Salut et bénédiction apostolique.
Dessein coupable des Sociétés bibliques
Entre les manœuvres principales qu’emploient de nos jours les non catholiques de dénominations diverses, pour chercher à surprendre les serviteurs de la vérité catholique et à détourner leurs esprits de la sainteté de la foi, les sociétés bibliques ne tiennent pas le dernier rang. Instituées d’abord en Angleterre, et de là répandues au loin, nous les voyons former comme un corps d’armée et s’entendre pour publier à un nombre infini d’exemplaires les livres des divines Ecritures traduits dans toutes les langues vulgaires, pour les disséminer au hasard, soit parmi les chrétiens, soit parmi les infidèles, pour engager chacun à les lire sans aucune direction. Aujourd’hui donc, comme saint Jérôme le déplorait déjà de son temps, on accorde « au babil de la bonne femme, au radotage du vieillard décrépit, à la verbosité du sophiste, à tous » [1] enfin, de quelque condition qu’ils soient et pourvu qu’ils sachent lire, la faculté d’interpréter les Ecritures sans aucun guide ; bien plus, ce qui est le comble de l’absurdité et presque absolument inouï, on ne refuse pas cette intelligence aux peuplades même infidèles.
Tous ne sont pas capables d’entendre l’Ecriture par eux-mêmes
Vous ne pouvez ignorer, vénérables Frères, où tendent les efforts des sociétés bibliques. Vous n’avez pas oublié cet avis du prince des apôtres, consigné dans les saints livres : après avoir loué les épîtres de saint Paul, il dit « qu’elles contiennent quelques endroits difficiles à entendre, que des hommes ignorants et sans consistance détournent en de mauvais sens, aussi bien que les autres Ecritures, pour leur propre ruine. » Et il ajoute, incontinent : « Vous donc, mes frères, qui en êtes instruits d’avance, prenez garde ; n’allez pas, emportés par les égarements de ces insensés, déchoir de votre fidélité. » (II P., III, 16, 17) Aussi est-il bien établi pour vous que, dès les premiers âges du christianisme, le propre des hérétiques fut de répudier la parole de Dieu transmise par la tradition, et de rejeter l’autorité de l’Eglise catholique, pour lacérer de leur main les Ecritures, ou en corrompre le sens par leur interprétation. Vous n’ignorez pas non plus quelle sollicitude, quelle sagesse est nécessaire pour transporter fidèlement dans une autre langue les paroles du Seigneur. Qu’y a‑t-il donc de surprenant si, dans ces versions multipliées par les sociétés bibliques, l’imprudence ou la mauvaise foi de tant d’interprètes insère les erreurs les plus graves, que la multitude et la diversité des traductions tiennent longtemps cachées pour la ruine de plusieurs ? Mais qu’importe à ces sociétés que les lecteurs de leurs traductions tombent dans une erreur ou dans une autre, pourvu qu’ils s’accoutument insensiblement à juger librement et par eux-mêmes du sens des Ecritures, à mépriser les traditions des Pères conservées dans l’Eglise catholique, à répudier même l’autorité enseignante de l’Eglise ?
Combien l’Eglise romaine prend à tâche de faire connaître l’Ecriture au peuple
Aussi les membres de ces sociétés ne cessent de poursuivre de leurs calomnies l’Eglise et le Saint-Siège ; ils l’accusent de chercher, depuis plusieurs siècles, à éloigner le peuple fidèle de la connaissance des Ecritures sacrées. Et cependant, combien de preuves éclatantes du zèle remarquable que, dans ces derniers temps mêmes, les souverains pontifes et, sous leur conduite, les autres évêques catholiques ont mis à procurer au peuple une connaissance plus approfondie de la parole de Dieu soit écrite soit transmise par la tradition ! A cela se rapportent en premier lieu les décrets du concile de Trente ; il y est d’abord enjoint aux évêques de veiller à ce que les Ecritures sacrées et la loi divine soient plus fréquemment expliquées dans leurs diocèses ; de plus, enchérissant sur une institution due au concile de Latran, il y fut réglé, que, dans chaque église cathédrale ou collégiale des grandes cités et des principales villes, il y eût une prébende théologale, et qu’elle fût conférée exclusivement à des personnes capables d’exposer et d’interpréter la sainte Ecriture. Ce qui concerne l’érection de cette prébende théologale, conformément aux décisions du concile de Trente, et les explications publiques à donner aux clercs et au peuple par le théologal, fut traité ensuite dans plusieurs synodes provinciaux et dans le concile romain de l’année 1725, où avaient été convoqués par le pape Benoît XIII, notre prédécesseur d’heureuse mémoire, non seulement les évoques de la province, mais aussi plusieurs des archevêques, évêques et autres ordinaires des lieux qui relevaient immédiatement du Saint-Siège. Dans ce but encore, le même souverain pontife établit plusieurs statuts dans des lettres apostoliques adressées expressément à l’Italie et aux îles adjacentes. Et vous, nos vénérables Frères, qui aux temps voulus, avez coutume d’informer le Saint-Siège de l’état de chacun de vos diocèses, vous connaissez les réponses données par notre Congrégation du concile à vos prédécesseurs et réitérées souvent à vous-mêmes ; et vous savez combien le Saint-Siège s’empresse de féliciter les évêques lorsqu’ils ont des théologiens prébendés qui accomplissent dignement leur devoir et expliquent en public les saintes Lettres ; comment il ne cesse d’exciter, d’animer leur sollicitude pastorale, lorsque sous ce rapport il ne trouve pas encore tout ce qu’il désire.
