Editorial du n° 41 de janvier 2016 – Aux Sources du Carmel – Fraternité St-Jean-de-la-Croix

Bulletin du Tiers-​Ordre sécu­lier pour les pays de langue fran­çaise

Editorial du n° 41 de janvier 2016, abbé Dubroeucq

Cher frère, Chère sœur,

Noël nous fait célé­brer la venue du Prince de la paix annon­cé par le pro­phète Isaïe. [Is., 9,6 et 4ème antienne de Vêpres]. Cette paix est annon­cée aux ber­gers par les anges : « paix sur la terre aux hommes de bonne volon­té ». Le Sauveur Lui-​même vient l’apporter au monde et Il en fera bien­tôt une des ses huit béa­ti­tudes : « Bienheureux les paci­fiques, on les appel­le­ra fils de Dieu ». [Mt 5, 9].

Mais peut-​on avoir la paix sur la terre ? La paix par­faite, non : il y aura tou­jours ici-​bas des luttes, des dif­fi­cul­tés ; mais la paix véri­table, oui, car Jésus l’a pro­mise et nous l’a donnée.

Qu’est-​ce au juste que la paix ? Saint Augustin l’a défi­nie « la tran­quilli­té de l’ordre » ; c’est le repos­qu’on éprouve quand tout est en ordre. On peut dire qu’elle est le cli­mat de Dieu, que c’est Dieu Lui-​même. Dieu, la paix même, dit saint Bernard, met la paix par­tout où il habite : Le contem­pler, c’est être au sein de la paix. [Sermon 23 sur le Cantique des can­tiques]. Parlant du Messie le pro­phète Michée dit qu’il sera la paix. [Mich., 5.]. En venant au monde, écrit saint Paul, Jésus-​Christ nous a appor­té la bonne nou­velle de la paix. [Eph., 2, 17]. Lorsque nous étions enne­mis, dit cet apôtre, nous avons été récon­ci­liés à Dieu par la mort de son Fils. [Rom., 5, 10.]. Et quand le pro­phète Isaïe annonce que « son empire se mul­ti­plie­ra et que sa paix n’aura pas de fin » [Is., 9,7.], il annonce la paix éter­nelle, au ciel, et celle qui en est le pré­lude, dans les âmes sanc­ti­fiées par la grâce, la paix inté­rieure dont jouissent les âmes dans les­quelles règne la charité.

Ainsi avant de mou­rir, Jésus déclare-​t-​Il à ses dis­ciples : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas comme le monde la donne que je vous la donne. Que votre cœur ne se trouble pas, et qu’il ne s’effraie pas. » [Jn, 14, 27.]. Il faut que nous rece­vions cette paix. Pour cela il faut nous ouvrir. Il faut être récep­tif à cette paix, car ori­gi­nel­le­ment nous n’a­vons pas la paix : celle-​ci étant le résul­tat de l’ordre, de l’har­mo­nie, il faut recon­qué­rir cette har­mo­nie, et c’est le tra­vail de toute la vie. Notre paix dépen­dra de nos rap­ports avec Dieu. C’est parce qu’on s’est écar­té de Dieu qu’on éprouve le désordre dans tous les domaines ; si l’on revient à Dieu, l’ordre se réta­blit. Si l’on veut se fixer dans la paix, il faut se fixer en Dieu, s’en­ra­ci­ner en Jésus et en son amour. Pour que la paix règne dans nos âmes, il faut accom­plir la volon­té de Dieu : « Que votre règne arrive, Que votre volon­té soit faite ! », que la région pro­fonde de l’âme soit abso­lu­ment pos­sé­dée par cet amour de la volon­té de Dieu. Alors peu importe ce qui se passe dans les régions super­fi­cielles, peu importent les séche­resses, les ten­ta­tions, les épreuves de tout genre, et même les scru­pules per­mis par Dieu ; peu importe la manière dont on nous traite. Soi-​même on ne compte plus ; on n’a qu’un seul désir : Dieu, et non pour soi mais pour Lui, sa divine volonté.

La paix, fruit de l’a­ban­don, est le fruit du don de sagesse, le propre des vrais enfants de Dieu, sagesse qui fait juger tout par la règle suprême, d’où un ordre par­fait, une paix souveraine.

« Bienheureux les paci­fiques, on les appel­le­ra fils de Dieu. » [Mt 5, 9.]. « Les paci­fiques, disait Mgr Gay, ceux qui ont un tel tré­sor de paix qu’ils la répandent tout autour d’eux, [] ce sont les enfants de Dieu ; et les enfants de Dieu par excel­lence, ce sont les âmes aban­don­nées. » [Vie et ver­tus chré­tiennes, Éd. Oudin frères, Poitiers, 1897, t. 2, Abandon III, p. 387–388.]. C’est l’Esprit de sagesse qui apprend à regar­der Dieu comme le tout, et le Père, Sa gloire et l’ac­com­plis­se­ment de Sa volon­té comme la seule chose à dési­rer, le bon­heur de Lui plaire comme le plus grand avan­tage. On est alors de vrais enfants de Dieu. La sagesse, la paix, c’est quand le tout de l’âme est le tout de Dieu. N’être qu’à Dieu, ne voir que Dieu, Sa gloire, Son bon plai­sir. Il n’est pas moins en la tri­bu­la­tion qu’en la pros­pé­ri­té : on demeure donc tou­jours en paix. « Que rien ne te trouble, que rien ne t’é­pou­vante. Tout passe, Dieu ne change point. La patience obtient tout. Quand on a Dieu, rien ne manque. Dieu seul suf­fit » disait sainte Thérèse de Jésus qui nous indique encore quelques dis­po­si­tions à res­pec­ter pour obte­nir la paix intérieure :

