Musique éléctronique dans les églises

epuis plus d’une année main­te­nant, l’as­so­cia­tion J’Croix, orga­nise des soi­rées sous forme de récit biblique, de prière dan­sante et de musique « tech­no », avec l’ap­pui total des évêques et du cler­gé local. C’est ain­si que fut orga­ni­sé le 15 mai 2004, à l’ex­té­rieur du monas­tère de Bonne- Fontaine à Quatre-​Vents en Moselle, une soi­rée sous le titre « Chapelle in the mix » qui ras­sem­bla envi­ron 600 per­sonnes, puis avec comme thème « l’a­vè­ne­ment », le 21 juin en l’é­glise Saint-​Bonaventure à Lyon, sur le Thème « Christ’appel III », sous la pré­si­dence de Mgr Barbarin qui, à l’is­sue a célé­bré une messe solen­nelle, et enfin le 30 novembre 2005, à l’é­glise Sainte- Thérèse de Metz, avec comme thème « l’Annonciation » sous le registre d’une musique « Epileptik ».

Le site inter­net de J’Croix nous raconte la genèse de ces actions contro­ver­sées par plus d’un !

« Vincent Mutschler, un patron de dis­co­thèque frappe à la porte du pèle­ri­nage fran­cis­cain de Notre-​Dame de Bonne- Fontaine à Danne-​et-​Quatre-​Vents (Moselle). Il vient pro­po­ser aux frères de créer une veillée de prière ani­mée avec des D.J. et des dan­seuses. Une idée auda­cieuse : Oser la ren­contre entre deux uni­vers, l’Église et le monde de la nuit, pour sau­ver un jeune viet­na­mien en attente d’une urgente opé­ra­tion du cœur, pour pro­po­ser aux jeunes loin de l’Église un temps de prière. » [1]

Cette visite d’un jour ne res­te­ra pas sans len­de­main. L’association J’Croix est créée et déve­lop­pe­ra ces deux buts, huma­ni­taire et de ren­contre entre deux mondes, tels que ses sta­tuts le manifestent :
1 – Soutenir des pro­jets huma­ni­taires. « L’association J’Croix, à chaque évé­ne­ment, orga­nise une col­lecte pour venir en aide à des enfants en urgence médicale. »
2 – Organiser des évé­ne­ments cultu­rels et spi­ri­tuels. « L’association J’Croix orga­nise des veillées per­met­tant aux jeunes, croyants ou non, de décou­vrir l’al­liance pos­sible entre les formes d’ex­pres­sion contem­po­raine et la spiritualité. »
3 – Promouvoir les ini­tia­tives de jeunes. « L’association J’Croix répond au désir de jeunes d’al­lier la spi­ri­tua­li­té et l’ex­pres­sion contem­po­raine, l’ac­tion huma­ni­taire et l’in­té­rio­ri­sa­tion. Pour ce faire, lors d’é­vé­ne­ments locaux, de très jeunes talents sont mis en avant, tant pour la danse que pour la musique. »

L’idée est géné­reuse, mais est-​elle conforme au sens com­mun et à la doc­trine catho­lique traditionnelle ?

Sur la ques­tion huma­ni­taire qui dépasse notre pro­pos et qui ne sau­rait en soi être contes­tée, nous pose­rons sim­ple­ment la ques­tion sui­vante, sans être à même d’en don­ner la réponse : les dons col­lec­tés de la part de ces jeunes dans une soi­rée couvrent-​ils les frais enga­gés ? Une jeu­nesse gén­ré­reuse, nous apprend le site de J’Croix, per­mit d’of­frir « une inter­ven­tion chi­rur­gi­cale à un enfant en urgence médi­cale. Le mon­tant récol­té cor­res­pond à peu près au coût d’une opé­ra­tion car­diaque à Saïgon. » Soit !

