Le pape François a reçu le 6 mai 2016 le Prix Charlemagne 2016 pour « son encouragement et son message d’espoir pour la paix et le vivre-ensemble » en Europe. D’après Le Figaro du 23 décembre 2015, date à laquelle le nom du lauréat 2016 a été rendu public par la municipalité d’Aix-la-Chapelle, ce prix « récompense tous les ans une contribution exceptionnelle à l’unification européenne », depuis 1950.
Fait inédit, la cérémonie s’est déroulée au Vatican et non dans la ville allemande d’Aix-la-Chapelle. Devant les plus hauts responsables des principales institutions européennes ainsi que la chancelière allemande Angela Merkel et le roi d’Espagne Felipe, le Saint-Père a fait part de son rêve d’un « nouvel humanisme européen », d’une « Europe jeune », capable « d’être encore mère », où « être migrant ne soit pas un délit ».
Dans son discours, disponible sur le site internet du Vatican, le Saint-Père n’a jamais évoqué « les racines chrétiennes de l’Europe ». Il a préféré rappeler que « l’identité européenne est, et a toujours été, une identité dynamique et multiculturelle ». Quant à la place de l’Eglise au sein de ce « rêve », le pape François a affirmé qu’elle « peut et doit contribuer à la renaissance » du continent à condition qu’elle soit « riche de témoins », pour qu’elle puisse « redonner l’eau pure de l’Evangile aux racines de l’Europe. »
Près de deux semaines plus tard, en recevant six nouveaux ambassadeurs accrédités auprès du Saint-Siège, le 19 mai 2016, François a également prononcé un discours centré sur l’accueil des migrants. « De nombreuses personnes tendent à s’isoler face à la dureté de la réalité », a déploré le pape. Et de souhaiter : « une intégration qui respecte l’identité des migrants et qui préserve la culture de la communauté qui les accueille et, en même temps, qui les enrichit mutuellement ».
Dans un entretien publié le même jour, par le quotidien français La Croix, le souverain pontife a admis qu’on « ne peut pas ouvrir grand les portes de façon irrationnelle. » Il a toutefois dénoncé les « ghettos » et appelé à l’« intégration », donnant comme exemple le nouveau maire de Londres, Sadiq Khan, fils de Pakistanais et musulman qui a « prêté serment dans une cathédrale (…) Cela montre pour l’Europe l’importance de retrouver sa capacité d’intégrer. »
Citant le quotidien tchèque Lidove noviny, La Croix du 10 mai rapportait que le cardinal Dominik Duka, archevêque de Prague « s’(était) montré sceptique envers la gestion de la question des migrants de la part du pape François ». Evoquant le voyage du souverain pontife sur l’île grecque de Lesbos et sa décision de ramener des réfugiés au Vatican en avril 2016, il a déclaré : « ce n’est pas une solution globale ». Il reprochait aussi aux médias de se focaliser sur le pape et d’oublier que ce dernier « envoie le cardinal Pietro Parolin à l’ONU pour demander une intervention humanitaire ». Il admet toutefois que « la sensibilité du pape François sur les questions sociales est différente de la nôtre, en Europe », rappelant ses origines sud-américaines, où « le fossé entre les riches et les pauvres est plus important ».
Dans un éditorial publié le 9 mai, intitulé « Que d’erreurs dans l’immigrationnisme de François », un contributeur du blog italien Campari & de Maistre soupçonne le Saint-Père d’aimer « tellement les pauvres qu’il en veut davantage ». Craignant que le « nouvel humanisme » proclamé lors de la remise du Prix Charlemagne ne soit « finalement terriblement confus », Alessandro Rico n’hésite pas à conclure : « L’allure oscillante de ce pontificat semble plonger dans la confusion plutôt que conforter les catholiques égarés. »
Sources : apic/imedia/afp/lefigaro /vatican/benoitetmoi/lacroix – n°336 du 27/05/16