Précautions à prendre pour les versions de la Bible en langue vulgaire
Quant à ce qui regarde les traductions de la Bible, déjà depuis plusieurs siècles les évêques ont dû, de temps en temps et en plusieurs endroits, redoubler de vigilance, en les voyant lues dans des conventicules secrets, et répandues avec profusion par les hérétiques. C’est à cela qu’ont trait les avertissements et les décrets de notre prédécesseur de glorieuse mémoire, Innocent III, relatifs à certaines réunions secrètes d’hommes et de femmes, tenues dans le diocèse de Metz, sous le prétexte de vaquer à la piété et à la lecture des livres saints. Nous voyons aussi des traductions de Bibles condamnées en France bientôt après et en Espagne avant le XVIe siècle. Mais il fallait user d’une vigilance nouvelle avec les hérésies de Luther et de Calvin. Assez audacieux pour vouloir ébranler la doctrine immuable de la foi par la diversité presque incroyable des erreurs, leurs disciples mirent tout en œuvre pour tromper les âmes des fidèles par de fautives explications des saints livres et de nouvelles traductions, merveilleusement aidés, dans la rapidité et l’étendue de leur débit, par l’art naissant de l’imprimerie. Aussi, dans les règles que rédigèrent les Pères choisis par le concile de Trente, qu’approuva notre prédécesseur Pie IV, d’heureuse mémoire, et qui furent inscrites en tête de l’index des livres défendus, il est expressément statué de ne permettre la lecture d’une traduction de la Bible qu’à ceux qu’on juge devoir y puiser l’accroissement de la piété et de la foi. Cette règle dut être restreinte encore à raison de l’astuce persévérante des hérétiques, et Benoît XIV déclara, avec toute son autorité, qu’on pouvait regarder comme permise la lecture des traductions « approuvées par le Siège Apostolique, ou publiées avec des annotations tirées soit des Pères de l’Eglise, soit d’interprètes savants et catholiques. »
Condamnation des Sociétés bibliques
Cependant il se rencontra des adeptes de la secte janséniste qui, empruntant la logique des luthériens et des calvinistes, ne rougirent pas de reprocher à l’Eglise et au Saint-Siège cette sage conduite. A leur dire, la lecture de la Bible était utile et nécessaire à chaque fidèle en tout temps et partout ; aucune autorité n’avait donc le droit de l’interdire. Cette audace des jansénistes fut condamnée avec plus de rigueur dans deux décisions solennelles que portèrent contre leurs doctrines, aux applaudissements de tout l’univers catholique, deux souverains pontifes, d’honorable mémoire, Clément XI, par sa constitution Unigenitus de 1713, Pie VI, par la constitution Auctorem fidei de 1794.
Ainsi, les sociétés bibliques n’étaient pas encore établies, et déjà les décrets mentionnés avaient prémuni les fidèles contre l’astuce des hérétiques, voilée sous le zèle spécieux de propager la connaissance des Ecritures. Pie VII, notre prédécesseur de glorieuse mémoire, vit ces sociétés naître et prendre de grands développements ; il ne cessa de résister à leurs efforts par ses nonces apostoliques, par des lettres, des décrets rendus dans diverses congrégations des cardinaux, par deux lettres pontificales adressées aux archevêques de Gnesne et de Mohiloff. Quant à Léon XII, notre prédécesseur d’heureuse mémoire, il signala les manœuvres des sociétés bibliques dans sa lettre encyclique du 5 mai 1824, adressée à tous les évêques de l’univers catholique C’est ce que fit aussi Pie VIII dans l’Encyclique du 24 mai 1829. Nous enfin, qui avons succédé à sa charge, si indigne que nous en soyons, nous n’avons pas oublié d’appliquer au même dessein notre sollicitude pastorale, et nous avons tenu, entre autres choses, à rappeler aux fidèles les règles déjà établies relativement aux traductions de la Bible.
