La coïncidence de la fête de S. Pie X avec les inscriptions au catéchisme nous invite à scruter l’enseignement du saint Pontife sur l’instruction religieuse. Jetons donc un regard rapide sur X son encyclique Acerbo nimis du 15 avril 1905 consacrée à l’enseignement du catéchisme.
Le fait de l’ignorance religieuse
S. Pie X commence par une constatation amère : « Pour nous, Vénérables Frères, sans nier les autres causes, Nous Nous rangeons de préférence à l’avis de ceux qui voient dans l’ignorance des choses divines la principale cause de la dépression actuelle, de la débilité des âmes et des maux graves qui s’ensuivent. »
On pourrait croire, à tort, que l’ignorance des choses de la religion est propre aux simples, aux masses laborieuses, aux gens de peu d’instruction. Il n’en est rien : « Quand nous disons le peuple chrétien, Nous n’entendons pas seulement les personnes du peuple, o ces hommes d’une classe inférieure dans la société qui trouvent souvent certaine excuse à leur ignorance en ce que, soumis à des maîtres durs, à peine peuvent-ils songer à eux-mêmes et à leurs intérêts ; mais Nous parlons encore et surtout de ceux qui, ne manquant ni d’intelligence ni de culture, brillent dans l’érudition profane et cependant, en ce qui concerne la religion, ont une conduite pleine de témérité et d’imprudence. »
Illuminer l’intelligence et fortifier la volonté
Le Pontife reprend à son compte les paroles de Benoît XIV : « Nous affirmons qu’une grande partie de ceux qui sont condamnés aux supplices éternels subissent ce châtiment sans fin à cause de leur ignorance des mystères qu’il est nécessaire de savoir et de croire pour être placé au milieu des élus. »
La volonté de l’homme, blessée par le péché originel et plongée dans la malice, a besoin d’une lumière pour ne pas agir à l’aveuglette. Il ne suffit pas de se laisser guider par les lueurs de la raison naturelle, il faut encore se laisser illuminer par la lumière de la foi : « La doctrine chrétienne, en effet, nous manifeste Dieu et ce que nous appelons ses infinies perfections, bien plus profondément que ne le permettent les forces de la nature. Et comment ? C’est qu’elle nous ordonne d’honorer Dieu par le devoir de la foi, qui relève l’esprit ; par le devoir de l’espérance, qui se rapporte à al volonté, et par celui de la charité, qui est la vertu du cœur ; et ainsi elle soumet l’homme tout entier à son suprême Créateur et Maître. »
A ces enseignements sur les trois vertus théologales nécessaires au salut, il faut ajouter ce qui concerne les quatre vertus cardinales : « Cette doctrine de Jésus-Christ nous enseigne aussi la sagesse de l’esprit, qui nous garde de al prudence de la chair ; la justice, qui nous fait rendre à chacun ce qui lui est dû ; la force, qui nous dispose à tout souffrir, et d’un cœur magnanime, pour Dieu et en vue du bonheur éternel ; la tempérance enfin, qui nous porte à aimer la pauvreté même pour le règne de Dieu, et, plus encore, à nous glorifier dans la croix, en méprisant l’ignominie. »
Connaissance nécessaire, mais non suffisante
Suffit-il de connaître la doctrine chrétienne pour sauver son âme ? S. Pie X répond : « De tout ceci, Nous sommes loin, certes, de conclure que la malice de l’âme et la corruption des mœurs ne peuvent coexister avec la science de la religion. Plût à Dieu que les faits ne le prouvassent point surabondamment ! »
Insuffisante à elle seule pour nous mener au ciel, cette connaissance reste nécessaire pour tous : « Nous affirmons que là où l’esprit est enveloppé des ténèbres d’une épaisse ignorance, il est impossible que subsistent une volonté droite ou de bonnes mœurs. Car s’il est possible à celui qui marche les yeux ouverts, de s’écarter du chemin droit et sûr, ce danger menace certainement celui qui est atteint de cécité. »
Une tâche proprement sacerdotale
Après avoir montré la nécessité de l’instruction religieuse pour le salut des âmes et décrit à grands traits son contenu, S. Pie X s’interroge sur celui « qui a le devoir de garder les esprits de cette pernicieuse ignorance et de leur inculquer une science si nécessaire ».
Sa réponse est nette : c’est au prêtre, c’est au pasteur des âmes de nourrir les fidèles de la sainte doctrine. Les preuves qu’en donne le Pontife sont nombreuses.
Les livres de l’Ancien Testament déjà faisaient de l’instruction religieuse un devoir spécifique du prêtre. On le lit chez le prophète Jérémie : « Je vous donnerai des pasteurs selon mon cœur, et ils vous nourriront de la science et de la doctrine » (Jer 3, 15) comme chez le prophète Malachie : « Les lèvres du prêtre garderont la science. C’est de sa bouche qu’ils rechercheront l’enseignement, parce qu’il est l’ange du Dieu des armées » (Mal 2, 7).
S. Paul y insiste dans sa 1ère épître aux Corinthiens : « Le Christ … ne m’a pas envoyé baptiser mais évangéliser. » (1 Cor 1, 17)
L’évêque le rappelle au prêtre le jour même de son ordination : « Que votre doctrine soit un remède spirituel pour le peuple de Dieu ; qu’ils soient eux-mêmes de prévoyants coopérateurs de notre Ordre, afin que, méditant sa loi le jour et la nuit, ils croient ce qu’ils auront lu et enseignent ce qu’ils auront cru. » (Pontifical romain, Cérémonie d’ordination sacerdotale)
Catéchisme, sermon et lectures
Dans sa constitution Etsi minime, Benoît XIV fait état d’une double obligation des prêtres : « Deux obligations principales ont été imposées par le Concile de Trente à ceux qui ont charge d’âmes : l’une est de parler au peuple des choses divines les jours de fête ; l’autre d’instruire les enfants et les ignorants des vérités élémentaires de la loi divine et de la foi. »
Se fondant sur cet enseignement du concile de Trente repris par Benoît XIV, S. Pie X insiste que le fait que la prédication à la Messe dominicale ne saurait remplacer l’apprentissage du catéchisme. Il s’en explique : « L’allocution sur l’Évangile s’adresse à ceux qui déjà doivent être pénétrés des éléments de la foi. (…) L’enseignement du catéchisme, au contraire, est le lait dont l’apôtre saint Pierre voulait que les fidèles fussent avides sans malice comme des enfants nouveaux nés. »
De même, S. Pie X montre que la lecture de bons ouvrages ne remplace pas l’apprentissage des vérités fondamentales : « Nous pensons qu’il faut juger de même des prêtres qui, pour mettre en lumière les vérités de la religion, composent de laborieux ouvrages ; ils méritent, assurément, qu’on leur en témoigne beaucoup d’estime. Mais combien en est-il qui étudient des ouvrages de ce genre et en tirent un profit proportionné à la peine et aux désirs de l’auteur ? Par contre, l’enseignement de la doctrine chrétienne, s’il est bien donné, procure toujours quelque utilité aux auditeurs. »
Encouragés par les exhortations de S. Pie X, que les petits s’inscrivent au catéchisme et les plus grands s’organisent pour assister aux différents cercles qui leur sont proposés.
Abbé François KNITTEL
Source : La Lettre de Notre-Dame du Rosaire, n° 141, septembre 2009