Concile de Trente

19ᵉ œcuménique ; 13 déc. 1545-4 déc. 1563

13 janvier 1547, 6e session

Décret sur la justification

Table des matières

Préambule

Ce n’est pas sans la perte de nom­breuses âmes et un grave détri­ment pour l’unité de l’Église que s’est répan­due en notre temps une doc­trine erro­née concer­nant la jus­ti­fi­ca­tion. Aussi, pour la louange et la gloire du Dieu tout-​puissant, pour la paix de l’Église et le salut des âmes, le saint concile œcu­mé­nique et géné­ral de Trente… se pro­pose d’exposer à tous les chré­tiens la véri­table et sainte doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion qu’a ensei­gnée le Christ Jésus, soleil de jus­tice [Ml 4, 2], auteur de notre foi, qui la mène à sa per­fec­tion [He 12, 2] que les apôtres nous ont trans­mise et que l’Église catho­lique, sous l’inspiration de l’Esprit Saint, a tou­jours conser­vée, en inter­di­sant sévè­re­ment que per­sonne n’ose à l’avenir croire, prê­cher ou ensei­gner autre­ment que ce qui est sta­tué et décla­ré par le pré­sent décret.

Chap. 1. Impuissance de la nature et de la Loi à justifier les hommes.

En pre­mier lieu, le saint concile déclare que. pour avoir une intel­li­gence exacte et authen­tique de la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion, il faut que cha­cun recon­naisse et confesse que, tous les hommes ayant per­du l’innocence dans la pré­va­ri­ca­tion d’Adam [voir Rm 5, 12 ; 1 Co 15, 22 ; ], « deve­nus impurs » [Is 64, 6] et (comme le dit l’Apôtre) « enfants de colère par nature » [Ep 2, 3] comme cela a été expo­sé dans le décret sur le péché ori­gi­nel, ils étaient à ce point « esclaves du péché » [Rm 6, 20] et sous le pou­voir du diable et de la mort, que non seule­ment les païens, par la force de la nature [can. 1], mais aus­si les juifs, par la lettre même de la Loi de Moïse, ne pou­vaient se libé­rer ou se rele­ver de cet état, même si le libre arbitre n’était aucu­ne­ment éteint en eux [can. 5], bien qu’affaibli et dévié en sa force .

Chap. 2. L’économie et le mystère de la venue du Christ

D’où il arri­va que le Père céleste, « Père des misé­ri­cordes et Dieu de toute conso­la­tion » [2 Co 1, 3], envoya aux hommes le Christ Jésus, son Fils [can. 1], annon­cé et pro­mis aus­si bien avant la Loi qu’au temps de la Loi à de nom­breux saints Pères [Gn 49, 10 ; Gn 49, 18], lorsque vint cette bien­heu­reuse « plé­ni­tude des temps » [Ep 1, 10 ; Ga 4, 4], afin que, d’une part, « il rachète les juifs sujets de la Loi » [Ga 4, 5] et que, de l’autre, « les païens qui ne pour­sui­vaient pas de jus­tice, atteignent la jus­tice » [Rm 9, 30], et que tous reçoivent l’adoption filiale [Ga 4, 5]. C’est lui que « Dieu a éta­bli vic­time pro­pi­tia­toire par son sang moyen­nant la foi » [Rm 3, 25] « pour nos péchés, non seule­ment pour les nôtres, mais aus­si pour ceux du monde entier » [1 Jn 2, 2].

Chap. 3. Ceux qui sont justifiés par le Christ

Mais, bien que lui soit « mort pour tous » [2 Co 5, 15], tous cepen­dant ne reçoivent pas le bien­fait de sa mort. mais ceux-​là seule­ment aux­quels le mérite de sa Passion est com­mu­ni­qué. En effet, de même qu’en toute véri­té les hommes ne naî­traient pas injustes s’ils ne nais­saient de la des­cen­dance issue cor­po­rel­le­ment d’Adam, puisque, quand ils sont conçus, ils contractent une injus­tice per­son­nelle par le fait qu’ils des­cendent cor­po­rel­le­ment de lui, de même ils ne seraient jamais jus­ti­fiés s’ils ne renais­saient pas dans le Christ, puisque, grâce à cette renais­sance, leur est accor­dé par le mérite de sa Passion la grâce par laquelle ils deviennent justes. Pour ce bien­fait l’Apôtre nous exhorte à tou­jours « rendre grâce au Père qui nous a ren­dus dignes d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière et nous a arra­chés à la puis­sance des ténèbres et trans­fé­rés dans le Royaume de son Fils bien-​aimé, en qui nous avons la Rédemption et la rémis­sion des péchés » [Col 1, 12–14]

Chap. 4. Esquisse d’une description de la justification de l’impie. Son mode dans l’état de grâce

Ces mots esquissent une des­crip­tion de la jus­ti­fi­ca­tion de l’impie, comme étant un trans­fert de l’état dans lequel l’homme naît du pre­mier Adam à l’état de grâce et d’adoption des fils de Dieu [Rm 8, 15], par le second Adam, Jésus Christ, notre Sauveur. Après la pro­mul­ga­tion de l’Évangile, ce trans­fert ne peut se faire sans le bain de la régé­né­ra­tion [can. 5] ou le désir de celui-​ci, selon ce qui est écrit « Nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu s’il ne renaît pas de l’eau et de l’Esprit Saint » [Jn 3, 5].