Résultats heureux de cette condamnation
Vous devons ici vous féliciter vivement, vénérables Frères, de ce qu’excités par votre piété et votre sagesse, soutenus par les lettres de nos prédécesseurs, vous n’avez pas négligé d’avertir au besoin le troupeau fidèle, pour le prémunir contre les pièges tendus par les sociétés bibliques. Ce zèle des évêques, uni à la sollicitude du Saint-Siège, a été béni du Seigneur ; avertis du mal, plusieurs catholiques imprévoyants qui favorisaient les sociétés bibliques, se sont retirés, et le peuple a été presque entièrement préservé de la contagion qui le menaçait.
Cependant les sectaires biblistes se promettaient une grande gloire ; ils comptaient amener jusqu’à un certain point les infidèles à la profession du christianisme, par la lecture des Livres sacrés publiés dans les langues vulgaires de ces peuples, et répandus à un nombre infini d’exemplaires par les missionnaires ou colporteurs qu’ils envoient dans ces régions pour les distribuer à qui veut les recevoir et même pour les faire recevoir bon gré mal gré à qui n’en veut pas. Mais à ces hommes qui cherchent à propager le nom chrétien, en se plaçant en dehors des règles instituées par le Christ lui-même, rien ou presque rien n’a réussi selon leurs espérances : ils ont pu seulement créer quelquefois de nouveaux obstacles à ces prêtres catholiques, qui, après avoir reçu leur mission du Saint-Siège, vont vers ces mêmes peuples, et n’épargnent aucun labeur afin d’engendrer de nouveaux fils à l’Eglise par la parole de Dieu et par l’administration des sacrements, prêts à répandre leur sang dans les plus cruels supplices pour le salut des âmes et en témoignage de la foi.
L’alliance chrétienne : liberté religieuse et indifférentisme
Or, parmi ces sectaires, ainsi frustrés dans leur attente et réfléchissant dans leur esprit chagrin aux sommes immenses dépensées à éditer leurs Bibles et à les répandre sans aucun résultat, il s’en est trouvé naguère qui ont ourdi leurs trames sur un nouveau plan, se proposant pour but d’atteindre, comme par une première attaque, les âmes des habitants de l’Italie et des citoyens de notre propre Ville. Il nous est prouvé par des messages et des documents reçus il y a peu de temps, que des hommes de sectes diverses se sont réunis l’an dernier à New-York en Amérique, et la veille des ides de juin, ont formé une nouvelle association dite de l’Alliance chrétienne, destinée à recevoir dans son sein des membres de tout pays et de toute nation, et à se fortifier par l’adjonction ou l’affiliation d’autres sociétés établies pour lui venir en aide, dans le but commun d’inoculer aux Romains et aux autres peuples de l’Italie, sous le nom de liberté religieuse, l’amour insensé de l’indifférence en matière de religion. Car ils avouent que depuis un grand nombre de siècles les institutions de la nation romaine et italienne sont d’un si grand poids, que rien de grand ne s’est produit dans le monde qui n’ait eu son principe dans cette Ville mère ; ce qu’ils n’attribuent pas à l’établissement en ces lieux, par la disposition du Seigneur, du siège suprême de Pierre, mais à certains restes de l’antique domination des Romains, que l’on voit encore, disent-ils, dans la puissance que nos prédécesseurs ont usurpée. Résolus donc de gratifier tous les peuples de la liberté de conscience ou plutôt de la liberté de l’erreur, d’où coule, comme de sa source, et pour l’accroissement de ce qu’ils appellent la prospérité publique, la liberté politique, ils croient ne rien pouvoir si, d’abord, ils n’avancent leur œuvre auprès des citoyens Italiens et Romains, dont l’autorité et l’action sur les autres peuples leur serait ensuite un secours tout puissant. Ce qui leur fait espérer d’atteindre aisément ce premier résultat, c’est qu’un si grand nombre d’Italiens séjournent dans les diverses parties de la terre, d’où un grand nombre reviennent à la patrie : beaucoup d’entre eux étant déjà ou spontanément enflammés du goût des choses nouvelles, ou corrompus dans leurs mœurs, ou en proie à la misère, on les détermine presque sans peine à s’enrôler dans l’Association nouvelle ou du moins à lui vendre leur concours à prix d’argent. Ainsi donc, après avoir recueilli ces hommes de toutes parts, ils emploient tous les moyens pour faire porter jusque dans Rome leurs Bibles en langue vulgaire et corrompues, et pour les faire distribuer clandestinement aux fidèles ; pour faire distribuer en même temps et afin d’aliéner l’esprit des lecteurs de l’obéissance due à l’Eglise et à ce Saint-Siège, les livres et les libelles les plus détestables, composés par ces Italiens, ou traduits par eux d’autres auteurs ; parmi eux ils recommandent particulièrement l’histoire de la Réforme, de Merle d’Aubigné, et les Mémoires sur la Réforme en Italie, de Jean Cric. Du reste, on peut se faire une idée de ce que peuvent être tous ces écrits, d’après ce statut qu’on attribue à l’association ; il y est dit qu’on ne peut jamais admettre dans certaines réunions particulières pour le choix des livres, deux membres appartenant à la même secte religieuse.
