Lors de son récent voyage en Turquie, dans la Mosquée bleue d’Istambul, François s’est déchaussé, s’est fait lire et expliquer le Coran par le Grand Mufti, lui a proposé de prier et, les deux ensemble, tournés vers la Mecque, ont prié ostensiblement pendant un long moment :
« Je suis venu en Turquie comme pèlerin, pas comme touriste (…) Quand je suis allé à la mosquée, je ne pouvais pas dire : « Non, maintenant, je suis un touriste ». Non, tout était religieux. Et j’ai vu cette merveille : le mufti m’expliquait bien les choses, avec beaucoup de douceur, y compris le Coran, où l’on parle de Marie et de saint Jean-Baptiste… Il m’expliquait tout. J’ai alors ressenti le besoin de prier, et j’ai dit : « Peut-on prier un peu ? ». « Oui, oui », a‑t-il dit. Et j’ai prié : pour la Turquie, pour la paix, pour le mufti… pour tous… et pour moi, qui en ai bien besoin. J’ai prié, vraiment. Et j’ai dit : « Seigneur, finissons-en avec la guerre ». Ce fut un moment de prière intense. » [1]
Jean-Marie Guenois du Figaro rapporte, quasi interloqué, dans un article [2] intitulé » Le pape François ose prier dans la Mosquée bleue d’Istanbul » :
« Le pape a croisé très visiblement les doigts, incliné longuement la tête en fermant profondément les yeux, deux à trois minutes, pour prier à l’évidence. Et pour… signifier qu’il priait. Et ce en direction du mihrab, cette niche cernée de deux colonnes, qui indique la qibla, donc la direction de la ka’ba de la Mecque. »
Et M. Guenois de conclure son article par ces mots :
« Cette étape à la mosquée, où aucun discours n’était prévu, devait être l’un des moments forts de son déplacement de trois jours en Turquie. Il le fut mais restera comme un geste fort du pape François. Car il aura osé là ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a jamais fait : prier ouvertement dans une mosquée à côté d’un dignitaire musulman. »
Dans son commentaire des faits, DICI, écrit dans son numéro 306 du 5 décembre 2014 [3] :
« La sincérité est une chose, la vérité en est une autre. Le pape priait pour la Turquie, la paix, le mufti, pour lui-même… mais qui priait-il dans cette mosquée en direction du mihrab, qui indique la qibla, la direction de la ka’ba de la Mecque ? Jésus dont les musulmans nient la divinité ? La Trinité que les musulmans rejettent absolument ? Bien sûr, dans « l’esprit d’Assise », on prétendra que le pape et le mufti ne priaient pas ensemble, qu’ils étaient ensemble dans la Mosquée bleue pour prier… Mais qu’en pense Asia Bibi condamnée à mort au Pakistan pour sa foi ? Et que dire aux trois enfants de Shazad et Shama, ce couple de catholiques pakistanais brûlés vifs dans un four à briques en haine du christianisme ? »
Le risque étant grand de voir éclater un nouveau scandale contre la Foi, le Père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican, a voulu rapidement allumer un contrefeu en déclarant « qu’il s’agissait, en fait, d’une adoration silencieuse ».
Tentative vaine et inutile, car aussitôt dans une envolée lyrique et admirative, Sébastien Maillard, journaliste à La Croix [4], nous apprend que :
« dans un geste spontané au siège du Patriarcat orthodoxe à Istanbul, samedi 29 novembre, le pape François s’est incliné pour que le patriarche Bartholomeos le bénisse ainsi que l’Église de Rome.[…] Aussitôt après, le pape François a donné une amicale tape dans le dos au patriarche. Il s’est aussi penché pour baiser sa main, comme il l’avait fait lors de leur rencontre au Saint-Sépulcre à Jérusalem en mai dernier.
« Bénissez-moi et bénissez l’Eglise de Rome » a déclamé François au Patriarche
qui a hésité un moment devant le pape qui baissait la tête, il l’a alors embrassé.
Mais nous devons boire ce funeste breuvage de la cuvée Nostra Aetate jusqu’à la lie et écouter ces paroles prononcées par le pape le 30 novembre en réponse aux journalistes dans l’avion du retour de Turquie :
« Je crois qu’avec l’orthodoxie nous sommes en chemin. Ils ont les sacrements, ils ont la succession apostolique… nous sommes en chemin. Que devons-nous attendre ? Que les théologiens se mettent d’accord ? Ce jour n’arrivera jamais, je vous l’assure, je suis sceptique. Ils travaillent bien, les théologiens, mais je me rappelle de ce qu’on disait à propos de ce qu’avait dit Athénagoras à Paul VI : « Nous, avançons seuls ; et mettons tous les théologiens sur une île, qu’ils réfléchissent ! » (…) On ne peut pas attendre : l’unité est un chemin, un chemin que l’on doit faire, que l’on doit faire ensemble. Et c’est cela l’œcuménisme spirituel : prier ensemble, travailler ensemble, il y a beaucoup d’œuvres de charité, beaucoup de travail… Enseigner ensemble… Aller de l’avant ensemble. C’est l’œcuménisme spirituel (…) Je dirai une chose que peut-être l’un ou l’autre ne pourra pas comprendre, mais… Les Églises catholiques orientales ont le droit d’exister, c’est vrai. Mais l’uniatisme est un mot d’une autre époque. Aujourd’hui on ne peut pas parler ainsi. On doit trouver une autre route. »
Et voilà comment le successeur de Pierre enterre sans autre forme de procès « l’uniatisme » dépassé pour un aller sur une route que pour notre part nous ne pouvons suivre sans nous perdre.
Restons fidèles à l’enseignement de notre vénéré fondateur Mgr Marcel Lefebvre qui lors de sa cinquième intervention au concile sur l’œcuménisme déclarait aux Pères conciliaires[5] :
« L’unique et indispensable source d’unité est le Souverain pontife, Successeur de Pierre et Vicaire du Christ. Là où est le Vicaire du Christ, là est l’Eglise catholique. Là où est le Vicaire du Christ, là est l’Eglise des Apôtres. Un est Dieu, Un est le Christ, Un est le Vicaire du Christ, Une est l’Eglise. Or, le Vicaire du Christ n’est autre, ici sur terre, que le Pontife romain. Cette vérité, d’elle-même, avec force et douceur, attire les âmes vers l’Eglise, Epouse du Christ et notre Mère. […] C’est pourquoi personne ne sera sauvé qui, sachant que l’Eglise a été divinement instituée par le Christ, refuse pourtant de se soumettre à l’Eglise, ou bien dénie l’obéissance due au Pontife romain, Vicaire du Christ. En effet, notre Sauveur n’a pas seulement prescrit à tous les hommes d’entrer dans l’Eglise ; il a aussi institué l’Eglise comme moyen de salut sans lequel personne ne peut entrer dans le royaume de la gloire céleste. »
La Porte Latine, 6 décembre 2014
- Site du Vatican – VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS EN TURQUIE (28–30 NOVEMBRE 2014) – CONFÉRENCE DE PRESSE DU SAINT-PÈRE AU COURS DU VOL DE RETOUR DE TURQUIE – Dimanche 30 novembre 2014[↩]
- Figaro du 29 novembre 2014 : Le pape François ose prier dans la Mosquée bleue d’Istanbul, par Jean-Marie Guenois[↩]
- Dici n° 306 du 5 décembre 2014 : La visite du pape François en Turquie[↩]
- La Croix du 30 novembre 2014[↩]
- Intervention du 26 novembre 1963 [↩]