Chap. 5. Nécessité pour les adultes d’une préparation à la justification. Son origine

Le concile déclare, en outre, que la jus­ti­fi­ca­tion elle-​même chez les adultes a son ori­gine dans la grâce pré­ve­nante de Dieu par Jésus Christ [can.3], c’est-à-dire dans un appel de Dieu par lequel ils sont appe­lés sans aucun mérite en eux. De la sorte, ceux qui s’étaient détour­nés de Dieu par leurs péchés, pous­sés et aidés par la grâce, se dis­posent à se tour­ner vers la jus­ti­fi­ca­tion que Dieu leur accorde, en acquies­çant et coopé­rant libre­ment à cette même grâce [can.4 et 5]. De cette manière, Dieu tou­chant le cœur de l’homme par l’illumination de l’Esprit Saint, d’une part l’homme lui-​même n’est pas tota­le­ment sans rien faire, lui qui accueille cette ins­pi­ra­tion qu’il lui est pos­sible de reje­ter, d’autre part, pour­tant, sans la grâce de Dieu, il ne lui est pas pos­sible, par sa propre volon­té, d’aller vers la jus­tice en pré­sence de Dieu [can.3]. Aussi, lorsqu’il est dit dans la sainte Écriture « Tournez-​vous vers moi et moi je me tour­ne­rai vers vous » [Za 1, 3], notre liber­té nous est rap­pe­lée ; lorsque nous répon­dons « Tourne-​nous vers toi, Seigneur, et nous nous conver­ti­rons » [Lm 5, 21], nous recon­nais­sons que la grâce de Dieu nous prévient.

Chap. 6. Mode de la préparation

Les hommes sont dis­po­sés à la jus­tice elle-​même [can.7 et 9] lorsque, pous­sés et aidés par la grâce divine, conce­vant en eux la foi qu’ils entendent prê­cher [Rm 10, 17], ils vont libre­ment vers Dieu, croyant qu’est vrai tout ce qui a été divi­ne­ment révé­lé et pro­mis [can.12–14] et, avant tout que Dieu jus­ti­fie l’impie « par sa grâce, au moyen de la Rédemption qui est dans le Christ Jésus » [Rm 3, 24] ; lorsque, aus­si, com­pre­nant qu’ils sont pécheurs et pas­sant de la crainte de la jus­tice divine, qui les frappe fort uti­le­ment [can.8, ], à la consi­dé­ra­tion de la misé­ri­corde de Dieu, ils s’élèvent à l’espérance, confiants que Dieu, à cause du Christ, leur sera favo­rable, com­mencent à l’aimer comme source de toute jus­tice, et, pour cette rai­son, se dressent contre les péchés, ani­més par une sorte de haine et de détes­ta­tion [can.9], c’est-à-dire par cette péni­tence que l’on doit faire avant le bap­tême [Ac 2, 38] ; lorsque, enfin, ils se pro­posent de rece­voir le bap­tême, de com­men­cer une vie nou­velle et d’observer les com­man­de­ments divins.

De cette dis­po­si­tion il est écrit : « Celui qui approche de Dieu doit croire qu’il est et qu’il récom­pense ceux qui le cherchent » [He 11, 6], et : « Aie confiance, mon fils, tes péchés te sont remis » [Mt 9, 2], et « La crainte du Seigneur chasse les péchés » [Si 1, 27], et : « Faites péni­tence et que cha­cun de vous soit bap­ti­sé au nom de Jésus Christ, pour la rémis­sion de ses péchés, et vous rece­vrez le don de l’Esprit Saint » [Ac 2, 38], et « Allez donc, ensei­gnez toutes les nations, les bap­ti­sant au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit, leur appre­nant à obser­ver tout ce que je vous ai com­man­dé » [Mt 28, 19–20] et : « Préparez vos cœurs pour le Seigneur » [1 S 7, 3].

Chap. 7 La justification de l’impie et ses causes.

Cette dis­po­si­tion ou pré­pa­ra­tion est sui­vie par la jus­ti­fi­ca­tion elle-​même, qui n’est pas seule­ment rémis­sion des péchés [can. 11], mais à la fois sanc­ti­fi­ca­tion et réno­va­tion de l’homme inté­rieur par la récep­tion volon­taire de la grâce et des dons. Par là, d’injuste l’homme devient juste, d’ennemi ami, en sorte qu’il est « Héritier, en espé­rance, de la vie éter­nelle » [Tt 3, 7]

Les causes de cette jus­ti­fi­ca­tion sont celles-​ci : cause finale, la gloire de Dieu et du Christ, et la vie éter­nelle ; cause effi­ciente : Dieu qui, dans sa misé­ri­corde, lave et sanc­ti­fie gra­tui­te­ment [1 Co 6, 11] par le sceau et l’onction [2 Co 1, 21–22] de l’Esprit Saint pro­mis « qui est le gage de notre héri­tage » [Ep 1, 13–14] ; cause méri­toire : le Fils unique bien-​aimé de Dieu, notre Seigneur Jésus Christ qui, « alors que nous étions enne­mis » [Rm 5, 10], « à cause du grand amour dont il nous a aimés » [Ep 2, 4], par sa très sainte Passion sur le bois de la croix nous a méri­té la jus­ti­fi­ca­tion [can.10 ] et a satis­fait pour nous à Dieu son Père ; cause ins­tru­men­tale, le sacre­ment du bap­tême, « sacre­ment de la foi » sans laquelle il n’y a jamais eu de jus­ti­fi­ca­tion pour personne.

Enfin l’unique cause for­melle est la jus­tice de Dieu, « non pas celle par laquelle il est juste lui-​même, mais celle par laquelle elle nous fait justes », c’est-à-dire celle par laquelle, l’ayant reçue en don de lui, nous sommes « renou­ve­lés par une trans­for­ma­tion spi­ri­tuelle de notre esprit » [Ep 4, 23] nous ne sommes pas seule­ment répu­tés justes, mais nous sommes dits et nous sommes vrai­ment justes [1 Jn 3, 1], rece­vant cha­cun en nous la jus­tice, selon la mesure que l’Esprit Saint par­tage à cha­cun comme il le veut [1 Co 12, 11] et selon la dis­po­si­tion et la coopé­ra­tion propres à chacun.

