Mes bien chers confrères,
Mes bien chers séminaristes,
Mes bien chers frères,
Oui, en effet, il y a vingt ans, jour pour jour aujourd’hui, je me rendais à Fribourg auprès de Mgr Charrière, évêque de Fribourg, pour lui demander le résultat de son étude et de l’enquête qu’il avait dû faire de nos statuts, de nos constitutions que je lui avais soumises au début du mois de juillet. Il avait donc eu quatre mois pour examiner ces constitutions.
Et j’avoue que je me rendais à l’évêché avec quelque appréhension. Le temps était déjà bien défavorable à toute œuvre de la Tradition. C’est pourquoi je me demandais bien ce qu’allait me répondre S. Exc. Mgr Charrière. Or, à ma stupéfaction et à ma joie évidemment, il me dit immédiatement : « Mais c’est entendu, je vais signer cela immédiatement ».
Il fit appeler son secrétaire – lui demanda les documents – la lettre était prête et Monseigneur, devant moi, signa l’acceptation de nos statuts et de nos constitutions.
J’avoue que c’était pour moi un petit miracle.
Et je m’imaginais quelle allait être la réaction de nos aînés, de nos premiers séminaristes, devant cette acceptation de la fondation de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, d’une manière officielle.
En effet, lorsque j’arrivais à la rue de la Vignetaz et que j’annonçais cela aux chers confrères qui étaient présents – et il y en a encore ici qui sont présents – ce fut une explosion de joie et d’étonnement. La Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X était reconnue officiellement par l’Église locale de Fribourg, par S. Exc. Mgr Charrière.
Et quelque temps plus tard, ces mêmes statuts, envoyés à Rome, avec l’approbation de Mgr Charrière, recevaient aussi l’approbation officielle du cardinal Wright, Préfet de la Congrégation du clergé et soussigné par le secrétaire de la congrégation, en ce temps-là Mgr Palazzini, aujourd’hui le cardinal Palazzini. Par conséquent d’une manière officielle le cardinal Wright et le cardinal maintenant Palazzini, reconnaissaient le bienfait de ces statuts et nous encourageaient à continuer l’œuvre déjà commencée.
Quelle joie pour la Fraternité, d’avoir eu ces reconnaissances officielles. Je pense que si les canonistes se penchaient sur le document qui nous a été donné par le cardinal Wright, ils pourraient conclure effectivement, que nous sommes reconnus de droit pontifical. Car il s’agissait en vérité d’un décret de louange de nos statuts et de nos constitutions, officiellement reconnus par une congrégation romaine.
Et mes chers amis, ne voyez-vous pas entre cette reconnaissance officielle de la Fraternité et le jour de la Toussaint, un lien mystique, profond, extraordinaire, qui correspond parfaitement à ce que la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X a pour but. C’est dans son essence même – je dirai – de rechercher la sainteté. Non seulement de rechercher la sainteté, mais de faire des Choses saintes.
Qu’est-ce donc que le prêtre, mes chers amis, qu’est-ce que le prêtre ? Sacerdos sacra dans : celui qui donne les Choses saintes. Sacrificium sacrum faciens : celui qui fait les Choses saintes. Voilà ce qu’est le prêtre.
Et nous recevions l’approbation de notre Fraternité Sacerdotale en ce jour de la fête de la sainteté. Chers amis, n’oublions pas ces circonstances. Rien n’est fait par hasard par la sainte Providence. Je suis bien sûr que les saints Anges se réjouissaient de là-haut de voir cette coïncidence entre la reconnaissance de cette Fraternité faite pour faire de saints Prêtres qui allaient communiquer la sainteté aux fidèles, en ce beau jour de la fête de la Toussaint.
Alors tirons un petit peu les conclusions, si vous voulez bien, de ce rapprochement. Il est donc voulu par la Providence que nos prêtres soient saints. Qu’est-ce que la sainteté ? Sinon la sainteté substantielle, sinon le Verbe de Dieu Lui-même : Verbum Dei : C’est l’Agneau, l’Agneau qui est désigné par l’Apocalypse, qui est entouré par les vingt quatre vieillards et par une foule innombrable d’anges et d’élus qui chantent : Saint, Saint, Saint est le Seigneur, notre Dieu.
