Pie IX

255ᵉ pape ; de 1846 à 1878

17 mars 1856

Lettre encyclique Singulari quidem

Sur la situation de l’Église en Autriche

Table des matières

Donné à Rome, près Saint-​Pierre, le 17 mars 1856

À nos Fils bien-​aimés les Cardinaux, à nos véné­rables Frères les Archevêques et Évêques de tous les États impé­riaux et royaux d’Autriche,

Pie IX, Pape

Chers fils et Vénérables Frères, Salut et Bénédiction Apostolique.

Le concordat entre le pape et l’empereur

Nous avons appris avec une joie et une satis­fac­tion toute par­ti­cu­lière, fils bien-​aimés et véné­rables frères, qu’empressés de défé­rer aux vœux expri­més presque au même moment à cha­cun de vous par nous-​même et par notre très cher fils en Jésus-​Christ, l’empereur François-​Joseph, vous avez réso­lu, sous l’inspiration de la foi qui vous dis­tingue et de votre zèle pas­to­ral, de vous réunir dans la ville impé­riale et royale de Vienne, pour y dis­cu­ter et y confé­rer entre vous, afin qu’on puisse mettre la der­nière main aux conven­tions arrê­tées entre nous et ce fils très cher en Jésus-​Christ, dans le concor­dat que cet illustre et reli­gieux prince a eu soin de conclure avec nous. Ce concor­dat nous comble de conso­la­tion ; il fait l’immortelle gloire du prince, rend à l’Église ses droits usur­pés et ravit de joie tous les gens de bien. Or, en vous féli­ci­tant avec bon­heur, du zèle remar­quable que vous faites écla­ter pour l’Église en tenant cette assem­blée, nous ne pou­vons nous abs­te­nir, fils bien-​aimés et véné­rables frères, de pro­fi­ter de cette cir­cons­tance pour vous par­ler avec amour, vous mon­trer les sen­ti­ments intimes de notre cœur et vous faire ain­si com­prendre davan­tage com­bien est grande l’affection que nous avons pour vous, et pour tous les peuples fidèles de ce vaste empire confiés à vos soins.

Et d’abord pour ce qui regarde l’exécution du concor­dat pré­ci­té, vous n’ignorez pas qu’il ren­ferme un grand nombre d’articles qui vous concernent tout spé­cia­le­ment ; mais nous dési­rons avec ardeur que pour la manière de les accom­plir, vous vou­liez bien suivre la même voie, avoir une même façon de les entendre. Ayez soin tou­te­fois de prendre avec pru­dence toutes les pré­cau­tions que pour­ront récla­mer les usages dif­fé­rents des dif­fé­rentes pro­vinces du vaste empire d’Autriche. Si cer­tains articles pré­sentent des doutes, si des dif­fi­cul­tés sur­gissent, ce que nous ne croyons pas, il nous sera très agréable que vous nous en fas­siez part ; nous en confé­re­rons avec sa majes­té impé­riale et apos­to­lique, ain­si qu’il a été pré­vu par l’article 35 de ce concor­dat, et nous pour­rons don­ner les déci­sions convenables.

Combattre l’indifférentisme

2. Maintenant l’ardente cha­ri­té qui nous fait embras­ser dans un même sen­ti­ment d’amour tout le trou­peau du Seigneur, divi­ne­ment confié à notre sol­li­ci­tude par Jésus-​Christ lui-​même, la charge redou­table du minis­tère apos­to­lique qui nous oblige à pour­voir de toutes nos forces au salut des nations et des peuples, tout nous presse, fils bien-​aimés et véné­rables frères, d’exciter de plus en plus, avec toute l’énergie dont nous sommes capable, votre émi­nente pié­té, votre ardeur, votre vigi­lance épis­co­pale à conti­nuer de rem­plir avec un zèle de plus en plus ardent et avec le plus grand soin toutes les fonc­tions de votre charge pas­to­rale ; n’épargnez ni soins, ni avis, ni labeur pour conser­ver intact, invio­lable, dans vos dio­cèses, le saint dépôt de notre foi ; veillez sur l’innocence de vos ouailles, préservez-​les de tous les pièges et de toutes les embûches de leurs enne­mis. Car vous n’ignorez pas les cou­pables arti­fices, les manœuvres mul­ti­pliées, les séduc­tions de tout genre et les mons­trueux sys­tèmes employés par ces arti­sans per­fides de per­verses doc­trines, pour cher­cher traî­treu­se­ment à faire dévier du sen­tier de la véri­té et de la jus­tice sur­tout les impré­voyants et les simples, et à les jeter dans l’abîme de l’erreur et de la perdition.

Entre les maux sans nombre et à jamais déplo­rables qui bou­le­versent et déchirent le plus la socié­té reli­gieuse et civile, il en est deux sur­tout, vous le savez, fils bien-​aimés et véné­rables frères, que l’on peut, à bon droit, consi­dé­rer comme la source de tous les autres. Vous connais­sez par­fai­te­ment, en effet, com­bien sont nom­breuses et funestes les cala­mi­tés que jette sur l’Église et sur l’État la source impure de l’indifférentisme. Avec ce sys­tème, en effet, on néglige com­plè­te­ment tout devoir envers Dieu, quoique nous trou­vions en lui la vie, le mou­ve­ment et l’être, on met tout à fait de côté notre sainte reli­gion ; on ébranle, on ren­verse presque entiè­re­ment tous les fon­de­ments du droit, de la jus­tice et de la vertu.

