Pie XII

260ᵉ pape ; de 1939 à 1958

30 septembre 1943

Lettre encyclique Divino Afflante Spiritu

Sur l'écriture sainte et les études bibliques

Table des matières

Donné à Rome, près Saint-​Pierre, le 30 sep­tembre, en la fête de saint Jérôme, le plus grand des Docteurs dans l’ex­po­si­tion des Saintes Écritures, l’an­née 1943

A nos Vénérables Frères les Patriarches, Primats, Archevêques, evêques et autres Ordinaires en paix et com­mu­nion avec le Siège apos­to­lique, ain­si qu’à tout le cler­gé et aux fidèles de l’univers catholique

Vénérables Frères,

Salut et Bénédiction apostolique !

Introduction – Occasion de l’encyclique « Providentissimus Deus » Manière d’en célébrer le cinquantenaire

Sous l’inspiration de l’Esprit-Saint, les écri­vains sacrés ont com­po­sé les livres que Dieu, dans sa pater­nelle bon­té, a vou­lu don­ner au genre humain « pour ensei­gner, convaincre, cor­ri­ger, for­mer à la jus­tice, en vue de rendre l’homme de Dieu par­fait, apte à toute bonne œuvre » (II Tim., iii, 16 ss.). Ce tré­sor qui lui est venu du ciel, l’Eglise le tient comme la source la plus pré­cieuse et une règle divine de la doc­trine de la foi et des mœurs. Il n’est donc pas éton­nant qu’elle l’ait gar­dé avec le plus grand soin, tel qu’elle l’a reçu intact des mains des apôtres ; qu’elle l’ait défen­du contre toute inter­pré­ta­tion fausse et per­verse ; qu’elle l’ait employé avec zèle dans sa tâche de pro­cu­rer aux âmes le salut éter­nel, comme d’innombrables docu­ments de toute époque l’attestent clairement.

Mais parce que, dans les temps modernes, la divine ori­gine des Saintes Ecritures et leur inter­pré­ta­tion cor­recte ont été particulière­ment mises en ques­tion, l’Eglise s’est appli­quée à les défendre et à les pro­té­ger avec encore plus d’ardeur et de soin. Aussi, le saint Concile de Trente, dans un décret solen­nel, a‑t-​il déjà décla­ré, au sujet de la Bible, qu’on devait en recon­naître « comme sacrés et cano­niques les livres entiers, avec toutes leurs par­ties, tels qu’on a cou­tume de les lire dans l’Eglise catho­lique et tels qu’ils sont conte­nus dans l’ancienne édi­tion de la Vulgate latine » [1].

Puis, de notre temps, le Concile du Vatican, vou­lant réprou­ver de fausses doc­trines sur l’inspiration, a décla­ré que l’Eglise tient les Livres Saints pour sacrés et cano­niques, « non parce que, œuvre de la seule indus­trie humaine, ils auraient été approu­vés ensuite par son auto­ri­té ni pour cette seule rai­son qu’ils contien­draient la véri­té sans erreur, mais parce que, écrits sous l’inspiration du Saint-​Esprit, ils ont Dieu pour auteur et ont été trans­mis comme tels à l’Eglise » [2].

Plus récem­ment cepen­dant, en dépit de cette solen­nelle défi­ni­tion de la doc­trine catho­lique, qui reven­dique pour ces « livres entiers, avec toutes leurs par­ties », une auto­ri­té divine les pré­ser­vant de toute erreur, quelques écri­vains catho­liques n’ont pas craint de res­treindre la véri­té de l’Ecriture Sainte aux seules matières de la foi et des mœurs, regar­dant le reste, du domaine de la phy­sique ou de l’histoire, comme « choses dites en pas­sant » et n’ayant – ain­si qu’ils le pré­ten­dirent – aucune connexion avec la foi. Mais Notre pré­dé­ces­seur Léon XIII, d’immortelle mémoire, dans son ency­clique Providentissimus Deus, du 18 novembre 1893, a confon­du à bon droit ces erreurs et réglé l’étude des Livres divins par des instruc­tions et des direc­tives très sages.

Puisqu’il convient de célé­brer le 50e anni­ver­saire de la publi­cation de cette ency­clique, consi­dé­rée comme la loi fon­da­men­tale des études bibliques, après avoir affir­mé, dès le com­men­ce­ment de Notre pon­ti­fi­cat, Notre inté­rêt pour les sciences sacrées [3], Nous avons jugé très oppor­tun, d’une part, de rap­pe­ler et de confir­mer ce que Notre pré­dé­ces­seur a éta­bli dans sa sagesse et ce que ses suc­ces­seurs ont ajou­té pour affer­mir et par­faire son œuvre ; d’autre part, d’in­diquer ce que les temps pré­sents semblent pos­tu­ler, afin de sti­mu­ler de plus en plus à une entre­prise aus­si néces­saire et aus­si louable tous les fils de l’Eglise qui s’adonnent à ces études.

I. Partie Historique
Sollicitude de Léon XIII et de ses successeurs pour les études bibliques

I. – Œuvre de Léon XIII

Doctrine de l’inerrance biblique

Le pre­mier et prin­ci­pal soin de Léon XIII fut d’exposer la doc­trine concer­nant la véri­té des Livres Saints et de la ven­ger des atta­ques lan­cées contre elle. Il pro­cla­ma donc avec insis­tance qu’il n’y a abso­lu­ment aucune erreur quand l’hagiographe, trai­tant des choses de la nature, « a sui­vi ce qui appa­raît aux sens », comme dit le Docteur angé­lique [4], par­lant « ou par une sorte de méta­phore ou comme le com­por­tait le lan­gage usi­té à cette époque ; il en est encore ain­si aujourd’hui, sur beau­coup de points, dans la vie quoti­dienne, même par­mi les hommes les plus savants ». En effet, « les écri­vains sacrés ou, plus véri­ta­ble­ment – ce sont les paroles mêmes de saint Augustin [5] – l’Esprit de Dieu qui par­lait par leur bouche n’a pas vou­lu ensei­gner aux hommes les véri­tés concer­nant la cons­titution intime des objets visibles, parce qu’elles ne devaient leur ser­vir de rien pour leur salut » [6] ; prin­cipe qu’il « sera per­mis d’appli­quer aux sciences du même genre et notam­ment à l’histoire » en réfu­tant « de la même manière les objec­tions fal­la­cieuses des adver­saires » et en défen­dant « la véri­té his­to­rique de l’Ecriture Sainte contre leurs attaques ». [7]

Il ne faut pas, en outre, impu­ter une erreur à l’auteur sacré « là où des copistes, en exé­cu­tant leur tra­vail, ont lais­sé échap­per quelque inexac­ti­tude » ou « lorsque le sens véri­table de quelque pas­sage demeure dou­teux ». Enfin, il serait abso­lu­ment funeste « soit de limi­ter l’inspiration à quelques par­ties seule­ment de la Sainte Ecriture, soit d’accorder que l’écrivain sacré lui-​même s’est trom­pé », puisque l’inspiration divine, « non seule­ment par elle-​même exclut toute erreur, mais encore l’exclut et y répugne aus­si néces­sairement que néces­sai­re­ment Dieu, sou­ve­raine véri­té, ne peut être l’auteur d’aucune erreur. Telle est la foi antique et constante de l’Eglise » [8].

Cette doc­trine, que Notre pré­dé­ces­seur Léon XIII a expo­sée avec tant de force, Nous la pro­po­sons aus­si avec Notre auto­ri­té et Nous insis­tons pour qu’elle soit reli­gieu­se­ment tenue par tous. Nous sta­tuons aus­si qu’on doit se confor­mer, aujourd’hui encore, avec la même appli­ca­tion, aux conseils et aux encou­ra­ge­ments qu’il a don­nés, pour son temps, avec une si grande sagesse. En effet, comme de nou­velles et graves dif­fi­cul­tés et pro­blèmes avaient sur­gi, soit en rai­son des pré­ju­gés du ratio­na­lisme qui s’était insi­nué par­tout, soit sur­tout à la suite des fouilles et des explo­ra­tions de monu­ments très anciens, effec­tuées en maintes régions de l’Orient, afin de rendre plus sûre­ment et plus abon­dam­ment acces­sible, pour l’utilité du trou­peau du Seigneur, cette source insigne de la Révélation catho­lique, et aus­si afin de ne pas la lais­ser pro­fa­ner en aucun point, Notre pré­dé­ces­seur, pous­sé par la sol­li­ci­tude de la charge apos­to­lique, sou­hai­ta et vou­lut « que plu­sieurs entre­prennent, comme il convient, la défense des Saintes Lettres et s’y attachent avec cons­tance, et que, sur­tout, ceux qui ont été appe­lés par la grâce de Dieu dans les ordres sacrés mettent de jour en jour un plus grand soin et un plus grand zèle à lire, à médi­ter et à expli­quer les Ecritures, rien n’étant plus conforme à leur état » [9].

Impulsion donnée aux études bibliques :
Ecole biblique de Jérusalem – Commission biblique

C’est pour­quoi le même Pontife loua et approu­va l’Ecole pour les études bibliques, fon­dée à Jérusalem, au couvent de Saint-​Etienne, par les soins du Maître géné­ral du saint ordre des Frères Prêcheurs ; école grâce à laquelle, disait-​il, « la science biblique a reçu des avan­tages sérieux et dont elle en attend de plus grands encore » [10].

Puis dans la der­nière année de sa vie, il trou­va un nou­veau moyen pour rendre chaque jour plus par­faites ces études tant recom­man­dées par son ency­clique Providentissimus Deus et pour les faire pro­gres­ser le plus sûre­ment pos­sible. En effet, par la lettre apos­to­lique Vigilantiae du 30 octobre 1902, il ins­ti­tua un conseil ou Commission com­posé d’hommes com­pé­tents, « dont la fonc­tion devait être de diri­ger tous leurs soins et tous leurs efforts, afin que les divines Ecritures trouvent par­tout, chez nos exé­gètes, cette inter­pré­ta­tion plus cri­tique que notre temps réclame et qu’elles soient pré­ser­vées non seule­ment de tout souffle d’erreur, mais encore de toute témé­ri­té d’opi­nions » [11]. Cette com­mis­sion, Nous l’avons, Nous aus­si, confir­mée et ren­for­cée, sui­vant l’exemple de Nos pré­dé­ces­seurs, usant de son minis­tère comme il avait été fait plu­sieurs fois aupa­ra­vant, pour rap­pe­ler aux inter­prètes des Livres Saints les saintes lois de l’exé­gèse catho­lique, que les saints Pères, les Docteurs de l’Eglise et les Souverains Pontifes eux-​mêmes ont trans­mises [12].