Nous nous conten­te­rons donc de répondre à la ques­tion sou­le­vée : la musique « tech­no » et la danse peuvent-​elles ser­vir à éle­ver l’âme et donc être apte à « rendre audible la Parole de Dieu à toute une géné­ra­tion de jeunes qui se recon­naissent dans cette culture » comme l’é­crit le com­mu­ni­qué du 10 novembre 2004 de la Pastorale des Jeunes, à la demande de Mgr Raffin pour répondre aux objec­tions reçues à la célé­bra­tion J’Croix du 5 novembre 2004, à la cathé­drale de Metz ?

I – Inculturation ?

L’argumentation fon­da­men­tale des par­ti­sans de l’as­so­cia­tion J’Croix consiste dans l’a­dap­ta­tion de leur « pré­di­ca­tion » au monde contem­po­rain afin que la jeu­nesse actuelle puisse retrou­ver ses repères cultu­rels dans l’Eglise.

1 – Une question légitime soulevée depuis longtemps

On a pu en effet voir cette ques­tion, qui se résume fina­le­ment à celle des rap­ports entre la pas­to­rale et la Foi, sou­le­vée tout au long de l’Histoire de l’Eglise, et spé­cia­le­ment dans la que­relle qui oppo­sa saint Paul et saint Pierre sur la ques­tion du main­tien ou non des rites de l’Ancien Testament pour les gen­tils nou­vel­le­ment conver­tis au chris­tia­nisme (que­relle qui sera tran­chée sous l’au­to­ri­té de saint Pierre, contre sa pre­mière pen­sée, au « concile » de Jérusalem, en l’an 50), et plus tard dans la que­relle des rites chi­nois qui dura pen­dant plus de 100 ans .[2]

Si l’Eglise n’a jamais été oppo­sée à une cer­taine incul­tu­ra­tion, elle a tou­jours main­te­nu que cette der­nière ne devait jamais aller contre l’or­tho­doxie de la foi. Car pour elle, la « lex oran­di » se doit d’être l’ex­pres­sion de la « lex credendi ».

Ainsi, le Pape Pie XII, lors de son allo­cu­tion de clô­ture du Congrès International de Liturgie d’Assise, le 22 sep­tembre 1956, décla­rait : [3]

« La litur­gie et le pas­sé. En matière de litur­gie, comme en beau­coup d’autres domaines, il faut évi­ter à l’é­gard du pas­sé deux atti­tudes exces­sives : un atta­che­ment aveugle et un mépris total. On trouve dans la litur­gie des élé­ments immuables, un conte­nu qui trans­cende le temps, mais aus­si des élé­ments variables, tran­si­toires, par­fois même défec­tueux. L’attitude actuelle des milieux litur­giques à l’é­gard du pas­sé nous semble en géné­rale tout à fait juste (…) Çà et là, pour­tant, appa­raissent des idées et des ten­dances aber­rantes, des résis­tances, des enthou­siasmes ou des condam­na­tions, dont les formes concrètes vous sont bien connues et dont nous avons dit un mot plus haut.

La litur­gie et le temps pré­sent. La litur­gie confère à la vie de l’Eglise, et même à toute l’at­ti­tude reli­gieuse d’au­jourd’­hui, une empreinte carac­té­ris­tique. On remarque sur­tout une par­ti­ci­pa­tion active et consciente des fidèles aux actions litur­giques. De la part de l’Eglise, la litur­gie actuelle com­porte un sou­ci de pro­grès, mais aus­si de conser­va­tion et de défense. Elle retourne au pas­sé sans le copier ser­vi­le­ment, et crée du nou­veau dans les céré­mo­nies elles-​mêmes, dans l’u­sage de la langue vul­gaire, dans le chant popu­laire et la construc­tion des églises. Il serait néan­moins super­flu de rap­pe­ler encore une fois que l’Eglise a de graves motifs de main­te­nir fer­me­ment dans un rite latin l’o­bli­ga­tion incon­di­tion­née pour le prêtre célé­brant d’employer la langue latine, et de même, quand le chant gré­go­rien accom­pagne le saint sacri­fice, que cela se fasse dans la langue de l’Eglise. (…) La litur­gie actuelle se pré­oc­cupe aus­si de nom­breux pro­blèmes par­ti­cu­liers concer­nant par exemple : les rap­ports de la litur­gie avec les idées reli­gieuses du monde actuel, la culture contem­po­raine, les ques­tions sociales, la psy­cho­lo­gie des pro­fon­deurs. Cette simple men­tion suf­fi­ra à vous mon­trer que les divers aspects de la litur­gie d’au­jourd’­hui, non seule­ment sus­citent notre inté­rêt, mais tiennent notre vigi­lance en éveil. Nous dési­rons sin­cè­re­ment que le mou­ve­ment litur­gique pro­gresse et nous vou­lons l’y aider ; mais il nous appar­tient aus­si de pré­ve­nir tout ce qui serait une source d’er­reurs et de dangers. »