De cette plaie hideuse de l’indifférentisme dif­fère peu le sys­tème de l’indifférence en matière de reli­gion, sys­tème sor­ti des ténèbres, qui détourne ses adeptes de la véri­té, les rend hos­tiles à la pra­tique de toute vraie croyance, oublieux de leur salut ; avec lui on enseigne des prin­cipes contra­dic­toires, on n’a point de doc­trine arrê­tée, on n’admet aucune dif­fé­rence entre les pro­fes­sions de foi les plus diver­gentes, on vit en paix avec toutes, et l’on pré­tend que toutes, à quelque reli­gion qu’elles appar­tiennent, conduisent au port de l’éternelle vie. Eh ! que leur importent leurs divi­sions par­ti­cu­lières, pour­vu seule­ment qu’ils tra­vaillent à la ruine de la véri­té.1

Une seule foi et une seule Eglise

3. Vous voyez, fils bien-​aimés et véné­rables frères, de quelle vigi­lance vous devez faire preuve pour empê­cher la conta­gion de cette épi­dé­mie cruelle, de gagner vos ouailles et de les perdre à jamais. Ne ces­sez donc de pré­mu­nir avec le plus grand soin, contre ces erreurs dam­nables, les peuples qui vous sont confiés ; de les péné­trer chaque jour plus inti­me­ment des ensei­gne­ments de la véri­té catho­lique ; de leur apprendre que, comme il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, son Christ et son Esprit, il n’y a qu’une seule véri­té divi­ne­ment révé­lée, une seule foi divine, prin­cipe du salut de l’homme, fon­de­ment de toute jus­ti­fi­ca­tion, vie du juste, sans laquelle il est impos­sible de plaire à Dieu ni de par­ve­nir à l’héritage de ses enfants (cf. Rm 1 ; Hb 11) ;2 qu’il n’y a qu’une seule et véri­table Église, l’Église sainte, catho­lique, apos­to­lique, romaine ; une seule chaire dont le Seigneur lui-​même a posé le fon­de­ment sur Pierre,3 loin de laquelle on ne peut trou­ver ni véri­table foi, ni salut éter­nel ; car celui-​là ne peut avoir Dieu pour père qui n’a pas l’Église pour mère. De plus, il est absurde de se croire dans l’Église quand on divorce avec la chaire de Pierre, sur laquelle repose l’Église comme sur sa base4. Mais il ne peut y avoir de plus grand crime, point de honte com­pa­rable à celle de s’être posé en adver­saire du Christ, d’avoir tra­vaillé à la des­truc­tion de cette Église acquise et engen­drée par son sang divin, d’avoir oublié la cha­ri­té évan­gé­lique, d’avoir lut­té avec les fureurs de la dis­corde cruelle, contre les cœurs unis, contre les enfants pai­sibles de Dieu.5

4. Le culte divin se com­pose de deux élé­ments, de la foi et des œuvres ; point de vraie foi sans les œuvres, point d’œuvres agréables à Dieu sans la foi. Ce qui rend étroite et ardue la voie qui mène à la vie6, ce n’est pas seule­ment l’obligation de pra­ti­quer les ver­tus et d’observer les pré­ceptes, c’est aus­si la néces­si­té de ne point s’écarter de la foi. Ne ces­sez donc d’avertir, de pres­ser vos peuples fidèles de deve­nir chaque jour plus fermes et plus inébran­lables dans leur croyance et de rendre chaque jour plus assu­rée, par leurs bonnes œuvres, leur voca­tion et leur admis­sion par­mi les élus.

Mais en vous appli­quant à pro­cu­rer le salut de votre trou­peau, ne négli­gez point de tra­vailler avec toute la bon­té, toute la patience et la sagesse pos­sibles à faire ren­trer dans le ber­cail unique de Jésus-​Christ les mal­heu­reux éga­rés, et pour les rap­pe­ler à l’unité catho­lique, adressez-​leur par­ti­cu­liè­re­ment ces paroles d’Augustin : « Revenez, frères, s’il vous plaît, pour vous enter de nou­veau sur le cep ; nous souf­frons de vous en voir retran­chés et jetés à terre. Comptez seule­ment les prêtres qui se sont suc­cé­dé sur le siège de Pierre, com­ment sur cette chaire de nos pères l’un a suc­cé­dé à l’autre ; ce siège est la pierre contre laquelle ne peut rien l’orgueil des portes infer­nales ».7 « Quiconque mange l’Agneau hors de cette enceinte est un pro­fane ; qui­conque n’est pas dans cette arche de Noé au moment du déluge péri­ra ».((S. Hieronymus, Epist. 14 [15, 2] (al. 57) ad Damas.))

Le rationalisme

5. Une autre mala­die, non moins per­ni­cieuse, étend main­te­nant ses ravages fruit de l’orgueil, elle fait en quelque sorte parade de la rai­son et s’intitule ratio­na­lisme. L’Église ne blâme cer­tai­ne­ment pas8 l’ardeur qui veut savoir la véri­té, car c’est Dieu lui-​même qui a mis au cœur de l’homme la pas­sion du vrai ; elle ne désap­prouve pas non plus les efforts que s’impose une rai­son droite et saine pour culti­ver l’intelligence, étu­dier la nature, per­cer les mys­tères les plus obs­curs et mettre au jour les secrets qu’elle cache dans son sein. Mère pieuse, elle sait, elle est com­plè­te­ment sûre, que l’un des plus grands bien­faits du ciel9 est cette rai­son qui nous élève au-​dessus de ce qui tombe sous les sens et nous aide à repro­duire en nous-​mêmes la grande image de Dieu. Elle sait qu’il faut cher­cher jusqu’à ce que l’on trouve et croire ce que l’on a décou­vert, pour­vu que l’on se per­suade encore qu’il ne faut croire, et consé­quem­ment recher­cher, après l’avoir trou­vé et quand on le croit, que ce qui a été ins­ti­tué par le Christ, car le Christ ne te com­mande d’étudier que ce qu’il a établi((Tertullianus, De praes­cript., cap. 9.)).

