La mode liturgique

La mode liturgique

Je viens de rece­voir un magni­fique cata­logue en cou­leurs où l’on me pro­pose des cha­subles (autour de 500 F), des étoles, des aubes modernes. La publi­ci­té fait flèche de tout bois : on me recom­mande donc « un modèle très élé­gant », l” « aube œcu­mé­nique »,et un tis­su rus­tique infrois­sable, le Taizé.

Sapristi, me disais-​je, s’il suf­fit pour ne pas frois­ser les pro­tes­tants d’u­ti­li­ser ce tis­su qui porte le nom du haut lieu le plus fré­quen­té des syn­cré­tistes, ça vaut la peine d’y mettre le prix. Pourtant, est-​ce qu’il suf­fi­ra à un pas­teur, dont l’or­di­na­tion est contes­table, d’en­dos­ser une aube oecu­mé­nique pour dire une bonne messe bien catho­lique, c’est plus que douteux.

Posée sur une chaise à côté de mon bureau, il y a une aube en den­telle prête à être mon­tée. Mgr Gallant me l’a léguée en mou­rant. Elle repré­sente un tra­vail extra­or­di­naire : des heures, des cen­taines d’heures de points faits à la main, une mul­ti­tude infi­nie d’actes d’a­mour de Dieu, bien à leur place, sans faute, par­fai­te­ment orthodoxes.

C’est cette aube-​là qui devrait être à la mode, à l’é­poque où l’on se dit dégou­té des pro­duc­tions indus­trielles stan­dar­di­sées et atten­tif au tra­vail humain per­son­na­li­sé. L” « Eglise des pauvres » y trou­ve­rait l’oc­ca­sion de sérieuses éco­no­mies. Grâce à cette aube que j’ai reçue, je tiens 50 000 AF à la dis­po­si­tion du pre­mier jeune qui vou­dra faire des études dans un sémi­naire, fut-​il « sauvage ».

Abbé Philippe Sulmont

Cet article est tiré du Bulletin parois­sial de Domqueur, dans la Somme (80).

Curé de Domqueur † 2010

L’abbé Philippe Sulmont (1921–2010), second d’une famille de qua­torze enfants, ancien sémi­na­riste des Carmes, fut pro­fes­seur de col­lège, puis de sémi­naire, aumô­nier d’un pen­sion­nat de filles, puis enfin curé durant 37 ans de Domqueur et de six paroisses avoi­si­nantes entre Amiens et Abbeville.