Monseigneur Lefebvre lui-​même, dans les années 50, se mon­trait favo­rable à une cer­taine afri­ca­ni­sa­tion de la litur­gie, bien com­prise dans le même sens qui sera don­né par Pie XII quelque temps plus tard[4] . Il recon­naît, écrit Mgr Tissier de Mallerais, qu’il n’y

« a aucune obli­ga­tion à main­te­nir uni­que­ment les mélo­dies de com­po­si­tion euro­péenne » et qu’il y a là « un tra­vail à accom­plir dans toutes les langues et sur des mélo­dies du pays » ; il admet « la danse reli­gieuse » lors des fêtes exté­rieures et des cor­tèges, mais non dans les pro­ces­sions ; il sug­gère de confier à des artistes indi­gènes la pein­ture et la sculp­ture dans les églises. Tout en deman­dant « une étude » des « céré­mo­nies plus ou moins féti­chistes et super­sti­tieuses qui accom­pagnent les évé­ne­ments de la vie sociale », c’est-​à-​dire, à mots cou­verts, leur exa­men cri­tique, il concède que « rien n’in­ter­dit cepen­dant l’é­tude d’une cer­taine adop­tion de céré­mo­nies cou­tu­mières qui pour­raient être chris­tia­ni­sées, sur­tout en ce qui concerne les funé­railles et cer­tains usages accom­pa­gnant le mariage. Le rituel pour­rait s’ar­gu­men­ter de cer­taines béné­dic­tions adap­tées aux habi­tudes et cou­tumes afri­caines. »[5]

De fait, l’Eglise, dans ses res­tau­ra­tions litur­giques, après des périodes de déca­dence, a tou­jours épu­ré les élé­ments étran­gers. Ainsi saint Pie V dans la res­tau­ra­tion tri­den­tine de la messe, en sup­pri­mant tous les rites ayant moins de deux cents ans d’exis­tence, a vou­lu sup­pri­mer de la litur­gie tout le pro­fane, voire le païen qui s’y était infil­tré, tel un hymne à Bacchus.

Alors, notre oppo­si­tion pré­sente à la tenue de soi­rée dan­sante à thème reli­gieux provient-​elle d’un esprit ren­fer­mé dans

« un uni­vers hos­tile au monde exté­rieur et imper­méable à tout esprit d’ou­ver­ture ain­si qu’à tout regard cha­leu­reux et misé­ri­cor­dieux sur ceux qui ne sont pas de sa cha­pelle » ? [6]

A Dieu ne plaise ! Cette atti­tude serait pro­pre­ment anti-​apostolique et contraire aux prin­cipes mis­sion­naires de l’Eglise catholique.

2 – Les changement opérés, de nouveaux principes

De fait, il faut mal­heu­reu­se­ment ajou­ter que cette ouver­ture don­née par les direc­tives de Pie XII sera vite dépas­sée par des reven­di­ca­tions plus radi­cales, tel ce vœu du IIIe Congrès inter­na­tio­nal de l’Institut pon­ti­fi­cal de musique sacrée, qui en 1957 à Rome, vou­dra « favo­ri­ser la musique litur­gique d’ins­pi­ra­tion autoch­tone ».