II. – Œuvre des successeurs de Léon XIII

Pie X :
Grades académiques – Programme des études bibliques Institut biblique

Ici, il ne semble pas hors de pro­pos de rap­pe­ler avec reconnais­sance les contri­bu­tions de Nos pré­dé­ces­seurs au même but, du moins les plus impor­tantes et les plus utiles ; contri­bu­tions que nous appel­lerions volon­tiers les com­plé­ments ou les fruits de l’heureuse ini­tiative de Léon XIII.

Tout d’abord, Pie X, « vou­lant four­nir un moyen assu­ré de pré­pa­rer en abon­dance des maîtres recom­man­dables par la pro­fondeur et l’intégrité de leur doc­trine qui se consa­cre­raient dans les écoles catho­liques à l’interprétation des Livres Saints…, ins­ti­tua les grades aca­dé­miques de licen­cié et de doc­teur dans la science de l’Ecriture Sainte…, à confé­rer par la Commission biblique » [13]. Il por­ta ensuite une loi « sur les règles qui doivent pré­si­der à l’ensei­gnement de l’Ecriture Sainte dans les grands sémi­naires », visant à ce que les sémi­na­ristes « non seule­ment eussent une pleine notion et com­pré­hen­sion de la por­tée, de la valeur et de la doc­trine des Livres Saints, mais encore pussent, avec une science com­pé­tente et saine, se livrer au minis­tère de la parole sacrée et défendre… contre les attaques les livres écrits sous l’inspiration divine » [14]. Enfin, Pie X vou­lut « qu’il y eût dans la ville de Rome un centre de hautes études rela­tives aux Livres Saints, afin de déve­lop­per le plus effi­cacement pos­sible, selon l’esprit de l’Eglise catho­lique, la science biblique et toutes les études annexes ». Il fon­da donc l’Institut bibli­que pon­ti­fi­cal, le confia aux soins de l’illustre Compagnie de Jésus ; il sta­tua qu’il serait « pour­vu de cours supé­rieurs et de toutes les res­sources de l’érudition biblique » et lui don­na lui-​même des lois et un règle­ment, affir­mant qu’il vou­lait réa­li­ser en cela « le pro­jet salu­taire et fécond » de Léon XIII [15].

Pie XI :
Grades académiques rendus obligatoires
Monastère de Saint-​Jérôme pour la révision de la Vulgate

A tout cela enfin, Notre der­nier pré­dé­ces­seur, Pie XI, d’heu­reuse mémoire, don­na son cou­ron­ne­ment quand il décré­ta, entre autres choses, que nul ne serait admis « à pro­fes­ser l’enseignement des Saintes Ecritures dans les sémi­naires s’il n’avait pas obte­nu légiti­mement, après avoir sui­vi des cours spé­ciaux de science scrip­tu­raire, les grades aca­dé­miques devant la com­mis­sion ou l’Institut biblique ». A ces grades il vou­lut que fussent recon­nus les mêmes droits et les mêmes effets qu’aux grades dûment confé­rés en théo­lo­gie et en droit cano­nique ; il éta­blit en outre qu’à per­sonne ne devrait être confé­ré « un béné­fice com­por­tant cano­ni­que­ment la charge d’expliquer au peuple la Sainte Ecriture s’il ne pos­sé­dait, en plus des autres qua­lités, la licence ou le doc­to­rat en science biblique ».

Il invi­tait en même temps les supé­rieurs géné­raux des ordres reli­gieux et des congré­ga­tions reli­gieuses, ain­si que les évêques du monde catho­lique, à envoyer les plus aptes par­mi leurs sujets fré­quenter les cours de l’Institut biblique et y conqué­rir les grades aca­dé­miques. De plus, il confir­mait ses exhor­ta­tions par l’exemple en consti­tuant géné­reu­se­ment, à cette fin pré­cise, des reve­nus annuels[16].

Enfin, après que Pie X eût favo­ri­sé et approu­vé, en 1907, « la tâche confiée aux reli­gieux béné­dic­tins de pré­pa­rer, par leurs recher­ches et leurs études, les élé­ments néces­saires à une nou­velle édi­tion de la tra­duc­tion latine des Ecritures, connue sous le nom de Vul­gate »[17] vou­lant assu­rer plus de soli­di­té et de sécu­ri­té à cette « entre­prise labo­rieuse et ardue » qui exige beau­coup de temps et de grandes dépenses, et dont la très grande uti­li­té était mani­fes­tée par les excel­lents volumes déjà parus, fit bâtir depuis ses fon­de­ments le monas­tère romain de Saint-​Jérôme, des­ti­né à se consa­crer unique­ment à cette tâche et le dota lar­ge­ment d’une biblio­thèque et de tous les autres ins­tru­ments de tra­vail[18].

III. – Sollicitude des Souverains Pontifes pour l’usage et la diffusion des livres saints

Nous ne pou­vons pas non plus pas­ser sous silence le soin avec lequel Nos pré­dé­ces­seurs, quand l’occasion s’en pré­sen­tait, ont recom­man­dé soit l’étude, soit la pré­di­ca­tion des Saintes Ecritures, soit leur pieuse lec­ture et leur médi­ta­tion. Pie X, en effet, approu­va cha­leu­reu­se­ment l’Association de Saint-​Jérôme, qui s’applique à recom­man­der aux fidèles la si louable cou­tume de lire et de médi­ter les saints Evangiles et à rendre, autant que pos­sible, cette pra­tique plus facile. Il l’exhorta à per­sé­vé­rer avec ardeur dans cette entre­prise en décla­rant que « c’était là la chose la plus utile entre toutes, qui répon­dait très bien aux besoins du temps », puisque cela ne contri­bue pas peu à « dis­si­per ce pré­ju­gé selon lequel l’Eglise voit de mau­vais œil et entrave la lec­ture de l’Ecriture Sainte en tangue vul­gaire » [19].

A l’occasion du XVe cen­te­naire de la mort de saint Jérôme, le plus grand des doc­teurs dans l’interprétation des Saintes Lettres, Benoît XV, après avoir scru­pu­leu­se­ment rap­pe­lé les pré­ceptes et les exemples du saint Docteur, ain­si que les prin­cipes et les règles don­nés par Léon XIII et par lui-​même, et après d’autres recom­man­da­tions des plus oppor­tunes dans cette matière et qui ne doivent jamais être oubliées, exhor­ta « tous les enfants de l’Eglise, et prin­ci­pa­le­ment les clercs, au res­pect, en même temps qu’à la lec­ture pieuse et à la médi­ta­tion assi­due de la Sainte Ecriture » ; il les enga­gea à « cher­cher dans ces pages la nour­ri­ture qui ali­mente la vie spi­ri­tuelle et la fait avan­cer dans la voie de la per­fec­tion », rap­pe­lant que « l’Ecri­ture sert prin­ci­pa­le­ment à sanc­ti­fier et fécon­der le minis­tère de la pré­di­ca­tion ». Enfin, Benoît XV loua de nou­veau l’œuvre de l’asso­ciation éta­blie sous le nom de Saint-​Jérôme, grâce à laquelle les Evangiles et les Actes des Apôtres sont répan­dus aus­si lar­ge­ment que pos­sible, « de manière que ces livres aient désor­mais leur place dans chaque famille chré­tienne et que cha­cun prenne l’habitude de les lire et médi­ter chaque jour [20].

IV. – Fruits de cette multiple activité

Mais ce n’est pas seule­ment grâce à ces entre­prises, à ces pré­ceptes, à ces encou­ra­ge­ments de Nos pré­dé­ces­seurs, que la science des Saintes Ecritures et leur usage ont nota­ble­ment pro­gres­sé par­mi les catho­liques, c’est aus­si, il est juste et agréable de le recon­naître, grâce aux efforts et aux tra­vaux de tous ceux qui ont mis leurs soins à suivre leurs direc­tives, en médi­tant, en étu­diant, en écri­vant, comme aus­si en ensei­gnant et en prê­chant, en tra­dui­sant ou en pro­pa­geant les Livres Saints. Déjà, en effet, de très nom­breux pro­fes­seurs d’Ecriture Sainte sont sor­tis des écoles de haut ensei­gne­ment théo­lo­gique et biblique, prin­ci­pa­le­ment de Notre Institut biblique, et il en sort chaque jour qui, ani­més d’un zèle ardent pour les Livres Saints, s’emploient à péné­trer le jeune cler­gé du même zèle géné­reux et se dévouent à lui com­mu­ni­quer la doc­trine qu’ils ont reçue eux- mêmes. Nombre d’entre eux aus­si, par leurs écrits, ont fait avan­cer et font avan­cer en dif­fé­rentes manières la science biblique, soit en publiant les textes sacrés selon la méthode cri­tique, soit en les expli­quant, en les éclair­cis­sant, en les tra­dui­sant en langue vul­gaire, soit en les pro­po­sant à la pieuse lec­ture et à la médi­ta­tion des fidèles, soit enfin en culti­vant et s’assimilant les sciences pro­fanes utiles pour l’interprétation de l’Ecriture.

Ces entre­prises et d’autres ini­tia­tives encore qui, de jour en jour, se répandent plus lar­ge­ment et se déve­loppent, comme, par exemple, les socié­tés, congrès et semaines d’études bibliques, les biblio­thèques et les asso­cia­tions pour la médi­ta­tion de l’Evangile, Nous font conce­voir une ferme espé­rance que le res­pect, l’usage, la science des Saintes Lettres se déve­lop­pe­ront de plus en plus pour le bien des âmes. Il en sera ain­si, pour­vu que tous observent avec une fer­me­té, une ardeur et une confiance tou­jours plus grandes la méthode des études bibliques pres­crite par Léon XIII, déve­lop­pée .et per­fec­tion­née par ses suc­ces­seurs, confir­mée et enri­chie par Nous, seule méthode sûre et plei­ne­ment approu­vée par l’expérience, sans se lais­ser arrê­ter par les dif­fi­cul­tés qui, ain­si qu’il arrive tou­jours dans la vie humaine, ne man­que­ront jamais à une œuvre aus­si excellente.