Qu’est-ce donc que l’Église ne souffre pas, ne per­met pas ? Qu’est-ce qu’elle inter­dit abso­lu­ment et condamne, comme l’y oblige la charge qui lui est impo­sée de gar­der le dépôt divin ? Ce que l’Église réprouve de toutes ses forces, ce qu’elle a tou­jours condam­né et condamne encore, c’est l’abus que font de la rai­son ceux qui ne rou­gissent ni ne craignent de l’opposer avec autant de folie que d’impiété à la parole de Dieu, de la mettre même au-​dessus. Pleins d’arrogance et de pré­somp­tion, l’orgueil les aveugle, et per­dant la notion du vrai, ils dédaignent avec fier­té la foi dont il est écrit qu’en man­quer sera un motif de condam­na­tion (cf. Mc 16, 16) ; ils nient, dans leur confiance en eux-​mêmes10, qu’on doive s’en rap­por­ter à Dieu sur Dieu, sur ce qu’il nous pro­pose de croire et de savoir de lui. C’est à ces hommes que l’Église a constam­ment oppo­sé que, sur la connais­sance de Dieu, il est juste11 que nous nous en réfé­rions à Dieu lui-​même, de qui nous tenons tout ce que nous croyons sur lui : car jamais l’homme n’eût pu connaître Dieu comme il doit être connu si Dieu même ne s’était révé­lé à lui pour son salut. Ce sont ces hommes que l’Église s’efforce de rap­pe­ler à l’usage du sens com­mun en leur disant : « Quoi de plus contraire à la rai­son que de vou­loir s’élever par la rai­son au-​dessus de la rai­son ? et quoi de plus contraire à la foi que de refu­ser de croire ce que la rai­son ne peut sai­sir »12.

L’Église ne cesse de leur répé­ter que le fon­de­ment de la foi n’est pas la rai­son mais l’autorité13 ; car il ne conve­nait pas que Dieu par­lant à l’homme se ser­vît d’arguments pour appuyer ses asser­tions, comme si l’on n’avait pas foi à sa parole ; mais il s’est expri­mé comme il a dû, c’est-à-dire comme le sou­ve­rain arbitre de toutes choses à qui il appar­tient d’affirmer, non de dis­pu­ter8.

Elle leur crie hau­te­ment que tout l’espoir de l’homme, que tout son salut est dans la foi chré­tienne, dans cette foi qui enseigne la véri­té, dis­sipe par sa lumière divine les ténèbres de l’ignorance humaine, opère par la cha­ri­té ; et en même temps dans l’Église catho­lique, car elle conserve le vrai culte, elle est le sanc­tuaire inébran­lable de la foi même, et le temple de Dieu hors duquel, sauf l’excuse d’une igno­rance invin­cible, il n’y a point de salut à attendre. Elle leur disait aus­si, avec beau­coup d’autorité, que si par­fois l’on peut don­ner dans l’explication de l’Écriture place à la science humaine, celle-​ci aurait mau­vaise grâce de s’en pré­va­loir. Son rôle n’est pas de pré­tendre avec arro­gance faire la maî­tresse, mais d’obéir comme une humble sui­vante : en mar­chant la pre­mière elle pour­rait s’égarer, elle pour­rait, en s’attachant trop aux signes exté­rieurs, aux mots, perdre la lumière de la ver­tu inté­rieure et s’écarter du droit sen­tier de la véri­té14.

Le progrès dans l’Eglise

Il n’en faut pas néan­moins conclure que dans l’Église du Christ, la reli­gion ne fait aucun pro­grès, elle en fait cer­tai­ne­ment, et de très consi­dé­rables, mais il est néces­saire que ce soient des pro­grès et non des chan­ge­ments dans la foi. Faites donc croître, il le faut, faites pro­gres­ser éner­gi­que­ment et le plus pos­sible, pen­dant le cours des siècles et des âges, l’intelligence, la science, la sagesse, de tous, de cha­cun, et de toute l’Eglise ; que l’on voie plus clai­re­ment ce que l’on croyait sans le voir ; que la pos­té­ri­té soit heu­reuse de com­prendre ce que l’antiquité véné­rait seule­ment par la foi ; que l’on polisse les pierres pré­cieuses du dogme, qu’on les adapte avec fidé­li­té, qu’on les monte avec sagesse, qu’on y ajoute l’éclat, la grâce et la beau­té, sans tou­te­fois rien chan­ger, c’est-à-dire sans rien chan­ger au dogme, au sens, à la pen­sée, en variant la forme non le fond15.

Exhortation aux évêques

Nous le croyons, fils bien-​aimés et véné­rables frères, nul d’entre vous ne s’étonne si à rai­son de notre pri­mau­té spi­ri­tuelle et de notre auto­ri­té suprême16 nous vous avons entre­te­nus ité­ra­ti­ve­ment de ces erreurs déplo­rables et funestes qui atteignent la reli­gion et la socié­té ; et si nous avons cru devoir exci­ter contre elles votre admi­rable vigi­lance épis­co­pale. Puisque l’homme enne­mi ne cesse de semer l’ivraie au milieu du fro­ment, puisque d’un autre côté nous sommes char­gé par la divine pro­vi­dence de veiller sur le champ du Seigneur, et que nous sommes le ser­vi­teur fidèle et pru­dent éta­bli sur la famille du Maître17, nous ne pou­vons ces­ser de rem­plir les devoirs insé­pa­rables de notre charge apostolique.