Il s’agit bien du Verbe et du Verbe incarné. Or que font les prêtres, sinon communiquer le Verbe de Dieu, communiquer ce Verbe saint. Le communiquer par la parole. Le communiquer par la prédication. Se faire l’écho de la Parole même de Dieu, de la parole substantielle de Dieu et de toutes les paroles que le Verbe incarné aura prononcées pendant son séjour ici-bas. Voilà le rôle du prêtre : être l’écho du Prophète. Fidèlement, nous devons transmettre ses Paroles à tous les fidèles, à tous ceux qui veulent vraiment être les fils de Dieu. À ceux qui veulent vraiment profiter de la grâce de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Nous communiquons donc ce Verbe qui est la Parole de Dieu, mais nous Le communiquons aussi : le Verbe s’est fait chair : Et Verbum caro factum est : Le Verbe de Dieu s’est fait chair. Il a habité parmi nous. Et l’œuvre par laquelle Il a communiqué ses grâces, par laquelle Il a communiqué sa vie, l’œuvre essentielle, vous le savez bien, c’est le Sacrifice de la Croix. Communiquer le Verbe par la parole de Dieu, communiquer le Verbe dans le Saint Sacrifice de la messe : le Verbe fait chair.
N’est-ce pas là le rôle du prêtre ? Communiquer Jésus dans la Sainte Eucharistie, après avoir réactué. le Sacrifice de la Croix et fait venir Dieu, sous les espèces du pain et du vin, de Le communiquer aux fidèles. Quel magnifique exemple, n’est-ce pas. Quelle tâche extraordinaire ! Oui, le prêtre est vraiment fait pour les Choses saintes. Alors, il doit être saint lui-même.
Et vous me direz peut-être et certaines personnes me diront : mais à quoi bon la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X. Avait-elle vraiment une utilité, en ce temps-là n’y avait-il pas encore dans le monde de saints Évêques et de saints Prêtres.
Hélas, hélas, nous étions obligé de constater la Révolution qui s’était faite et qui était en train de s’accomplir tous les jours davantage. Nous étions en 1970. Il y avait déjà cinq ans que le concile avait fermé ses portes et (que l’on) avait appliqué des réformes désastreuses. Car en définitive, qu’est-il arrivé aux prêtres des paroisses, à ces pauvres prêtres, dont beaucoup d’ailleurs n’avaient plus de prêtre que le nom : ils l’ont prouvé en abandonnant leur sacerdoce et en rejoignant le monde.
Mais beaucoup d’entre eux encore avaient gardé la foi, avaient gardé le désir de célébrer saintement le Sacrifice de la messe. Eh bien, on leur arrachait des mains – en quelque sorte – et le Saint Sacrifice de la messe et leur catéchisme. Donc cette parole de Dieu qui est inscrite dans nos catéchismes traditionnels qui n’est que l’écho de la parole de Notre Seigneur Jésus-Christ. On leur falsifiait le catéchisme. On leur demandait d’enseigner une autre foi, qui n’est plus la foi catholique. Imaginez la douleur de ces prêtres !
Et on les force encore aujourd’hui à enseigner ces choses contraires à leur foi, contraires à la foi catholique, à tous les enfants de leur paroisse. Et on leur a arraché le Saint Sacrifice de la messe, on l’a transformé. On l’a rapproché bien plus de la Cène protestante que du vrai Sacrifice de la messe catholique. C’est évident.
Cette transformation a été pour beaucoup de ces prêtres, une douleur…, leur a causé une douleur profonde. Beaucoup d’ailleurs se sont retirés. Des évêques se sont retirés, ont donné leur démission, pour ne pas être obligés de mettre en pratique cette révolution. Et beaucoup de prêtres ont quitté leur paroisse. Ceux qui le pouvaient ont donné également leur démission.
J’en ai vu pleurer, pleurer de douleur et je suis persuadé – je l’ai dit souvent – qu’au moins les deux archevêques de Madrid et de Dublin, sont morts de douleur devant cette réforme affreuse qui changeait la nature du prêtre.