En effet, bien que per­sonne ne puisse être juste que si les mérites de la Passion de notre Seigneur Jésus Christ lui sont com­mu­ni­qués, c’est cepen­dant ce qui se fait dans la jus­ti­fi­ca­tion de l’impie, alors que, par le mérite de cette très sainte Passion, la cha­ri­té de Dieu est répan­due par l’Esprit Saint dans les cœurs [Rm 5, 5] de ceux qui sont jus­ti­fiés et habite en eux [can.11]. Aussi, avec la rémis­sion des péchés, l’homme reçoit-​il dans la jus­ti­fi­ca­tion même par Jésus Christ, en qui il est insé­ré, tous les dons sui­vants infus en même temps : la foi, l’espérance et la charité.

Car la foi à laquelle ne se joignent ni l’espérance ni la cha­ri­té n’unit pas par­fai­te­ment au Christ et ne rend pas membre vivant de son corps. Pour cette rai­son, l’on dit en toute véri­té que la foi sans les œuvres est morte et inutile [voir Jc 2, 17–20 ; can.19], et que dans le Christ Jésus ni la cir­con­ci­sion, ni l’incirconcision n’ont de valeur, mais la foi « qui opère par la cha­ri­té » [Ga 5, 6 ; Ga 6, 15].

C’est elle que, selon la tra­di­tion des apôtres, les caté­chu­mènes demandent à l’Église avant le sacre­ment du bap­tême, quand ils demandent « la foi qui pro­cure la vie éter­nelle » que, sans l’espérance et la cha­ri­té, la foi ne peut pro­cu­rer. Aussi entendent-​ils immé­dia­te­ment la parole du Christ : « Si tu veux entrer dans la vie, observe les com­man­de­ments » [Mt 19, 17 ; can.18–20]. C’est pour­quoi lorsqu’ils reçoivent la jus­tice véri­table et chré­tienne, cette pre­mière robe [Lc 15, 22] qui leur est don­née par le Christ à la place de celle que, par sa déso­béis­sance, Adam a per­due pour lui et pour nous, il est ordon­né aus­si­tôt à ceux qui viennent de renaître de la conser­ver blanche et sans tache, pour l’apporter devant le tri­bu­nal de notre Seigneur Jésus Christ et avoir la vie éternelle.

Chap. 8. Comment comprendre que l’impie est justifié par la foi et gratuitement

Lorsque l’Apôtre dit que l’homme est « jus­ti­fié par la foi » [can.9] et gra­tui­te­ment [Rm 3, 22–24], il faut com­prendre ces mots dans le sens où l’a tou­jours et una­ni­me­ment tenu et expri­mé l’Église catho­lique, à savoir que si nous sommes dits être jus­ti­fiés par la foi, c’est parce que « la foi est le com­men­ce­ment du salut de l’homme », le fon­de­ment et la racine de toute jus­ti­fi­ca­tion, que sans elle « il est impos­sible de plaire à Dieu » [He 11, 6] et de par­ve­nir à par­ta­ger le sort de ses enfants [2 P 1, 4] ; et nous sommes dits être jus­ti­fiés gra­tui­te­ment parce que rien de ce qui pré­cède la jus­ti­fi­ca­tion, que ce soit la foi ou les œuvres, ne mérite cette grâce de la jus­ti­fi­ca­tion. En effet « Si c’est une grâce, elle ne vient pas des œuvres ; autre­ment (comme le dit le même Apôtre) la grâce n’est plus la grâce » [Rm 11, 6].

Chap. 9. Contre la vaine confiance des hérétiques

Bien qu’il soit indis­pen­sable de croire que les péchés ne sont et n’ont jamais été remis que gra­tui­te­ment par misé­ri­corde divine à cause du Christ, cepen­dant per­sonne ne doit, en se tar­guant de la confiance et de la cer­ti­tude que ses péchés sont remis et en se repo­sant sur cela, dire que ses péchés sont ou ont été remis, alors que cette confiance vaine et éloi­gnée de toute pié­té peut exis­ter chez des héré­tiques et des schis­ma­tiques, bien plus que de notre temps elle existe et est prê­chée à grand bruit contre l’Église catho­lique [can.12].

Mais il ne faut pas non plus affir­mer que tous ceux qui ont été vrai­ment jus­ti­fiés doivent être sans aucune hési­ta­tion convain­cus en eux-​mêmes qu’ils ont été jus­ti­fiés, ni que per­sonne n’est absous de ses péchés et jus­ti­fié, sauf celui qui croit avec cer­ti­tude qu’il a été absous et jus­ti­fié, et que c’est par cette seule foi que se réa­lise l’absolution et la jus­ti­fi­ca­tion [can.14], comme si celui qui ne croit pas cela met­tait en doute les pro­messes de Dieu et l’efficacité de la mort et de la Résurrection du Christ. En effet, de même qu’aucun homme pieux ne doit mettre en doute la misé­ri­corde de Dieu, les mérites du Christ, la ver­tu et l’efficacité des sacre­ments, de même qui­conque se consi­dère lui-​même, ain­si que sa propre fai­blesse et ses mau­vaises dis­po­si­tions, peut être rem­pli d’effroi et de crainte au sujet de sa grâce [can. 13], puisque per­sonne ne peut savoir, d’une cer­ti­tude de foi excluant toute erreur, qu’il a obte­nu la grâce de Dieu.