II. Partie Doctrinale
Des études Bibliques à notre époque

État actuel des études Bibliques

Il n’y a per­sonne qui ne soit à même de remar­quer com­bien, au cours des cin­quante der­nières années, se sont modi­fiées les condi­tions des études bibliques et des dis­ci­plines auxi­liaires. Ainsi, pour ne pas par­ler du reste, au temps où Notre pré­dé­ces­seur publiait son ency­clique Providentissimus Deus, c’est à peine si l’on avait com­men­cé l’exploration de l’un ou de l’autre des sites de la Palestine en y opé­rant des fouilles inté­res­sant les ques­tions bibliques. Maintenant, les recherches de ce genre ont gran­de­ment aug­men­té en nombre et, grâce à une méthode plus sévère et à un art per­fec­tion­né par l’expérience, elles nous four­nissent des résul­tats plus nom­breux et plus cer­tains. Quelle lumière jaillit de ces recherches pour une intel­li­gence plus exacte et plus pleine des Saints Livres, tous les spé­cia­listes le savent, ain­si que tous ceux qui se livrent à ces études. L’importance de ces explo­ra­tions est encore accrue par la fré­quente décou­verte de monu­ments écrits, qui sont d’un grand secours pour la connais­sance des langues, des lit­té­ra­tures, des évé­ne­ments, des mœurs et des cultes des plus anciens peuples. La décou­verte et l’étude des papy­rus, aujourd’hui si fré­quentes, ne sont pas d’un moindre inté­rêt, car ils nous font mieux connaître la lit­té­ra­ture, ain­si que les ins­ti­tu­tions publiques et pri­vées, sur­tout à l’époque de notre Sauveur. En outre, d’anciens manus­crits des Livres Saints ont été décou­verts et publiés avec soin et saga­ci­té ; l’exégèse des Pères de l’Eglise a été étu­diée d’une façon plus appro­fon­die et plus éten­due ; enfin, la façon propre aux anciens de racon­ter et d’écrire a été illus­trée de nom­breux exemples.

Tous ces résul­tats que notre temps a acquis, non sans un secret des­sein de la Providence, invitent en quelque sorte les inter­prètes des Saintes Lettres et les engagent à user avec empres­se­ment d’une si belle lumière pour scru­ter plus à fond les paroles divines, les com­menter avec plus de pré­ci­sion, les expo­ser plus lumi­neu­se­ment. Que si, avec une suprême conso­la­tion, Nous voyons que ces mêmes exé­gètes ont déjà répon­du avec empres­se­ment à cet appel et y répondent encore, ce n’est certes ni le der­nier ni le moindre fruit de l’encyclique Providentissimus Deus, par laquelle Notre pré­dé­ces­seur Léon XIII, comme pres­sen­tant cette flo­rai­son nou­velle de la science biblique, a invi­té au tra­vail les exé­gètes catho­liques et leur a tra­cé avec sagesse la voie et la méthode à suivre dans ce tra­vail. Nous aus­si, par la pré­sente ency­clique, Nous dési­rons obte­nir non seule­ment que ce tra­vail soit conti­nué, avec per­sé­vé­rance et constance, mais qu’il devienne de jour en jour plus par­fait et plus fécond ; c’est pour­quoi Nous Nous pro­po­sons prin­ci­pa­le­ment de mon­trer à tous ce qui reste à faire et dans quel esprit l’exégète catho­lique doit s’adonner aujourd’hui à une tâche si impor­tante et si sublime, vou­lant aus­si don­ner aux ouvriers, qui tra­vaillent avec zèle dans la vigne du Sei­gneur, de nou­veaux sti­mu­lants et un nou­veau courage.

I. – Recours aux textes originaux

Etude des langues bibliques

A l’exégète catho­lique qui se dis­po­sait à com­prendre et à expli­quer les Saintes Ecritures, déjà les Pères de l’Eglise, et sur­tout saint Augustin, recom­man­daient avec force l’étude des langues anciennes et le recours aux textes ori­gi­naux [21]. Cependant, à cette époque, les condi­tions des études étaient telles que peu d’hommes connais­saient, même impar­fai­te­ment, la langue hébraïque. Au moyen âge, tan­dis que la théo­lo­gie sco­las­tique était à son apo­gée, la connais­sance de la langue grecque elle-​même était depuis long­temps si affai­blie en Occident que même les plus grands Docteurs de ce temps, pour com­menter les Livres divins, ne se ser­vaient que de la ver­sion latine, qu’on appelle la Vulgate. De nos jours, au contraire, non seule­ment la langue grecque, rap­pe­lée en quelque sorte à une vie nou­velle dès le temps de la Renaissance, est fami­lière à presque tous ceux qui cultivent l’antiquité et les lettres, mais aus­si la connais­sance de la langue hébraïque et des autres langues orien­tales est lar­ge­ment répan­due par­mi les hommes culti­vés. Il y a main­te­nant tant de moyens pour apprendre ces langues que l’interprète de la Bible qui, en les négli­geant, s’interdirait l’accès aux textes ori­gi­naux, ne pour­rait échap­per au reproche de légè­re­té et de nonchalance.

Il appar­tient, en effet, à l’exégète, de cher­cher à sai­sir religieuse­ment et avec le plus grand soin les moindres détails sor­tis de la plume de l’hagiographe sous l’inspiration de l’Esprit divin, afin d’en péné­trer plus pro­fon­dé­ment et plus plei­ne­ment la pen­sée. Qu’il tra­vaille donc avec dili­gence à s’assurer une maî­trise chaque jour plus grande des langues bibliques et des autres idiomes orien­taux, et qu’il étaye son exé­gèse avec toutes les res­sources que four­nissent les diffé­rentes branches de la phi­lo­lo­gie. C’est ce que saint Jérôme s’efforça soi­gneu­se­ment de réa­li­ser sui­vant l’état des connais­sances de son temps ; c’est à cela qu’aspirèrent avec une ardeur infa­ti­gable, et non sans un réel pro­fit, beau­coup des meilleurs exé­gètes des XVIe et XVIIe siècles, bien que la science des langues fût alors très infé­rieure à ce qu’elle est aujourd’hui. C’est en sui­vant la même métho­de qu’il importe d’expliquer le texte pri­mi­tif qui, écrit par l’auteur sacré lui-​même, a plus d’autorité et plus de poids qu’aucune ver­sion, même la meilleure, ancienne ou moderne ; ce en quoi on réus­si­ra sans doute avec plus de faci­li­té et de suc­cès si l’on joint à la connais­sance des langues une solide com­pé­tence dans la cri­tique textuelle.

Importance de la critique textuelle

Quelle impor­tance il faut attri­buer à cet art de la cri­tique du texte, saint Augustin nous l’enseigne avec per­ti­nence quand, par­mi les pré­ceptes à incul­quer à qui étu­die les Livres Saints, il met en pre­mière ligne le soin qu’il faut avoir de se pro­cu­rer un texte cor­rect. « La saga­ci­té de ceux qui dési­rent connaître les Ecritures divines doit veiller en pre­mier lieu à cor­ri­ger les manus­crits – ain­si s’exprime l’illustre Docteur de l’Eglise – afin que les manus­crits incor­rects cèdent le pas à ceux qui sont cor­rects » [22]. Cet art, qu’on appelle la cri­tique tex­tuelle, qu’on emploie avec beau­coup d’éclat et de suc­cès dans l’édition des textes pro­fanes, doit s’appliquer aujourd’hui, à plus forte rai­son en véri­té, aux Livres Saints, à cause du res­pect qui est dû à la parole divine. Le but de cet art est, en effet, de réta­blir le texte sacré, autant qu’il se peut, avec la plus grande per­fection, en le pur­geant des alté­ra­tions dues aux insuf­fi­sances des copistes et en le déli­vrant, dans la mesure du pos­sible, des gloses et des lacunes, des inver­sions de mots et des répé­ti­tions, ain­si que des fautes de tout genre qui ont cou­tume de se glis­ser dans tous les écrits trans­mis à tra­vers plu­sieurs siècles.

D’aucuns, il est vrai, ont employé la cri­tique, il y a quelques dizaines d’années, d’une façon tout arbi­traire, et sou­vent de telle sorte qu’on aurait pu dire qu’ils agis­saient ain­si afin d’introduire dans le texte sacré leurs opi­nions pré­con­çues ; mais aujourd’hui, il est à peine besoin de le remar­quer, la cri­tique pos­sède des lois si stables et si sûres qu’elle est deve­nue un ins­tru­ment de choix pour édi­ter la parole divine avec plus de pure­té et d’exactitude, tout abus pou­vant être faci­le­ment dépis­té. Il n’est pas néces­saire de rap­pe­ler ici – car c’est trop évident et trop connu de ceux qui s’adonnent à l’étude de l’Ecriture Sainte – com­bien l’Eglise, depuis les pre­miers siècles jusqu’à nos jours, a eu en hon­neur ces tra­vaux de l’art critique.

Aujourd’hui donc, après que cet art est arri­vé à une si grande per­fec­tion, c’est pour ceux qui étu­dient les ques­tions bibliques une tâche hono­rable, sinon tou­jours facile, d’employer tous les moyens pour que, le plus tôt pos­sible, les catho­liques pré­parent et publient oppor­tu­né­ment des édi­tions conformes aux­dites règles, tant des Livres Saints que des anciennes ver­sions, en unis­sant au res­pect abso­lu du texte sacré l’ob­ser­va­tion atten­tive des lois de la cri­tique. Que tous le sachent bien : ce tra­vail de longue durée n’est pas seule­ment néces­saire pour com­prendre, comme il faut, les textes écrits sous l’inspiration divine ; il est encore impé­rieu­se­ment requis par cette pié­té qui doit nous por­ter à être infi­ni­ment recon­nais­sants envers la Providence divine de ce qu’elle nous a des­ti­né ces livres comme des lettres pater­nelles envoyées du trône où siège sa majes­té à ses enfants.

Portée du décret du concile de Trente sur l’usage de la Vulgate
Traductions en langues vulgaires

Et que per­sonne ne voie dans ce recours aux textes ori­gi­naux, confor­mé­ment à la méthode cri­tique, une déro­ga­tion aux prescrip­tions si sage­ment for­mu­lées par le concile de Trente au sujet de la Vulgate[23]. Car c’est un fait appuyé sur des docu­ments cer­tains que le saint concile char­gea ses pré­si­dents de prier le Souverain Pontife en son nom – et ils le firent – de faire cor­ri­ger, autant que pos­sible, d’abord l’édition latine, ensuite les textes grec et hébreu [24], afin de les publier plus tard pour l’utilité de la Sainte Eglise de Dieu. S’il ne fut pas pos­sible de répondre alors plei­ne­ment à ce désir, à cause des dif­fi­cul­tés du moment et d’autres obs­tacles, Nous avons la confiance que, main­te­nant, il pour­ra y être don­né plus parfaite­ment et plus entiè­re­ment satis­fac­tion grâce à la col­la­bo­ra­tion entre savants catholiques.