Condamnation de l’alliance chrétienne
Aussitôt que ces choses nous ont été rapportées, nous n’avons pu que nous affliger profondément en considérant le péril préparé par les sectaires à notre sainte Religion, non seulement dans les lieux éloignés de Rome, mais jusqu’au centre même de l’unité catholique. On ne doit pas craindre sans doute de voir jamais tomber le siège de Pierre sur lequel a été posé par le Christ Notre-Seigneur, l’inexpugnable fondement de son Eglise ; il ne nous est pas permis cependant de négliger la défense de son autorité, et l’office même du suprême apostolat nous rappelle que le Prince divin des Pasteurs nous demandera un compte rigoureux de l’ivraie qui croît dans le champ du Seigneur, si l’homme ennemi a pu en répandre la semence pendant notre sommeil, et du sang des brebis confiées à notre garde, si c’est par notre faute qu’elles ont péri.
Aussi, après avoir consulté plusieurs cardinaux de la sainte Eglise, après avoir gravement et mûrement pesé toute l’affaire, de leur avis, nous avons résolu de vous adresser à tous cette lettre, vénérables Frères. Nous y condamnons de nouveau, en vertu de l’autorité apostolique, toutes les susdites sociétés bibliques déjà réprouvées par nos prédécesseurs ; et de même, par le jugement de notre suprême apostolat, nous réprouvons nominativement et nous condamnons l’association nouvelle ci-dessus désignée, de l’Alliance chrétienne, constituée l’an dernier à New-York, ainsi que toutes les sociétés de même genre qui déjà se seraient unies ou qui s’uniraient dans la suite à cette association. Que tous le sachent donc : ce serait, devant Dieu et devant l’Eglise, se rendre coupable d’un crime très grave que de s’affilier ou prêter aide à quelqu’une desdites sociétés ou de les favoriser d’une manière quelconque. Nous confirmons en outre et nous renouvelons par notre autorité apostolique les prescriptions rappelées plus haut et déjà depuis longtemps promulguées sur la publication, la propagation, la lecture et la conservation des livres de l’Ecriture sacrée traduits en langues vulgaires ; quant aux autres ouvrages, quels qu’en scient les auteurs, tous doivent savoir qu’il faut s’en tenir aux règles générales et aux décrets de nos prédécesseurs placés en tête de l’index des livres prohibés ; et qu’on doit se garder non seulement des livres nominativement indiqués dans ce même Index, mais encore de tous ceux dont il est question d’une manière générale dans lesdites prescriptions.
Règles relatives aux traductions de la Bible en langue vulgaire et aux livres prohibés
Pour vous, vénérables Frères, appelés à partager notre sollicitude, nous vous recommandons vivement, dans le Seigneur, d’annoncer et d’expliquer, selon les lieux et les temps, aux peuples confiés à votre charge pastorale, ce jugement apostolique et nos présents commandements ; faites aussi tous vos efforts pour éloigner les brebis fidèles de la susdite association de l’Alliance chrétienne, et de toutes celles qui lui viennent en aide, ainsi que des autres sociétés bibliques, et de tout rapport avec les unes et les autres. Vous devrez encore, d’après cela, ôter des mains des fidèles soit les Bibles traduites en langue vulgaire, publiées contrairement aux sanctions ci-dessus rappelées des Pontifes romains, et de plus, veiller à ce que, par vos avertissements et par votre autorité, les chrétiens apprennent quels pâturages ils doivent regarder comme salutaires, lesquels, comme nuisibles et mortels.
