Sermon de Mgr Tissier de Mallerais le 26 février 2017 pour les 40 ans du retour de St-​Nicolas à la Tradition

Mgr Bernard Tissier de Mallerais, évêque auxi­liaire de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit Ainsi soit-il

Nous avons été priés de célé­brer la Messe du Cœur imma­cu­lé de Marie qui est le règne du Cœur de Marie Reine du cler­gé, hono­ré spé­cia­le­ment en cette église. Je vous par­le­rai donc du Cœur imma­cu­lé de Marie.

Je met­trai une ini­mi­tié entre toi et la femme, entre ta des­cen­dance et son lignage, elle t’é­cra­se­ra la tête et tu la mor­dras au talon, telle fut la malé­dic­tion pro­non­cée par Dieu contre le démon sous sa forme de ser­pent, après le péché originel.

Dieu a posé une ini­mi­tié, une adver­si­té entre la femme, c’est-​à-​dire la Très Sainte Vierge Marie, et le démon, entre le lignage de Marie, c’est-​à-​dire les vrais chré­tiens, et les sup­pôts de satan. Une ini­mi­tié théo­lo­gique qui n’est pas par hasard entre ces deux lignages, entre le sein très pur de Marie et son Cœur imma­cu­lé d’un côté, et le cloaque immonde du moder­nisme et du concile Vatican II. Songeons sim­ple­ment que nous sommes en 2017. En 1517 c’é­tait la révolte de Luther. En 1717, c’é­tait la fon­da­tion de la grande loge de Londres, donc le début de la franc-​maçonnerie, et en 1917, il y a un siècle, la fon­da­tion du com­mu­nisme et la per­sé­cu­tion contre l’Église dans beau­coup de pays, en Russie et au Mexique.

C’est donc sous la ban­nière du Cœur imma­cu­lé que nous allons conti­nuer le com­bat. Mais je vou­drais d’a­bord évo­quer com­ment a conti­nué ce com­bat vic­to­rieux du Cœur imma­cu­lé de Marie, il y a qua­rante ans, le dimanche 27 février 1977, pre­mier dimanche de carême. Où l’on chan­tait dans l’Introït, « il m’in­vo­que­rait et je l’exau­ce­rai, je le déli­vre­rai et je le glo­ri­fie­rai ». Il s’a­gis­sait donc d’une déli­vrance, d’une libé­ra­tion d’une église qui était jusque-​là aux mains du moder­nisme, et que nos pères, il y a plus d’une géné­ra­tion, ont pris par la force, une sainte force, pour la libérer.

En ce dimanche, Mgr Ducaud-​Bourget avait convo­qué tous ses fidèles de ses cha­pelles pari­siennes à la salle de la Mutualité. L’abbé Coache avait aus­si convo­qué tous les membres du Combat de la foi à la même salle de la Mutualité, pour une Messe. Mais dis­crè­te­ment, au fur et à mesure que les gens arri­vaient, on leur disait : allez dans l’é­glise, allez vous asseoir dans l’é­glise. Et le cler­gé, donc mor­der­niste, de Saint-​Nicolas, voyait peu à peu à la fin de la pre­mière messe la nef se peu­pler d’une foule invrai­sem­blable et com­men­çait à don­ner des signes d’é­ton­ne­ment et même d’in­quié­tude quand brus­que­ment entra la pro­ces­sion, Mgr Ducaud-​Bourget enca­dré par l’ab­bé Coache et par un autre prêtre fidèle, et avec tous les aco­lytes, le cler­gé, la scho­la, s’a­van­çant jus­qu’à la croi­sée du tran­sept où il y avait une estrade en bois et un autel mobile que l’on pas­sa pour venir au maître-​autel, célé­brer la Messe sur le maître-autel.

Cet évé­ne­ment, chers fidèles, fut cou­ron­né de grâces puisque l’ab­bé Coache décla­ra : « nous y sommes, nous y res­tons ». On y res­ta grâce à la garde de saint Nicolas qui depuis lors n’a jamais ces­sé de veiller sur l’é­glise afin qu’elle ne soit pas reprise par les moder­nistes. Et depuis ce temps-​là c’est une source de grâces immense et incroyable qui a décou­lé sur tous les fidèles qui sont venus à Saint-​Nicolas-​du-​Chardonnet. Mes parents en pre­mier. Mon père et ma mère étaient par­mi les pre­miers parois­siens de cette paroisse. Le cler­gé fidèle, nous avons connu de nom­breux prêtres avec Mgr Ducaud-​Bourget, de nom­breux prêtres fidèles au rite fidèle de la vraie messe catho­lique. Nous avons vu le caté­chisme véri­table, c’est-​à-​dire avec des ques­tions véri­tables et les bonnes réponses comme il se doit. Nous avons vu les mou­ve­ments de jeu­nesse se mul­ti­plier, en par­ti­cu­lier les scouts, les guides et les lou­ve­teaux, et nous avons vu se déve­lop­per des confé­rences, des pré­di­ca­tions doc­tri­nales, solides mais avec le bon esprit fran­çais mêlant à l’o­deur de l’en­cens une odeur de poudre, quel­que­fois. C’était Saint-​Nicolas il y a qua­rante ans. Et ça n’a jamais ces­sé de l’être.

