Le 11 octobre 1962, l’Eglise entrait dans une phase de mutations profondes : le concile Vatican II allait donner de nouvelles orientations théologiques et pastorales.
En 1969, le pape Paul VI introduisait un nouveau rite de célébration de la messe. Ce rite, fabriqué de toutes pièces par des hommes de bureau, rompait de façon brutale avec la pratique liturgique et l’esprit des siècles précédents. Le rite traditionnel qui avait sanctifié des milliards de chrétiens pendant plus de 15 siècles fut soudainement voué aux gémonies. Déchirant l’Eglise tout entière, des innovations liturgiques fantaisistes et trompeuses entraînèrent la désertion progressive des églises : en 20 ans, la pratique dominicale est tombée de dix à un, des dizaines de milliers de prêtres ont abandonné leur sacerdoce, les séminaires se sont vidés et sont aujourd’hui, pour la plupart, fermés.
Dans les faits, Vatican II et la messe de Paul VI n’ont donc pas été « le printemps de l’Eglise », comme certains dignitaires actuels le prétendent. Les faits et les chiffres sont têtus : d’ici 2015, la plupart des paroisses françaises n’auront plus de prêtres.
Face à cette situation inquiétante, de nombreuses voix se sont élevées à travers le monde pour demander un retour à la messe et aux valeurs traditionnelles. De fait, une certaine volonté semble se dessiner à Rome en faveur d’une pratique plus large de la messe traditionnelle, ce qui entraîne bien des réticences de la part d’une partie du clergé.
Avant de répondre aux arguments mis en avant par celui-ci, un mot sur l’histoire et la véritable portée de la messe traditionnelle.
D’où vient la messe traditionnelle ?
L’essentiel de cette messe nous vient des apôtres, donc du 1er siècle. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la messe traditionnelle, dite de St-Pie V, n’est pas de saint Pie V (1566–1572). Ce pape, dans le prolongement du concile de Trente, n’a fait que codifier ce qui existait bien avant lui. Ainsi, l’ensemble du canon tel que nous le connaissons remonte au moins au Vème siècle. Quant au reste de l’ordinaire de la messe, bien des éléments existent ainsi dans la forme sanctionnée par saint Pie V dès le pontificat de saint Grégoire (590–604); l’essentiel des prières de l’offertoire seront ajoutées entre le IXe et le XIe siècles. Enfin, le rite de l’élévation se répandit de façon commune après les attaques de Bérenger de Tours (998‑1088) contre la présence réelle : ces différents ajouts constituèrent des enrichissements et non pas des changements radicaux.
La messe dite de St-Pie V est donc l’expression de la piété et de la foi de l’Eglise depuis les origines ; elle est le fruit de la tradition apostolique et de la contemplation du mystère de l’eucharistie par nos pères dans la foi.
Une messe interdite ?
Remplacée brutalement par la messe de Paul VI en 1969, interdite de fait dans la plupart des paroisses, la messe traditionnelle n’a cependant jamais été abolie en droit. « Le rite de St-Pie V n’a jamais été supprimé canoniquement » affirmait en 2004 le cardinal Medina Estevez, alors Préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. « J’ai soigneusement étudié la question de l’abrogation du rite de St-Pie V après le Concile Vatican II. (…) Sur la base de mes recherches, je ne puis conclure que le rite de St-Pie V ait jamais été abrogé. » Cardinal Medina, interview avec The latin mass, avril 2003.
En septembre 2005, le cardinal Castrillon Hoyos déclarait dans le mensuel 30 Giorni : « La messe de St-Pie V n’a jamais été abolie ». Il ne faisait que reprendre les conclusions de la commission de neuf cardinaux convoquée par Jean-Paul II, en 1986, pour étudier le statut légal de la messe traditionnelle.
Le cardinal Stickler avait fait savoir en 1995 que les membres de cette commission avaient reconnu, à huit contre un, que Paul VI n’avait pas supprimé légalement la messe tridentine par le seul fait de la promulgation du nouveau rite. Et cette commission avait reconnu à l’unanimité que tout prêtre demeurait libre d’utiliser l’ancien missel.
Alors pourquoi tant de difficultés et d’oppositions à obtenir dans les faits ce que l’Eglise a toujours reconnu de droit ?