Pourquoi ? Le vent du Concile souf­flait déjà dans l’Eglise.

« J’entends autour de moi, disait le futur Pie XII, des nova­teurs qui veulent déman­te­ler la Chapelle Sacrée, détruire la flamme uni­ver­selle de l’Eglise, reje­ter ses orne­ments, lui don­ner le remords de son pas­sé his­to­rique. Eh bien, mon cher ami, j’ai la convic­tion que l’Eglise de Pierre doit assu­mer son pas­sé ou alors elle creu­se­ra sa tombe. – Supposez, cher ami, avait com­men­cé à dire le pape, que le com­mu­nisme ne soit que le plus visible des organes de sub­ver­sion contre l’Eglise et contre la tra­di­tion de la révé­la­tion divine, alors nous allons assis­ter à l’in­va­sion de tout ce qui est spi­ri­tuel, la phi­lo­so­phie, la science, le droit, l’en­sei­gne­ment, les arts, la presse, la lit­té­ra­ture, le théâtre et la reli­gion. Je suis obsé­dé par les confi­dences de la Vierge à la petite Lucie de Fatima. Cette obs­ti­na­tion de la Bonne Dame devant le dan­ger qui menace l’Eglise, c’est un aver­tis­se­ment divin contre le sui­cide que repré­sen­te­rait l’al­té­ra­tion de la foi, dans sa litur­gie, dans sa théo­lo­gie et son âme. » [7]

Ce déman­tè­le­ment, nous en voyons son ori­gine dans le décret conci­liaire Gaudium et Spes qui donne la racine théo­lo­gique de ces nou­veau­tés en accep­tant les valeurs du monde les plus pri­sées par nos contemporains.

« Mû par la foi, se sachant conduit par l’Esprit du Seigneur qui rem­plit l’u­ni­vers, le peuple de Dieu s’ef­force de dis­cer­ner dans les évé­ne­ments, les exi­gences et les requêtes de notre temps, aux­quels il par­ti­cipe avec les autres hommes, quels sont les signes véri­tables de la pré­sence ou du des­sein de Dieu. La foi, en effet, éclaire toutes choses d’une lumière nou­velle et nous fait connaître la volon­té divine sur la voca­tion inté­grale de l’homme, orien­tant ain­si l’es­prit vers, des solu­tions plei­ne­ment humaines. Le Concile se pro­pose avant tout de juger à cette lumière les valeurs les plus pri­sées par nos contem­po­rains et de les relier à leur source divine. Car ces valeurs, dans la mesure où elles pro­cèdent du génie humain, qui est un don de Dieu, sont fort bonnes ; mais il n’est pas rare que la cor­rup­tion du cœur humain les détourne de l’ordre requis : c’est pour­quoi elles ont besoin d’être puri­fiées. Que pense l’Eglise de l’homme ? Quelles orien­ta­tions semblent devoir être pro­po­sées pour l’é­di­fi­ca­tion de la socié­té contem­po­raine ? Quelle signi­fi­ca­tion der­nière don­ner à l’ac­ti­vi­té de l’homme dans l’u­ni­vers ? Ces ques­tions réclament une réponse. La réci­pro­ci­té des ser­vices que sont appe­lés à se rendre le peuple de Dieu et le genre humain, dans lequel ce peuple est insé­ré, appa­raî­tra alors avec plus de net­te­té : ain­si se mani­fes­te­ra le carac­tère reli­gieux et, par le fait même, sou­ve­rai­ne­ment humain de la mis­sion de l’Eglise. »

Le Père Congar lui-​même, expert au concile, et pour­tant condam­né aupa­ra­vant par Pie XII, donne dès 1950 la source de Gaudium et Spes :