Maintenant ce que nous deman­dons à la pié­té et à la pru­dence qui vous dis­tinguent, c’est que dans votre assem­blée vous appli­quiez votre péné­tra­tion et votre sagesse à for­mer sur­tout entre vous les des­seins que vous juge­rez capables d’étendre la gloire de Dieu et de pro­cu­rer le salut des hommes dans toutes les par­ties de ce vaste empire. Il est vrai, nous nous réjouis­sons ample­ment dans le Seigneur de savoir que beau­coup d’ecclésiastiques, voire même de laïques, ani­més à un haut degré de l’esprit de foi et de cha­ri­té chré­tiennes, répandent la bonne odeur de Jésus-​Christ ; mais aus­si notre dou­leur n’est pas légère à la pen­sée que dans quelques lieux plu­sieurs membres du cler­gé oublieux de leur digni­té et de leur devoir ont ces­sé de vivre dans l’esprit de leur voca­tion, et que le peuple chré­tien peu ins­truit des divins ensei­gne­ments de notre sainte reli­gion, expo­sé aux plus graves dan­gers, renonce mal­heu­reu­se­ment aux œuvres de pié­té, à la fré­quen­ta­tion des sacre­ments, s’écarte de l’honnêteté des mœurs, des règles de la vie chré­tienne et court à sa per­di­tion. Nous en sommes inti­me­ment per­sua­dé, votre sol­li­ci­tude épis­co­pale bien connue consa­cre­ra tous ses soins et toutes ses pen­sées à mettre un terme à tous ces maux.

Faire des synodes provinciaux

Vous savez, fils bien-​aimés et véné­rables frères, quelle est pour amé­lio­rer la dis­ci­pline ecclé­sias­tique, cor­ri­ger les mœurs des peuples, et détour­ner les périls qui les menacent, l’influence des conciles pro­vin­ciaux, sage­ment pres­crits par les saints canons, et constam­ment employés pour le bon­heur de l’Eglise par les plus saints pré­lats ; notre vœu le plus ardent est donc que vous célé­briez selon les règles cano­niques ces synodes pro­vin­ciaux. Vous y trou­ve­rez les remèdes conve­nables et effi­caces aux com­munes souf­frances de chaque pro­vince ecclé­sias­tique de l’empire. Comme vous aurez à trai­ter dans ces synodes des ques­tions graves et nom­breuses, nous dési­rons que dans cette réunion de Vienne vous pre­niez avec votre sagesse et d’un plein accord, des réso­lu­tions sur les ques­tions prin­ci­pales qui devront y être trai­tées et déci­dées, et sur les mesures que votre zèle éga­le­ment réglé, devra employer pour assu­rer à notre reli­gion divine et à ses salu­taires ensei­gne­ments, dans toutes les pro­vinces de cet empire, une vigueur, une beau­té, une auto­ri­té qui croissent chaque jour davan­tage ; et pour obte­nir que les peuples fidèles s’éloignent du mal, pra­tiquent le bien, marchent comme des enfants de lumière dans la bon­té, dans la jus­tice et dans la vérité.

L’exemple de la vie du clergé

De tous les moyens qui peuvent por­ter conti­nuel­le­ment les autres à la ver­tu, à la pié­té, à l’amour du ser­vice de Dieu, il n’en est point de plus puis­sant que la vie et l’exemple de ceux qui se sont dévoués au saint minis­tère ; ne négli­gez donc pas de prendre entre vous et avec toute votre pru­dence les moyens propres à réta­blir la dis­ci­pline dans le cler­gé, par­tout où elle aura subi quelque échec, et à la faire pros­pé­rer, où le besoin s’en fera sentir.

6. Par consé­quent, fils bien-​aimés et véné­rables frères, après avoir mis en com­mun vos idées et vos dési­rs, employez tout votre zèle, toute votre ardeur à faire que les ecclé­sias­tiques n’oublient jamais leur digni­té ni leurs devoirs, s’éloignent de tout ce que le cler­gé ne peut se per­mettre sans faute et sans incon­ve­nance ; qu’ornés de toutes les ver­tus ils servent d’exemple aux fidèles dans leurs paroles, leur genre de vie, dans la cha­ri­té, la foi et la chas­te­té dont ils feront preuve ; qu’ils récitent les heures de chaque jour avec l’attention et la pié­té dési­rables ; qu’ils s’exercent à la prière et à la médi­ta­tion des choses du ciel ; qu’ils aiment la beau­té de la mai­son de Dieu ; qu’ils accom­plissent les fonc­tions saintes et les céré­mo­nies du culte sans s’écarter du pon­ti­fi­cal et du rituel romain ; qu’ils rem­plissent les devoirs par­ti­cu­liers de leur minis­tère avec ardeur, science et sain­te­té ; qu’ils n’interrompent jamais l’étude sur­tout des sciences sacrées, et qu’ils tra­vaillent constam­ment à pro­cu­rer le salut des hommes qui leur sont confiés.

