter d’une classe à une autre, et avant d’être appe­lés aux Ordres sacrés, les élèves seront exa­mi­nés sur l’Ecri­ture Sainte comme sur les autres branches de ren­sei­gne­ment théolo­gique afin que l’on constate ain­si le pro­fit qu’ils auront tiré des expli­ca­tions du cours.

XVI. — Dans toutes les Académies, les can­di­dats aux grades acadé­miques de théo­lo­gie devront répondre à cer­taines ques­tions d’Ecriture Sainte sur l’intro­duc­tion his­to­rique et cri­tique de la Bible et sur l’exé­gèse : et ils mon­tre­ront par une épreuve qu’ils inter­prètent assez faci­le­ment les Livres Saints et qu’ils connaissent l’hé­breu et le grec biblique.

XVII. — On exhor­te­ra les étu­diants eu Lettres sacrées à lire, outre les inter­prètes, les bons auteurs qui traitent des sujets en rap­port avec leurs cours, comme l’his­toire des deux Testaments, la vie de Noire-​Sei­gneur, celle des apôtres, les voyages, les pèle­ri­nages en Palestine ; ils acquer­ront ain­si faci­le­ment la connais­sance des lieux et des mœurs bibliques.

XVIII. — Dans ce but, chaque Séminaire aura soin d’é­ta­blir, selon ses res­sources, une petite biblio­thèque, où des ouvrages de ce genre seront sous la main des élèves.

Tels sont Nos ordres et Notre volon­té, non­obs­tant toutes dispo­sitions contraires.

Donné à Rome, près Saint-​Pierre, sous i anneau du pécheur, le 87 mars de Tannée 1906, de Notre pon­ti­fi­cat la troisième.

A. card. MACCHI.

11 avril 1909
Béatification des trente-quatre martyrs de Chine, d’Annam et du Tonkin, François de Capillas, E.-Th. Cuénot, J.-P. Néel, P.-Fr. Néron, J.-Th. Vénard et leurs compagnons.
  • Saint Pie X