Une chapelle oecuménique dans Saint-Paul-Hors-les-Murs

Abbé Philippe François, prieur de Mulhouse

LE CARDINAL Montezemolo, archi­prêtre de la basi­lique papale de Saint-​Paul-​hors-​les-​Murs à Rome, a annon­cé le 21 jan­vier der­nier à la salle de presse du Saint-​Siège l’aménagement d’une cha­pelle œcu­mé­nique dans le bap­tis­tère actuel de la basi­lique (Osservatore Romano, 21–22.01.2008 et Osservatore Romano, éd. heb­dom. en langue fran­çaise, ORLF, 29.01.2008).

Cet évé­ne­ment est « la grande nou­veau­té de l’année pau­li­nienne », que Benoît XVI ouvri­ra lors des vêpres du 28 juin pro­chain à Saint-​Paul, pour célé­brer le bimil­lé­naire de la nais­sance de l’Apôtre des Gentils.

Durant cette année consa­crée à saint Paul, il s’agit de « mettre l’accélérateur sur la réa­li­té œcu­mé­nique » (ORLF, ibid.).

« Cette cha­pelle », comme l’a expli­qué le car­di­nal, « conser­ve­ra sa carac­té­ris­tique de bap­tis­tère, avec les fonts bap­tis­maux d’un côté, mais sera des­ti­née à offrir aux frères chré­tiens qui le demandent, un lieu spé­cial de prière, pour leurs groupes qui viennent en pèle­ri­nage sur la tombe de Paul (sic), ou encore pour prier ensemble avec les catho­liques sans célé­bra­tion de sacre­ments ». Un autel y sera pla­cé conte­nant des reliques de mar­tyrs du IVe siècle. Plusieurs « Eglises » et confes­sions chré­tiennes ont déjà répon­du posi­ti­ve­ment à l’invitation à venir en pèlerinage.

A noter aus­si que durant cette année, les vêpres du ven­dre­di seront œcu­mé­niques, comme celles que Benoît XVI a célé­brées, tou­jours à Saint-​Paul, le 25 jan­vier der­nier pour la clô­ture de la Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens, – dont c’était le cen­te­naire – avec le car­di­nal Kasper, pré­sident du Conseil pon­ti­fi­cal pour la pro­mo­tion de l’Unité des Chrétiens et le Révérend Samuel Kobia, Secrétaire géné­ral du Conseil Œcuménique des Eglises. Dans son homé­lie le pape a notam­ment affir­mé que « la barque de l’œcuménisme est pous­sée par le souffle de l’Esprit-Saint ».

Le tombeau de saint Paul

On mesure mieux la gra­vi­té de ce scan­dale œcu­mé­nique, le der­nier en date, si l’on consi­dère l’importance de ce sanc­tuaire pour la Catholicité. En effet, avec Saint-​Pierre-​du-​Vatican, Saint-​Jean-​de-​Latran et Sainte-​Marie-​Majeure, c’est une des quatre basi­liques majeures de la Ville Eternelle.

Tout de suite après Saint-​Pierre, cet édi­fice est la plus grande église de Rome, bien mise en valeur grâce au large espace qui la sépare des édi­fices environnants.

Basilique constan­ti­nienne consa­crée le 18 novembre 324 par le pape saint Sylvestre Ier, sa gloire est de pos­sé­der le corps de saint Paul, l’Apôtre des Nations, mar­ty­ri­sé non loin de là aux Eaux-​Salviennes – aujourd’hui Saint-​Paul-​Trois-​Fontaines – en 67 ap. J.-C. On y vénère aus­si le corps de son fidèle dis­ciple, saint Timothée, évêque et martyr.

Le sar­co­phage de saint Paul, récem­ment mis à jour, est conser­vé depuis bien­tôt dix-​sept siècles sous l’autel papal, sur­mon­té depuis le XIiIe siècle par le magni­fique bal­da­quin sculp­té par Arnolfo di Cambio. Ce chef‑d’œuvre de la sculp­ture médié­vale romaine échap­pa mira­cu­leu­se­ment au dra­ma­tique incen­die qui détrui­sit presque toute l’église (autel, tran­sept et abside mis à part) dans la nuit du 15 au 16 juillet 1823.

La basi­lique, riche­ment recons­truite avec ses splen­dides mosaïque res­tau­rées et ses cinq nefs aux pro­por­tions majes­tueuses, fut consa­crée par le pape Pie IX le 10 décembre 1854, sur­len­de­main de la pro­cla­ma­tion du dogme de l’Immaculée Conception.

L’œcuménisme conciliaire : une hérésie

Lieu pri­vi­lé­gié des céré­mo­nies œcu­mé­niques à Rome depuis Paul VI et le Concile Vatican II, Saint-​Paul accueille­ra donc pen­dant des mois les héré­tiques et les schis­ma­tiques qui vien­dront y prier dans leur « cha­pelle œcu­mé­nique » à l’invitation de Benoît XVI.