Veillez avec un égal sou­ci à ce que les cha­noines de métro­poles, de cathé­drales, de col­lé­giales et les autres béné­fi­ciers astreints au ser­vice du chœur s’attachent par la gra­vi­té de leurs mœurs, la pure­té de leur vie, leur amour pour la pié­té, à briller de tous côtés comme des lumières pla­cées sur le chan­de­lier dans le temple du Seigneur ; qu’ils rem­plissent avec zèle tous les devoirs de leur minis­tère ; qu’ils tra­vaillent à la splen­deur du culte divin, observent la rési­dence, veillent avec bon­heur pour célé­brer les louanges du Seigneur avec appli­ca­tion, régu­la­ri­té, pié­té, reli­gion, évi­tant d’avoir l’esprit et les yeux dis­traits, une atti­tude peu décente ; qu’ils n’oublient jamais que s’ils font l’office du chœur, ce n’est pas seule­ment pour rendre à Dieu le culte sacré et le res­pect qui lui sont dus, mais encore pour le sup­plier de répandre sur eux et sur autrui toutes sortes de grâces.

7. Mais cha­cun de vous sait par­fai­te­ment com­bien servent à entre­te­nir, à nour­rir l’esprit ecclé­sias­tique, et à asseoir la constance dans le bien, ces exer­cices spi­ri­tuels que les Pontifes romains nos pré­dé­ces­seurs ont enri­chis d’indulgences sans nombre. Ne ces­sez donc de les recom­man­der à tous vos ecclé­sias­tiques et de les y por­ter de plus en plus pour que, un nombre de jours déter­mi­nés, ils se retirent sou­vent dans un endroit conve­nable. Là, fai­sant trêve à toute occu­pa­tion humaine, ils devront exa­mi­ner devant Dieu, avec le plus grand soin, toutes leurs actions, leurs paroles et leurs pen­sées ; médi­ter constam­ment les années éter­nelles, son­ger aux immenses bien­faits qu’ils ont reçus de Dieu, s’attacher ain­si à effa­cer les fautes dont ils se sont souillés dans la pous­sière du monde, à faire renaître la grâce qui leur a été don­née par l’imposition des mains, à se dépouiller du vieil homme et de ses mœurs pour revê­tir le nou­veau qui a été créé dans la jus­tice et la sainteté.

La formation des prêtres

8. Comme les lèvres des prêtres doivent être les dépo­si­taires de la science, afin de pou­voir répondre à ceux qui veulent par eux connaître la loi et de repous­ser les attaques des contra­dic­teurs, il importe, Fils bien-​aimés et véné­rables Frères, que vous employiez toute votre sol­li­ci­tude à pro­cu­rer au cler­gé une bonne et saine édu­ca­tion. Consacrez donc tous vos efforts et tous vos moyens à faire fleu­rir, sur­tout dans vos sémi­naires, les études bonnes et entiè­re­ment catho­liques ; que dès l’âge le plus tendre, les jeunes clercs y soient for­més, par des maîtres éprou­vés, à la pié­té, à la ver­tu et à l’esprit ecclé­sias­tique ; qu’ils y puisent, avec la science de la langue latine et des lettres humaines, des connais­sances phi­lo­so­phiques pures et éloi­gnées de tout péril d’erreur. Veillez ensuite et par­ti­cu­liè­re­ment à leur faire ensei­gner la théo­lo­gie, soit dog­ma­tique soit morale, d’après les livres divins, la tra­di­tion des saints Pères et l’autorité infaillible de l’Eglise ; à leur faire acqué­rir aus­si, pen­dant le temps néces­saire et conve­nable, avec le plus grand soin et d’une manière solide, la science des lettres sacrées, des saints canons, de l’histoire ecclé­sias­tique et de la litur­gie. Veillez par­ti­cu­liè­re­ment au choix des livres, dans la crainte qu’entraînés par le déluge d’erreurs dont nous sommes inon­dés, les jeunes ecclé­sias­tiques n’abandonnent témé­rai­re­ment la voie des saines doc­trines ; main­te­nant sur­tout, vous le savez, que des hommes ins­truits mais sépa­rés de nous en matière de reli­gion et retran­chés de l’Eglise, ont publié la Bible et les ouvrages des Pères tra­duits avec une cer­taine élé­gance, mais sou­vent, hélas ! viciés et détour­nés du sens véri­table par les com­men­taires infi­dèles qui les accompagnent.

Nul de vous n’ignore com­bien l’Église a besoin, par­ti­cu­liè­re­ment à notre époque, de ministres capables, dis­tin­gués par la sain­te­té de leur vie, par l’étendue et la droi­ture de leur science en œuvres et en paroles, habiles à défendre la cause de Dieu et de sa sainte Église et à édi­fier au Seigneur une mai­son fidèle. On ne doit donc rien négli­ger pour don­ner aux jeunes clercs dès leur bas âge une édu­ca­tion docte et sainte ; c’est l’unique moyen de for­mer pour l’Eglise des ministres vrai­ment utiles. Or, afin d’arriver de plus en plus à pro­cu­rer aux clercs une édu­ca­tion qui réponde à votre émi­nente pié­té, à votre sol­li­ci­tude pas­to­rale, à ce qu’exigent la gloire de l’Église et le salut des peuples, ne vous las­sez pas d’exhorter, de prier les ecclé­sias­tiques dis­tin­gués de vos dio­cèses, les laïques opu­lents mais bien dis­po­sés en faveur de la reli­gion catho­lique, de vou­loir bien, à votre exemple, four­nir de bon cœur quelque somme d’argent pour vous mettre à même de construire et de doter conve­na­ble­ment des sémi­naires, des­ti­nés à don­ner dès l’enfance une bonne édu­ca­tion aux jeunes clercs.