Chap. 10. L’accroissement de la grâce reçue

Ainsi donc, ceux qui ont été jus­ti­fiés et sont deve­nus « amis de Dieu » et « membres de sa famille » [Jn 15, 15 ; Ep 2, 19] mar­chant « de ver­tu en ver­tu » [Ps 83, 8] se renou­vellent (comme dit l’Apôtre) de jour en jour [2 Co 4, 16], c’est-à-dire en mor­ti­fiant les membres de leur chair [Col 3, 5] et en les pré­sen­tant comme des armes à la jus­tice pour la sanc­ti­fi­ca­tion [Rm 6, 13–19], par l’observation des com­man­de­ments de Dieu et de l’Église ; ils croissent dans cette jus­tice reçue par la grâce du Christ, la foi coopé­rant aux bonnes œuvres [Jc 2, 22] et ils sont davan­tage jus­ti­fiés [can. 24 et 32], selon ce qui est écrit : « Celui qui est juste, sera encore jus­ti­fié » [Ap 22, 11] et aus­si : « Ne crains pas d’être jus­ti­fié jusqu’à la mort » [Si 18, 22] et encore « Vous voyez que l’homme est jus­ti­fié par les œuvres et non par la foi seule » [Jc 2, 24] Cet accrois­se­ment de jus­tice, la sainte Église le demande quand elle dit dans la prière : « Seigneur, aug­mente en nous la foi, l’espérance et la charité. »

Chap. 11. L’observation des commandements. Sa nécessité et sa possibilité.

Personne, si jus­ti­fié soit-​il, ne doit pen­ser qu’il est libé­ré de l’observation des com­man­de­ments [can. 20]. Personne ne doit user de cette expres­sion témé­raire et inter­dite sous peine d’anathèmes par les Pères, à savoir que pour l’homme jus­ti­fié les com­man­de­ments de Dieu sont impos­sibles à obser­ver [can. 18 et 22]. « Car Dieu ne com­mande pas de choses impos­sibles, mais en com­man­dant il t’invite à faire ce que tu peux et à deman­der ce que tu ne peux pas », et il t’aide pour que tu le puisses ; ses com­man­de­ments ne sont pas pesants [1 Jn 5, 3], son joug est doux et son far­deau léger [Mt 11, 30] En effet, ceux qui sont enfants de Dieu aiment le Christ ; ceux qui l’aiment (comme il en témoigne lui-​même) gardent ses paroles [Jn 14, 23] ce qui leur est tou­jours pos­sible avec l’aide de Dieu.

Bien qu’en cette vie mor­telle, aus­si saints et justes qu’ils soient, ils tombent par­fois au moins dans les péchés légers et quo­ti­diens, qu’on appelle aus­si véniels [can. 23], ils ne cessent pas pour autant d’être justes. En effet l’expression humble et authen­tique des justes est celle-​ci : « Remets-​nous nos dettes » [Mt 6, 12 ; voir s].

C’est pour­quoi les justes eux-​mêmes doivent se sen­tir d’autant plus obli­gés à mar­cher dans la voie de la jus­tice que, désor­mais « libé­rés du péché, deve­nus ser­vi­teurs de Dieu » [Rm 6, 22], vivant « dans la tem­pé­rance, la jus­tice et la pié­té » [Tt 2, 12], ils peuvent pro­gres­ser par le Christ Jésus qui leur a ouvert l’accès à cette grâce [Rm 5, 2]. Car ceux qu’il a jus­ti­fiés une fois, « Dieu ne les aban­donne pas, à moins qu’il ne soit d’abord aban­don­né par eux ».

C’est pour­quoi per­sonne ne doit se ras­su­rer dans la foi seule [can.9 ; 19 ; 20 ], pen­sant que par la foi seule il a été consti­tué héri­tier et obtien­dra l’héritage, même s’il ne souffre pas avec le Christ pour être glo­ri­fié avec lui [Rm 8, 17]. Car le Christ lui-​même (comme le dit l’Apôtre), « tout Fils de Dieu qu’il fût, a appris par ses souf­frances à obéir, et, ayant tout accom­pli, est deve­nu cause de salut éter­nel pour tous ceux qui lui obéissent » [He 5, 8–9].

C’est pour­quoi l’Apôtre lui-​même aver­tit ceux qui ont été jus­ti­fiés en ces termes : « Ne savez-​vous pas que, dans les courses du stade, tous courent, mais un seul obtient le prix ? Courez de manière à le rem­por­ter. Pour moi, donc, c’est ain­si que je cours, non à l’aventure ; c’est ain­si que je com­bats, non comme en frap­pant dans le vide. Mais je châ­tie mon corps et je le réduis en escla­vage, de peur qu’après avoir prê­ché aux autres je ne sois moi-​même éli­mi­né » [1 Co 9, 24 s]. Et Pierre, le prince des Apôtres « Appliquez-​vous à rendre cer­taine votre voca­tion et votre élec­tion par vos bonnes œuvres ; en agis­sant ain­si vous ne péche­rez jamais » [2 P 1, 10].

Il est par là évident qu’ils s’opposent à la doc­trine ortho­doxe de la reli­gion ceux qui disent que, dans toute bonne action, le juste pèche au moins véniel­le­ment [can. 25] ou (ce qui est plus into­lé­rable) mérite les peines éter­nelles ; de même aus­si ceux qui déclarent que les justes pèchent dans toutes leurs actions, si, vou­lant secouer en eux l’indolence et s’encourager à cou­rir dans le stade, ils consi­dèrent, en même temps que la glo­ri­fi­ca­tion mise en pre­mier lieu, la récom­pense éter­nelle [can. 26 ; 31], alors qu’il est écrit : « J’ai dis­po­sé mon cœur à la pra­tique de tes pres­crip­tions à cause de la récom­pense » [Ps 118, 112], et que l’Apôtre dit de Moïse qu’il « avait les yeux fixés sur la récom­pense » [He 11, 26].

Chap. 12. On doit se garder d’une présomption téméraire concernant la prédestination.