Le prêtre n’ayant plus à offrir vraiment le Sacrifice, mais simplement à faire une Eucharistie, à faire un partage, à la méthode protestante et n’ayant plus à enseigner le véritable catéchisme tel qu’il l’avait appris lui-même dans son enfance, c’était poignarder le cœur des prêtres et à plus forte raison des évêques qui savaient qu’ils étaient en quelque sorte responsables de ce qui se passait dans leur diocèse. Oui, cette réforme terrible a été une révolution, qui continue, qui n’est pas terminée. Alors, dites-moi, mes chers amis, mes bien chers frères, si l’institution de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X était inutile, était vaine. Elle est précisément cette contre-révolution par l’affirmation de la foi, de la foi catholique de toujours et elle continue la contre révolution par l’offrande du vrai Sacrifice de la messe, qui est la source de la sainteté, la source de la vie. Car avec le Sacrifice de la messe, il faut voir les sept sacrements, qui sont comme le rayonnement de la messe, qui en sont ou la préparation, ou une conséquence, mais qui sont liés essentiellement au Saint Sacrifice de la messe, profondément au Saint Sacrifice de la messe. C’est toute la vie de Jésus, la vie du Verbe de Dieu qui nous est communiquée par la Sainte Messe et par les saints Sacrements et à plus forte raison par Notre Seigneur Jésus-Christ Lui-même dans la Sainte Eucharistie, centre de notre religion.
Oui, la naissance de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X a été certainement voulue par la Providence et j’en suis d’autant plus convaincu que j’ai été un instrument – peut-être parfois indocile – car il m’est arrivé au cours de cette année 1969–70, de me demander s’il ne fallait pas abandonner le projet. Et si je n’avais pas eu à mes côtés mes anges gardiens qui étaient l’abbé Aulagnier et l’abbé Tissier de Mallerais qui m’ont réconforté, qui m’ont dit – comme les saints Anges, je pense, qui assistaient Notre Seigneur au Jardin des oliviers qui ont inspiré Notre Seigneur : Fiat voluntas tua. Et ainsi la Fraternité s’est faite et s’est réalisée.
Et je pense qu’après vingt années d’existence, tous, tous ceux même qui au dehors de la Fraternité ne la suivent pas ou même ne sont pas d’accord avec elle, sont bien obligés de reconnaître qu’elle a été bénie de Dieu.
À preuve ceux qui sont venus nous visiter officiellement de Rome et qui ont consigné par écrit, sur le livre d’or du séminaire, leur admiration de l’œuvre qui se réalisait ici dans ce séminaire. Oui, la Fraternité a été voulue par le Bon Dieu et d’innombrables grâces ont été données.
Et je pense que c’est là la grande consolation, au milieu des immenses épreuves que sont les nôtres, car de nous sentir incompris et même rejeté par les autorités officielles de l’Église, par celles qui actuellement occupent les postes de commandement, c’est une douleur immense. Douleur pour la vitalité de l’Église, douleur parce que nous voyons les âmes se diriger vers l’enfer en foule, à cause de l’apostasie qui règne à Rome. C’est une véritable apostasie. Notre Seigneur n’est plus honoré comme Il devrait l’être, étant donné qu’Il est Dieu, qu’Il doit régner et qu’Il est le seul qui doit régner, le seul qui ait droit à la véritable religion, à La religion.
Nous voyons cette apostasie de l’esprit par la transformation de cette vertu de foi qui n’est plus une vraie foi ; qui est un sentiment de la subconscience qui se développe à l’intérieur de l’homme et qui n’a rien à voir avec la vraie foi. Par la désobéissance de la volonté qui remplace la loi de Dieu par la conscience humaine, donc par l’homme. Dieu est remplacé par l’homme aussi bien dans l’intelligence que dans la volonté. Et cela est un péché grave, un péché permanent qui s’exprime par exemple dans la laïcité des États voulue par le Saint-Siège.
La laïcité c’est l’athéisme public et c’est un péché grave. Et ces États qui professent désormais cet athéisme officiel basé sur la Déclaration des droits de l’homme, sont dans un état de péché mortel continuel. Ils légalisent le péché, puisqu’ils ont rejeté la loi divine. Ils font des lois maintenant qui sont contraires à la loi divine et qui mettent des millions d’âmes en état de péché permanent.
La loi du divorce met en état de péché permanent des gens qui sont responsables de leur divorce. L’avortement met en état de péché mortel, tous ceux qui concourent à l’avortement. Et ainsi de suite. Nous pourrions continuer la liste des lois qui mettent en état de péché habituel des millions d’âmes. Et cela dans le monde entier, dans le monde chrétien.