« Les pro­gres­sistes du 19e siècle[8] ont alors trop pris telles quelles, pour les intro­duire en chris­tia­nisme, et ain­si pensaient- ils les bap­ti­ser, des idées nées dans un autre monde sou­vent hos­tile et encore char­gé d’un autre esprit. Réconcilier l’Eglise avec un cer­tain monde moderne ne pou­vait pas se faire en intro­dui­sant telles quelles dans l’Eglise les idées de ce monde moderne. Cela sup­po­sait un tra­vail en pro­fon­deur par lequel les prin­cipes per­ma­nents du catho­li­cisme prissent un déve­lop­pe­ment nou­veau en assi­mi­lant après les avoir décan­tés et puri­fiés les apports valables de ce monde moderne. »[9]

Désormais, cette incul­tu­ra­tion devient avec et après le Concile comme un leit­mo­tiv de la nou­velle litur­gie. On y affirme en même temps tout et le contraire de tout. En même temps, on affirme cette pri­mau­té de la doc­trine, tout en accep­tant dans les textes « doc­tri­naux » une incul­tu­ra­tion théo­rique, et dans la pra­tique une incul­tu­ra­tion de cer­tains rites païens est pratiquée.

Alors, comme pour illus­trer les abus qui deviennent la norme offi­cielle, nous ne serons abso­lu­ment pas éton­nés de lire sous la plume de Jean-​Paul II, pour des motifs pas­to­raux, cet appel à l’in­cul­tu­ra­tion, qu’il pra­ti­quait d’ailleurs régu­liè­re­ment et sans com­plexe dans ses voyages pontificaux :

« L’adaptation doit tenir compte du fait que dans la litur­gie, sur­tout celle des sacre­ments, il existe une par­tie immuable – parce qu’elle est d’ins­ti­tu­tion divine -, dont l’Eglise est gar­dienne, et des par­ties sus­cep­tibles de chan­ge­ment, qu’elle a le pou­voir, et par­fois même le devoir, d’a­dap­ter aux cultures des peuples récem­ment évan­gé­li­sés. »[10]

Il est vrai – encore une fois – qu’il y a dans les sacre­ments une par­tie immuable, d’es­sence divine. Le pou­voir de l’Eglise s’ar­rête alors à la sub­stance des sacre­ments, c’est-​àdire à ce qu’a ins­ti­tué le Christ. Mais l’Eglise, tout de même, dans la pro­mul­ga­tion de nou­veaux rites, ne peut faire fi de toute la Tradition de l’Eglise, qui par les prières et céré­mo­nies qui entourent le rite essen­tiel du sacre­ment, dis­posent nos âmes à sa récep­tion et en pré­cisent le sens. Or, on est bien obli­gé de recon­naître que l’in­cul­tu­ra­tion dépasse la simple pas­to­rale en inté­grant des rites païens ou autre folk­lore local qui n’ont rien à voir avec les sacro-​saints prin­cipes litur­giques. L’inculturation, par défi­ni­tion, exclut la pos­si­bi­li­té de conser­ver les prin­cipes de la Liturgie.

Le com­pen­dium du Catéchisme de l’Eglise catho­lique est bien un exemple de cette ambi­guï­té galo­pante. Faute de place, nous ne relè­ve­rons que trois numéros :

n°248. Quel est le cri­tère qui garan­tit l’u­ni­té dans cette pluralité ?

C’est la fidé­li­té à la Tradition apos­to­lique, à savoir la com­mu­nion dans la foi et dans les sacre­ments reçus des Apôtres, com­mu­nion signi­fiée et garan­tie par la suc­ces­sion apos­to­lique. L’Église est catho­lique : elle peut donc inté­grer dans son uni­té toutes les véri­tables richesses des dif­fé­rentes cultures.

n°249. Tout est-​il immuable dans la liturgie ?

Dans la litur­gie, sur­tout dans la litur­gie des sacre­ments, il y a des élé­ments immuables, parce qu’ils sont d’ins­ti­tu­tion divine, dont l’Église est la fidèle gar­dienne. Il y a aus­si des élé­ments sus­cep­tibles de chan­ge­ment, qu’elle a le pou­voir et par­fois le devoir d’a­dap­ter aux cultures des dif­fé­rents peuples.

n°559. Existe-​t-​il dans l’Église dif­fé­rents che­mins de prière ?