Personne non plus, aus­si long­temps qu’il vit dans la condi­tion mor­telle, ne doit pré­su­mer du mys­tère caché de la pré­des­ti­na­tion divine qu’il déclare avec cer­ti­tude qu’il est abso­lu­ment du nombre des pré­des­ti­nés [can.15], comme s’il était vrai qu’une fois jus­ti­fié ou bien il ne puisse plus pécher [can. 23] ou bien, s’il venait à pécher, il doive se pro­mettre une repen­tance cer­taine. Car, à moins d’une révé­la­tion spé­ciale, on ne peut savoir ceux que Dieu s’est choi­sis [can. 16].

Chap. 13. Le don de la persévérance

Il en est de même du don de la per­sé­vé­rance [can.16]. Il est écrit à son sujet : « Celui qui per­sé­vé­re­ra jusqu’à la fin sera sau­vé » [Mt 10, 22 ; Mt 24, 13] : cela ne peut se faire que par celui qui « a le pou­voir de main­te­nir celui qui est debout pour qu’il conti­nue de l’être » [Rm 14, 4] et de rele­ver celui qui tombe. Que per­sonne donc ne se pro­mette rien de sûr avec une cer­ti­tude abso­lue, bien que tous doivent pla­cer et faire repo­ser dans le secours de Dieu la plus ferme espé­rance. Car Dieu, s’ils ne sont pas infi­dèles à sa grâce, mène­ra à son terme la bonne œuvre, comme il l’a déjà com­men­cée [Ph 1, 6], opé­rant en eux le vou­loir et le faire [Ph 2, 13 ; can. 22].

Pourtant, que ceux qui se croient être debout, veillent à ne pas tom­ber [1 Co 10, 12] et tra­vaillent à leur salut avec crainte et trem­ble­ment [Ph 2, 12] dans les fatigues, les veilles, les aumônes, les prières et les offrandes, dans le jeûne et la chas­te­té [2 Co 6, 5–6]. Sachant, en effet, qu’ils sont nés de nou­veau dans l’espérance de la gloire [1 P 1, 3] mais pas encore dans la gloire, ils doivent avoir des craintes concer­nant le com­bat qui leur reste contre la chair, contre le monde, contre le diable, com­bat dans lequel ils ne peuvent être vain­queurs que si, avec la grâce de Dieu, ils obéissent aux paroles de l’Apôtre : « Nous ne sommes plus tenu, vis-​à-​vis de la chair, de vivre selon la chair. Si vous vivez, en effet, selon la chair, vous mour­rez. Mais si par l’Esprit vous faites mou­rir les œuvres de la chair, vous vivrez » [Rm 8, 12–13].

Chap. 14. Ceux qui sont tombés et leur relèvement

Ceux qui, après avoir reçu la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion, en sont déchus par le péché pour­ront être de nou­veau jus­ti­fiés [can. 29] lorsque, pous­sés par Dieu, ils feront en sorte de retrou­ver la grâce per­due au moyen du sacre­ment de la péni­tence, grâce aux mérites du Christ. Ce mode de jus­ti­fi­ca­tion est le relè­ve­ment du pécheur, que les saints Pères ont fort bien appe­lé « la seconde planche après le nau­frage qu’est la perte de la grâce ». En effet pour ceux qui tombent dans le péché après le bap­tême, le Christ Jésus a ins­ti­tué le sacre­ment de la péni­tence, lorsqu’il dit « Recevez le Saint-​Esprit, à ceux à qui vous remet­trez les péchés, ils seront remis, et ils seront rete­nus à ceux à qui vous les retien­drez » [Jn 20, 22–23].

Aussi faut-​il ensei­gner que la péni­tence du chré­tien après une chute est très dif­fé­rente de la péni­tence bap­tis­male. Elle com­prend non seule­ment l’abandon des péchés et leur détes­ta­tion, ou « un cœur contrit et humi­lié » [Ps 50, 19] mais aus­si la confes­sion sacra­men­telle de ceux-​ci, ou du moins le désir de la faire en temps oppor­tun, l’absolution par un prêtre, et, de plus, la satis­fac­tion par le jeûne, les aumônes, les prières et autres pieux exer­cices de la vie spi­ri­tuelle, non pour remettre la peine éter­nelle – laquelle est remise en même temps que la faute par le sacre­ment ou le désir du sacre­ment -, mais pour remettre la faute tem­po­relle [can. 30] qui (comme l’enseigne l’Écriture sainte) n’est pas tou­jours tota­le­ment remise, comme elle l’est au bap­tême, à ceux qui, ingrats envers la grâce de Dieu qu’ils ont reçue, ont contris­té l’Esprit Saint [Ep 4, 30] et n’ont pas craint de vio­ler le Temple de Dieu [1 Co 3, 17]

Il est écrit de cette péni­tence : « Souviens-​toi d’où tu es tom­bé, fais péni­tence et reviens à tes pre­mières œuvres » [Ap 2, 51] et aus­si : « La tris­tesse selon Dieu pro­duit une péni­tence pour un salut durable » [2 Co 7, 10] et encore « Faites péni­tence » [Mt 3, 2 ; Mt 4, 17], et « Faites de dignes fruits de péni­tence » [Mt 3, 8 ; Lc 3, 8].

Chap. 15. Tout péché mortel fait perdre la grâce, mais non la foi.

Contre les esprits rusés de cer­tains hommes qui, « par de doux dis­cours et des béné­dic­tions, séduisent les cœurs simples » [Rm 16, 18], il faut affir­mer que la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion, qui a été reçue, se perd non seule­ment par l’infidélité [can. 27], par laquelle se perd aus­si la foi elle-​même, mais aus­si par n’importe quel péché mor­tel, bien qu’alors ne se perde pas la foi [can. 28]. On défend ain­si la doc­trine de la Loi divine qui exclut du Royaume de Dieu non seule­ment les infi­dèles, mais aus­si les fidèles for­ni­ca­teurs, adul­tères, effé­mi­nés, sodo­mites, voleurs, avares, ivrognes, médi­sants, rapaces [1 Co 6, 9–10] et tous les autres qui com­mettent des péchés mor­tels dont, avec l’aide de la grâce divine, ils peuvent s’abstenir et à cause des­quels ils sont sépa­rés de la grâce du Christ [can. 27].