Si le concile de Trente a vou­lu que la Vulgate fût la ver­sion latine « que tous doivent employer comme authen­tique », cela, cha­cun le sait, ne concerne que l’Eglise latine, et l’usage public qu’elle fait de l’Ecriture, mais ne dimi­nue en aucune façon – il n’y a pas le moindre doute à ce sujet – ni l’autorité ni la valeur des textes ori­gi­naux. Au sur­plus, il ne s’agissait pas alors des textes ori­ginaux, mais des ver­sions latines qui cir­cu­laient à cette époque ; ver­sions entre les­quelles le concile, à juste titre, ordon­na qu’on pré­fé­rât celle qui, « par un long usage de tant de siècles, était approu­vée dans l’Eglise ».

Cette auto­ri­té émi­nente de la Vulgate ou, comme l’on dit, son authen­ti­ci­té, n’a donc pas été décré­tée par le concile, sur­tout pour des rai­sons de cri­tique, mais bien plu­tôt à cause de son emploi légi­time dans les Eglises au cours de tant de siècles. Cet usage, en véri­té, démontre, ain­si que l’Eglise l’a com­pris et le com­prend, que cette Vulgate est abso­lu­ment exempte de toute erreur en ce qui concerne la foi et les mœurs ; si bien que, comme même l’Eglise l’atteste et le confirme, on peut la citer en toute sûre­té et sans péril d’erreur dans les dis­cus­sions, dans l’enseignement et dans la pré­di­ca­tion. Dès lors une authen­ti­ci­té de ce genre ne doit pas être qua­li­fiée en titre prin­ci­pal de cri­tique, mais bien plu­tôt de juri­dique. C’est pour­quoi l’autorité de la Vulgate en matière de doc­trine n’empêche donc nul­le­ment – aujourd’hui elle le deman­de­rait plu­tôt – que cette doc­trine soit encore jus­ti­fiée et confir­mée par les textes ori­gi­naux eux-​mêmes et que ces textes soient appe­lés cou­ram­ment à l’aide pour mieux déga­ger et expli­quer le sens exact des Saintes Lettres. Le décret du concile de Trente n’empêche même pas que, pour l’usage et le bien des fidèles, en vue de leur faci­li­ter l’intelligence de la parole divine, des ver­sions en langue vul­gaire soient com­po­sées pré­cisément d’après les textes ori­gi­naux, comme Nous savons que cela a déjà été fait d’une manière louable en plu­sieurs pays, avec l’appro­bation de l’autorité ecclésiastique.

II. – De l’interprétation des livres saints

Importance et recherche du sens littéral

Bien ver­sé dans la connais­sance des langues anciennes et pour­vu des res­sources de la cri­tique, l’exégète catho­lique peut abor­der la tâche – la plus impor­tante de toutes celles qui lui incombent – de décou­vrir et d’exposer le véri­table sens des Livres Saints. Que les exé­gètes, dans l’accomplissement de ce tra­vail, aient tou­jours devant les yeux qu’il leur faut avant tout s’appliquer à dis­cer­ner et à pré­ci­ser ce sens des mots bibliques qu’on appelle le sens lit­té­ral. Ils doivent mettre le plus grand soin à décou­vrir ce sens lit­té­ral des mots au moyen de la connais­sance des langues, en s’aidant du contexte et de la com­pa­rai­son avec les pas­sages ana­logues ; toutes opé­ra­tions qu’on a cou­tume de faire aus­si dans l’interprétation des écrits pro­fanes, pour faire res­sor­tir plus clai­re­ment la pen­sée de l’auteur.

Que les exé­gètes des Saintes Lettres, se sou­ve­nant qu’il s’agit ici de la parole divi­ne­ment ins­pi­rée, dont la garde et l’interprétation ont été confiées à l’Eglise par Dieu lui-​même, ne mettent pas moins de soin à tenir compte des inter­pré­ta­tions et décla­ra­tions du magis­tère de l’Eglise, ain­si que des expli­ca­tions don­nées par les saints Pères, en même temps que de « l’analogie de la foi », comme Léon XIII le fait obser­ver très sage­ment dans l’encyclique Providentissimus Deus[25]. Qu’ils veillent d’une manière toute par­ti­cu­lière à ne pas se conten­ter d’exposer ce qui regarde l’histoire, l’archéologie, la phi­lo­lo­gie et les autres sciences sem­blables – comme Nous regret­tons qu’on le fasse dans cer­tains com­men­taires – mais, tout en allé­guant à pro­pos ces infor­ma­tions, pour autant qu’elles peuvent aider à l’exégèse, qu’ils exposent sur­tout quelle est la doc­trine théo­lo­gique de cha­cun des livres ou des textes en matière de foi et de mœurs ; en sorte que leurs expli­ca­tions, non seule­ment aide­ront les pro­fes­seurs de théo­logie à expo­ser et à prou­ver les dogmes de la foi, mais encore elles seront utiles aux prêtres pour expli­quer la doc­trine chré­tienne au peuple et enfin à tous les fidèles pour mener une vie sainte, digne d’un chrétien.

Usage exact du sens spirituel

Quand les exé­gètes catho­liques don­ne­ront une pareille inter­prétation, avant tout théo­lo­gique, comme Nous avons dit, ils rédui­ront défi­ni­ti­ve­ment au silence ceux qui assurent ne rien trou­ver dans les com­men­taires de la Bible qui élève l’esprit vers Dieu, nour­risse l’âme et sti­mule la vie inté­rieure, pré­ten­dant en consé­quence qu’il faut avoir recours à une inter­pré­ta­tion spi­ri­tuelle, ou, comme ils disent, mys­tique. Que cette manière de voir soit peu fon­dée, l’expé­rience de beau­coup d’hommes l’enseigne ; étu­diant et médi­tant sans cesse la parole de Dieu, ils ont conduit leur âme à la per­fec­tion et ont été entraî­nés vers Dieu par un amour ardent. C’est aus­si ce que montrent clai­re­ment et la pra­tique constante de l’Eglise et les aver­tissements des plus grands Docteurs. Ce qui ne signi­fie certes pas que tout sens spi­ri­tuel soit exclu de la Sainte Ecriture ; car les paroles et les faits de l’Ancien Testament ont été mer­veilleu­se­ment ordon­nés et dis­po­sés par Dieu de telle manière que le pas­sé pré­fi­gu­rait d’avance d’une manière spi­ri­tuelle ce qui devait arri­ver sous la nou­velle alliance de la grâce. C’est pour­quoi l’exégète, de même qu’il doit recher­cher et expo­ser le sens lit­té­ral des mots, tel que l’hagiogra­phe l’a vou­lu et expri­mé, ain­si doit-​il expo­ser le sens spi­ri­tuel, pour­vu qu’il résulte cer­tai­ne­ment qu’il a été vou­lu par Dieu. Dieu seul, en effet, a pu connaître ce sens spi­ri­tuel et nous le révé­ler. Or, ce sens, notre divin Sauveur nous l’indique et nous l’enseigne lui-​même dans les saints Evangiles ; à l’exemple du Maître, les apôtres le signalent ouver­te­ment dans leurs paroles et leurs écrits ; la tra­di­tion constante de l’Eglise le montre ; enfin, l’antique usage de la litur­gie l’exprime chaque fois qu’on est en droit d’appliquer l’adage connu : « La loi de la prière est la loi de la croyance ».

Ce sens spi­ri­tuel donc, vou­lu et fixé par Dieu lui-​même, les exé­gètes catho­liques doivent le mettre en lumière et le pro­po­ser avec le soin qu’exige la digni­té de la parole divine. Qu’ils veillent reli­gieusement, tou­te­fois, à ne pas pré­sen­ter comme sens authen­tique de la Sainte Ecriture des signi­fi­ca­tions méta­pho­riques des choses. Car si, dans le minis­tère de la pré­di­ca­tion sur­tout, un emploi plus large et méta­pho­rique du texte sacré peut être utile pour éclai­rer et mettre en valeur cer­tains points de la foi et des mœurs, à condi­tion de le faire avec modé­ra­tion et dis­cré­tion, il ne faut cepen­dant jamais oublier que cet usage des paroles de la Sainte Ecriture lui est comme extrin­sèque et adven­tice. Il arrive même, sur­tout aujour­d’hui, que cet usage n’est pas sans dan­ger, parce que les fidèles, et en par­ti­cu­lier ceux qui sont au cou­rant des sciences sacrées comme des sciences pro­fanes, cherchent ce que Dieu nous signi­fie par les Lettres sacrées, de pré­fé­rence à ce qu’un écri­vain ou un ora­teur disert expose en jouant habi­le­ment des paroles de la Bible. « La parole de Dieu, vivante et effi­cace, plus affi­lée qu’une épée à deux tran­chants, si péné­trante qu’elle va jusqu’à sépa­rer l’âme et l’esprit, les join­tures et les moelles, démê­lant les sen­ti­ments et les pen­sées des cœurs » (Hébr., iv, 12), n’a pas besoin d’artifice ni d’accommodations humaines pour émou­voir et frap­per les esprits. Les pages sacrées, en effet, écrites sous l’inspiration de Dieu, sont, par elles-​mêmes, riches en signi­fication ; douées de ver­tu divine, elles valent par elles-​mêmes ; ornées d’une beau­té qui vient d’en haut, elles brillent et resplen­dissent par elles-​mêmes, pour­vu que le com­men­ta­teur les explique si plei­ne­ment, si soi­gneu­se­ment, que tous les tré­sors de sagesse et de pru­dence qu’elles contiennent soient mis en lumière.

L’étude des saints Pères et des grands exégètes doit être stimulée

Pour s’acquitter de sa tâche, l’exégète pour­ra trou­ver une aide très appré­ciable dans l’étude sérieuse des œuvres que les saints Pères, les Docteurs de l’Eglise et les plus illustres exé­gètes des temps pas­sés ont consa­crées à l’explication des Saintes Lettres. Ceux-​là, en effet, bien que par­fois leur éru­di­tion pro­fane et leurs connais­sances linguis­tiques fussent moins pous­sées que celles des exé­gètes modernes, l’em­portent en rai­son du rôle que Dieu leur a attri­bué dans l’Eglise, par une sorte de suave intui­tion des choses célestes et par une admi­rable péné­tra­tion d’esprit, grâce aux­quels ils vont plus avant dans les pro­fon­deurs de la parole divine et mettent en lumière tout ce qui peut ser­vir à expli­quer la doc­trine du Christ et à faire pro­gres­ser la sain­te­té de la vie.