Certains évêques craignent que le retour de l’ancienne messe ne signifie la remise en cause du dernier concile. « La réconciliation ne pourra se faire au prix d’un trait tiré sur un concile – Vatican II – qui fait partie de la tradition dogmatique de l’Eglise. » Mgr Defois (Le Figaro du 22 octobre 2006)
Mgr Defois semble oublier que les pères conciliaires ont affirmé à de nombreuses reprises ne pas vouloir faire un concile dogmatique, mais un concile pastoral [1]. C’est pourquoi proposer aujourd’hui les conclusions de Vatican II comme faisant partie du dogme catholique, voire les imposer sans laisser la moindre place à la discussion théologique – même celle qui impliquerait une remise en question – est non seulement une infidélité à l’esprit de ce concile mais aussi un manque d’honnêteté intellectuelle. Le « pluralisme » et la « diversité » tant vantés aujourd’hui disparaissent subitement dès qu’un retour aux valeurs traditionnelles est évoqué.
Cela dit, la réflexion de Mgr Defois montre qu’il est conscient de la véritable portée de la messe traditionnelle : celle-ci n’est pas seulement une affaire de sensibilité liturgique, elle est l’expression de la foi de l’Eglise depuis Notre Seigneur Jésus-Christ, elle est un résumé de cette foi, selon l’adage lex orandi, lex credendi : la forme liturgique est l’expression du contenu de la foi. Un retour de la messe traditionnelle est donc perçu par lui, à juste titre, comme une menace pour les acquis de Vatican II. Nous sommes en face de deux conceptions opposées de la foi :
la foi traditionnelle, transcendante, tournée vers le divin, vers l’autel, pour faire descendre le sacré, la grâce divine sur les hommes, leur promettant un paradis dans l’au-delà ;
la foi moderne, humaniste, qui veut faire l’économie de la grâce et du surnaturel, tourne le dos à Dieu pour se tourner vers l’homme, et lui promet un paradis terrestre ; cette dernière a trouvé une entrée dans l’Eglise à Vatican II.
L’humanisme laïque et profane est apparu dans sa terrible stature et a, en un certain sens, défié le concile. La religion du Dieu qui s’est fait homme s’est rencontrée avec la religion (car c’en est une) de l’homme qui se fait Dieu. Qu’est-il arrivé ? Un choc, une lutte, un anathème ? Cela pouvait arriver ; mais cela n’a pas eu lieu.
Discours de Paul VI lors de la dernière session du Concile, le 8 décembre 1965
« Jésus n’a jamais célébré en latin ! » (P. Daniel Dewulf, Lille)
Et pour cause : il n’y avait pas encore de langue liturgique universelle, puisqu’Il n’avait pas encore donné la mission de « prêcher l’évangile à toute créature », ce qui ne se fera qu’à partir de la Pentecôte.
Le latin est la langue liturgique universelle depuis le IIIe siècle ; même le concile Vatican II l’a rappelé. De fait, cette langue universelle, facteur d’unité, n’a jamais été un obstacle à la compréhension de la foi ; les missels de messe comportent toutes les traductions utiles, si bien que même les enfants suivent la messe traditionnelle sans difficulté particulière.
Le latin est le langage du sacré, du divin, comme la langue vernaculaire est le langage du quotidien, de l’humain. L’élévation des âmes vers la transcendance divine se réalise au moyen de rites et de symboles qui ne sont pas abordables de plain-pied. Vouloir faciliter la participation à la liturgie en supprimant le latin et la symbolique mystique enlève à la liturgie toute possibilité de faire entrer les âmes dans le monde du divin, banalisant, vulgarisant la foi et son expression, et retirant finalement à l’homme la possibilité de communiquer avec Dieu.
Enfin, le latin, devenu langue morte depuis un millénaire et demi, a le grand avantage de conserver les formules de la foi, les préservant de la corruption possible due aux fluctuations des langues vivantes. Le latin garantit ainsi une unité de foi non seulement dans l’espace, mais aussi dans le temps : nous récitons le même Credo que nos aïeux, nous célébrons la même liturgie, manifestant ainsi l’immutabilité divine qui se tient au-dessus du monde changeant et instable des humains. Les héritiers de Vatican II ne peuvent en dire autant.
« Jésus n’a pas tourné le dos à ses disciples ! »
Il n’a pas eu besoin de se tourner vers Dieu, puisqu’Il est Dieu !