La formation de la jeunesse

9. N’ayez pas moins d’ardeur, fils bien-​aimés et véné­rables frères, à cher­cher les moyens de don­ner à la jeu­nesse de vos dio­cèses, quels que soient sa condi­tion et son sexe, une édu­ca­tion chaque jour plus catho­lique. Déployez donc l’énergie de votre vigi­lance épis­co­pale pour que, péné­trée de bonne heure et avant tout de l’esprit de crainte de Dieu, et abreu­vée du lait de la pié­té, la jeu­nesse acquière, outre les élé­ments de la foi, une connais­sance exacte et plus com­plète de notre sainte reli­gion, se forme à la ver­tu, aux bonnes mœurs, à l’esprit de la vie chré­tienne et s’éloigne de toutes les séduc­tions, de tous les dan­gers où le vice triomphe, où suc­combe l’innocence.

Augmenter l’esprit de foi dans les fidèles

Même sol­li­ci­tude pour ne ces­ser jamais d’exciter de plus en plus et par tous les moyens pos­sibles les peuples fidèles qui vous sont confiés, à la pié­té et à la reli­gion. Ainsi donc faites tout pour nour­rir chaque jour davan­tage ces peuples du pain salu­taire de la véri­té et de la foi catho­lique, leur faire aimer Dieu de tout leur cœur, obser­ver par­fai­te­ment ses pré­ceptes, visi­ter sou­vent et reli­gieu­se­ment son sanc­tuaire, sanc­ti­fier le dimanche, assis­ter fré­quem­ment, avec le res­pect et la pié­té néces­saires, au divin sacri­fice, s’approcher digne­ment aus­si des augustes sacre­ments de Pénitence et d’Eucharistie, ser­vir et hono­rer avec une dévo­tion toute par­ti­cu­lière la très sainte Mère de Dieu, l’immaculée Vierge Marie, avoir entre eux une mutuelle et impé­ris­sable cha­ri­té, per­sé­vé­rer dans la prière, vivre ain­si d’une manière digne de Dieu, lui plai­sant en toutes choses et fruc­ti­fiant en toutes sortes de bonnes œuvres.

Comme les mis­sions faites par des ouvriers capables sont émi­nem­ment propres à réveiller dans les peuples l’esprit de foi et de reli­gion, à les faire ren­trer dans le sen­tier de la ver­tu et du salut, nous dési­rons vive­ment que de temps en temps vous en fas­siez célé­brer dans vos dio­cèses. Nous féli­ci­tons ardem­ment, et comme ils le méritent, tous ceux d’entre vous qui ont déjà intro­duit dans les limites de leur juri­dic­tion cette œuvre salu­taire des mis­sions, d’où nous sommes heu­reux que soient sor­tis, sous l’influence de la grâce divine, des fruits abondants.

Visiter les diocèses

10. Ce que, dans votre assem­blée, vous devez avoir pré­fé­ra­ble­ment devant les yeux, Fils bien-​aimés et véné­rables Frères, c’est de vous pré­pa­rer à faire face, par des efforts com­muns, aux maux dont vous souf­frez tous. En effet, pour répa­rer les pertes prin­ci­pales que vos dio­cèses peuvent avoir subies et aug­men­ter leur pros­pé­ri­té, il n’y a rien de plus effi­cace que des visites fré­quentes et des synodes régu­liè­re­ment tenus, vous le savez. Vous savez aus­si que le concile de Trente sur­tout a recom­man­dé et pres­crit ces deux moyens18 La sol­li­ci­tude et la cha­ri­té remar­quables dont vous faites preuve envers le trou­peau confié à vos soins demandent donc que, confor­mé­ment aux lois cano­niques, vous n’ayez rien plus à cœur que de visi­ter vos dio­cèses avec le plus grand zèle et de faire, avec soin, tout ce qui peut assu­rer le fruit de la visite. Or, en accom­plis­sant ce devoir, attachez-​vous for­te­ment, par vos soins, sur­tout par vos avis pater­nels, par vos utiles dis­cours et par tous les moyens les plus conve­nables, à déra­ci­ner les erreurs, les désordres et les vices qui auraient pu se glis­ser dans votre trou­peau ; à dis­tri­buer à tous l’enseignement du salut, à raf­fer­mir la dis­ci­pline du cler­gé, à aider, à for­ti­fier les fidèles prin­ci­pa­le­ment en leur dis­tri­buant tous les secours spi­ri­tuels, et à les gagner tous à Jésus-Christ.

Prenez éga­le­ment à tâche de célé­brer les synodes dio­cé­sains, confor­mé­ment aux règles des saints canons, et d’y faire les ordon­nances que votre pru­dence juge­ra les plus propres à pro­cu­rer le plus grand bien de cha­cun de vos diocèses.

Il est à craindre que dans les prêtres qui doivent s’appliquer à l’enseignement et à l’étude, à qui incombe la charge d’instruire le peuple des choses dont la connais­sance est indis­pen­sable au salut, et d’administrer les sacre­ments19, on ne voie s’affaiblir l’amour de la science et se refroi­dir le zèle ; aus­si, nous dési­rons sou­ve­rai­ne­ment que dans les dif­fé­rentes par­ties de vos dio­cèses vous éta­blis­siez, sitôt que vous le pour­rez, des confé­rences où l’on s’occupe pré­fé­ra­ble­ment de théo­lo­gie morale et de litur­gie. Les prêtres sur­tout seront tenus de s’y pré­sen­ter avec une réponse écrite aux ques­tions posées préa­la­ble­ment par vous, d’y dis­cu­ter, pen­dant un temps déter­mi­né par vous éga­le­ment, sur la théo­lo­gie morale, sur les règles litur­giques, après que l’un d’eux aura pro­non­cé un dis­cours qui devra trai­ter prin­ci­pa­le­ment des devoirs du sacerdoce.