Il est certes regret­table que ces pré­cieux tré­sors de l’antiquité chré­tienne soient si peu connus de maints écri­vains de notre temps et que les his­to­riens de l’exégèse n’aient pas encore accom­pli tout ce qui sem­ble­rait néces­saire pour une étude métho­dique et une juste appré­cia­tion de cette matière si impor­tante. Plaise au ciel que se lèvent en grand nombre des tra­vailleurs qui recherchent avec soin les auteurs et les ouvrages catho­liques qui ont inter­pré­té les Saintes Ecritures et qui y puisent, pour ain­si dire, toutes les richesses presque incom­men­su­rables amas­sées par ces auteurs. Ils contri­bue­ront ain­si à mon­trer tou­jours mieux avec quel soin ces anciens exé­gètes ont scru­té et mis en lumière la doc­trine des Livres Saints et à obli­ger les exé­gètes contem­po­rains à s’inspirer de leur exemple, à cher­cher chez eux des argu­ments oppor­tuns. Ainsi se réa­li­se­ra enfin l’heureuse et féconde union de la doc­trine et de Ponction des anciens avec l’érudition plus vaste et l’art plus per­fec­tion­né des modernes ; union qui pro­dui­ra des fruits nou­veaux dans le champ des Lettres divines, lequel ne sera jamais ni assez culti­vé ni entiè­re­ment épuisé.

III. – Les taches particulières des exégètes de nos jours

Etat actuel de l’exégèse

En outre, Nous avons de bonnes et justes rai­sons d’espérer que notre temps lui aus­si appor­te­ra sa contri­bu­tion à une inter­pré­ta­tion plus appro­fon­die et plus exacte des Saintes Lettres. Car bien des points, en par­ti­cu­lier par­mi ceux qui touchent à l’histoire, ont été à peine ou insuf­fi­sam­ment expli­qués par les com­men­ta­teurs des siècles écou­lés, parce qu’il leur man­quait presque toutes les connais­sances néces­saires pour mieux les élu­ci­der. Combien cer­tains points ont été pour les Pères eux-​mêmes dif­fi­ciles et comme impé­né­trables, Nous le voyons, pour ne rien dire d’autre, aux efforts réité­rés de beau­coup d’entre eux pour inter­pré­ter les pre­miers cha­pitres de la Genèse, comme aux divers essais ten­tés par saint Jérôme pour tra­duire les psaumes de façon à mettre clai­re­ment en lumière leur sens lit­té­ral, c’est-à-dire celui que les mots mêmes expriment. Il y a enfin d’autres livres ou textes sacrés dont les dif­fi­cul­tés n’ont été décou­vertes qu’à l’époque moderne, après qu’une meilleure connais­sance de l’antiquité eût sou­le­vé des ques­tions nou­velles, fai­sant péné­trer d’une manière plus appro­priée dans le vif du sujet. C’est donc à tort que cer­tains, ne connais­sant pas exac­te­ment les condi­tions actuelles de la science biblique, pré­tendent que l’exégète catho­lique contem­po­rain ne peut rien ajou­ter à ce qu’a pro­duit l’antiquité chré­tienne, alors qu’au contraire notre temps a mis en évi­dence tant de ques­tions qui, en exi­geant de nou­velles recherches et de nou­veaux contrôles, sti­mulent gran­de­ment l’activité stu­dieuse des exé­gètes modernes.

Il faut tenir compte du caractère de l’hagiographe

Notre âge, en véri­té, qui sou­lève de nou­velles ques­tions et accu­mule de nou­velles dif­fi­cul­tés, four­nit aus­si à l’exégète, grâce à Dieu, de nou­velles res­sources et de nou­veaux appuis. Sous ce rap­port, il paraît juste de faire une men­tion par­ti­cu­lière de ce fait que les théo­logiens catho­liques, en sui­vant la doc­trine des saints Pères, sur­tout celle du Docteur angé­lique et uni­ver­sel (saint Thomas d’Aquin), ont étu­dié et expo­sé la nature et les effets de l’inspiration biblique d’une façon plus appro­priée et plus par­faite qu’on avait cou­tume de le faire dans les siècles passés.

Partant, dans leurs recherches, du prin­cipe que l’hagiographe, en rédi­geant le Livre Saint, est l’organe (δργανον) ou l’instrument de l’Esprit-Saint, mais un ins­tru­ment vivant et doué de rai­son, ils remarquent à juste titre que, conduit par la motion divine, il use cepen­dant de ses facul­tés et de ses talents, de telle manière que l’on peut faci­le­ment sai­sir, dans le livre com­po­sé par lui, « son carac­tère par­ti­cu­lier et, pour ain­si dire, ses traits et linéa­ments per­son­nels » [26]. L’exégète doit donc s’efforcer, avec le plus grand soin, sans rien négli­ger des lumières four­nies par les recherches mo­dernes, de dis­cer­ner quel fut le carac­tère par­ti­cu­lier de l’écrivain sacré et ses condi­tions de vie, l’époque à laquelle il a vécu, les sources écrites ou orales qu’il a employées, enfin sa manière d’écrire. Ainsi pourra-​t-​il bien mieux connaître qui a été l’hagiographe et ce qu’il a vou­lu expri­mer en écri­vant. Il n’échappe, en effet, à per­sonne, que la loi suprême de l’interprétation est d’examiner atten­ti­ve­ment et de défi­nir ce que l’écrivain a vou­lu dire, comme nous en aver­tit admi­ra­ble­ment saint Athanase : « Ici, ain­si qu’il convient de faire dans tous les autres pas­sages de la Sainte Ecriture, il faut obser­ver à quelle occa­sion l’Apôtre a par­lé, remar­quer avec soin et impar­tia­li­té à qui et pour­quoi il a écrit, de peur qu’en igno­rant ces cir­cons­tances ou les com­pre­nant autre­ment, on ne s’écarte du véri­table sens » [27].

Importance du genre littéraire, surtout en histoire

Or, dans les paroles et les écrits des anciens auteurs orien­taux, sou­vent le sens lit­té­ral n’apparaît pas avec autant d’évidence que chez les écri­vains de notre temps ; ce qu’ils ont vou­lu signi­fier par leurs paroles ne peut pas se déter­mi­ner par les seules lois de la gram­maire ou de la phi­lo­lo­gie, non plus que par le seul contexte. Il faut abso­lu­ment que l’exégète remonte en quelque sorte par la pen­sée jusqu’à ces siècles recu­lés de l’Orient, afin que s’aidant des res­sources de l’histoire, de l’archéologie, de l’ethnologie et des autres sciences, il dis­cerne et recon­naisse quels genres lit­té­raires les auteurs de cet âge éloi­gné ont vou­lu employer et ont réel­le­ment employés. Les anciens Orientaux, en effet, pour expri­mer ce qu’ils avaient dans l’esprit, n’ont pas tou­jours usé des formes et des manières de dire dont nous usons aujourd’hui, mais bien plu­tôt de celles dont l’usage était reçu par les hommes de leur temps et de leur pays. L’exégète ne peut pas déter­mi­ner a prio­ri ce qu’elles furent ; il ne le peut que par une étude atten­tive des lit­té­ra­tures anciennes de l’Orient. Or, dans ces der­nières dizaines d’années, ces recherches, pour­sui­vies avec plus de soin et de dili­gence qu’autrefois, ont révé­lé plus clai­re­ment les formes de lan­gage employées dans ces temps anciens, soit dans les com­po­si­tions poé­tiques, soit dans l’énoncé des lois et des normes de vie, soit enfin dans le récit des faits et des évé­ne­ments de l’his­toire.

Cette même étude a déjà prou­vé clai­re­ment que le peuple d’Israël l’a empor­té sin­gu­liè­re­ment sur les autres nations anciennes de l’Orient dans la manière d’écrire cor­rec­te­ment l’histoire, tant pour l’ancienneté que pour la fidèle rela­tion des évé­ne­ments ; pré­ro­ga­tive qui est due, sans doute, au cha­risme de l’inspiration divine et au but par­ti­cu­lier, d’ordre reli­gieux, de l’histoire biblique.

Néanmoins, qui­conque pos­sède un juste concept de l’inspiration biblique, ne s’étonnera pas de trou­ver chez les écri­vains sacrés, comme chez tous les anciens, cer­taines façons d’exposer et de racon­ter, cer­tains idio­tismes propres aux langues sémi­tiques, ce qu’on appelle des approxi­ma­tions, cer­taines manières hyper­bo­liques de par­ler, voire même par­fois des para­doxes des­ti­nés à impri­mer plus fer­me­ment les choses dans l’esprit. En effet, des façons de par­ler dont le lan­gage humain avait cou­tume d’user pour expri­mer la pen­sée chez les peu­ples anciens, en par­ti­cu­lier chez les Orientaux, aucune n’est exclue des Livres Saints, pour­vu tou­te­fois que le genre employé ne répugne en rien à la sain­te­té ni à la véri­té de Dieu ; c’est ce que déjà le Docteur angé­lique a remar­qué dans sa saga­ci­té, lorsqu’il dit : « Dans l’Ecriture, les choses divines nous sont trans­mises selon le mode dont les hommes ont cou­tume d’user. » [28].

De même que le Verbe sub­stan­tiel de Dieu s’est fait en tout sem­blable aux hommes « hor­mis le péché » (Hébr., iv, 15), ain­si les paroles de Dieu, expri­mées en langue humaine, sont sem­blables en tout au lan­gage humain, l’erreur excep­tée. C’est là la ou condes­cen­dance de la divine Providence, que saint Jean Chrysos­tome a magni­fi­que­ment exal­tée, affir­mant à plu­sieurs reprises qu’elle se trouve dans les Livres Saints[29].