Chap. 16. Le fruit de la justification : le mérite, les bonnes œuvres. Sa nature

C’est donc dans cette pers­pec­tive qu’il faut pro­po­ser aux hommes jus­ti­fiés, qu’ils aient sans cesse gar­dé la grâce reçue ou qu’ils l’aient recou­vrée après l’avoir per­due, les mots de l’Apôtre : « Soyez riches de toute œuvre bonne, sachant que votre labeur n’est pas vain dans le Seigneur » [1 Co 15, 58] car « Dieu n’est pas injuste au point d’oublier ce que vous avez fait et la cha­ri­té dont vous avez fait preuve en son nom » [He 6, 10], et : « Ne per­dez pas votre confiance ; elle aura une grande récom­pense » [He 10, 35]. Et c’est pour­quoi, à ceux qui agissent bien « jusqu’à la fin » [Mt 10, 22 ; Mt 24, 13] et qui espèrent en Dieu, il faut pro­po­ser la vie éter­nelle à la fois comme la grâce misé­ri­cor­dieu­se­ment pro­mise par le Christ Jésus aux fils de Dieu et « comme la récom­pense », que Dieu, selon la pro­messe qu’il a faite lui-​même, accor­de­ra à leurs œuvres bonnes et à leurs mérites [can. 26 ; 32]. Telle est, en effet, « la cou­ronne de jus­tice » dont l’Apôtre disait qu’elle lui était « réser­vée après son com­bat et sa course et lui serait don­née par le juste juge, non seule­ment à lui, mais aus­si à tous ceux qui attendent avec amour son avè­ne­ment » [2 Tm 4, 7–8].

Le Christ Jésus lui-​même com­mu­nique constam­ment sa force à ceux qui ont été jus­ti­fiés, comme la tête aux membres [Ep 4, 15], comme le cep aux sar­ments [Jn 15, 5] force qui tou­jours pré­cède, accom­pagne et suit leurs bonnes œuvres et sans laquelle celles-​ci ne pour­raient en aucune manière être agréables à Dieu et méri­toires [can. 2]. Aussi faut-​il croire qu’il ne manque rien d’autre aux jus­ti­fiés eux-​mêmes pour qu’ils soient esti­més avoir plei­ne­ment satis­fait à la Loi de Dieu, dans les condi­tions de cette vie, par ces œuvres qui ont été faites en Dieu [Jn 3, 21], et avoir vrai­ment méri­té d’obtenir, en son temps, la vie éter­nelle [can. 32], si tou­te­fois ils meurent dans la grâce [Ap 14, 13]. Le Christ notre Sauveur ne dit-​il pas : « Si quelqu’un boit de l’eau que je lui don­ne­rai, il n’aura jamais soif ; elle devien­dra en lui une source d’eau jaillis­sant pour la vie éter­nelle » [Jn 4, 14] ?

Ainsi notre jus­tice per­son­nelle n’est pas éta­blie comme venant per­son­nel­le­ment de nous [2 Co 3, 5] et la jus­tice de Dieu n’est ni mécon­nue ni reje­tée [Rm 10, 3]. En effet cette jus­tice est dite nôtre, parce que nous sommes jus­ti­fiés par cette jus­tice qui habite en nous [can. 10 et 11] ; et cette même jus­tice est celle de Dieu, parce qu’elle est répan­due en nous par Dieu et par les mérites du Christ.

Il ne faut pas omettre ceci : la sainte Écriture attri­bue, certes, une telle valeur aux bonnes œuvres que le Christ pro­met que même celui qui donne à l’un de ses plus petits un verre d’eau fraîche ne per­dra pas sa récom­pense [Mt 10, 42 ; Mc 9, 40] ; et l’Apôtre atteste que notre « légère tri­bu­la­tion d’un ins­tant nous pré­pare au-​delà de toute mesure un poids éter­nel de gloire dans les cieux » [2 Co 4, 17] Cependant, loin de nous de pen­ser que le chré­tien se confie ou se glo­ri­fie en lui-​même et non pas dans le Seigneur [1 Co 1, 31 ; 2 Co 10, 17] dont la bon­té envers les hommes est si grande qu’il veut que ses dons soient leurs mérites [can. 32].

Et parce que « nous péchons tous en bien des choses » [Jc 3, 2 ; can. 23], cha­cun doit avoir devant les yeux non seule­ment la misé­ri­corde et la bon­té, mais aus­si la sévé­ri­té et le juge­ment, et l’on ne doit pas se juger soi-​même, même si on n’est conscient d’aucune faute. Car toute la vie des hommes doit être exa­mi­née et jugée non pas par un juge­ment d’homme, mais par celui de Dieu « qui éclai­re­ra les secrets des ténèbres et ren­dra mani­festes les secrets des cœurs ; et alors cha­cun rece­vra de Dieu la louange qui lui revient » [1 Co 4, 4 s], lui qui, comme il est écrit, « ren­dra à cha­cun selon ses œuvres » [Rm 2, 6]

Après avoir expo­sé la doc­trine catho­lique concer­nant la jus­ti­fi­ca­tion [can. 33], que cha­cun rece­vra fidè­le­ment et fer­me­ment pour être jus­ti­fié, le saint concile a jugé bon d’y joindre les canons sui­vants, pour que tous sachent non seule­ment ce qu’ils doivent tenir et suivre, mais aus­si ce qu’ils doivent évi­ter et fuir.

Canons sur la justification.