Les devoirs des curés

Les curés sur­tout vous prêtent aide et secours dans la conduite de votre trou­peau ; vous les avez admis au par­tage de votre sol­li­ci­tude et ils sont vos coopé­ra­teurs dans le plus grand de tous les arts. Ne ces­sez donc, fils bien-​aimés et véné­rables frères, d’enflammer leur zèle, de les exci­ter de tout votre cœur à accom­plir leurs devoirs avec toute l’activité et la reli­gion conve­nables. Répétez-​leur que jamais ils ne doivent omettre de nour­rir avec soin le peuple qui leur est confié, par la pré­di­ca­tion de la parole de Dieu, la dis­pen­sa­tion des sacre­ments, la dis­tri­bu­tion des nom­breuses grâces divines ; d’enseigner avec amour, avec patience aux igno­rants, sur­tout aux petits enfants, les mys­tères de la foi chré­tienne et les véri­tés de notre reli­gion ; de faire ren­trer les éga­rés dans le che­min du salut ; de s’appliquer par­ti­cu­liè­re­ment à détruire les haines, les ran­cunes, les ini­mi­tiés, les dis­cordes, les scan­dales ; à for­ti­fier les pusil­la­nimes, à visi­ter les malades, à leur pro­cu­rer pré­fé­ra­ble­ment les secours spi­ri­tuels ; à conso­ler les mal­heu­reux, les affli­gés et tous ceux qui sont dans la peine ; enfin à apprendre et à exci­ter tout le monde, confor­mé­ment à la saine doc­trine, à rendre reli­gieu­se­ment à Dieu ce qui est à Dieu, à César ce qui est à César ; car, en tout ce qui n’est contraire ni aux lois de Dieu, ni aux lois de l’Eglise, tous doivent se sou­mettre, obéir aux princes et aux puis­sances, non seule­ment par crainte de la colère, mais par devoir de conscience.

Continuez comme vous faites, et à la grande gloire de votre nom, fils bien-​aimés et véné­rables frères, à envoyer à la Congrégation du concile, aux époques déter­mi­nées, un rap­port exact sur la situa­tion de vos dio­cèses res­pec­tifs, à nous mettre avec soin au cou­rant de ce qui les inté­resse, afin que nous puis­sions être plus utiles soit à vous, soit à ces dio­cèses. Il nous est par­ve­nu que dans plu­sieurs dio­cèses du ter­ri­toire ger­ma­nique, cer­taines cou­tumes ont pré­va­lu sur la col­la­tion des paroisses et que quelques-​uns d’entre vous en dési­rent la conser­va­tion. Nous sommes dis­po­sé à user d’indulgence à cet égard, après avoir cepen­dant sou­mis à un exa­men atten­tif ces mêmes cou­tumes dont nous atten­dons que cha­cun de vous nous fasse une rela­tion détaillée et appro­fon­die ; nous pour­rons les auto­ri­ser dans les limites que la néces­si­té et les cir­cons­tances prin­ci­pales des pro­vinces paraî­tront exi­ger ; notre devoir, avant tout, est de faire obser­ver soi­gneu­se­ment les pres­crip­tions canoniques.

Aux évêques de rite oriental

Avant de clore cette lettre, où nous avons le bon­heur de vous entre­te­nir, vous tous pré­lats de l’empire d’Autriche, nous nous adres­sons à vous spé­cia­le­ment, véné­rables frères arche­vêques et évêques, qui dans ce grand empire, en union avec nous dans la vraie foi, dans la doc­trine catho­lique, et atta­chés à cette chaire de Pierre, sui­vez les rites de l’Eglise orien­tale et ses louables cou­tumes, approu­vées ou per­mises par le Saint-​Siège. Vous avez appris, vous com­pre­nez quel prix ce Siège apos­to­lique a tou­jours atta­ché à vos rites : il en a sou­vent exi­gé l’observation, comme l’attestent sur­abon­dam­ment les décrets et consti­tu­tions de tant de Pontifes romains nos pré­dé­ces­seurs, et par­mi ces décrets et consti­tu­tions les lettres de Benoît XIV du 26 juillet 1755, qui com­mencent ain­si : Allatœ, et celles que nous-​même avons envoyées le 6 jan­vier 1848 à tous les Orientaux et qui com­mencent par ces mots : In supre­ma Petri Apostoli Sede. Ainsi donc nous vous enga­geons aus­si de toutes nos forces non seule­ment à rem­plir votre minis­tère, avec toute la reli­gion et toute la sol­li­ci­tude pas­to­rale qui vous animent, non seule­ment à fixer vos regards sur tout ce que nous venons de dire, mais sur­tout à employer conti­nuel­le­ment vos soins, votre intel­li­gence, votre vigi­lance, pour obte­nir qu’orné de toutes les ver­tus, pro­fon­dé­ment ins­truit des sciences et sur­tout des sciences sacrées, votre cler­gé s’occupe avec un zèle sou­te­nu à pro­cu­rer l’éternel salut des fidèles, à faire mar­cher les popu­la­tions chré­tiennes dans la voie qui conduit à la vie ; à étendre, à aug­men­ter de jour en jour et de plus en plus la sainte uni­té de la reli­gion catho­lique, à admi­nis­trer les sacre­ments et à célé­brer les divins offices selon votre dis­ci­pline, mais en fai­sant usage des livres litur­giques qui ont reçu l’approbation du Saint-​Siège. Et comme nous ne dési­rons rien tant que d’avoir le bon­heur de venir en aide à vous et aux fidèles de votre juri­dic­tion, n’oubliez pas de recou­rir à nous, de nous rendre compte des affaires de vos dio­cèses, d’en envoyer chaque quatre ans le rap­port à notre Congrégation de la propagande.