– En gar­dant la règle : « Il importe beau­coup de com­prendre com­bien il nous est avan­ta­geux » [d’observer les trois points sui­vants de la Constitution,] « si nous vou­lons jouir à l’intérieur et à l’extérieur de la paix que Notre-​Seigneur nous a tant recom­man­dée. Le pre­mier est l’amour mutuel ; le deuxième, le déta­che­ment de tout ce qui est créé ; le troi­sième, l’humilité véri­table. Ce point [] est cepen­dant le prin­ci­pal, et il embrasse tous les autres. » [Chemin de per­fec­tion, ch. 4, 4, in Thérèse d’Avila. Œuvres com­plètes, Paris, Cerf, 1995, p. 712.]. 

En gar­dant la cha­ri­té : Se gar­der des ami­tiés par­ti­cu­lières : « Ce que je vous dis vous paraît peut-​être exces­sif, et cepen­dant, croyez-​moi, mes sœurs, c’est la source d’une grande per­fec­tion, d’une paix pro­fonde ; par là, on évite à celles qui ne sont pas encore très fortes beau­coup d’occasions de péché. » [Chemin de Perfection, ch. 4, 7, op. cit., p. 713.]. Et il faut évi­ter de juger : « Le soin de remar­quer dans les autres des vétilles — qui par­fois ne seront même pas des imper­fec­tions et que peut-​être notre igno­rance seule nous fera prendre en mau­vaise part — pour­rait nous faire perdre la paix de l’âme, et même la faire perdre aux autres. » [Premières Demeures, ch. 2, 18, op. cit., p. 982.]. 

- En gar­dant l’humilité : « Croyez-​le, quand une âme est véri­ta­ble­ment humble, Dieu ne lui accorderait-​il jamais de conso­la­tions, il lui don­ne­ra une paix et une confor­mi­té à sa volon­té qui la ren­dront plus heu­reuse que d’autres avec leurs conso­la­tions. » [Troisièmes Demeures, ch. 1, 9, op. cit., p. 1002]. 

Et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus nous apprend par les exemples de sa vie à goû­ter ce fruit du Saint-​Esprit qui pro­cure la joie par­faite. « Ah !quelle paix inonde l’âme lorsqu’elle s’élève au-​dessus des sen­ti­ments de la nature. […] Non, il n’est pas de joie com­pa­rable à celle que goûte le véri­table pauvre d’esprit… » [Manuscrit C, 16 r°, in Thérèse de Lisieux. Œuvres com­plètes, Paris, Cerf-​DDB, 2009, p. 256.].« Je n’ai plus du tout atta­ché d’importance à l’opinion des créa­tures et cette impres­sion s’est tel­le­ment déve­lop­pée en moi qu’à pré­sent les blâmes, les com­pli­ments, tout glisse sur moi sans lais­ser la plus légère empreinte. » [Le car­net jaune, 25 juillet 1897, in Œuvres com­plètes, op. cit., p. 1059, 15.]. 

Ô mon Dieu ! Si Vous êtes le centre de Votre paix, Vous l’êtes aus­si de la mienne. Faites-​moi donc la grâce que je ne la recherche et ne la trouve qu’en Vous ; et pour cet effet, que je Vous sois uni­que­ment atta­ché, par la grâce et par l’amour. Que je sois aus­si paci­fique, à Votre imi­ta­tion, afin que, comme ami de la paix, je mérite d’être du nombre de Vos enfants, selon la pro­messe de Votre Fils quand Il a dit : Heureux les paci­fiques, parce qu’ils seront appe­lés les enfants de Dieu. [Mt, 5, 9.]

Que Notre-​Dame, Reine de la paix, nous obtienne cette grâce de son divin Fils afin que notre joie soit parfaite ! 

Je vous bénis.

Abbé L.-P. Dubrœucq

Retraites carmélitaines

Retraites car­mé­li­taines

Retraites mixtes (hommes et dames),ouvertes prin­ci­pa­le­ment aux ter­tiaires du car­mel mais aus­si aux per­sonnes inté­res­sées par la spi­ri­tua­li­té du carmel.

Inscriptions auprès de M. l’ab­bé Dubroeucq au prieu­ré de Gastines tél : 02 41 74 12 78 

Tél : au prieu­ré Saint Louis-​Marie Grignon de Montfort, 49380 Faye d’Anjou ou au 06 16 80 63 17