1. Si quelqu’un dit que l’homme peut être jus­ti­fié devant Dieu par ses œuvres – que celles-​ci soient accom­plies par les forces de la nature humaine ou par l’enseignement de la loi – sans la grâce divine venant par Jésus Christ : qu’il soit anathème .

2. Si quelqu’un dit que la grâce divine venant par Jésus Christ n’est don­née que pour que l’homme puisse plus faci­le­ment vivre dans la jus­tice et méri­ter la vie éter­nelle, comme si, par le libre arbitre et sans la grâce, il pou­vait par­ve­nir à l’une et à l’autre chose, tou­te­fois péni­ble­ment et dif­fi­ci­le­ment : qu’il soit anathème.

3. Si quelqu’un dit que, sans l’inspiration pré­ve­nante du Saint-​Esprit et sans son aide, l’homme peut croire, espé­rer et aimer, ou se repen­tir, comme il le faut, pour que lui soit accor­dée la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion : qu’il soit anathème .

4. Si quelqu’un dit que le libre arbitre de l’homme, mû et pous­sé par Dieu, ne coopère en rien quand il acquiesce à Dieu, qui le pousse et l’appelle à se dis­po­ser et pré­pa­rer à obte­nir la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion, et qu’il ne peut refu­ser d’acquiescer, s’il le veut, mais que tel un être inani­mé il ne fait abso­lu­ment rien et se com­porte pure­ment pas­si­ve­ment : qu’il soit anathème .

5. Si quelqu’un dit que, après le péché d’Adam, le libre arbitre de l’homme a été per­du et éteint, ou qu’il est une réa­li­té qui n’en porte que le nom, bien plus un nom sans réa­li­té, une fic­tion enfin intro­duite par Satan dans l’Église : qu’il soit anathème.

6. Si quelqu’un dit qu’il n’est pas au pou­voir de l’homme de s’engager dans les voies du mal, mais que ses mau­vaises comme ses bonnes actions sont l’œuvre de Dieu, non seule­ment parce qu’il les per­met, mais encore pro­pre­ment et par lui-​même, tel­le­ment que la tra­hi­son de Judas ne serait pas moins son œuvre propre que la voca­tion de Paul : qu’il soit anathème.

7. Si quelqu’un dit que toutes les œuvres accom­plies avant la jus­ti­fi­ca­tion, de quelque façon qu’elles le soient, sont vrai­ment des péchés et méritent la haine de Dieu, ou que plus on fait d’efforts pour se dis­po­ser à la grâce, plus on pèche gra­ve­ment : qu’il soit anathème .

8. Si quelqu’un dit que la crainte de l’enfer, par laquelle, en nous affli­geant de nos péchés, nous nous réfu­gions dans la misé­ri­corde de Dieu ou nous nous abs­te­nons de pécher, est un péché ou rend les hommes encore pires : qu’il soit anathème.

9. Si quelqu’un dit que l’impie est jus­ti­fié par la seule foi, enten­dant par là que rien d’autre n’est requis pour coopé­rer à l’obtention de la grâce, et qu’il ne lui est en aucune manière néces­saire de se pré­pa­rer et dis­po­ser par un mou­ve­ment de sa volon­té : qu’il soit anathème.

10. Si quelqu’un dit que les hommes sont jus­ti­fiés sans la jus­tice du Christ, par laquelle il a méri­té pour nous, ou qu’ils sont for­mel­le­ment justes par cette jus­tice : qu’il soit anathème.

11. Si quelqu’un dit que les hommes sont jus­ti­fiés ou bien par la seule impu­ta­tion de la jus­tice du Christ, ou bien par la seule rémis­sion des péchés, à l’exclusion de la grâce et de la cha­ri­té qui est répan­due dans leurs cœurs par l’Esprit Saint [Rm 5, 5] et habite en eux, ou encore que la grâce par laquelle nous sommes jus­ti­fiés est seule­ment la faveur de Dieu : qu’il soit anathème.

12. Si quelqu’un dit que la foi qui jus­ti­fie n’est rien d’autre que la confiance en la misé­ri­corde divine, qui remet les péchés à cause du Christ, ou que c’est par cette seule confiance que nous sommes jus­ti­fiés : qu’il soit anathème. .

13. Si quelqu’un dit qu’il est indis­pen­sable à tout homme, pour obte­nir la rémis­sion des péchés, de croire avec cer­ti­tude et sans aucune hési­ta­tion venant de sa fai­blesse per­son­nelle ou de son manque de dis­po­si­tion que ses péchés lui sont remis : qu’il soit anathème.

14. Si quelqu’un dit que l’homme est absous de ses péchés et jus­ti­fié parce qu’il croit avec une cer­ti­tude qu’il est absous et jus­ti­fié, ou que n’est vrai­ment jus­ti­fié que celui qui croit qu’il est jus­ti­fié, et que cette seule foi réa­lise l’absolution et la jus­ti­fi­ca­tion : qu’il soit anathème.

15. Si quelqu’un dit que l’homme né de nou­veau et jus­ti­fié est tenu par la foi de croire qu’il est cer­tai­ne­ment au nombre des pré­des­ti­nés : qu’il soit anathème .

16. Si quelqu’un dit avec une cer­ti­tude abso­lue et infaillible qu’il aura cer­tai­ne­ment le grand don de la per­sé­vé­rance jusqu’à la fin [Mt 10, 22 ; Mt 24, 13] à moins qu’il ne l’ait appris par une révé­la­tion spé­ciale : qu’il soit anathème.

17. Si quelqu’un dit que la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion n’échoit qu’à ceux qui sont pré­des­ti­nés à la vie et que tous les autres qui sont appe­lés, le sont assu­ré­ment, mais ne reçoivent pas la grâce, parce que pré­des­ti­nés au mal par la puis­sance divine : qu’il soit anathème.

