Mes bien chers amis,
Mes bien chers frères,
La fête que nous célébrons aujourd’hui, la fête de la Pentecôte, était déjà célébrée chez les juifs. Elle leur rappelait que Dieu avait donné à Moïse, les tables de la Loi sur le Mont Sinaï, cinquante jours après leur sortie d’Égypte. Et c’est pourquoi cette fête est appelée la Pentecôte, puisqu’il s’est écoulé précisément cinquante jours entre la sortie d’Égypte et la remise des tables de la Loi à Moïse.
Oh évidemment, comme toutes les choses dans l’Ancien Testament, elles ne sont que des figures de la grande réalité qui devait se réaliser par Notre Seigneur Jésus-Christ, par le Nouveau Testament.
Et cette Pentecôte du Sinaï n’était que l’image de la Pentecôte future, de celle que nous fêtons aujourd’hui : la descente du Saint-Esprit sur les apôtres.
Il y a là une similitude profonde entre la fête que célébraient les juifs et celle que nous célébrons aujourd’hui. Il y a une affinité profonde. En effet, qu’est-ce donc que cette prise de possession, en quelque sorte, du cœur et de l’esprit des apôtres par l’Esprit de Dieu, par l’Esprit de Notre Seigneur, sinon d’inscrire en lettres d’or, d’inscrire profondément dans leur cœur de chair et dans leur âme, la loi de Dieu ? Cette loi qui fut inscrite sur des pierres, ne l’est plus désormais sur des pierres, mais elle l’est sur des âmes.
Car cette loi n’est pas faite pour demeurer inscrite sur des pierres qui sont froides, et qui ne peuvent pas accomplir cette loi. Désormais ce sont les âmes mêmes des apôtres qui vont recevoir cette loi dans leur cœur. Cette loi de charité n’est pas autre chose que la vertu de Dieu Lui-même. Car la loi en Dieu, c’est le Verbe de Dieu.
Et cette loi c’est la loi de charité. Et c’est pourquoi cette inscription dans leur cœur, cette marque de la loi dans leur cœur, s’est accomplie par l’esprit d’amour, par l’esprit de charité qui s’est montré visiblement sur la tête des apôtres par des langues de feu. Feu de la charité.
Notre Seigneur n’avait-Il pas dit : « Je suis venu allumer le feu sur la terre et je n’ai qu’un désir c’est qu’il s’embrase » ?. Et ce feu, c’est bien le feu de la charité, le feu de l’amour qui embrasait les apôtres, qui a transformé leur âme.
Et comment s’est opéré, dans l’âme des apôtres cette transformation, cette inscription dans leur cœur, inscription vivante, inscription pénétrante de la loi de Dieu, de la charité dans leur cœur ?
Oh laissons, si vous voulez bien de côté, les aspects miraculeux de l’événement, qui ne sont pas à dédaigner bien sûr et que le Bon Dieu a voulus pour qu’ils marquent aussi nos intelligences, nos cœurs, nos mémoires. Mais demandons-nous ce qui a pu transformer ainsi les apôtres. Eh bien ce n’est ni plus ni moins que la grâce sanctifiante, que la participation à la vie divine de Notre Seigneur, par les apôtres, dans leur âme et leur cœur qui les a embrasés de cet amour que le Saint-Esprit est venu leur donner.
Et alors n’est-ce pas aujourd’hui une leçon pour nous ? Nous devrions rendre grâces à Dieu de toute notre âme, de toutes nos forces pour ce don, pour ce bienfait extraordinaire, inestimable que Notre Seigneur nous a fait au jour de notre baptême. Car cette grâce sanctifiante est la même que celle que les apôtres ont reçue. Je dirai même qu’elle est la même aussi que celle que Notre Seigneur Jésus-Christ a reçue dans son âme et qui a fait de l’âme de Notre Seigneur Jésus-Christ, une âme rayonnante de la divinité, à tel point que le Père Lui-même a pu dire : « Écoutez ce Fils en qui j’ai mis toutes mes complaisances ».
Oui, Dieu se plaisait dans l’âme de Notre Seigneur Jésus-Christ, parce que son âme était toute divine, divine par cette grâce de l’union hypostatique, mais aussi divine par la grâce sanctifiante que Notre Seigneur a reçue, grâce à l’union de la nature divine et de la nature humaine en Lui. Alors cette âme devait être un Ciel, un Paradis, quelque chose d’ineffable. Si Dieu le Père Lui-même disait qu’il se complaisait dans l’âme de Notre Seigneur Jésus-Christ, comme cette âme devait être belle et qu’elle devait lui rappeler le Paradis, le Ciel qu’il est Lui-même, que Dieu est Lui-même.
Or c’est dans cette grâce sanctifiante que nous sommes sanctifiés nous-mêmes et c’est pourquoi nous sommes vraiment et réellement les fils adoptifs de Dieu.
Si Jésus est le Fils unique de Dieu, nous, nous sommes devenus des enfants adoptifs. Est-il possible que nous participions vraiment à cette grâce, dans laquelle le Père s’est complu, cette grâce de Notre Seigneur Jésus-Christ ? Eh oui, c’est vrai. Et si nous n’avons pas (reçu) sur nos têtes ces langues de feu qui manifestent la charité qui est en nous par la grâce sanctifiante, ce n’est pas pour cela que cette grâce sanctifiante est moins réelle.
Ah si le Bon Dieu, par un miracle, pouvait découvrir la beauté d’une âme ornée de la grâce sanctifiante, nous serions stupéfaits, nous serions émerveillés de la beauté d’une âme remplie de la grâce sanctifiante, car c’est une âme remplie du Ciel.