Le prêtre, lui, est le médiateur, l’intermédiaire entre Dieu et les hommes. A ce titre, il se tourne vers Dieu, vers la croix, pour offrir au nom des hommes le sacrifice salvateur : il n’est donc pas question de « tourner le dos au peuple ». Par ailleurs, on n’a pas constaté que le fait de se tourner vers l’assemblée et de ne parler qu’en langue vernaculaire ait permis une meilleure compréhension de la liturgie. A voir la banalité de beaucoup de célébrations et la désertion des églises, c’est plutôt l’inverse qui s’est produit…
De plus, « la position du prêtre tourné vers le peuple a fait de l’assemblée priante une communauté refermée sur elle-même », écrivait en 2003 le préfet de la Congrégation de la doctrine de la foi, le cardinal Ratzinger, regrettant que Dieu soit « de plus en plus absent de la scène » et que la messe devienne un one man show du célébrant.
Cette différence de position du prêtre matérialise l’opposition entre les deux rites : dans le rite de Paul VI, le prêtre se tourne vers l’homme parce qu’il est un animateur d’assemblée, d’où la nécessité de recourir à des expédients originaux censés animer en même temps qu’ils désacralisent ; dans le rite traditionnel, le prêtre se tourne vers Dieu parce qu’il est sacrificateur : au nom des fidèles et de l’Eglise tout entière, il offre à Dieu le Père le sacrifice de son Fils.
La différence, voire l’opposition entre les deux rites va encore plus loin : la nouvelle messe se réduit à être « le rassemblement du peuple de Dieu, sous la présidence du prêtre, en vue de célébrer le mémorial du Seigneur. » (art. 7 de la Présentation générale du nouveau missel romain) ; l’insistance porte sur le « rassemblement du peuple de Dieu », et le rôle du prêtre se réduit à une présidence d’assemblée. La messe est en réalité le renouvellement non sanglant de la Passion du Christ qui offre à son Père céleste une juste compensation pour les péchés des hommes ; la messe renouvelle sacramentellement cet acte salvateur pour appliquer aux âmes vivant dans le temps les fruits de la Rédemption ; cet acte inouï que fut la Passion doit se prolonger sur nos autels selon une forme aussi transcendante que la Rédemption elle-même.
C’est donc toute la théologie du salut qui s’exprime et se réalise dans la messe ; c’est pourquoi il est dangereux et nuisible de vouloir changer ce rite sacré, quintessence de la foi de l’Eglise.
« Proposer deux missels différents, c’est encourager le subjectivisme, c’est ouvrir la porte à la discorde. » (Père abbé de Ligugé)
C’est la nouvelle messe qui a introduit la discorde et non une éventuelle réintroduction de la messe traditionnelle. Depuis 1969, ce n’est pas un nouveau rite qui est célébré dans les églises, mais une variété interminable de rites fantaisistes, chaque prêtre agrémentant à son goût une liturgie déjà humaniste et dépourvue de transcendance.
Quant au subjectivisme, il a été introduit suite à Vatican II ; dans quelle paroisse trouve-t-on aujourd’hui un prêtre capable de célébrer la messe en suivant fidèlement le missel de 1969 ? Il n’y a pas deux messes qui se ressemblent. Mgr Le Gall, évêque de Toulouse et responsable de la commission liturgique de la Conférence des évêques de France, estime que les abus liturgiques de l’après-Concile sont chose révolue. Il semble qu’il n’ait pas fait le tour des paroisses, pour ignorer à ce point la banalité et la créativité subjectiviste auxquelles on expose les quelques fidèles encore attachés au devoir dominical. « A une époque de l’histoire où le pluralisme jouit du droit de citoyenneté, pourquoi ne pas reconnaître le même droit à ceux qui souhaitent célébrer la liturgie selon la manière utilisée durant plus de quatre siècles ? » (Cardinal Medina, interview avec The latin mass, avril 2003). Quinze siècles, précisément.
« Certaines prises de positions d’associations réclamant de telles dispositions liturgiques relèvent de choix politiques particuliers, reprenant les conceptions d’une Eglise héritées de l’Action française du siècle dernier. »
Cette affirmation de Mgr Defois révèle un amalgame politico-religieux dont le but est de disqualifier les tenants de la messe traditionnelle et particulièrement la Fraternité sacerdotale St-Pie X. Il ne s’agit pas d’un argument, mais d’une étiquette que l’on colle sur le front des indésirables. De fait, son affirmation est gratuite : on ne voit pas en quoi les tenants de la messe traditionnelle auraient besoin des arguments de l’Action française pour faire valoir leur droit à la liturgie de toujours. Il y a confusion des domaines : la Fraternité sacerdotale St-Pie X est une congrégation religieuse et n’a, par conséquent, pas de mission politique.