Par conséquent, nous pouvons dire en vérité, que ces foules se dirigent vers l’enfer. Si elles ne retrouvent pas la grâce au moment de la mort – espérons-le – elles vont en enfer.
C’est bien ce que montrait Notre-Dame de Fatima aux enfants. Ces foules qui descendent en enfer. Et cela voulu, organisé par toute une révolution. Et une révolution qui a commencé particulièrement dans les universités, parmi les esprits soi-disant éclairés, qui ont remplacé la pensée de Dieu et l’Être de Dieu, par leur pensée personnelle. Qui ont remplacé la loi divine par leur conscience.
C’est le péché radical. C’est l’exclusion de Dieu de l’esprit et des volontés et des âmes. Et ce péché a commencé dans les universités et ensuite s’est répandu dans la révolution, dans la constitution des Droits de l’homme et maintenant ces constitutions des droits de l’homme sont à la base de toutes nos sociétés socialistes, maçonniques.
Mes chers amis, vous voyez immédiatement l’importance de votre rôle. Car vous êtes ici comme dans une université et vous devez par conséquent prendre conscience de ce péché grave qu’est le péché de l’humanité aujourd’hui, de tous ceux qui pensent malheureusement (ainsi), pour la plupart.
Alors, à vous de reprendre le chemin de Dieu ; à vous de montrer que les esprits sont faits pour Dieu, pour l’Être ; pour le réel et non pas pour la pensée humaine.
À vous de montrer que la conscience est faite pour la loi et qu’elle n’est pas faite pour elle-même ; à vous de montrer que la loi de Dieu doit remplacer les constitutions des droits de l’homme qui sont une insulte à Dieu et ainsi de suite.
Quel travail ! Quelle œuvre vous avez à accomplir, mes chers amis, vous êtes ce petit reste, mais qui tient le flambeau hardiment. N’ayez pas peur de le montrer. N’ayez pas peur de montrer que vous êtes prêtre, prêtre traditionnel, prêtre comme l’Église a voulu les faire toujours, prêtre pour la Vérité, prêtre pour la sainteté.
Ah quelle belle tâche ; quelle belle croisade vous avez devant vous. Le Bon Dieu vous a fait naître à une époque de l’Histoire de l’humanité qui est enthousiasmante pour des jeunes comme vous. Absolument comme l’étaient les Maccabées lorsqu’ils ont quitté la société corrompue d’Israël, ils étaient quelques-uns. Judas Maccabée s’est trouvé avec huit cents soldats devant une armée de vingt mille et il les a battus.
Eh bien ayez confiance, mes chers amis. Dieu est avec vous. Il ne vous abandonnera pas, pas plus qu’il ne nous a abandonné au cours de ces vingt années. Il ne vous abandonnera pas dans le futur non plus, parce que Dieu se veut Lui-même. Dieu ne veut pas disparaître. Il est Dieu, Il veut demeurer Dieu, non seulement au Ciel, mais ici-bas. Et c’est pourquoi Il veut des soldats dans son armée. Et je voudrais vous lire en conclusion, les quelques paroles que l’évêque adresse aux ordinands à la fin de la monition de l’ordination, qui sont bien adaptées à la conclusion – je dirai – de ces vingt années et en même temps la préparation des années futures que le Bon Dieu voudra bien donner à la Fraternité.
« Appréciez ce que vous faites, imitez ce que vous opérez en tant que par la célébration du mystère de la mort de Notre Seigneur, vous vous efforcez de faire mourir en vous tous les vices et toutes les concupiscences. Que vos paroles soient un remède spirituel pour le peuple de Dieu. Que la bonne odeur de votre vie, fasse les délices de l’Église de Jésus-Christ. Que vos discours et vos exemples soient l’édification de la maison de Dieu afin que le Seigneur ne nous punisse point un jour, nous, pour vous avoir admis à ce ministère, vous, pour y avoir été élevés, mais plutôt nous en récompense, qu’il daigne nous l’accorder par sa grâce. Ainsi soit-il. »
Demandons à la Vierge Marie, Mère du Prêtre éternel et notre Mère, de nous garder dans la sainteté de notre sacerdoce.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.