La prière est pour l’homme le premier des biens. C’est par ces mots saisissants que dom Prosper Guéranger commence la préface de sa célèbre Année liturgique. Et il précise : « La prière est sa lumière, sa nourriture, sa vie même, puisqu’elle met l’homme en rapport avec Dieu qui est lumière, nourriture et vie ». Nous pouvons d’ailleurs remarquer que Notre Seigneur Jésus-Christ, afin de nous montrer l’importance de la prière, a inauguré les phases principales de son ministère par une prière.
L’Évangile nous décrit le début du ministère du Christ par deux faits de prière : Jésus reçoit le baptême de Jean et se retire dans le désert pour prier (Mt 3, 13–17 et 4, 1–11 ; Mc, 1, 9–13 ; Lc 3, 21–23 et 4, 1–13). L’institution des Apôtres fait également suite à une prière : « En ces jours-là, Jésus s’en alla sur une montagne pour prier, et il passa toute la nuit à prier Dieu. Et quand le jour fut venu, il appela ses disciples ; et il en choisit douze d’entre eux, qu’il nomma Apôtres » (Lc 6, 12–13).
Jésus prélude à son plus éclatant miracle (avant sa propre résurrection), la résurrection de Lazare, par une prière publique : « Père, je vous rends grâce de ce que vous m’avez écouté. Pour moi, je savais que vous m’écoutez toujours ; mais je parle ainsi à cause du peuple qui m’entoure, afin qu’ils croient que c’est vous qui m’avez envoyé » (Jn 11, 41–42). Jésus inaugure enfin sa Passion par une grande prière tandis qu’il traverse Jérusalem avec ses Apôtres après la Cène (Jn 17), puis par une oraison instante au Jardin des Oliviers, où on le voit se prosterner, supplier, accepter la volonté du Père (Mt 26, 38–44 ; Mc 14, 34–41 ; Lc 22, 40–46).
Donc, « il faut prier toujours et ne jamais cesser » (Lc 18, 1). Saint Alphonse de Liguori conclut le premier chapitre de son précieux petit ouvrage, Le grand moyen de la prière, par cette forte assertion : « Celui qui prie se sauve certainement ; celui qui ne prie pas se damne certainement. Tous les élus du Ciel, en dehors des enfants, se sont sauvés par la prière. Tous les damnés se sont perdus pour n’avoir pas prié. S’ils avaient prié, ils ne se seraient pas perdus ». Et le concile de Trente, reprenant une phrase de saint Augustin, affirme de façon certaine : « Dieu ne commande jamais l’impossible, mais en nous donnant ses préceptes, il nous avertit de faire ce que nous pouvons faire tout de suite, et de lui demander par la prière ce que nous ne pouvons pas faire encore, et il nous accorde sa grâce pour que nous puissions le faire ». Mais quelle est la bonne manière de prier ? Comment devons-nous prier ? Avec quels mots ? Que devons-nous demander à Dieu dans la prière ?
Il existe de très nombreuses méthodes d’oraison, proposées par des saints et des grands spirituels. Ces méthodes sont bonnes, utiles, louables ; chacun peut et doit en user pour le bien de son âme et son progrès spirituel. Mais au-dessus de ces méthodes humaines, il existe une méthode que l’on peut qualifier de divine, car elle a été dictée par l’Esprit-Saint à l’Église. Cette méthode nous apprend ce que nous devons demander à Dieu, en quels termes, dans quelles dispositions, et elle nous obtient infailliblement l’objet de nos demandes, car c’est l’Épouse même du Christ qui parle alors par notre bouche. Cette méthode inspirée s’appelle tout simplement la liturgie, et notamment les oraisons de la liturgie romaine. Chaque jour, nous trouvons dans les trois oraisons de la messe (collecte, secrète et postcommunion) ce qui nous sera nécessaire pour la journée, avec les mots les plus justes et les plus saints.
Prions donc le Père avec l’Église, prions-le avec la bienheureuse Marie toujours Vierge, avec les anges et les saints, prions-le dans l’Esprit-Saint, prions-le par le Médiateur, Jésus-Christ : prions Dieu avec la liturgie catholique.
Abbé Régis de Cacqueray †, Supérieur du District de France
Source : Fideliter n° 194