Cher frère. Chère sœur,
La Réparation, tel est le thème qui a retenu notre attention pour ce bulletin. Nous y avons placé un large extrait de l’encyclique Miserentissimus Redemptor du Pape XI sur la réparation due par tous au Sacré-Cœur de Jésus, que nous vous invitons à lire et à méditer attentivement. La doctrine de l’Église y est clairement exposée. Aussi bien, les autres articles de ce bulletin visent-ils davantage à encourager, à stimuler notre volonté soutenue par la grâce, à répondre, à la suite des saints, à cet appel de l’Église, qui se fait l’écho des appels pressants à la réparation, du Sacré-Cœur de Jésus et du Cour Immaculé de Marie.
La Réparation diffère de l’expiation.
« On expie le péché pour le dominer, on répare ensuite les désastres qu’il a causés. Ceux-ci sont de deux sortes : affaiblisse- ment et insensibilité dans l’ordre surnaturel. » (Mgr Gonon, Jésus agonisant, Lyon, 1925, p.10 ).
Après le péché, l’âme est affaiblie. La vigueur de la volonté est atténuée, sinon détruite. Le sacrifice la retrempe. Contemplons Jésus, en Son agonie ; II souffre atrocement, volontairement. Par Son Fiat II a rendu sa volonté invincible… Par nos Fiat répétés à la volonté de Dieu, aux actes de renoncement qu’il nous demande, nous rendrons à notre volonté la force perdue par nos fautes.
Le péché répété rend l’âme insensible.
« Le péché mortel fréquent oblitère le sens moral ; le péché véniel crée des illusions, alourdit le cour, obscurcit l’esprit. On ne sent plus Dieu, on ne voit plus la vérité, on devient indélicat. » (Mgr Gonon, op. cit., p.11–12).
Jésus a souffert aussi en sa sensibilité exquise.
« II épuise la possibilité de souffrir, réparant ainsi nos endurcissements, compensant ce qu’ils nous ont fait enlever, refuser, à la gloire de Dieu. » (Mgr Gonon, op. cit. , p.l2).
Imitons-le, soyons attentifs à plaire à Dieu en toutes nos œuvres. Rien n’est petit pour celui qui aime. C’est par un renoncement quotidien que nous y parviendrons.
« Le plaisir de mourir sans peine vaut bien la peine de vivre sans plaisir », disait sainte Thérèse d’Avila.
« Le péché est un refus d’amour, la réparation sera donc une restitution d’amour, mais dans la norme où le refus s’est produit. Or le refus d’amour qui constitue le péché s’est affirmé par un abus de jouissances ; on n’a pas voulu ce que Dieu voulait. Pourquoi ? Pour jouir/ou dans son corps ou dans son esprit, ou dans sa volonté, ou dans son cœur. La restitution d’amour, pour réparer, apportera donc au lieu de la jouissance, la souffrance. » (Mgr Gonon, Retraite, 4–12 mars 1942).
La pénitence exige la souffrance de l’amour réparateur ; celle-ci est nécessaire car nous sommes tous pécheurs.
« Sans effusion de sang, il n’y a pas de rémission » (Heb. IX, 22).
Il a fallu le sacrifice de Jésus pour obtenir le pardon. Cependant l’Apôtre ajoute ailleurs :
« J’achève dans ma chair ce qui manque à la Passion du Christ, pour son Corps qui est l’Église. » (Col. 1,24),
nous faisant comprendre ainsi la théologie de la Réparation. Certes il ne manque rien à la Passion de Jésus-Christ, mais il lui faut un rayonnement extérieur et une coopération réceptive de la part des âmes.
« L’Église a besoin des âmes qui s’immolent comme de la messe ; elle vit du sacrifice de Jésus-Christ continué de ces deux manières. » (Mgr Gay).
« Lorsque le Sacré-Cœur invite les âmes à la réparation, que leur propose-t-il ? La plus haute perfection dans l’ordre de la charité, je veux dire l’imitation des trois actes d’amour dont le Cour de Jésus nous a donné le parfait modèle : prendre sur soi les péchés du prochain et même du monde entier, se faire pour ainsi dire leur caution auprès de Dieu, offrir ses souffrances volontaires et involontaires pour le rachat de leurs âmes et la glorification de la Majesté divine. » (R.P. François Charmot, s.j./ L’amour du Christ et l’apostolat moderne /Éd. Spes, 1949, p.235).