La grâce sanctifiante qui nous rend des enfants de Dieu, fait aussi que Dieu habite en nous. Et nous l’avons entendu dans l’Évangile, il y a quelques instants :
« Si vous m’aimez, dit le Seigneur, et si vous accomplissez mes commandements, voilà la loi de Dieu inscrite dans nos cœurs, si vous accomplissez mes commandements, mon Père et moi, nous viendrons habiter en vous » (Jn 14,23). « Nous viendrons habiter en vous ».
Oh certes, le Bon Dieu est présent en toutes choses de multiples manières. Il est même présent dans les démons, par sa puissance, dit saint Thomas, par sa présence et par son essence. Dans toutes les créatures Dieu est présent de ces trois manières : par sa puissance, parce qu’il domine toutes choses ; par sa présence, parce que Dieu est partout ; par son essence, parce que Dieu est la cause même de notre existence.
Alors Dieu est présent partout, même dans les démons, dans tout ce qui existe. Mais autre chose est sa présence, sa présence d’amour, sa présence par la grâce sanctifiante qui est une participation à la nature divine elle-même, à Dieu Lui-même. Nous devenons des dieux, nous pouvons le dire en toute réalité, par cette participation à la nature divine qui est dans nos âmes. Alors combien nous devons estimer la grâce sanctifiante ; combien nous devons tout faire pour la garder, éviter le péché qui nous l’enlève ; éviter le péché qui diminue cette grâce sanctifiante et cette habitation de Dieu en nous.
Et la grâce nous fait encore – c’est l’Écriture qui nous le dit de multiples manières – nous fait amis de Dieu.
Vos amici mei estis, si feceritis quæ ego præcipio vobis (Jn 15,14) : « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande ». Voilà ce que dit le Seigneur.
Nous sommes ses amis et l’Église également et la Sainte Écriture dit que l’âme est comme l’épouse de Notre Seigneur Jésus-Christ. Oui, Jésus nous aime comme son épouse mystique Il nous aime et Il produit en nous des fruits abondants, une fécondité extraordinaire de vertus, de vertus surnaturelles qui surgissent de cette grâce sanctifiante.
Tous les dons du Saint-Esprit qui nous sont donnés viennent compléter ces vertus que le Bon Dieu nous donne.
Enfin les Béatitudes. Notre âme est ainsi ornée, ornée de pierres précieuses, ornée de vertus qui font l’admiration des anges et que nous devrions aimer de toute notre âme, de tout notre cœur. Nous devrions faire en sorte de les développer en nous et de faire en sorte que cette grâce sanctifiante ne soit pas comme un trésor que nous avons enfermé et que nous ne devons pas faire fructifier.
Bien au contraire, cette grâce nous est donnée pour que la présence de Dieu soit toujours plus vraie et plus riche dans nos âmes.
Voilà ce que nous devons méditer aujourd’hui, car la descente du Saint-Esprit sur les apôtres, s’est continuée à travers les siècles jusqu’à nous. Et chaque fois que nous recevons les sacrements, chaque fois que nous recevons une augmentation de grâce, c’est aussi une augmentation de la présence de Jésus en nous.
Nous Le recevons particulièrement par la confirmation, précisément, ce sacrement que nous allons donner cet après-midi à un bon nombre d’enfants. Ces enfants vont recevoir d’une manière plus particulière et plus abondante, les dons du Saint-Esprit, comme aussi par le sacrement de l’ordre ; les sous-diacres et les diacres qui ont été ordonnés hier, ont reçu particulièrement le Saint- Esprit.
Et cette grâce qui est dans nos âmes est tout entière orientée vers le Ciel. C’est déjà une participation au Ciel en nous. C’est pourquoi nos âmes doivent être tout entières tournées vers le Ciel. Autant nous étions convertis vers les choses de la terre avant que nous ayons reçu la grâce, autant notre âme doit se convertir vers Dieu et être convertie vraiment vers Dieu, par la grâce sanctifiante.
Alors toutes les choses de la terre, doivent nous être peu de choses, à côte des choses du Ciel. Voilà ce que sont les vrais chrétiens ; voilà ce que sont ceux qui ont vraiment la grâce sanctifiante en eux. Ils doivent rayonner cette charité ; rayonner cette présence de Dieu en eux. Rayonner par leur sérénité ; rayonner par leur dévouement ; rayonner par leur désir de convertir les âmes, de leur transmettre cette grâce qu’ils ont reçue eux-mêmes.
Et c’est cela le règne de Notre Seigneur, règne de Dieu en nous, règne de Dieu autour de nous. C’est bien ce que l’Écriture nous dit : Le règne de Dieu est semblable à celui qui a trouvé une pierre précieuse et qui vend tout, pour acquérir cette pierre précieuse.
Eh bien, nous aussi vendons tout, abandonnons tout, pour acquérir cette pierre précieuse qui est la grâce sanctifiante.
Demandons-la à Dieu ; demandons aujourd’hui à la très Sainte Vierge Marie qui a été remplie elle aussi du Saint-Esprit et par qui les apôtres ont reçu les grâces que le Bon Dieu leur a données par le Saint-Esprit au jour de la Pentecôte – c’est par la Vierge Marie qu’ils ont reçu ces grâces – eh bien, demandons nous aussi, à la Vierge Marie de nous donner l’Esprit Saint et de nous faire prendre conscience toujours davantage de la grandeur, de la beauté : de la sublimité de la grâce sanctifiante que nous devons garder précieusement en nous et faire en sorte que jamais nous ne la perdions, afin de pouvoir nous unir dans l’éternité avec tous les saints du Paradis.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.