Nous vous sup­plions, en ter­mi­nant, fils bien-​aimés et véné­rables frères, d’employer tous vos efforts pour conser­ver, entre­te­nir et aug­men­ter chaque jour et de plus en plus la paix et la concorde par­mi les ecclé­sias­tiques du rite latin et du rite grec-​catholique de tous ces dio­cèses ; que ceux qui com­battent sous l’étendard du Seigneur, ani­més, sans excep­tion, les uns pour les autres, d’une affec­tion mutuelle, d’une fra­ter­nelle cha­ri­té, et se pré­ve­nant par des témoi­gnages d’honneur, s’attachent tous d’un com­mun accord et avec grande ardeur à pro­cu­rer la gloire de Dieu et le salut des âmes.

Dernière exhortation

Voilà, chers fils et véné­rables frères, ce que, dans notre immense amour pour vous et pour les fidèles de ce vaste empire, nous avons cru devoir vous faire connaître. Nous tenons pour cer­tain qu’inspirés par vos émi­nentes ver­tus, votre reli­gion, votre pié­té, votre foi et votre res­pect si connu pour nous et pour cette chaire de Pierre, vous vous empres­se­rez d’obéir à nos avis, à nos pater­nels dési­rs, vous irez même au-​delà. Bien plus, nous ne dou­tons pas, Fils bien-​aimés et véné­rables Frères, que, les yeux conti­nuel­le­ment fixés sur le Prince des pas­teurs, sur Jésus-​Christ qui s’est mon­tré doux et humble de cœur ; qui a don­né son âme pour ses bre­bis, nous lais­sant son exemple pour nous invi­ter à mar­cher sur ses traces, vous tra­vaille­rez de toutes vos forces à le prendre pour modèle, à suivre ses ensei­gne­ments, à veiller assi­dû­ment sur le trou­peau qui vous est confié, à vous occu­per tou­jours, à rem­plir votre minis­tère, à recher­cher, non ce qui vous plaît, mais ce qui plaît à Jésus-​Christ, à vous mon­trer, non les domi­na­teurs du cler­gé, mais ses pas­teurs, mais ses pères très affec­tueux, à deve­nir les modèles du trou­peau, à ne trou­ver rien de si pénible, rien de si dif­fi­cile, rien de si ardu que vous ne le souf­friez, que vous ne l’entrepreniez, que vous ne l’accomplissiez avec toute la patience, toute la man­sué­tude, toute la dou­ceur et toute la pru­dence pos­sibles pour le salut de vos ouailles.

Pour nous, nous ne ces­sons d’adresser les prières les plus fer­ventes au doux Père des lumières et des misé­ri­cordes, au Dieu de toute conso­la­tion. Nous lui deman­dons de répandre tou­jours abon­dam­ment les effu­sions de sa bon­té pro­pice sur vous, et de les faire des­cendre lar­ge­ment sur les chères bre­bis dont vous avez la garde. Comme gage de ce divin secours, comme témoi­gnage de notre vive affec­tion, de notre dévoue­ment envers vous, nous accor­dons avec amour et de tout notre cœur la béné­dic­tion apos­to­lique à cha­cun de vous, fils bien-​aimés et véné­rables frères, à tous les clercs et à tous les fidèles de vos diocèses.

Donné à Rome, près Saint-​Pierre, le 17 mars de l’année 1856, dixième de notre pontificat.

PIE IX, Pape

  1. Tertullianus, De praes­cript., cap. 41. []
  2. Cf. Conc. Trid., Sess. 6, cap. 8. []
  3. S. Cyprianus, Epist. 43. []
  4. S. Cyprianus, De uni­tate Ecclesiae. []
  5. S. Cyprianus, Epist. 72. []
  6. S. Cyrillus Hierosol. Cath. IV Illuminand., n. 2 ; S. Leo M., Sermo 5 de Nativit. Dom. []
  7. In psalm. Contr. Part. Donat. []
  8. Lactantius, De divi­nis ins­ti­tu­tio­ni­bus, lib. 3, cap. 1. [] []
  9. Clemens Alex., Stromata, lib. 1, cap. 3 ; lib. 2, cap. 2 ; et Gregorius Thaumaturg., Orat. Panegyr., cap. 7, 13. []
  10. S. Hilarius, De Trinitate, lib. 4. []
  11. Cassianus, De Incarnatione, lib. 4, cap. 2. []
  12. S. Bernardus, Epist. 190. []
  13. S. Bernardus, De consi­de­ra­tione, lib. 5, cap. 3. []
  14. S. Petrus Damian., Opuscul., 36, cap. 5. []
  15. Vincentius Lirinensis, Commonitorium. []
  16. S. Ambrosius, De Incarnatione, cap. 4, n. 32. Cassianus, de Incarnatione, lib. 3, cap. 12. []
  17. S. Ambrosius, De fide ad Gratianum Imperat., lib. 5, in pro­log. []
  18. Sess. 24, de Reformatione, cap. 2, 3. []
  19. Conc. Tridentinum, Sess. []