8. Si quelqu’un dit que les com­man­de­ments de Dieu sont impos­sibles à obser­ver même pour l’homme jus­ti­fié et éta­bli dans la grâce : qu’il soit anathème.

19. Si quelqu’un dit que rien n’est com­man­dé dans l’Évangile en dehors de la foi, que les autres choses sont indif­fé­rentes, ni com­man­dées, ni défen­dues, mais libres, ou que les dix com­man­de­ments ne concernent pas les chré­tiens : qu’il soit anathème.

20. Si quelqu’un dit que l’homme jus­ti­fié, aus­si par­fait qu’il soit, n’est pas tenu d’observer les com­man­de­ments de Dieu et de l’Église, mais seule­ment de croire, comme si l’Évangile était une pure et simple pro­messe de la vie éter­nelle sans la condi­tion d’observer les com­man­de­ments : qu’il soit anathème.

21. Si quelqu’un dit que le Christ Jésus a été don­né par Dieu aux hommes comme rédemp­teur, en qui se confier, et non pas aus­si comme légis­la­teur à qui obéir : qu’il soit anathème.

22. Si quelqu’un dit que le jus­ti­fié soit peut per­sé­vé­rer dans la jus­tice sans un secours spé­cial de Dieu, soit ne le peut pas avec ce secours : qu’il soit anathème .

23. Si quelqu’un dit que l’homme une fois jus­ti­fié ne peut plus pécher ni perdre la grâce, et que donc celui qui tombe et pèche n’a jamais été vrai­ment jus­ti­fié : ou, au contraire, qu’il peut dans toute sa vie évi­ter tous les péchés, même véniels, à moins que ce soit par un pri­vi­lège spé­cial de Dieu, comme l’Église le tient au sujet de la bien­heu­reuse Vierge : qu’il soit anathème.

24. Si quelqu’un dit que la jus­tice reçue ne se conserve pas et même ne s’accroît pas devant Dieu par les bonnes œuvres, mais que ces œuvres ne sont que le fruit et le signe de la jus­ti­fi­ca­tion obte­nue et non pas aus­si la cause de son accrois­se­ment : qu’il soit anathème .

25. Si quelqu’un dit qu’en toute bonne œuvre le juste pèche au moins véniel­le­ment ou (ce qui est plus into­lé­rable) mor­tel­le­ment, et qu’il mérite pour cela les peines éter­nelles ; qu’il n’est pas dam­né à cause de cela seule­ment, parce que Dieu n’impute pas ses œuvres pour la dam­na­tion : qu’il soit anathème.

26. Si quelqu’un dit que, pour les bonnes œuvres qu’ils ont faites en Dieu [Jn 3, 21], les justes ne doivent pas attendre et espé­rer de rétri­bu­tion éter­nelle de la part de Dieu, en rai­son de sa misé­ri­corde et des mérites de Jésus Christ, s’ils per­sé­vèrent jusqu’à la fin à faire le bien et à gar­der les com­man­de­ments divins [Mt 10, 22 ; Mt 24, 13] : qu’il soit anathème.

27. Si quelqu’un dit qu’il n’y a aucun péché mor­tel, sauf celui d’infidélité, ou que la grâce une fois reçue ne peut être per­due par aucun autre péché, aus­si grave et énorme soit-​il, sauf par celui de l’infidélité : qu’il soit anathème .

28. Si quelqu’un dit qu’une fois la grâce per­due par le péché, en même temps la foi est pour tou­jours per­due ou que la foi qui reste n’est pas une vraie foi, puisqu’elle n’est pas vivante [Jc 2, 26], ou bien que celui qui a la foi sans la cha­ri­té n’est pas un chré­tien : qu’il soit anathème .

29. Si quelqu’un dit que celui qui est tom­bé après le bap­tême ne peut pas se rele­ver avec la grâce de Dieu, ou qu’il peut certes recou­vrer la jus­tice per­due, mais par la seule foi, sans le sacre­ment de la péni­tence, comme l’a jusqu’ici pro­fes­sé, gar­dé et ensei­gné la sainte Église romaine uni­ver­selle, ins­truite par notre Seigneur et les apôtres : qu’il soit anathème .

30. Si quelqu’un dit que, après avoir reçu la grâce de la jus­ti­fi­ca­tion, tout pécheur péni­tent voit sa faute remise et sa condam­na­tion à la peine éter­nelle annu­lée, en sorte que ne reste aucune condam­na­tion à une peine tem­po­relle à expier, ou dans ce monde ou dans le monde à venir au pur­ga­toire, avant que ne puisse s’ouvrir l’entrée au royaume des cieux qu’il soit anathème .

31. Si quelqu’un dit que le jus­ti­fié pèche en fai­sant le bien en vue d’une récom­pense éter­nelle : qu’il soit anathème .

32. Si quelqu’un dit que les bonnes œuvres de l’homme jus­ti­fié sont les dons de Dieu, en telle sorte qu’elles ne soient pas aus­si de bons mérites de jus­ti­fié ; ou que, par les bonnes œuvres qu’il fait par la grâce de Dieu et les mérites du Christ (dont il est un membre vivant), le jus­ti­fié ne mérite pas vrai­ment un accrois­se­ment de la grâce, la vie éter­nelle et (s’il meurt dans la grâce) l’entrée dans la vie éter­nelle, ain­si que l’accroissement de gloire : qu’il soit anathème.

33. Si quelqu’un dit que, par cette doc­trine catho­lique sur la jus­ti­fi­ca­tion expo­sée par le saint concile dans le pré­sent décret, il fait tort en par­tie à la gloire de Dieu ou aux mérites de Jésus Christ notre Seigneur et non plu­tôt que sont ain­si mises en lumière la véri­té de notre foi et la gloire de Dieu et du Christ Jésus : qu’il soit anathème.