Il est à souhaiter qu’après s’être engagé dans un mouvement d’opposition, les adversaires de la libéralisation de la messe traditionnelle n’adoptent pas l’attitude qu’ils reprochent à ladite Fraternité.
« Restaurer le rite traditionnel :
• perturberait les fidèles ainsi que les prêtres.
Beaucoup de fidèles sont lassés des abus liturgiques, voire blessés par certains scandales ; permettre le rite traditionnel serait une manière de faire oublier ce passé peu glorieux de l’Eglise conciliaire et de redonner confiance.
• dissuaderait la jeunesse de venir à l’église et de suivre l’appel de Dieu dans la vie consacrée.
Les faits démontrent exactement l’inverse : la plupart des séminaires diocésains sont vides ; les quelques séminaires interdiocésains ne regroupent pour la plupart qu’un petit nombre de candidats pour des régions immenses. Au contraire, dans les instituts qui tiennent à l’ancienne liturgie, les vocations sont jeunes et nombreuses.
• détruirait l’unité de l’Eglise.
C’est la nouvelle liturgie imposée par la force en 1969 qui a détruit l’unité de l’Eglise ; depuis, il existe deux liturgies pour deux « Eglises » parallèles. Restaurer la liturgie traditionnelle serait un retour à l’ordre normal des choses et donc à la véritable unité de l’Eglise ; par sa structure même, la liturgie traditionnelle est facteur d’unité, empêchant l’improvisation, la créativité et le subjectivisme. A l’heure des grands rassemblements, qui ne voit l’avantage de pouvoir faire chanter les catholiques des différents continents sur les mêmes mélodies grégoriennes ? A l’heure des voyages incessants, qui n’apprécierait de trouver à l’autre bout du monde la même liturgie, dans la même langue universelle, avec les mêmes prières, les mêmes rites et symboles ?
• On ne peut imposer cela du jour au lendemain. »
En 1969, les novateurs au Vatican ont imposé du jour au lendemain une nouvelle liturgie qui n’avait aucun passé et aucun enracinement dans l’Eglise, heurtant beaucoup de fidèles dans leur foi, entraînant le désarroi de beaucoup de prêtres. Nombre d’entre ceux qui voulurent rester fidèles à la messe de leur ordination furent chassés de leur paroisse, traqués par une hiérarchie sans pitié, ni humanité. Aujourd’hui, ces mêmes hiérarques s’indignent à la simple pensée que la liturgie traditionnelle soit permise.
« Un rite promulgué par le pape a force de loi ; le pape Paul VI n’a pas moins de pouvoir que n’en a eu saint Pie V. »
Un pape ne peut pas défaire ce qu’a fixé un prédécesseur qui s’est basé sur toute la Tradition de l’Eglise, les conciles, les théologiens et les saints. Le pape n’a pas le pouvoir de disposer du dépôt révélé et de son expression liturgique selon son gré ; il doit transmettre ce qu’il a reçu et veiller à la pureté de la transmission. C’est pourquoi une réforme qui ne s’appuierait pas sur la Tradition écrite et orale est d’emblée suspecte, ce qui est le cas de la réforme liturgique de 1969. D’ailleurs, le pape Paul VI n’a jamais présenté sa réforme comme infaillible et irréformable ; par conséquent, nul ne peut l’imposer à coups de diktats. « Le rite et les rubriques respectives ne sont pas en eux-mêmes une définition dogmatique ; ils sont susceptibles de qualification théologique de valeur variable, selon le contexte liturgique auquel ils se réfèrent. » (Discours de Paul VI du 19 novembre 1969, à propos du nouvel Ordo).
« L’ancien rite n’est plus d’actualité. »
La messe n’est pas comme un morceau de tissu que l’on adapte aux goûts et aux modes de chaque génération.
Cardinal Ottaviani
Une communauté qui déclare soudain strictement interdit ce qui était jusqu’alors pour elle tout ce qu’il y a de plus sacré et de plus haut, et à qui l’on présente comme inconvenant le regret qu’elle en a, se met elle-même en question. Comment la croirait-on encore ? Ne va-t-elle pas interdire demain ce qu’elle prescrit aujourd’hui ?
