Orages sur le mariage

Depuis un an, ton­nerres et tour­mentes s’abattent sur le mariage chré­tien ; d’autant plus sur­pre­nants qu’ils pro­viennent de là où l’on ne les attend pas : du som­met du Vatican.

Avant même le deuxième synode sur la famille, le pape François publiait deux motu pro­prio visant offi­ciel­le­ment à faci­li­ter les pro­cé­dures de nul­li­té de mariage. Il s’agissait dans les faits d’introduire un « divorce catho­lique » qui tait son nom. Vint ensuite l’exhortation apos­to­lique Amoris Lætitia, ouvrant insi­dieu­se­ment la porte, en sa note 351, à la com­mu­nion aux divor­cés rema­riés. Enfin, par deux fois ces der­niers jours, les 16 et 18 juin, le pape s’est fait le pro­mo­teur du concu­bi­nage, aux dépens du sacre­ment de mariage. Affirmant d’un côté : « La grande majo­ri­té des mariages sacra­men­tels sont nuls parce que : s’ils disent « oui, pour toute la vie » ils ne savent pas ce qu’ils disent ayant une autre culture », il ajoute d’autre part : « J’ai vu tel­le­ment de fidé­li­té dans ces concu­bi­nages (en Argentine) je suis sûr que ce sont des mariages vrais, qu’ils ont la grâce du sacre­ment, parce qu’ils sont fidèles ».

On ne peut qu’être atter­ré par de tels pro­pos, trans­for­mant le mariage en un idéal tel­le­ment inac­ces­sible que la plu­part de ceux qui sont contrac­tés sont esti­més inva­lides, tan­dis que le concu­bi­nage est consi­dé­ré comme moyen d’y accé­der. En un mot, ce n’est plus le sacre­ment qui est moyen de salut, mais l’état de péché. En ces pro­pos, le pape Bergolio prêche à l’opposé de l’Évangile et donc de sa fonc­tion, décla­rant la bon­té du mal, et réci­pro­que­ment. L’apôtre saint Jean n’hésiterait pas à dire qu’il agit en Antichrist.

À la clé de cette dra­ma­tique inver­sion se trouve le prin­cipe de gra­dua­li­té, que Vatican II a ins­crit au cœur de son ecclé­sio­lo­gie : les confes­sions héré­tiques ou schis­ma­tiques y sont décla­rées pos­sé­der des élé­ments de salut, et à ce titre par­ti­cipent plus ou moins plei­ne­ment à l’Église, désor­mais défi­nie comme com­mu­nion de cha­ri­té. On appar­tient alors à cette der­nière de manière gra­duelle, et cha­cun de ces modes d’appartenance se doit d’être res­pec­té. Le pape François ne fait qu’appliquer ce même prin­cipe au mariage, redé­fi­ni comme com­mu­nion d’amour – c’est la fameuse inver­sion des fins du mariage opé­rée à Vatican II. Il y a alors dans cette logique plu­sieurs degrés à l’amour matri­mo­nial, et le concu­bi­nage en est un.

Certains se ras­surent au vu de pré­lats pre­nant la défense du mariage. Pourtant, force est de consta­ter qu’aucun d’eux ne remet en cause le prin­cipe de gra­dua­li­té qui en est la source, ce qui les obli­ge­rait à dénon­cer l’ecclésiologie erro­née de Vatican II. Mais de cela ils ne veulent pas. Aussi, rela­ti­ve­ment à ces réac­tions, je me fais le dis­ciple de Bossuet : « Dieu se rit de ceux qui déplorent les effets dont ils ché­rissent les causes ».

En un mot, en cette ter­rible crise qui secoue l’Église et aujourd’hui le mariage, le salut n’est pas pour l’heure en ces pré­lats, et bien moins encore dans le pape. Certains s’en décou­ra­ge­ront, car le Christ semble dor­mir en pleine tem­pête. Mais Il est là, au sein même de la barque, au milieu de votre foyer, pré­ci­sé­ment par la grâce sacra­men­telle du mariage. Qu’il est encou­ra­geant de le voir vivi­fier secrè­te­ment vos familles, de vous voir vivre les prin­cipes catho­liques du mariage, de voir de jeunes foyers se pré­pa­rer et se fon­der dans un idéal pro­fon­dé­ment chré­tien ! Nul doute qu’en ces temps, Dieu répand avec sur­abon­dance ses grâces de sain­te­té familiale.

Profitez-​en ! C’est alors que vous serez, pour reprendre l’expression de Mgr Lefebvre, « la gloire et la cou­ronne de l’Église ».

Abbé Patrick de La Rocque, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Sources : Le Chardonnet n° 320 de juillet 2016

FSSPX

M. l’ab­bé Patrick de la Rocque est actuel­le­ment prieur de Nice. Il a par­ti­ci­pé aux dis­cus­sions théo­lo­giques avec Rome entre 2009 et 2011.