Enquête sur le port de la soutane dans les diocèses

L’hebdomadaire Famille chré­tienne du 19 avril 2021 s’est livré à une enquête sur le port de la sou­tane par les prêtres dio­cé­sains en France. Force est de consta­ter que « de plus en plus de jeunes prêtres dio­cé­sains la revêtent ».

« Après des années de pur­ga­toire, la sou­tane est de retour. “Aux ses­sions de for­ma­tion conti­nue de ma pro­vince ecclé­sias­tique [Rouen. NDLR], nous étions deux à la por­ter en 2014. Nous sommes aujourd’hui une dizaine, soit la moi­tié des par­ti­ci­pants”, remarque l’abbé Laurent Gastineau, ordon­né prêtre il y a quatre ans dans le dio­cèse de Séez.

« Un phé­no­mène confir­mé par l’entreprise Arte Houssard, fabri­cant de sou­tanes sur mesure, qui a vu ses ventes aug­men­ter de 145 % entre 1999 et 2016. “Nous avons tou­jours eu des clients, essen­tiel­le­ment des tra­dis, aux­quels s’ajoute aujourd’hui la nou­velle géné­ra­tion de prêtres qui veulent en avoir une, même s’ils ne la portent pas tous les jours”, confie Stéphanie, la res­pon­sable du maga­sin parisien. »

Pourquoi pas se conten­ter du cler­gy­man, demande-​t-​on à ces jeunes prêtres ? Voici leurs réponses rap­por­tées par l’hebdomadaire : « “Le cler­gy­man ne parle qu’aux cathos, remarque le Père Marc-​Olivier de Vaugiraud, 38 ans, ancien vicaire dans les Yvelines. En outre, la sou­tane est plus visible. Si je mets deux écharpes, on conti­nue de la voir. Je suis deux fois plus inter­pel­lé quand je la porte !”

« Même constat pour l’abbé Gastineau qui assure être, en sou­tane, “cer­tain de ne pas voya­ger seul dans le train”, et se rap­pelle une tra­ver­sée de Paris ren­due épui­sante par un déluge de sol­li­ci­ta­tions. “Je com­prends que cer­tains veuillent l’enlever pour être tran­quilles !”, plaisante-​t-​il. Certains pas­sants n’hésitent pas en effet à deman­der des béné­dic­tions, des prières, com­ment rece­voir le bap­tême ou faire sa pre­mière communion.

Plusieurs prêtres notent éga­le­ment que visi­bi­li­té rime avec dis­po­ni­bi­li­té. Vicaire de la basi­lique d’Argenteuil (Val‑d’Oise), le Père David Lamballe rap­porte qu’on lui a plu­sieurs fois deman­dé la confes­sion dans la rue ou le métro : “Quand je dois me dépla­cer d’un endroit à un autre, j’ai inté­rêt à pré­voir large car je sais que je serai sol­li­ci­té. Pour les gens, la sou­tane signi­fie que je suis ‘en ser­vice’, à leur disposition”. »

Loin de la pas­to­rale de l’enfouis­se­ment de l’après-Concile, la sou­tane est consi­dé­rée comme un bon moyen d’évangélisation : « “Dans une socié­té de plus en plus sécu­la­ri­sée, la sou­tane joue son rôle de signe qu’il existe une autre réa­li­té, indique Don Louis-​Hervé Guiny de la Communauté Saint-​Martin. Elle incite à se poser des ques­tions et à entrer en contact.”

« A Mantes-​la-​Jolie, le Père de Vaugiraud a régu­liè­re­ment expé­ri­men­té la dimen­sion mis­sion­naire de sa longue robe noire. Entrant un jour dans un bar devant lequel il était pas­sé quelques minutes aupa­ra­vant, le patron lui a confié que sa sou­tane avait pro­vo­qué une dis­cus­sion par­mi les clients.

« “Le bon Dieu s’est invi­té dans leur conver­sa­tion. Nous avons lon­gue­ment par­lé de la cha­ri­té, de l’amour du Christ. Ce bout de tis­su, que les fran­cis­cains du Bronx appellent ‘homé­lie silen­cieuse’, m’a per­mis d’introduire dans un cœur le nom de Jésus. Je suis l’homme-sandwich du Bon Dieu !”, conclut-il. »

Famille chré­tienne cite un fait révé­la­teur : « L’abbé Gastineau se sou­vient que lorsqu’il était au sémi­naire, il était “impen­sable” pour les futurs prêtres d’y arbo­rer un vête­ment ecclé­sias­tique (ils avaient l’obligation d’être en civil), mais que tous dis­si­mu­laient une sou­tane dans leur placard.

« “Nous la por­tions à l’extérieur après nous être chan­gés en cachette. Même si ce n’est pas la rai­son prin­ci­pale, je pense que nous l’avons sans doute aus­si adop­tée en réac­tion à une géné­ra­tion de prêtres à laquelle nous ne par­ve­nions pas à nous iden­ti­fier”, confesse-t-il.

« “Choisir la sou­tane cor­res­pond à une cer­taine vision du monde et de l’Eglise”, ana­lyse le Père de Vaugiraud. A une époque, cer­tains ont pen­sé qu’elle consti­tuait un obs­tacle à leur apos­to­lat. Aujourd’hui, beau­coup de jeunes prêtres estiment qu’elle est leur meilleure alliée dans une socié­té déchristianisée.

« Peu convain­cus par l’expérience du levain dans la pâte [qui ser­vait de jus­ti­fi­ca­tif à l’enfouis­se­ment post­con­ci­liaire], ils ont opté pour être la “lumière du monde”. “Mais atten­tion, être en sou­tane ne signi­fie pas qu’on est plus saint. Et avant de savoir si on la por­te­ra ou non, ce qui compte est de savoir quel homme on va mettre dedans”, conclut le Père de Vaugiraud. »

De fait, c’est tout un conte­nu spi­ri­tuel et doc­tri­nal que doit expri­mer la sou­tane, comme l’enseignait Mgr Marcel Lefebvre à ses sémi­na­ristes, dès 1970. La forme ves­ti­men­taire est le reflet d’une for­ma­tion phi­lo­so­phique et théo­lo­gique qui puise au tré­sor bimil­lé­naire de l’Eglise. L’habit ecclé­sias­tique n’est pas un retour en arrière, mais un retour à la source.

Source : Fsspx.Actualités

Historique du port de la soutane et raisons de cet usage multiséculaire