Le dimanche 6 octobre, la « manif’ pour tous » reprenait du service pour organiser la première d’une série de journées d’action contre la loi en faveur de PMA en passe d’être votée par les chambres parlementaires. Par cette grande manifestation parisienne, elle voulait et devait faire nombre pour espérer être entendue et peser sur le débat. Aussi ratisse-t-elle large. Elle est « pour tous » et accueille avec joie et tolérance tous ceux qui s’opposent à la PMA quelles que soient les raisons de leur opposition et leurs idées politiques. Cela donne parfois lieu à des situation ubuesques, telles ces jeunes filles qui défilaient coiffées du bonnet phrygien. S’opposent-elles à la PMA au nom des principes de la révolution française dont leur bonnet est l’un des symboles ? Une telle variété de manifestants n’est pas si surprenante lorsque l’on constate que les organisateurs eux-mêmes n’ont pas un message clair.
Un message flou
Que signifiait ce slogan peint sur une multitude de drapeaux verts floquées par les organisateurs : « liberté, égalité, paternité » ? Je leur souhaite bien du courage pour appuyer une contestation crédible de la PMA sur les principes de la république française. Le président Chirac n’a‑t-il pas déclaré refuser au nom de celle-ci toute loi qui serait au-dessus des lois de la république ?
Les responsables de la « manif’ pour tous » n’évoquent jamais le respect de la loi naturelle pour justifier leur opposition à la PMA. C’est pourtant là la vraie raison pour ce rejet, celle qui explique toutes les conséquences désastreuses dénoncées par les leaders du mouvement. Ils semblent craindre qu’un discours trop clair effraye et fasse fuir un certain nombre de « compagnons d’armes ». Mais le flou ne risque-t-il pas au contraire de saper leur résolution et de les démobiliser ? N’est-il pas préférable de profiter de leur mobilisation actuelle pour les former en leur faisant entendre les principes fondamentaux en jeu dans ce combat ?
Hélas, l’appel au respect de la loi naturelle était absent des discours ce dimanche 6 octobre ainsi que des différentes interventions dans les médias à l’occasion de la manifestation. Blanche Streb, dans son intervention au nom d’Alliance Vita, a bien rappelé au gouvernement que « si un principe éthique tombe, les dominos tombent les uns après les autres » ; mais sans préciser à quel principe elle faisait allusion.
Nos ennemis n’hésitent pas à profiter de ce manque d’affirmation claire et nette de nos principes. J’ai entendu à la radio un journaliste pousser dans ses retranchements un homme politique qui exprimait timidement son opposition à la PMA. « A qui appartient ma vie, à Dieu ? » a‑t-il lancé ; et l’homme politique de se récrier aussitôt : « Non, notre vie nous appartient. » Avec une telle affirmation, il sciait la branche sur laquelle il était assis bien inconfortablement. Quoi qu’il puisse ajouter par la suite, il avait capitulé et le débat était clos. Plus que jamais, les méchants sont forts de la faiblesse, de la lâcheté des bons.
Mais si les responsables de la « manif’ pour tous » sont si timorés pour défendre les principes de la loi naturelle, c’est tout simplement parce qu’ils n’y croient pas. Ils ne sont opposés, Albéric Dumont, vice-président de la « manif’ pour tous » l’a clairement affirmé sur la chaîne TMC (émission Balance ton post du 28 septembre 2019) qu’à la PMA sans père, mais approuvent la PMA réalisée au sein d’un couple stable qui souffre d’une pathologie causant la fertilité. Ludovine de la Rochère a été jusqu’à déclarer sur la chaîne CNEWS (6 octobre) qu’elle n’avait aucune objection au fait qu’un enfant soit élevé par deux pères ou deux mères !
Ne rien faire alors ?
Alors faut-il rester les bras croisés en attendant que se présente le mouvement parfait pour se mobiliser ? Peut-être pas. Mais sachons au moins où nous mettons les pieds. Soyons conscients des forces et des faiblesses de la « manif’ pour tous » et efforçons-nous d’y faire triompher la défense de la loi naturelle dans tous ses principes.
PS : Mais quel est donc ce principe autour duquel tout le monde tourne sans le nommer ? Le voici sous la plume du pape Pie XII :
« La fécondité humaine, au-delà du plan physique, revêt des aspects moraux essentiels qu’il faut nécessairement considérer même lorsqu’on traite le sujet du point de vue médicale. (…) La fécondation artificielle dans le mariage « dépasse les limites du droit que les époux ont acquis par le contrat matrimonial, à savoir, celui d’exercer pleinement leur capacité sexuelle naturelle dans l’accomplissement naturel de l’acte matrimonial » (Pie XII, Allocution au Congrès de la fertilité et de la stérilité, 19/05/1956)
« Réduire la cohabitation des époux et l’acte conjugal à une pure fonction organique pour la transmission des germes serait comme convertir le foyer domestique, sanctuaire de la famille, en un simple laboratoire biologique. Aussi, dans notre allocution du 29 septembre 1949, au Congrès international des médecins catholiques, Nous avons formellement exclu du mariage la fécondation artificielle. L’acte conjugal, dans sa structure naturelle, est une action personnelle, une coopération simultanée et immédiate des époux, laquelle, du fait même de la nature des agents et du caractère de l’acte, est l’expression du don réciproque, qui, selon la parole de l’Ecriture, réalise l’union « en une seule chair » (Pie XII, Allocution aux sages-femmes, 29 octobre 1951).
N’y voyons pas un précepte de l’Eglise basée sur la révélation surnaturelle, mais l’expression de la loi naturelle qui, comme son nom l’indique, reste au plan purement naturel.
Abbé François Castel
Sources : La Porte Latine du 17 octobre 2019