Dans l’Église, il existe divers che­mins de prière, liés aux dif­fé­rents contextes d’ordre his­to­rique, social et cultu­rel. Il appar­tient au Magistère de dis­cer­ner leur fidé­li­té à la tra­di­tion de la foi apos­to­lique, et aux pas­teurs et aux caté­chètes d’en expli­quer le sens, qui est tou­jours en rela­tion avec Jésus-Christ.

3 – Eléments de réponses pour ces spectacles

Maintenant que nous avons posé les prin­cipes de l’in­cul­tu­ra­tion, nous devons nous poser la ques­tion pré­cise : l’in­cul­tu­ra­tion prô­née par l’as­so­cia­tion J’Croix est-​elle accep­table pour un catholique ? 

a) Cette incul­tu­ra­tion est-​elle litur­gique ? Au sens strict, l’hon­nê­te­té nous oblige à répondre par la néga­tive. La sérieuse (?) lec­ture de textes bibliques, la réci­ta­tion de prières, tels le Pater, une béné­dic­tion ou un salut du Saint-​Sacrement à la fin de la céré­mo­nie, ne suf­fisent pas à faire entrer ces réunions dans le cadre litur­gique. Cependant ces « mixt » suf­fisent à main­te­nir une ambi­guï­té pratique.

b) Cette incul­tu­ra­tion (para­li­tur­gique) attaque-​t-​elle la lex cre­den­di ? Bonne ques­tion ! Il fau­drait sim­ple­ment pour y répondre pos­sé­der le texte exact des dif­fé­rentes inter­ven­tions pour y répondre avec pré­ci­sion. Disons sim­ple­ment, pour avoir vision­né le film de la soi­rée don­née dans la cathé­drale de Metz, que la repré­sen­ta­tion sen­suelle de la Vierge Marie nous semble plu­tôt quelque peu blasphématoire.

c) Les églises, des lieux de spec­tacle ou de litur­gie ? Ces cita­tions de la Sainte Ecriture ou du droit canon suf­fisent à reje­ter les musiques et danses modernes qui hyper­tro­phient la sen­si­bli­té du corps qui ne sait plus que se « trémousser ».

« Ma mai­son est une mai­son de prière et vous en avez fait une caverne de brigand. »

« Terribilis est, locus iste, quia domus Dei est et por­ta caelis. »

Le code de droit canon ne fait-​il pas l’in­jonc­tion de n’ad­mettre « dans un lieu sacré que ce qui sert ou favo­rise le culte, la pié­té ou la reli­gion, et y sera défen­du tout ce qui ne convient pas à la sain­te­té du lieu » ? En aucun cas, continue-​t-​il, l’Ordinaire ne peut per­mettre d’autres usages qui soient contraires à la sain­te­té du lieu. (Canon 1210).

La pas­to­rale se doit d’être au ser­vice de la foi et de la conver­sion des âmes : Quelle est le but de cette pas­to­rale qui ne pré­tend aucu­ne­ment conver­tir et éle­ver les âmes ? Eloquent cet aveu du Père Tiem, fran­cis­cain, ori­gi­naire du Vietnam, qui explique ain­si sa démarche :

« On sait bien qu’on ne va pas conver­tir les gens. On veut mon­trer qu’on est capable d’être une église d’ac­cueil des jeunes. Parfois, on a l’im­pres­sion qu’il s’a­git de deux mondes paral­lèles qui ne se croisent pas. » [11]

Objection 1 : les cathé­drales, les basi­liques étaient des lieux de réunion du peuple chré­tien dans les pre­miers temps de l’Eglise jus­qu’au Moyen-​Age finis­sant par des réa­li­tés profanes !

Réponses :

Il n’y avait pas à l’é­poque de grande salle pour les réunions.
Ces églises avaient été payées direc­te­ment par les fidèles.
Et sur­tout, les fidèles vivaient dans une ambiance de sacré.

