Lettre aux mamans sur l’éducations n°7

N° 7 – Septembre 2006

hère Madame,

Après avoir vu les devoirs des parents, voyons les devoirs des enfants vis-​à-​vis des parents. C’est par­ti­cu­liè­re­ment à la maman qu’il incombe d’ap­prendre à son enfant ses devoirs que sont : l’Amour, le Respect et l’Obéissance. L’enfant est donc tenu, en pre­mier lieu, de les aimer. Honorer signi­fie aimer avec res­pect, avec sou­mis­sion et recon­nais­sance, et non pas comme on aime son frère ou son cama­rade. Je crois que ce point est, soit mal com­pris, soit mal trans­mis aux enfants, et, en tous cas, de moins en moins appli­qué. Et c’est bien regret­table ! En ce qui concerne ce com­man­de­ment, on parle sur­tout du péché de déso­béis­sance. Mais il y a plus. Quand l’en­fant cri­tique, juge ses parents ou dit du mal d’eux, il y a trois péchés : un contre la cha­ri­té, un contre la pié­té filiale et un contre la jus­tice. Le sait-​on ? Le sait-il ?

Dieu veut que cha­cun honore son père et sa mère, en ne leur man­quant jamais de res­pect, soit par des actions, soit par des paroles, et en sup­por­tant leurs défauts avec une patience inal­té­rable. C’est donc un péché de par­ler à ses parents avec aigreur ou d’un ton éle­vé, de s’en moquer ou de les contre­faire, etc,.. Dans l’Ancien Testament, l’en­fant qui inju­riait son père ou sa mère, était condam­né à mort. Maintenant, s’il n’est pas condam­né à la mort tem­po­relle, il est tou­jours mau­dit de Dieu qui le condamne à la mort éter­nelle – ce qui est pire -. (cf. St Alphonse de Liguori).

L’obéissance aux parents est due dans tout ce qui est juste :« Enfants, obéis­sez à vos parents dans le Seigneur ». (St Paul : Ephésiens 6,1). L’enfant est tenu d’o­béir en tout ce qui regarde le bien de la famille et les bonnes mours. St Paul pré­cise : « on doit obéir dans les choses qui plaisent à Dieu et non dans celles qui Lui déplaisent ». Cela signi­fie que si les parents demandent de faire quelque chose qui est contraire aux com­man­de­ments, l’en­fant ne doit pas obéir. Mais ceci est rare dans une famille chrétienne.

Je vou­drais vous entre­te­nir aujourd’­hui de la ver­tu d’o­béis­sance sou­vent mal com­prise et mal trans­mise, sur­tout à l’en­fant. Aujourd’hui, l’en­fant n’o­béit pas ou mal, parce qu’il ne lui a pas été appris à vrai­ment obéir. Je m’ex­plique. Nous vivons dans un monde où l’on prône tant l’ins­truc­tion aux dépens de l’é­du­ca­tion com­plète et où les tech­niques modernes (l’audio-​visuel, l’or­di­na­teur,..) semblent acti­ver et faci­li­ter énor­mé­ment les connais­sances, que l’en­fant éprouve un besoin de tout savoir, de tout com­prendre indé­pen­dam­ment de son âge. Les parents, pris dans l’en­gre­nage, pensent bien faire en répon­dant à ce besoin de l’en­fant et cherchent à tout lui expli­quer. C’est un grand dan­ger pour l’é­du­ca­tion de l’o­béis­sance. De ce fait, on éduque chez le tout-​petit l’in­tel­li­gence avant le cour. Le résul­tat est un des­sè­che­ment du cour et une mal­for­ma­tion de l’es­prit. Ne dit-​on pas que l’âge de rai­son se situe vers les 6/​7 ans ? Pourquoi devan­cer la nature telle que Dieu l’a faite ? Orgueil mater­nel ou igno­rance ?. C’est une grave erreur d’é­du­quer l’es­prit ou l’in­tel­li­gence avant le cour ; c’est l’in­verse qu’il faut faire.

Qu’est ce que l’é­du­ca­tion du cour ?

Le cour a un rôle très impor­tant. Il est « la source de la vie » dit Salomon. Il est le centre de tout,

« la condi­tion de l’exé­cu­tion d’un acte, la force la plus ter­rible et la plus sublime, la plus visible et la plus mys­té­rieuse, la source des plus belles actions et des plus laides, la force qui nous porte au som­met de l’hu­ma­ni­té ou nous pré­ci­pite aux pires déchéances ».

Le cour est la grande source d’in­fluence. Les triomphes de la force, les pres­tiges de la science même ne sont rien en com­pa­rai­son de l’ac­tion qu’exerce un cour en livrant le sien sans cal­cul et sans réserve.

« Tant que tu n’au­ras pas gagné les cours, en livrant le tien sans cal­cul et sans réserve, ton pou­voir sera éphé­mère comme les triomphes de la force. » écrit le père Bessières.

