Synode : l’Instrumentum laboris contient d’autres bombes que celles sur les divorcés « remariés »

Note de la rédac­tion de La Porte Latine :
il est bien enten­du que les com­men­taires repris dans la presse exté­rieure à la FSSPX
ne sont en aucun cas une quel­conque adhé­sion à ce qui y est écrit par ailleurs.

Plusieurs articles publiés dans The Catholic Herald, revue catho­lique bri­tan­nique, sous la signa­ture de Xavier Rynne, notent com­bien les lignes de frac­ture au synode sur la famille sont déjà visibles : qu’il s’a­gisse de ce qu’on accepte de mettre sous le concept de « famille » ou de la ques­tion des divor­cés « rema­riés », ils ont été lar­ge­ment trai­tés par les médias.

Mais au cœur du docu­ment de tra­vail, affirme l’au­teur, il y a une autre bombe qui n’at­tend qu’à explo­ser : celle qui se cache dans le para­graphe 128 qui évoque les mariages mixtes, et qui pour­rait abou­tir à l’ac­cès à la com­mu­nion eucha­ris­tique pour les pro­tes­tants mariés avec des catho­liques.

C’est énorme, et c’est une idée qui ne semble pas avoir été l’ob­jet de dis­cus­sions du synode extra­or­di­naire de 2014 et tout autant de son docu­ment final, la Relation syno­di. L’ajout à l’Instrumentum labo­ris aurait été fait par le car­di­nal Lorenzo Baldisseri ou son équipe de rédac­tion du secré­ta­riat du synode. Rynne sug­gère qu’il a pu être fait à la demande de « cer­tains évêques alle­mands » dans la mesure où ils font cette pro­po­si­tion depuis plu­sieurs années, et la mettent même en œuvre en cer­tains lieux.

Le paragraphe 128 de l” »Instrumentum laboris » ne peut que proposer la communion pour les protestants

Voici le texte du para­graphe 128 : « Certains sug­gèrent que les mariages mixtes soient consi­dé­rés comme des cas de « grave néces­si­té » pour les­quels il est pos­sible à des bap­ti­sés vivant en dehors de la pleine com­mu­nion de l’Église catho­lique, mais qui par­tagent tou­te­fois avec elle la foi concer­nant l’Eucharistie, d’être admis à la récep­tion de ce sacre­ment en l’absence de leurs propres pas­teurs (cf. EdE, 45–46 (40); Conseil pon­ti­fi­cal pour la pro­mo­tion de l’unité des chré­tiens, Directoire pour l’application des prin­cipes et des normes pour l’œcuménisme, 25 mars 1993, 122–128) (41), en tenant compte éga­le­ment des cri­tères spé­ci­fiques à la com­mu­nau­té ecclé­siale à laquelle ils appartiennent. »

Apparemment inno­cent, le para­graphe révèle sa teneur explo­sive dès lors qu’on l’examine de près, affirme Xavier Rynne. « A la sur­face, la pro­po­si­tion fait pen­ser aux dis­po­si­tions qui gou­vernent la récep­tion de la sainte com­mu­nion dans les rites catho­liques par des membres des Eglises ortho­doxes. Mais puisque la loi en vigueur dans l’Eglise pré­voit déjà le cas des ortho­doxes, les prin­ci­paux béné­fi­ciaires de la nou­velle pro­po­si­tion seraient des pro­tes­tants. La pro­po­si­tion se résume donc à ceci : les pro­tes­tants qui pro­fessent une foi en l’Eucharistie et qui se trouvent dans des « mariages mixtes » (c’est-à-dire qui sont mariés avec des catho­liques) pour­raient être admis à la sainte com­mu­nion au cours de la messe catho­lique de manière habi­tuelle, sim­ple­ment parce que leur époux est catholique. »

La condi­tion de l’« absence des propres pas­teurs » serait pro­ba­ble­ment inter­pré­tée de manière large dans la pra­tique, observe Rynne.

L’autre bombe de l” »Instrumentum laboris » : la communion pour les mariages mixtes

Il va de soi qu’une telle dis­po­si­tion ne tou­che­rait pas seule­ment à la dis­ci­pline de l’Eglise, mais à la doc­trine catho­lique sur l’Eucharistie, au cœur même de la foi. « L’Eucharistie n’est pas seule­ment un signe ou un ins­tru­ment d’inclusion sociale », note l’auteur : il s’agit d’une « réa­li­té spi­ri­tuelle pro­fonde, avec des effets spi­ri­tuels – et même divins ».

Faut-​il vrai­ment le rap­pe­ler ? « La récep­tion de l’Eucharistie signi­fie que l’on est en pleine com­mu­nion avec le Corps visible du Christ (et avec le pape et les évêques qui sont ses vicaires) en même temps qu’elle rend effec­tive cette com­mu­nion et qu’elle ren­force cette uni­té. » C’est là l’enseignement constant de l’Eglise, depuis saint Paul jusqu’à Ecclesia de Eucharistia.

« Si l’Eglise admet habi­tuel­le­ment à com­mu­nier ceux qui ne sont pas en pleine com­mu­nion avec elle, le lien fon­da­men­tal entre l’Eucharistie et la com­mu­nion visible sera rom­pu, avec de graves consé­quences pour la doc­trine de l’Eucharistie elle-​même », écrit Rynne.

Des divorcés « remariés » aux protestants : comment le synode sur la famille est invité à détricoter la doctrine eucharistique

En outre, la com­mu­nion exiges des dis­po­si­tions pré­cises, par­mi les­quelles la confes­sion sacra­men­telle – un fait dont la pro­po­si­tion 128 ne parle même pas. Ce n’est que dans des cas de grave néces­si­té, comme celle du mou­rant non catho­lique qui affirme croire de manière catho­lique en la réa­li­té des sacre­ments et qui peut alors, sans avoir été reçu dans l’Eglise catho­lique, rece­voir le sacre­ment de péni­tence, l’onction des malades et l’Eucharistie en tant que viatique…

Rynne qua­li­fie la pro­po­si­tion conte­nue dans l’article 128 comme por­teuse d’une révo­lu­tion aus­si « monu­men­tale » que celle conte­nue dans la pro­po­si­tion Kasper sur les divor­cés « remariés ».

Et de noter qu’il n’y a pas de « grave néces­si­té » dans le fait d’être marié à un ou une catho­lique qui per­mette la récep­tion de la com­mu­nion. « Nous ne pro­po­sons pas la coha­bi­ta­tion comme stra­té­gie pour construire un bon mariage. On ne com­mence pas par l’acte de com­mu­nion le plus pro­fond qui soit dans l’espoir que l’engagement sui­vra. Trop sou­vent, le résul­tat n’est pas l’engagement, mais son contraire, qui va de pair avec une perte de tout sens de la sacra­li­té de l’acte lui-même. »

Il va de soi que ce texte est un appel aux pères synodaux…

Anne Dolhein

Sources : rein​for​ma​tion​.tv/​LPL