Objection 2 : saint Louis-​Marie Grignon de Montfort a bien écrit des can­tiques sur des mélo­dies popu­laires et pro­fanes, quelques fois des airs de danse !

Réponses : 

Le but était d’é­le­ver les âmes vers Dieu, en les pre­nant là où elles étaient, selon le vrai esprit d’apostolat.
Ces can­tiques n’é­taient pas liturgiques.
Les musiques pou­vaient être assu­mées par un catho­lique car elles ten­daient à l’universel.

Abbé Patrick VERDET †

Suite au pro­chain numé­ro : Les rockers de Dieu, par M. l’ab­bé Billecocq.

Notes

1 – Cette volon­té uto­pique de faire ren­con­trer ces deux uni­vers est la même que celle du Concile, telle que Paul VI l’exprime lui­même devant l’O.N.U. en 1966 : (Source : Documentation Catholique, 1966). « L’Eglise du Concile, il est vrai, s’est beau­coup occu­pée de l’homme, de l’homme tel qu’il se pré­sente à notre époque : l’homme vivant, l’homme tout entier occu­pé de soi, l’homme qui se fait non seule­ment le centre de tout ce qui l’intéresse, mais qui ose se pré­tendre le prin­cipe et la rai­son der­nière de toute réa­li­té. Tout l’homme phé­no­mé­nal, c’est-à-dire avec le revê­te­ment de ses innom­brables appa­rences, s’est comme dres­sé devant l’assemblée des Pères conci­liaires… L’humanisme laïc et pro­fane enfin est appa­ru dans sa ter­rible sta­ture et a, en un cer­tain sens, défié le Concile. La reli­gion du Dieu qui s’est fait homme, s’est ren­con­trée avec la reli­gion (car c’en est une) de l’homme qui se fait Dieu. Qu’est-il arri­vé ? Un choc, une lutte, un ana­thème ? Cela pou­vait arri­ver, mais cela n’a pas eu lieu. La vieille his­toire du sama­ri­tain a été le modèle de la spi­ri­tua­li­té du Concile. Une sym­pa­thie sans bornes l’a enva­hi tout entier… Reconnaissez- lui au moins ce mérite, vous, huma­nistes modernes, qui renon­cez à la trans­cen­dance des choses suprêmes, et sachez recon­naître notre nou­vel huma­nisme : nous aus­si, nous plus que qui­conque, nous avons le culte de l’homme. »
Surprenant, ne trouvez-​vous pas ?

2 – Environ de 1631 à 1742.

3 – Enseignements Pontificaux de Solesmes : « La litur­gie », n° 820–822 « La sainte litur­gie et l’action pastorale ».

4 – Voir Marcel Lefebvre, par Mgr Tissier de Mallerais, p. 251–252.

5 – Préface d’un ouvrage col­lec­tif Des prêtres noirs s’interrogent. Cf. Lettre cir­cu­laire de Mgr Lefebvre à ses prêtres à Dakar surl” apos­to­lat, 1960 ; Lettres pas­to­rales et écrits, p. 129.

6 – Monseigneur Pierre Raffin, lettre du 23 décembre 2004, en réponse à M. l’abbé Verdet.

7 – Le comte Enrico Pietro Galeazzi, nous rap­porte ces paroles du car­di­nal Paccelli. In Mgr Roche et P. Saint Germain : « Pie XII devant l’his­toire », pp. 52–53.

8 – Ex : de Lamennais.

9 – « Vraies et fausses réformes dans l’Eglise » – Cerf 1950 p. 345–346.

10 – Jean-​Paul II, Lettre apos­to­lique, à l’occasion du 25e anni­ver­saire de la consti­tu­tion « Sacrosanctum Concilium » sur la sainte Liturgie, 4 décembre 1988, n°16.

11 – Dans L’Est répu­bli­cain, same­di 6 novembre 2004 par Philippe Maracci.