En effet, sous le pon­ti­fi­cat actuel, nous res­tons plus que jamais dans la pour­suite du dia­logue œcu­mé­nique. « Ce dia­logue demeure tou­jours une des prio­ri­tés de l’Eglise catho­lique », comme l’a rap­pe­lé le pape dès son élec­tion (pre­mier mes­sage à l’Eglise, 20 avril 2005).

C’est ce que confirment deux textes récents de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, approu­vés par le Souverain Pontife avant publi­ca­tion : les « Réponses à des ques­tions concer­nant cer­tains aspects de la doc­trine sur l’Eglise » du 10 juillet 2007 (trois jours après le Motu Proprio Summorum Pontificium) et la « Note doc­tri­nale sur cer­tains aspects de l’évangélisation » du 14 décembre 2007, qui, tout en rap­pe­lant la néces­si­té de l’évangélisation, entend sau­ve­gar­der la liber­té reli­gieuse pro­mue par Vatican II.

Dans le pre­mier docu­ment, la Congrégation déclare qu’il est « cor­rect d’affirmer que l’Eglise du Christ est pré­sente et agis­sante dans les Eglises [ortho­doxes] et les com­mu­nau­tés ecclé­siales [pro­tes­tantes] qui ne sont pas encore en pleine com­mu­nion avec l’Eglise Catholique, grâce aux élé­ments de sanc­ti­fi­ca­tion et de véri­té qu’on y trouve. (…) L’Esprit du Christ ne refuse pas de se ser­vir d’elles comme de moyens de salut, dont la force dérive de la plé­ni­tude de grâces et de véri­té, qui a été confiée à l’Eglise catholique ».

A cela, Mgr Lefebvre avait déjà répon­du dans « Ils L’ont décou­ron­né » : « Le Concile s’est plu à exal­ter les valeurs de salut ou les valeurs tout court des autres reli­gions. Parlant des reli­gions chré­tiennes non-​catholiques, Vatican II enseigne que « bien que nous les croyions vic­times de défi­ciences , elles ne sont nul­le­ment dépour­vues de signi­fi­ca­tion et de valeur dans le mys­tère du Salut ». – C’est une héré­sie ! L’unique moyen de salut c’est l’Eglise Catholique. En tant que sépa­rées de l’unité de la vraie foi, les com­mu­nions pro­tes­tantes [ou ortho­doxes] ne peuvent pas être uti­li­sées par le Saint-​Esprit. Celui-​ci ne peut qu’agir direc­te­ment sur les âmes ou user des moyens (par exemple le bap­tême) qui, de soi, ne portent aucun signe se sépa­ra­tion. On peut se sau­ver dans le pro­tes­tan­tisme mais pas par le pro­tes­tan­tisme ! »

L’apostasie silencieuse

Comme l’écrivaient les quatre évêques de la Fraternité le 6 jan­vier 2004 dans la pré­face à l’étude inti­tu­lée « De l’œcuménisme à l’apostasie silen­cieuse », texte adres­sé à tous les car­di­naux : « Méprisant l’enseignement constant et una­nime de la Tradition selon laquelle le corps mys­tique du Christ est l’Eglise Catholique et qu’en dehors d’elle il n’y a pas de salut, cet œcu­mé­nisme a comme détruit les plus beaux tré­sors de l’Eglise, parce que au lieu d’accepter l’Unité fon­dée sur la véri­té entière, il a vou­lu construire une uni­té adap­tée à une véri­té mariée d’erreur ». (textes cités dans « Esprit mis­sion­naire et œcu­mé­nisme conci­liaire », « Nouvelles de Chrétienté », n° 109, janv.-fév. 2008, article très éclai­rant de l’abbé Alain Lorans).

Notre attachement à la Rome de toujours

L’abominable « cha­pelle œcu­mé­nique » de « l’année pau­li­nienne » en cours d’aménagement à Saint-​Paul-​hors-​les-​Murs est une insulte de plus à la Sainte Eglise Romaine, l’épouse unique et imma­cu­lée de Notre Seigneur Jésus-​Christ, celle que saint Paul prê­cha aux Juifs et aux Gentils avec tout son zèle mis­sion­naire qui lui valut le titre d’« Apôtre des Nations ».

Il est bon de relire en cette année du XXe anni­ver­saire des sacres épis­co­paux ce que Mgr. Lefebvre écri­vait le 7 juin 1988 dans la post­face de l’ouvrage « Pierre m’aimes-tu ? » :

« La Rome moder­niste pour­sui­vant son œuvre de démo­li­tion de la foi et de la chré­tien­té, c’est un devoir de la répu­dier en nous atta­chant à la Rome de tou­jours, pro­cla­mant plus que jamais la néces­si­té du Règne Universel de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ et de sa sainte Mère, Marie-Reine ».

Abbé Philippe François

Texte extrait du Bulletin du Prieuré Marie-​Reine, 195, rue de Bâle, 68100 Mulhouse - Mars 2008