Lettre aux parents, amis et bienfaiteurs
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Editorial de l’abbé Bernard de Lacoste
Es-tu fier de ta foi ?
En 1915, le Père de Foucault écrivait au général Laperrine :
« J’avais cru en entrant dans la vie religieuse que j’aurais surtout à conseiller la douceur et l’humilité ; avec le temps, je vois que, ce qui manque le plus souvent, c’est la dignité et la fierté ! »
Cette réflexion est d’une actualité brûlante. Par la grâce de Dieu, nous sommes catholiques. Nous avons reçu de Dieu la foi le jour de notre baptême. Néanmoins, certains sont si discrets dans ce domaine qu’on pourrait les croire honteux d’être les disciples de Jésus-Christ. En milieu privé et catholique, ils ne craignent pas de se dire catholiques. Mais dans un lieu public, leur comportement est radicalement différent, si bien que même les esprits les plus perspicaces seront incapables de deviner leur foi. Outre la faiblesse de caractère que cette attitude révèle, c’est le signe que nous nous préoccupons plus de l’opinion des hommes que de l’honneur de Dieu.
Saint Thomas d’Aquin enseigne que, dans certaines circonstances, la profession publique de la foi est une obligation grave :
- quand le fidèle est interrogé au sujet de sa foi par une autorité publique ;
– quand il est interrogé par une personne privée qui l’incite, en haine de la foi, à renier Jésus-Christ ;
– quand l’omission de la profession de foi causerait un grave scandale pour le prochain.
Un épisode de la vie de saint Sébastien illustre bien cette fierté d’être chrétien : En l’an 288, Sébastien a 28 ans. Il est un jour convoqué chez l’empereur Dioclétien qui semble irrité :
- Sébastien, je t’ai nommé tribun. Je t’ai donné mon amitié. Cependant, on m’apprend que tu es chrétien, et un chrétien plein de zèle.
– C’est exact, Majesté, mon intention n’est pas de vous mentir ou de le nier ; mais vous savez que les chrétiens sont vos plus fidèles sujets !
– Méprises-tu nos dieux ?
– Cela oui, je ne le nie pas.
– Mon ami, tu sais combien ta disparition me blesserait au cœur. Finissons-en, renie ce christianisme qui cause ta perte et je te comblerai de richesses !
– Maître, vous me demandez l’impossible. Jamais je ne trahirai mon Seigneur et mon Dieu !
Exaspéré, Dioclétien appelle le chef de ses archers :
« Je viens de condamner ce traître à mort. Conduis-le dans la cour et que tes hommes le percent de flèches ».
C’est ainsi que saint Sébastien préfère perdre la vie au milieu de terribles souffrances plutôt que de renier son divin maître.
Cependant, à l’heure actuelle, pour le jeune chrétien, il est rare que le dilemme soit aussi tragique. La tentation n’est pas celle de renier Jésus-Christ pour échapper à la mort, mais plutôt pour échapper aux moqueries ou aux insultes. Parfois, c’est la seule crainte de l’opinion d’autrui qui constitue un obstacle à la confession de la foi. Une telle crainte, qu’on appelle respect humain, est d’autant plus inadmissible et scandaleuse que les ennemis de notre foi, au contraire, ne craignent pas de manifester haut et fort leurs fausses croyances.
L’exhortation que Notre-Seigneur adressait à ses apôtres vaut aussi pour nous :
« Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée ; et on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais on la met sur le candélabre afin qu’elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux ».
La vie de saint Louis-Marie Grignion de Montfort nous offre un bel exemple de victoire sur le respect humain. Le saint voyage en bateau sur la Seine. A peine sur le coche, il se met à genoux et invite les passagers à réciter avec lui le rosaire. On devine quel éclat de rire accueille sa proposition. Mais lui, imperturbable sous la grêle des quolibets, alterne avec frère Nicolas la récitation d’un premier chapelet, faisant monter vers Marie des invocations affectueuses pour ses insulteurs. Le calme enfin revenu, le bon Père se lève et renouvelle son invitation à la prière ; les rires de recommencer, mais déjà plus timides. La puissance des Ave Maria commence à se faire sentir, pendant que le missionnaire et son compagnon égrènent un deuxième chapelet, si bien qu’à la troisième sommation, la partie est gagnée : la foule achève la récitation du rosaire ; et, docile désormais, écoute jusqu’au débarquement les instructions du saint prêtre.
Aucune trace de honte, ni de crainte de l’opinion d’autrui dans cet épisode. C’est l’amour de Dieu et de sa sainte mère qui l’anime et qui est à l’origine de son zèle pour les âmes.
Les saints n’avaient pas honte d’être chrétiens. Au contraire, ils en étaient fiers, de cette fierté qui, loin d’être de l’orgueil, consiste plutôt dans une force pleine de noblesse pour conserver sa foi et la répandre. Qu’importe si l’on se moque de nous ? Les Actes des apôtres nous rapportent qu’après avoir été flagellés, sur ordre du Sanhédrin, les apôtres étaient « heureux d’avoir été jugés dignes de souffrir des outrages pour le nom de Jésus ». Non pas que la honte, en elle-même, soit toujours un sentiment méprisable. On a honte de ce que l’on souhaiterait ne pas être ou ne pas posséder. Ainsi la honte d’avoir commis une faute est salutaire. Mais que dire de la honte d’avoir la foi ? Ecoutons la voix du divin Maître :
« Quiconque me confessera devant les hommes, je le confesserai aussi moi-même devant mon Père qui est dans les cieux. Mais quiconque me reniera devant les hommes, je le renierai aussi moi-même devant mon Père qui est dans les cieux. »
De quoi examiner sérieusement notre conscience…
Chers amis et bienfaiteurs, voici les sentiments que nous nous efforçons, avec l’aide de Dieu, de transmettre à vos enfants. La tâche est difficile. Je terminerai en vous remerciant de votre précieux soutien et en faisant à nouveau appel à votre générosité, qui n’a plus à être prouvée mais qui nous est toujours aussi nécessaire pour faire fonctionner notre école. Le prix des scolarités, bien que très élevé pour les familles, ne suffit pourtant pas à couvrir toutes les dépenses indispensables.
Nous vivons grâce à vos dons. Les prêtres et les élèves vous assurent de leurs prières reconnaissantes.
Abbé Bernard de Lacoste