Enseignement de l’Ecriture
Cependant, appliquez-vous chaque jour davantage, vénérables Frères, à la prédication de la parole de Dieu, soit par vous-mêmes, soit par les curés ayant charge d’âmes dans chaque diocèse et par les autres ecclésiastiques propres à cette fonction : veillez plus particulièrement sur ceux-là surtout qui sont chargés d’expliquer publiquement l’Ecriture sacrée ; qu’ils aient soin, en s’acquittant de leur office, de se mettre à la portée de leurs auditeurs, et qu’aucun d’eux ne se permette, sous quelque prétexte que ce soit, d’expliquer et d’interpréter les divines Lettres d’une manière contraire à la tradition des Pères ou en dehors du sens de l’Eglise catholique. Enfin, comme le propre d’un bon pasteur est non seulement de protéger et de nourrir les brebis qui restent près de lui, mais encore de courir à la recherche de celles qui se sont écartées au loin et de les ramener au bercail, ainsi votre devoir et le nôtre sera d’employer toutes les forces de l’amour pastoral pour faire reconnaître, par la grâce de Dieu, la gravité de leur péché à tous ceux qu’auraient pu séduire les sectaires ci-dessus désignés et les propagateurs de mauvais livres, et pour les amener à expier leurs fautes par le remède d’une salutaire pénitence. Votre sollicitude pastorale ne doit pas même négliger les séducteurs de ses malheureux ni les maîtres eux-mêmes de l’iniquité ; quoique leur iniquité soit plus grande, nous ne devons pas nous abstenir de procurer avec ardeur leur salut par toutes les voies et tous les moyens en notre pouvoir.
Déjouer les efforts tentés auprès des Italiens
Au reste, vénérables Frères, nous demandons une vigilance particulièrement active contre les embûches et les tentatives des membres de l’Alliance chrétienne, à ceux de votre ordre qui régissent les Eglises situées en Italie ou dans les lieux que les Italiens fréquentent davantage, mais surtout dans les pays limitrophes et partout où se trouvent des marchés et des ports d’où le passage en Italie est plus fréquent. Les sectaires s’efforçant d’exécuter leurs desseins dans ces lieux-là mêmes, c’est surtout aux évêques de ces lieux de travailler ardemment et constamment avec nous à déjouer leurs manœuvres, avec le secours de Dieu.
Les princes doivent leur appui
Vos efforts et les nôtres auront nous n’en doutons pas, l’appui des puissances civiles, et particulièrement des très hauts et très puissants princes de l’Italie, soit à cause de leur zèle pour la conservation de la religion catholique, soit parce que leur sagesse n’ignore pas qu’il importe beaucoup au bien public de faire échouer les projets des sectaires. Il est constant, en effet, et l’expérience des temps passés ne le prouve que trop, que l’indifférence en matière de religion, propagée par les sectaires sous le nom de liberté religieuse, est la voie la plus sûre pour retirer les peuples de la fidélité et de l’obéissance qu’ils doivent aux princes. Et les nouveaux associés de l’Alliance chrétienne ne s’en cachent pas. Ils protestent n’avoir aucun dessein d’exciter des séditions civiles ; mais en attribuant à chacun indistinctement l’interprétation de la Bible et en propageant parmi les Italiens ce qu’ils appellent l’entière liberté de conscience, ils se vantent de donner par là même la liberté politique à l’Italie.
Prière
Mais avant tout et par-dessus tout, levons tous ensemble nos mains vers Dieu, vénérables Frères : recommandons-lui notre cause, la cause de tout son troupeau et de son Eglise, par les prières les plus humbles et les plus ferventes ; invoquons aussi la très pieuse intercession de Pierre, le Prince des Apôtres, de tous les autres Saints, et surtout de la bienheureuse Vierge Marie, à qui il a été donné d’exterminer toutes les hérésies dans tout l’univers.
Enfin, et comme gage de notre ardente charité, nous vous donnons avec amour et avec effusion de cœur notre bénédiction apostolique, à vous tous, vénérables Frères, à tous les clercs ainsi qu’à tous les fidèles laïques confiés à vos soins.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le lendemain des nones de mai 1844. de notre Pontificat l’an 14e.
GRÉGOIRE XVI, PAPE.
Source : Lettres apostoliques de Pie IX, Grégoire XVI, Pie VII, Edition « Les bon livres »
- Epist. ad Paulinum § 7,quae est epistola LIII, tom. I.Op. S. Hieron. edit. Vallarsii[↩]