Le livre de l’Imitation de Jésus-Christ est surtout le livre de l’imitation de Jésus crucifié. Les saints, à la suite de saint Paul, ont porté sur leur chair la mortification de Jésus. Mais ce qui donnait de la valeur à leur réparation, c’était leur union à l’unique Sacrifice rédempteur.
« II faut toujours nous souvenir que toute la vertu d’expiation découle de l’unique sacrifice sanglant du Christ. » (Pie XI, Miserentissimus Redemptor).
Différentes formes ont été données à la réparation suivant que l’on considère le péché comme une offense à la justice ou à l’amour. Sainte Marguerite-Marie pratiqua l’une et l’autre. Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus a pratiqué la vie réparatrice d’amour avec une telle splendeur qu’elle ne nous laisse plus rien à découvrir dans cette voie du don total de soi. Émue « de l’ingratitude des méchants », elle s’offre comme « victime d’holocauste à l’Amour miséricordieux » de la Trinité, en union avec Jésus-Christ, qui nous a aimés en S’immolant pour nous sur la Croix. La charité qui la pousse à cette réparation est née de la contemplation des saintes plaies de Jésus en Croix.
« Mon cour se fendit de douleur à la vue de ce sang précieux qui tombait à terre sans que personne ne s’empressât de le recueillir ; et je résolus de me tenir continuellement en esprit au pied de la croix, pour recevoir la divine rosée du salut et la répandre ensuite sur les âmes. »
La réparation est aussi ancienne que le christianisme. Depuis le coup de lance qui a percé le Cour du Christ en Croix, bien des âmes ont été attirées par le Saint- Esprit dans la voie de l’immolation, manifestant ainsi dans leur vie la charité infinie de Dieu.
Le dernier appel à la réparation nous vient de la Très Sainte Vierge à Fatima, où nous a été donné l’ultime don de Dieu pour sauver le monde : la dévotion au Cour Immaculé de Marie.
« Cette dévotion est une dévotion réparatrice, et finalement adoratrice – adoratrice de la Miséricorde de Dieu dans le don qu’il nous fait de Marie. » (R.P. Joseph de Sainte Marie, L’heure de Marie, Fatima, p.38).
À Fatima, il est un genre particulier de péchés pour lequel Dieu demande réparation : ceux qui sont commis contre le Cour Immaculé de Marie. Quelle relation y a‑t-il entre ces péchés et ceux qui sont commis immédiatement contre Dieu lui-même ?
« Dieu lui-même est blessé à travers sa créature, c’est le Christ qui est frappé lorsque ses membres le sont : « Saul ! Saul ! pourquoi me persécutes-tu ? » (Ac. IX, 4).
Or, la Très Sainte Vierge est, parmi toutes les créatures, celle qu’il a le plus aimée. Il l’a conçue Immaculée pour être Mère de Dieu. On comprend donc l’importance de tout péché commis contre Elle : c’est le Verbe lui-même qui, en Elle, est atteint dans ce qu’il a de plus cher ; c’est le Cour du Christ qui souffre lorsque celui de sa Mère est blessé. Et cette souffrance, après celle que lui cause l’offense faite à son Père et à sa propre Divinité, est la plus indicible de toutes celles qu’il peut éprouver. » ( R.P. Joseph de Sainte Marie, op. cit., p.37).
Mais à cette raison fondée sur le fait de l’Incarnation, s’en ajoute une autre, qui relève du mystère de la Rédemption. La dévotion au Cour Immaculé de Marie est le don ultime de Dieu pour le salut du monde.
« C’est par elle que nous redécouvrirons le Cour et l’amour du Christ, que l’Eucharistie reprendra sa place dans l’Église et y redeviendra la source inépuisable de vie. Car c’est par le Cour Immaculé de Marie que l’Esprit Saint nous est et nous sera donné pour nous convertir, sauver nos âmes et instaurer dans le monde la paix et le règne de Dieu » (RP Joseph de Sainte Marie, Op., p.38).
Le temps se fait court. Répondons généreusement, chers tertiaires, aux demandes pressantes de l’Église, du Sacré-Cœur et du Cour Immaculé de Marie, nous invitant à la réparation.
« Voulez-vous vous offrir à Dieu pour supporter toutes les souffrances qu’il voudra vous envoyer, en acte de réparation pour les péchés par lesquels II est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs ? » (Notre-Dame, à Fatima, 13 mai 1917).
+ Je vous bénis.
Abbé L.-P. Dubrœucq +