Ainsi donc, pour bien répondre aux besoins actuels des études bibliques, l’exégète catho­lique, en expli­quant l’Ecriture Sainte, en prou­vant et défen­dant son abso­lue iner­rance, doit user pru­dem­ment de cette res­source ; qu’il recherche com­ment la manière de parier ou le genre lit­té­raire, employé par l’écrivain sacré, peut conduire à la vraie et exacte inter­pré­ta­tion. Qu’il se per­suade qu’il ne peut négli­ger cette par­tie de sa tâche sans grand détri­ment pour l’exégèse catho­lique. Souvent, en effet – pour Nous en tenir là – lorsque cer­tains se plaisent à objec­ter que les auteurs sacrés se sont écar­tés de la véri­té his­to­rique ou qu’ils ont rap­por­té quelque chose avec peu d’exactitude, on constate qu’il s’agit seule­ment de manières de par­ler ou de racon­ter habi­tuelles aux anciens, dont les hommes usaient cou­ram­ment dans leurs rela­tions mutuelles et qu’on employait en fait lici­te­ment et com­mu­né­ment. L’équité requiert donc, lorsqu’on ren­contre ces expres­sions dans la parole de Dieu qui s’exprime au pro­fit des hommes en termes humains, qu’on ne les taxe pas plus d’erreur que lorsqu’on les ren­contre dans l’usage quo­ti­dien de la vie. Grâce à la connais­sance et à la juste appré­cia­tion des façons usuelles de par­ler et d’écrire des anciens, bien des objec­tions, sou­le­vées con­tre la véri­té et la valeur his­to­rique des Saintes Lettres, pour­ront être réso­lues. En outre, cette étude condui­ra d’une façon non moins appro­priée à la décou­verte plus com­plète et plus lumi­neuse de la pen­sée de l’auteur sacré.

L’étude des antiquités bibliques doit être encouragée

Ceux donc qui, par­mi nous, s’adonnent aux études bibliques, doivent soi­gneu­se­ment faire atten­tion à ce point et ne rien négli­ger de ce qu’ont appor­té de nou­veau l’archéologie, l’histoire de l’anti­quité et la science des lit­té­ra­tures anciennes. Ils ne doivent rien négli­ger de ce qui est apte à faire mieux connaître la men­ta­li­té des écri­vains anciens, leur manière de rai­son­ner, de racon­ter et d’écrire, leur genre et leur tech­nique. En cet ordre de choses, les laïques catho­liques, qu’ils le remarquent bien, ne ren­dront pas seu­lement ser­vice aux sciences pro­fanes, mais ils auront aus­si très bien méri­té de la cause chré­tienne, s’ils se livrent avec toute l’application et tout le zèle pos­sibles à la recherche et à l’étude des œuvres de l’antiquité et s’ils contri­buent, dans la mesure de leurs forces, à débrouiller les ques­tions de ce genre, demeu­rées jusqu’ici moins clai­re­ment connues. Toute connais­sance humaine, en effet, même pro­fane, pos­sède une digni­té et une excel­lence qua­si innées, en tant qu’elle est une par­ti­ci­pa­tion de la connais­sance infi­nie de Dieu ; mais elle acquiert une nou­velle et plus haute digni­té, et comme une con­sécration, quand elle s’emploie à mettre les choses divines en une plus vive lumière.

IV. – Manière de traiter les questions les plus difficiles

Difficultés heureusement résolues par les études récentes

Ces inves­ti­ga­tions pro­gres­sives dans le domaine de l’antiquité orien­tale, dont Nous avons par­lé plus haut, l’étude plus appro­fon­die des textes ori­gi­naux, comme aus­si une connais­sance plus éten­due et plus minu­tieuse des langues bibliques et orien­tales en géné­ral, ont eu un heu­reux résul­tat, avec l’aide de Dieu ; en effet, maintes ques­tions sou­le­vées au temps de Notre pré­dé­ces­seur d’immortelle mémoire, Léon XIII, par des cri­tiques étran­gers ou même oppo­sés à l’Eglise, contre l’au­then­ti­ci­té des Livres sacrés, leur anti­qui­té, inté­gri­té et véri­té his­to­rique, ne pré­sentent plus de dif­fi­cul­tés aujour­d’hui et sont résolues.

Les exé­gètes catho­liques, usant cor­rec­te­ment de ces mêmes armes d’ordre scien­ti­fique dont abu­saient trop sou­vent nos adver­saires, ont pro­po­sé des inter­pré­ta­tions qui, tout en s’accordant avec la doc­trine catho­lique et l’en­sei­gne­ment de la tra­di­tion, paraissent en même temps répondre aux dif­fi­cul­tés sou­le­vées par les nou­velles explo­ra­tions et les nou­velles décou­vertes, ou à celles dont l’antiquité a lais­sé à notre temps la solu­tion. D’où il est résul­té que la confiance dans l’autorité de la Bible et dans sa valeur his­to­rique, ébran­lée jusqu’à un cer­tain point chez quelques-​uns par tant d’attaques, est aujourd’hui com­plètement réta­blie chez les catho­liques ; bien plus, il ne manque pas d’écrivains même non catho­liques qui, grâce à des recherches entre­prises avec calme et sans pré­ju­gés, ont été ame­nés à reje­ter les opi­nions des modernes et à reve­nir, au moins sur tel ou tel point, aux posi­tions plus anciennes. Ce chan­ge­ment est dû, en grande par­tie, au labeur infa­ti­gable par lequel les com­men­ta­teurs catho­liques des Saintes Lettres, sans se lais­ser effrayer par les dif­fi­cul­tés et les obs­tacles de tout genre, se sont employés de toutes leurs forces à uti­liser tout ce que les recherches actuelles des savants, soit en archéo­logie, soit en his­toire ou en phi­lo­lo­gie, ont appor­té pour résoudre les ques­tions nouvelles.

Difficultés non encore résolues ou insolubles

Personne, tou­te­fois, ne doit s’étonner qu’on n’ait pas encore tiré au clair ni réso­lu toutes les dif­fi­cul­tés et qu’il y ait encore aujourd’hui de graves pro­blèmes qui pré­oc­cupent sérieu­se­ment les exé­gètes catho­liques. Il ne faut pas, pour autant, perdre cou­rage ni oublier que dans les sciences humaines il ne peut en être autre­ment que dans la nature, où ce qui com­mence croît peu à peu et où les fruits ne se recueillent qu’après de longs tra­vaux. C’est ain­si que des contro­verses, lais­sées sans solu­tion et en suspens- dans les temps pas­sés, ont été enfin heu­reu­se­ment tran­chées en notre temps, grâce au pro­grès des études. On peut donc espé­rer que sur celles-​là aus­si, qui aujourd’hui paraissent les plus com­pli­quées et les plus ardues, se fera enfin un jour, grâce à un effort constant, la pleine lumière.

Que si une solu­tion dési­rée tarde long­temps et ne nous sou­rit pas à nous, mais que peut-​être une heu­reuse issue de ces débats ne doive être obte­nue que par nos suc­ces­seurs, per­sonne ne doit le trou­ver mau­vais ; car il est juste que s’applique aus­si à nous l’avis don­né par les Pères pour leurs temps, et en par­ti­cu­lier par saint Augustin [30] : que Dieu a par­se­mé à des­sein de dif­fi­cul­tés les Livres Saints qu’il a ins­pi­rés lui-​même, afin de nous exci­ter à les lire et à les scru­ter avec d’autant plus d’attention et pour nous exer­cer à l’humilité par la consta­ta­tion salu­taire de la capa­ci­té limi­tée de notre intel­li­gence. Il n’y aurait donc rien d’étonnant si l’une ou l’autre ques­tion devait res­ter tou­jours sans réponse abso­lu­ment adé­quate, puisqu’il s’agit par­fois des choses obs­cures, trop éloi­gnées de notre temps et de notre expé­rience, et puisque l’exégèse, elle aus­si, comme toutes les sciences et les plus impor­tantes, peut avoir ses secrets, impé­né­trables pour nos intel­li­gences et qu’aucun effort humain ne peut percer.

Des solutions positives doivent être cherchées

Même dans ces condi­tions, cepen­dant, l’exégète catho­lique, pous­sé par un amour actif et cou­ra­geux de sa science, sin­cè­re­ment dévoué à notre Mère la Sainte Eglise, ne doit, en aucune façon, s’interdire d’aborder, et à plu­sieurs reprises, les ques­tions dif­fi­ciles qui n’ont pas été réso­lues jusqu’ici, non seule­ment pour repous­ser les objec­tions des adver­saires, mais encore pour ten­ter de trou­ver une solide explica­tion, en accord par­fait avec la doc­trine de l’Eglise, spé­cia­le­ment avec celle de l’inerrance biblique, et capable en même temps de satis­faire plei­ne­ment aux conclu­sions cer­taines des sciences profanes.

Les efforts de ces vaillants ouvriers dans la vigne du Seigneur méritent d’être jugés non seule­ment avec équi­té et jus­tice, mais encore avec une par­faite cha­ri­té ; que tous les autres fils de l’Eglise s’en sou­viennent. Ceux-​ci doivent avoir en més­es­time ce zèle tout autre que pru­dent, qui croit devoir com­battre ou tenir en sus­pi­cion tout ce qui est nou­veau. Qu’ils n’oublient pas avant tout que, dans les règles et les lois por­tées par l’Eglise, il s’agit de la doc­trine con­cernant la foi et les mœurs, tan­dis que dans l’immense matière con­tenue dans les Livres Saints, livres de la Loi ou livres his­to­riques, sapien­tiaux et pro­phé­tiques, il y a bien peu de textes dont le sens ait été défi­ni par l’autorité de l’Eglise, et il n’y en a pas davan­tage sur les­quels existe le consen­te­ment una­nime des Pères. Il reste donc beau­coup de points, et d’aucuns très impor­tants, dans la dis­cus­sion et l’explication des­quels la péné­tra­tion d’esprit et le talent des exé­gètes catho­liques peuvent et doivent s’exercer libre­ment, afin que cha­cun contri­bue pour sa part et d’après ses moyens à l’utilité com­mune, au pro­grès crois­sant de la doc­trine sacrée, à la défense et à l’honneur de l’Eglise. Cette vraie liber­té des enfants de Dieu qui, gar­dant fidè­le­ment la doc­trine de l’Eglise, accueille avec recon­nais­sance, comme un don de Dieu, et met à pro­fit tout l’apport de la science pro­fane ; cette liber­té, secon­dée et sou­te­nue par la confiance de tous, est la condi­tion et la source de tout réel suc­cès et de tout solide pro­grès dans la science catho­lique, comme nous en aver­tit excellem­ment Notre pré­dé­ces­seur d’heureuse mémoire, Léon XIII, lorsqu’il dit : « Si l’on ne sau­ve­garde pas l’accord des esprits et le res­pect des prin­cipes, il n’y aura pas à espé­rer qu’une mul­ti­tude de tra­vaux variés fasse réa­li­ser à cette science de notables pro­grès » [31].