Cardinal Ratzinger, Le Sel de la terre, p. 172
« On encouragerait ceux qui ont critiqué le pape pendant des années ! »
Les prêtres fidèles à la Tradition de l’Eglise ont remis en cause les doctrines et la liturgie nouvelles qui ont révolutionné l’Eglise et vidé les lieux de culte.
La violence verbale ne fut pas du côté de ceux qui se sont efforcés de se situer au niveau de la foi et de la doctrine, mais plutôt du côté de ceux qui se sont permis d’user à l’égard d’une partie du peuple chrétien d’épithètes discriminatoires, telles « intégristes », « excommuniés », « schismatiques », « lefebvristes ». De plus, il faut constater qu’à peine le pape Benoît XVI émet-il le souhait d’élargir l’accès à la liturgie traditionnelle, que des voix s’élèvent, celles qui naguère prêchaient l’obéissance et la soumission, pour accuser aujourd’hui le pape de « méconnaître les progrès de Vatican II », de « provoquer un recul de l’Eglise ».
Mgr Raffin, évêque de Metz, monte au créneau contre la volonté papale d’élargir la liturgie traditionnelle ; c’est pourtant le premier évêque de France à avoir organisé, à deux reprises déjà, une rave party dans sa cathédrale. De quel côté sont les abus et les insoumissions ?
Conclusion
Il est heureux de pouvoir constater que la « marche en avant » de la messe traditionnelle ne peut plus laisser indifférent. L’époque de la politique du silence semble définitivement révolue ; les plus hautes autorités de l’Eglise sont obligées de tenir compte du développement de la Tradition et du potentiel qu’elle représente. L’heure vient où ceux qui ont voulu parquer la vraie messe au musée des codifications tridentines sont obligés de faire marche arrière et de reconnaître leurs erreurs, tel un cardinal Médina qui intervint très énergiquement contre la messe tridentine en 1998, et qui avoue aujourd’hui : « sur la base de mes recherches, je ne puis conclure que le rite de St-Pie V ait jamais été abrogé. » Nous le remercions pour cet aveu sincère.
Pour l’instant, Rome semble très préoccupée de la réaction des évêques. Et il est vrai que le chef de l’Église doit tenir compte de ceux qui sont les pasteurs des diocèses et ont de lourdes responsabilités vis-à-vis des fidèles. Mais que vaut actuellement leur avis ? Que l’on songe au cardinal Sterzinsky qui, le mercredi des Cendres, est allé au temple protestant de Berlin pour y recevoir les cendres d’un pasteur ; ou au cardinal Law, qui s’est rendu à la mosquée de Wayland pour s’associer au repas du ramadan et déclarer qu’il se sentait tout à fait chez lui ; à Mgr Defois qui vient de déclarer, lors de l’inauguration de la faculté musulmane de Lille : « l’Islam fait partie de nos racines européennes. J’aimerais que nous les recherchions ensemble pour faire émerger une base philosophique commune » ; ou encore à l’ancien évêque d’Orléans qui a cautionné publiquement un livre blasphémateur rempli d’obscénités. Nous pourrions, hélas ! allonger tristement cette liste. Si le pape souhaite la réconciliation avec la Fraternité sacerdotale St-Pie X, il lui faut assumer sa fonction de chef de l’Eglise et passer outre aux récriminations d’évêques qui, s’ils étaient fidèles à leur mission de transmettre le dépôt de la foi, se réjouiraient d’une telle mesure de salut public pour l’Eglise et pour le monde.
Après une descente aux enfers dans les années 70, après les tentatives de sauvegarde des années 80, après une multiplication exponentielle des lieux de culte dans les années 90, la messe traditionnelle est plus que jamais d’actualité, et la prise de conscience de son rôle capital pour la revitalisation de l’Eglise augmente par cercles concentriques, atteignant jusqu’à une partie du jeune clergé diocésain. Les gesticulations épiscopales auront beau intenter des manœuvres dilatoires, la messe traditionnelle opère un retour qui s’avère de plus en plus inéluctable. Dans les temps de crise, les hommes ont beau mettre la lumière divine sous le boisseau, elle finit toujours par réapparaître et éclairer l’Eglise, prouvant, une fois de plus, que « les portes de l’enfer ne prévaudront point contre Elle. »
- Un concile dogmatique précise ou définit des vérités de foi ; un concile pastoral – Vatican II fut le premier en son genre – est censé n’aborder les vérités de foi que sous leur aspect pratique.[↩]