C’est le cour qui donne la mesure d’un homme et de ses suc­cès. Un exemple dans l’his­toire : c’est l’at­ti­tude douce et humble des pre­miers chré­tiens qui assu­ra la vic­toire. On fut tou­ché de leur patience sur­hu­maine ; on se lais­sa convaincre par leur ver­tu ; un jour, il se trou­va qu’ils avaient conquis le monde. L’Eglise a ouvert une école de béni­gni­té, de cha­ri­té, de com­pas­sion ; elle a trans­for­mé tous ses élèves : le Romain orgueilleux comme le Barbare san­gui­naire. Le chef-​d’ouvre de cet incom­pa­rable édu­ca­teur du genre humain a été le che­va­lier du Moyen Age à l’âme si fière et si vaillante dans les com­bats, au cour si doux et si tendre pour toutes les faiblesses.

Le Père Faber dit, en par­lant de la bon­té du cour :

« nous aurions mieux fait de par­ler de l’es­prit de Jésus ».

Oui, le cour est le grand ouvrier des belles réus­sites dans la vie. Le Maréchal Foch aimait cette pen­sée de Mistral :

« Croire conduit à la victoire ».

En effet, la vic­toire est à ceux qui mettent tout leur cour dans ce qu’ils font ; éty­mo­lo­gi­que­ment croire (cre­dere) c’est don­ner son cour – celui qui croit quel­qu’un adhère avec son esprit et son cour par la confiance.

Nous ne devons pas nous dés­in­té­res­ser de la for­ma­tion du cour qui fait ou défait la répu­ta­tion d’un homme. Dans l’o­pi­nion, en effet, le cour occupe la pre­mière place ; l’homme vaut sur­tout par le cour. C’est vrai même dans notre vie si maté­ria­liste. Le cour reste la plus belle réalité.

Les saints ont exer­cé sur leur entou­rage un grand pres­tige par leur cour ou cette bon­té qu’ils ont imi­tée du Divin Maître.

« La bon­té a conver­ti plus de pécheurs que le zèle, l’é­lo­quence ou l’ins­truc­tion ; et ces trois moyens n’ont jamais conver­ti per­sonne sans que la bon­té y ait été pour quelque chose. »

Le rôle du cour en édu­ca­tion est donc très impor­tant. Rien n’entre dans l’homme et n’y reste que par le cour. Si le cour ne se livre pas, l’é­du­ca­tion est dif­fi­cile voire impossible.

Un jour, il était repro­ché à un édu­ca­teur d’a­voir échoué avec un élève intel­li­gent. Pour sa défense, il répondit :

« Que vouliez-​vous que je fisse : il ne m’ai­mait pas ! »

Cet exemple illustre cette véri­té que les parents ont un devoir impé­rieux de don­ner tous leurs soins à la for­ma­tion du cour (avant l’in­tel­li­gence !), et cela le plus tôt pos­sible, c’est-​à-​dire dès le ber­ceau. C’est par le cour que vous pren­drez barre sur la vie de l’en­fant. Sans lui, vous bâti­rez sur le sable.

Le cour est comme un pont jeté entre les sens et la rai­son. Entre les satis­fac­tions sen­sibles et les satis­fac­tions intel­lec­tuelles réside le domaine du sen­ti­ment. Au cour abou­tissent les efforts et les luttes entre les deux. De là son impor­tance capi­tale. Le cour est à la vie morale ce que l’or­gane est à la vie phy­sique : le cour n’est pas le cer­veau, ni le bras, ni le sang et cepen­dant sans le cour le bras est inerte, le cer­veau endor­mi et le sang corrompu.

Si je m’at­tarde aus­si lon­gue­ment sur ce sujet de la for­ma­tion du cour, c’est pour vous aider à apprendre à votre enfant à obéir par amour de Dieu et de ses parents, et non par caprice « quand cela lui plaît » ou selon « son » juge­ment ; dans ce cas, il n’y a pas vrai­ment d’o­béis­sance chré­tienne, même si l’ac­tion est accom­plie. Pour en reve­nir à l’o­béis­sance, vous sai­si­rez pro­gres­si­ve­ment que si l’é­du­ca­tion du cour manque à l’en­fant, il est inca­pable d’o­béir, car Dieu demande l’o­béis­sance joyeuse et amou­reuse qui sup­pose la confiance. L’enfant ne doit pas obéir à sa maman parce qu’il « com­prend » que « c’est bien » mais parce qu’il vous aime, désire vous faire plai­sir et de même vis-​à-​vis de Dieu. L’obéissance est « don de soi et dépas­se­ment de soi ». La déso­béis­sance, au contraire, est un replie­ment sur soi, ne l’ou­blions pas. (cf. St Alphonse de Liguori : ins­truc­tion sur le Décalogue et sur les Sacrements.)

(à suivre…)

Une Religieuse.

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