V. – L’usage de l’Écriture Sainte dans l’instruction des fidèles

Différentes manières d’utiliser l’Ecriture Sainte dans le ministère sacré

Considérant les immenses efforts entre­pris par l’exégèse catho­lique pen­dant près de deux mille ans, pour com­prendre tou­jours plus pro­fondément et plus par­fai­te­ment la parole divine com­mu­ni­quée aux hommes par les Saintes Lettres et pour l’aimer plus ardem­ment, on se per­sua­de­ra aisé­ment que c’est un grave devoir pour les fidèles, et en par­ti­cu­lier pour les prêtres, d’user abon­dam­ment et sain­te­ment de ce tré­sor ras­sem­blé pen­dant tant de siècles par les génies les plus éle­vés. Les Livres Saints, en effet, Dieu ne les a pas confiés aux hommes pour satis­faire leur curio­si­té ou leur four­nir des sujets d’étude et de recherche, mais, comme le remarque l’Apôtre, pour que ces divines paroles puissent nous « don­ner la sagesse qui conduit au salut par la foi en Jésus-​Christ », et « en vue de rendre l’homme de Dieu par­fait, apte à toute bonne œuvre » (cf. II Tim., iii, 15, 17). Que les prêtres donc, à qui est confié le soin de pro­cu­rer aux fidèles le salut éter­nel, après avoir scru­té par une étude sérieuse les pages sacrées et se les être assi­mi­lées dans la prière et la médi­ta­tion, aient à cœur de répandre les célestes richesses de la parole divine dans leurs ser­mons, leurs homé­lies, leurs exhor­ta­tions ; qu’ils confirment la doc­trine chré­tienne par des maximes tirées des Livres Saints ; qu’ils l’illustrent par les mer­veilleux exemples de l’Histoire Sainte, et nom­mé­ment par ceux de l’Evangile du Christ, Notre-​Seigneur. Evitant avec un soin atten­tif les inter­pré­ta­tions accom­mo­da­tices intro­duites par la fan­tai­sie per­son­nelle ou que l’on va cher­cher trop loin et qui sont non un usage, mais un abus de la parole divine, qu’ils exposent celle-​ci avec tant d’éloquence, de net­te­té et de clar­té, que les fidèles ne soient pas seule­ment mus et por­tés à y confor­mer exac­te­ment leur vie, mais encore conçoivent une sou­ve­raine véné­ration pour les Saintes Ecritures. Cette véné­ra­tion, les évêques s’attacheront à l’accroître tou­jours davan­tage et à la per­fec­tion­ner chez les fidèles qui leur sont confiés, en encou­ra­geant toutes les ini­tia­tives entre­prises par des apôtres zélés, dans le but louable de faire naître et d’entretenir, par­mi les catho­liques, la connais­sance et l’amour des Livres Saints. Qu’ils favo­risent donc et qu’ils sou­tiennent ces pieuses asso­cia­tions, qui se pro­posent de répandre par­mi les fidèles des exem­plaires impri­més des Saintes Lettres, sur­tout des Evangiles, et qui veillent à ce que la pieuse lec­ture s’en fasse tous les jours dans les familles chré­tiennes ; qu’ils recom­mandent d’une manière effi­cace, par la parole et par leurs actes, là où les lois litur­giques le per­mettent, les tra­duc­tions de l’Ecriture Sainte, en langue vul­gaire, approu­vées par l’autorité ecclé­sias­tique ; qu’ils donnent eux-​mêmes ou fassent don­ner par des ora­teurs sacrés par­ti­cu­liè­re­ment com­pé­tents des leçons ou confé­rences publiques sur des ques­tions bibliques. Que tous les ministres du sanc­tuaire sou­tiennent, dans la mesure de leurs forces, et divulguent oppor­tu­né­ment, par­mi les dif­fé­rents groupes et les diverses classes de leur trou­peau, les pério­diques qui se publient d’une manière si louable et si utile, dans les diverses par­ties du globe, soit pour trai­ter et expo­ser les ques­tions bibliques selon la méthode scien­ti­fique, soit pour adap­ter les fruits de ces recherches au minis­tère sacré ou aux besoins des fidèles. Que les ministres du sanc­tuaire en soient bien convain­cus : toutes ces ini­tia­tives et les autres entre­prises du même genre, que le zèle apos­to­lique et un sin­cère amour de la parole divine sau­ront leur sug­gé­rer comme pou­vant conduire à ce but sublime, leur seront d’un secours effi­cace dans le minis­tère des âmes.

Enseignement biblique dans les séminaires

Mais il ne peut échap­per à per­sonne que tout cela ne peut être conve­na­ble­ment accom­pli par les prêtres si eux-​mêmes, pen­dant leur séjour au sémi­naire, n’ont pas reçu un amour actif et durable des Saintes Ecritures. C’est pour­quoi les évêques, à qui incombe la sol­li­ci­tude pater­nelle de leurs sémi­naires, doivent veiller avec soin à ce que, en ce domaine aus­si, rien ne soit omis qui puisse contri­buer à atteindre ce but. Que les pro­fes­seurs d’Ecriture Sainte orga­nisent tout le cours biblique de telle manière que les jeunes gens des­ti­nés au sacer­doce et au minis­tère de la pré­di­ca­tion soient pour­vus de cette connais­sance des Saintes Lettres et péné­trés de cet amour envers elles, sans les­quels l’apostolat ne peut guère por­ter des fruits abon­dants. Il faut donc que leur exé­gèse fasse res­sor­tir avant tout le conte­nu théo­lo­gique, en évi­tant les dis­cus­sions super­flues et en omet­tant tout ce qui est pâture de curio­si­té plu­tôt que source de science véri­table et sti­mu­lant de solide pié­té. Que les pro­fes­seurs éta­blissent le sens lit­té­ral, et sur­tout le sens théo­lo­gique, d’une manière si solide, qu’ils l’expliquent si per­ti­nem­ment, qu’ils l’incul­quent avec tant de cha­leur, de sorte qu’il advienne à leurs élèves ce qui arri­va aux dis­ciples de Jésus-​Christ allant à Emmaiis, lors­qu’ils s’écrièrent après avoir enten­du les paroles du Maître : « Notre cœur n’était-il pas tout brû­lant au-​dedans de nous lorsqu’il nous décou­vrait les Ecritures ? » (Luc, xxiv, 32). Qu’ainsi les Saintes Lettres deviennent pour les futurs prêtres de l’Eglise une source pure et inta­ris­sable pour leur propre vie spi­ri­tuelle, un ali­ment et une force pour la tâche sacrée de la pré­di­ca­tion qu’ils vont assu­mer. Si les pro­fes­seurs qui enseignent dans les sémi­naires cette science impor­tante atteignent ce résul­tat, qu’ils aient la douce per­sua­sion d’avoir gran­de­ment contri­bué au salut des âmes, au pro­grès de la cause catho­lique, à l’honneur et à la gloire de Dieu, et d’avoir accom­pli une œuvre inti­me­ment liée aux devoirs de l’apostolat.

Sens de la parole divine en ce temps de guerre :
elle est la consolation des affligés, la voie de la justice pour tous

Ce que Nous venons de dire, Vénérables Frères et chers Fils, néces­saire en tout temps, l’est cer­tai­ne­ment beau­coup plus en ces jours mal­heu­reux où presque tous les peuples et nations sont plon­gés dans un océan de cala­mi­tés, tan­dis qu’une guerre atroce accu­mule ruine sur ruine, car­nage sur car­nage, tan­dis que, par le fait des haines impi­toyables des peuples exci­tés les uns contre les autres, Nous voyons, avec une suprême dou­leur, s’éteindre dans beau­coup d’hommes non seule­ment le sen­ti­ment de la modé­ra­tion chré­tienne et de la cha­ri­té, mais même celui de l’humanité. Qui peut por­ter remède à ces mor­telles bles­sures faites à la socié­té humaine, sinon Celui à qui le Prince des apôtres, plein d’amour et de confiance, adres­sa ces paroles : « Seigneur, à qui irions-​nous ? Vous avez les paroles de la vie éter­nelle » (Jean, vi, 69). A notre Rédempteur très misé­ri­cor­dieux il nous faut donc, de toutes nos forces, rame­ner tous les hommes ; il est le Consolateur divin des affli­gés ; il est Celui qui enseigne à tous – qu’ils tiennent en main l’autorité publique ou que leur incombe le devoir de l’obéissance et de la sou­mis­sion – la véri­table droi­ture, la jus­tice intègre, la cha­ri­té géné­reuse ; il est enfin, à lui seul, Celui qui peut être le solide fon­de­ment et le sou­tien de la paix et de la tran­quilli­té : « Car per­sonne ne peut poser un autre fon­de­ment que Celui qui est déjà posé, savoir Jésus-​Christ » (I Cor., iii, 11).

Or, ce Christ, auteur de notre salut, les hommes le connaî­tront d’autant plus par­fai­te­ment, l’aimeront d’autant plus ardem­ment, l’imiteront d’autant plus fidè­le­ment qu’ils seront pous­sés avec plus de zèle à la connais­sance et à la médi­ta­tion des Saintes Lettres, en par­ti­cu­lier du Nouveau Testament. Car, comme le dit saint Jérôme, le Docteur de Stridon : « L’ignorance des Ecritures est l’ignorance du Christ » [32], et « s’il est une chose qui en cette vie sou­tient le sage et le déter­mine à gar­der la séré­ni­té de l’âme au milieu des tri­bu­la­tions et des agi­ta­tions du monde, j’estime que c’est en tout pre­mier lieu la médi­ta­tion et la science des Ecritures » [33]. C’est à cette source que tous ceux qui sont fati­gués et acca­blés par l’adversité et l’affliction pui­se­ront les véri­tables conso­la­tions et la ver­tu divine de souf­frir et d’endurer ; c’est là – à savoir dans les saints Evangiles – que le Christ est pré­sent pour tous, modèle suprême et par­fait de jus­tice, de cha­ri­té et de misé­ri­corde ; c’est là que s’ouvrent pour le genre humain, déchi­ré et inquiet, les sources de cette grâce divine sans laquelle, si on la dédaigne ou si on la néglige, peuples et con­ducteurs de peuples ne pour­ront éta­blir ou conso­li­der ni l’ordre public ni la concorde des esprits. C’est là, enfin, que tous appren­dront à connaître ce Christ, « qui est le Chef de toute prin­ci­pau­té et de toute puis­sance » (Col., ii, 10) et « qui, de par Dieu, a été fait pour nous sagesse, et jus­tice, et sanc­ti­fi­ca­tion, et Rédemption » (I Cor., i, 30).

Conclusion
Exhortation à tous ceux qui cultivent les études bibliques

Après avoir expo­sé et recom­man­dé ce qui concerne les études bibliques en vue de les adap­ter aux besoins de notre temps, il Nous reste, Vénérables Frères et chers Fils, à féli­ci­ter avec une pater­nelle bien­veillance tous ceux qui étu­dient la Bible et qui, en fils dévoués de l’Eglise, suivent fidè­le­ment sa doc­trine et ses direc­tives, de ce qu’ils ont été des­ti­nés et appe­lés à une tâche aus­si noble. A ces féli­ci­ta­tions, Nous vou­lons ajou­ter Nos encou­ra­ge­ments, afin qu’ils pour­suivent de tout leur zèle, avec tout leur soin et avec une éner­gie tou­jours nou­velle, l’œuvre heu­reu­se­ment entre­prise. Très haute tâche, avons-​Nous dit, car qu’y a‑t-​il de plus sublime que de scru­ter, d’expliquer, d’annoncer aux fidèles, de défendre contre les infi­dèles la parole même de Dieu, trans­mise aux hommes sous l’inspiration du Saint-​Esprit ? L’esprit lui-​même de l’exégète se nour­rit de cet ali­ment spi­ri­tuel et en pro­fite « pour le renou­vel­le­ment de la foi, pour la conso­la­tion de l’espérance, pour l’exhortation de la cha­ri­té »[34]. « Vivre au milieu de ces choses, les médi­ter, ne connaître ni ne cher­cher rien d’autre, cela ne vous paraît-​il pas que c’est déjà habi­ter le royaume céleste ? » [35]

Que les âmes des fidèles se nour­rissent aus­si du même ali­ment, qu’elles y puisent la connais­sance et l’amour de Dieu, le pro­grès spi­ri­tuel et la féli­ci­té pour cha­cune d’elles.

Que de toute leur intel­li­gence les com­men­ta­teurs de la parole divine se donnent à cette sainte entre­prise. « Qu’ils prient pour com­prendre » [36]. Qu’ils tra­vaillent pour péné­trer chaque jour plus pro­fon­dé­ment dans les secrets des pages sacrées ; qu’ils enseignent et qu’ils prêchent pour ouvrir aus­si aux autres les tré­sors de la parole de Dieu. Ce que dans les siècles pas­sés les illustres inter­prètes de la Sainte Ecriture ont réa­li­sé avec tant de fruit, que les modernes s’efforcent de l’imiter autant qu’ils le peuvent, en sorte que, comme aux temps pas­sés, ain­si à l’heure actuelle l’Eglise ait des doc­teurs émi­nents dans l’art d’interpréter les Saintes Lettres, et que les fidèles, grâce à leur labeur et à leur tra­vail, reçoivent des Saintes Ecritures pleine lumière, exhor­ta­tion, allé­gresse. Dans cette tâche, certes ardue et lourde, qu’ils aient, eux aus­si, « pour conso­la­tion les Saints Livres » (I Macc., xii, 9) ; qu’ils se sou­viennent de la récom­pense qui les attend, puisque « ceux qui auront pos­sé­dé la science brille­ront comme la splen­deur du fir­ma­ment, et ceux qui en auront conduit beau­coup à la jus­tice seront comme les étoiles, éter­nel­le­ment et sans fin » (Dan., xii, 3).

Et main­te­nant, tan­dis que Nous sou­hai­tons vive­ment à tous les fils de l’Eglise, et nom­mé­ment aux pro­fes­seurs des sciences bibliques, au jeune cler­gé et aux ora­teurs sacrés que, médi­tant sans rélâche la parole de Dieu, ils goûtent com­bien l’esprit du Seigneur est suave et bon (cf. Sag., xii, 1), comme gage des faveurs célestes, en témoi­gnage de Notre pater­nelle bien­veillance, à vous tous et à cha­cun d’entre vous, Vénérables Frères et chers Fils, Nous accor­dons très affec­tueu­se­ment dans le Seigneur la Bénédiction apostolique.

Pie XII, Pape

Source : Documents Pontificaux de sa Sainteté Pie XII, année 1943, Edition Saint-​Augustin Saint-​Maurice – D’après le texte latin des A. A. S., XXXV, 1943, p. 297 ; tra­duc­tion fran­çaise publiée offi­ciel­le­ment à Rome par l’Imprimerie poly­glotte vati­cane. Les titres et sous-​titres ont été ajou­tés d’après l’index des A. A. S. eux-​mêmes (vol. XXXV, p. 326).

Notes de bas de page
  1. Sess. IV, décr. 1 ; Ench. Bibl., n. 45[]
  2. Sess. III, cap. II ; Ench. Bibl., n. 62.[]
  3. Sermo ad alum­nos Seminariorum… in Urbe, 24 juin 1939 ; A. A. S., vol. XXXI, 1939, pp. 245–251. Cf. Documents Pontificaux 1939, p. 151 et suiv.[]
  4. Cf. Ia, q. 70, art. 1 ad 3.[]
  5. De Gen. ad litt. II, IX, 20 ; P. L., XXXIV, col. 270 sq. : C. S. E. L., XXVIII (Sectio III, pars II), p. 46.[]
  6. Léon XIII, Acta, XIII, p. 355 ; Ench. Bibl., n. 106.[]
  7. Cf. Benoît XV, ency­cl. Spiritus Paraclitus, A. A. S., vol. XII, 1920, p. 396 ; Ench. Bibl., n. 471.[]
  8. Léon XIII, Acta, XIII, p. 357 sq. ; Ench. Bibl., n. 109 sq.[]
  9. Cf. Léon XIII, Acta, XIII, p. 328 ; Ench. Bibl., n. 67 sq.[]
  10. Lettre apost. Hierosolymae in coe­no­bio, 17 sept. 1892 ; Léon XIII, Acta, XII, pp. 239–241, v. p. 240.[]
  11. Cf. Léon XIII, Acta, XXII, p. 232 sq. ; Ench. Bibl., n. 130–141 ; v. n. 130, 132.[]
  12. Lettre de la Commission pon­ti­fi­cale des études bibliques aux arche­vêques et évêques d’Italie, 20 août 1941 ; A. A. S., XXXIII, 1941, p. 465. Voir Documents Pontificaux 1941, p. 371 et suiv.[]
  13. Lettre apost. Scripturae Sanctae, 23 février 1904 ; Pie X, Acta, I, pp. 176–179 : Ench. Bibl., n. 142–150, v. n. 143–144.[]
  14. Cf. lettre apost. Quoniam in re bibli­ca, 27 mars 1906 ; Pie X, Acta, III, pp. 72 – 76 ; Ench. Bibl., n. 155–173 ; v. n. 155.[]
  15. Lettre apost. Vinea elec­ta, 7 mai 1909 ; A. A. S., vol. I, 1909, pp. 447 – 449 ; Ench. Bibl., n. 293–306. v. n. 294 et 296.[]
  16. Cf. Motu pro­prio Bibliorum scien­tiam, 27 avril 1924 ; A. A. S., vol. XVI, 4924, pp. 180 – 182 ; Ench. Bibl., n. 518 – 525.[]
  17. Lettre au Rme D. Aidan Gasquet, 3 décembre 1907 ; Pie X, Acta, IV, pp. 117 – 119 ; Ench. Bibl., n. 285 sq.[]
  18. Const. apost. Inter prae­ci­puas, 15 juin 1933 ; A. A. S., vol. XXVI, 1934, pp. 85 – 87.[]
  19. Lettre à S. Em. le car­di­nal Cassetta, 21 jan­vier 1907 ; Pie X, Acta, IV, pp. 23 – 25.[]
  20. Encycl. Spiritus Paraclitus, 15 sep­tembre 1920 ; A. A. S., vol. XII, 1920, pp. 385 – 422 ; Ench. Bibl., n. 457–508 ; v. n. 457–508 ; v. n. 457, 491, 495, 497.[]
  21. Cf. p. ex. S. Jérôme, Praef. in IV Evang. ad Damasum ; P. L. XXIX, col. 526, 527 : S. Augustin, De doc­tr. christ., II, 16 ; P. L., XXXIV, col. 42, 43.[]
  22. De doc­tr. christ., II, 21 ; P. L., XXXIV, col. 46.[]
  23. Décret de edi­tione et usu Sacrorum Librorum ; Conc. de Trente, éd. Soc. Goerres, t. V, p. 91 sq.[]
  24. Ibid., t. X, p. 471 ; cf. t. V, pp. 29, 59, 65 ; t. X, p. 446 sq.[]
  25. Léon XIII, Acta, XIII, pp. 345 – 346 ; Ench. Bibl., n. 94–96.[]
  26. Cf. Benoît XV, ency­cl. Spiritus Paraclitus ; A. A. S., vol. XII, 1920, p. 390 ; Ench. Bibl., n. 461.[]
  27. Contra Arianos, I, 54 ; P. G., XXVI, col. 123.[]
  28. Comment. ad Hebr., cap. I, lec­tio 4.[]
  29. Cf. p. ex. In Gen. I, 4 (P. G., LIII, col. 34–35) ; in Gen. II, 21 (ibid., col. 135) ; Hom. 15 in Joan., ad. I, 18 (P. G., LIX, col. 97 sq.).[]
  30. Cf. S. Augustin, Epist. CXLIX ad Paulinum, n. 34 (P. L., XXXIII, col. 644) ; De diver­sis quaes­tio­ni­bus, q. LIII, n. 2 (ibid. XL, col. 36) ; Enarr. in Ps., CXLVI, n. 12 (ibid. XXXVII, col. 1907).[]
  31. Lettre apost. Vigilantiae ; Léon XIII, Acta, XXII, p. 237 ; Ench. Bibl., n. 136.[]
  32. S. Jérôme, In Isaiam, pro­logue ; P. L., XXIV, col. 17.[]
  33. Id., In Ephesios, pro­logue ; P. L., XXVI, col. 439.[]
  34. Cf. S. Augustin, Contra Faustum, XIII, 18 ; P. L., XLII, col. 294 ; C.S.E.L., XXV, p. 400.[]
  35. S. Jérôme, Epist. LUI, 10 ; P. L., XXII, col. 549 ; C. S. E. L., LIV, p. 463.[]
  36. S. Augustin, De doc­tr. christ., III, 56 ; P. L., XXXIV, col. 89.[]