Et c’est donc sous la ban­nière du Cœur Immaculé que nous conti­nuons ce com­bat, sous la ban­nière de Marie Reine du cler­gé, sous la ban­nière de ce Cœur vic­to­rieux puis­qu’elle a annon­cé à Fatima, il y a cent ans, que son Cœur imma­cu­lé triompherait.

Ce com­bat, je vou­drais le décrire dans le Cœur imma­cu­lé de Marie, elle-​même qui a dû lut­ter, qui a dû com­battre. Bien qu’elle fût sans péché, rien n’é­tait évident, en par­ti­cu­lier la foi. La Sainte Vierge a eu la foi, elle a exer­cé la ver­tu de foi. Elle a eu peut-​être à com­battre des erreurs contre la foi autour d’elle. Mgr Lefebvre disait que la Sainte Vierge n’a jamais hési­té, que la Sainte Vierge n’a jamais eu le moindre sur­saut de l’in­tel­li­gence contre les véri­tés de la foi et les mys­tères de Dieu. Et d’autre part, elle n’a­vais jamais eu le moindre sur­saut de la volon­té contre la sainte Loi de Dieu. Nous pou­vons donc en toute sécu­ri­té suivre l’exemple de ce Cœur immaculé.

Dès le pre­mier ins­tant de sa concep­tion, dit saint Pie X, cin­quante après la défi­ni­tion de l’Immaculée Conception de Marie, alors qu’elle était pré­ser­vée de toute souillure du péché ori­gi­nel, elle a com­bat­tu et elle montre aux chré­tiens cette néces­si­té de la foi véri­table contre les bles­sures infli­gées à la nature humaine par le péche. Et donc, pour ceux qui croient en l’im­ma­cu­lée Conception, dit saint Pie X, croient néces­sai­re­ment dans le péché ori­gi­nel, dans la déchéance uni­ver­selle de l’homme, dans la res­tau­ra­tion de la nature humaine par Notre-​Seigneur Jésus-​Christ et à sa croix, ils croient éga­le­ment dans la souf­france rédemp­trice, mys­tère de la souf­france répa­ra­trice et ils croient aus­si que tout ce qui s’ap­pelle libé­ra­lisme et moder­nisme est ter­ras­sé par ce Cœur imma­cu­lé. Voilà les paroles de saint Pie X. Le Cœur imma­cu­lé tout dépen­dant de Dieu dans sa pro­tec­tion contre satan, contre le péché, tout dépen­dant de Dieu dans sa pro­gres­sion, dans la sain­te­té de la sainte Vierge. Le Cœur imma­cu­lé est une pro­fes­sion par elle-​même du sur­na­tu­rel, de l’exis­tence de la grâce et des ver­tus sur­na­tu­relles. Et d’un com­bat sur­na­tu­rel, qui n’est pas seule­ment au niveau natu­rel et poli­tique, mais qui est tout d’a­bord, à la racine, un com­bat surnaturel.

Mgr Lefebvre disait que la Sainte Vierge est la mère du grand prêtre qui fut la vic­time du Calvaire, et par consé­quent qu’elle est aus­si la mère des prêtres qui renou­vellent de façon sacra­men­telle, chaque jour, le sacri­fice de la Croix. Et il ajou­tait que le sacri­fice de la Messe était par lui-​même une pro­fes­sion de la royau­té de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ par le bois de sa croix. En effet, Notre-​Seigneur a rem­por­té la vic­toire sur nos enne­mis par le sang ver­sé sur sa croix. Regnavit a ligno Deus. Nous le chan­tons dans le Vexilla Regis le jour des Rameaux. Notre-​Seigneur, Dieu a régné par le bois de la croix et par consé­quent la Messe qui renou­velle sacra­men­tel­le­ment la croix, est une pro­fes­sion du règne de Dieu, le règne de Jésus-Christ.

Et donc, nous en sommes aujourd’­hui, chers fidèles, dans la néces­si­té de faire des pro­fes­sions de foi face aux erreurs pro­fes­sées en haut lieu dans l’Église. Et je vous pro­po­se­rai bien, si vous le vou­lez bien, une pro­fes­sion de foi tirée des paroles mêmes des papes ou des conciles, avec leur conci­sion et leur carac­tère frap­pant qui détruisent ipso fac­to toutes les héré­sies actuelles.

Tout d’a­bord avec le car­di­nal Pie, évêque de Poitiers au XIXème siècle : « Je pro­fesse, et Nous pro­fes­sons que Notre-​Seigneur Jésus-​Christ est roi par droit de nais­sance et par droit de conquête en tant qu’Il est le seul homme qui soit Dieu par la très sainte incar­na­tion, et d’autre part qu’Il a gagné nos âmes par le prix de son sang. Et que par consé­quent, Il est roi et sou­ve­rain de toutes créa­tures et de toutes les choses humaines, dont aucune ne se sous­trait à son domaine, en par­ti­cu­lier l’Etat ».

Avec le pape Pie XI : « ».

Avec le pape saint Pie X : « Je sou­tiens, et je sou­tien­drai jus­qu’à mon der­nier souffle, s’il plaît à Dieu, la foi des pères dans le cha­risme, la grâce cer­taine de la véri­té qui est, qui a été et qui sera tou­jours dans la suc­ces­sion de l’é­pis­co­pat depuis les apôtres, afin que soit tenu non point ce qui semble meilleur ou plus adap­té à la men­ta­li­té de chaque époque, mais afin que ne soit jamais crue autre­ment, que ne soit jamais enten­due autre­ment la véri­té abso­lue et immuable prê­chée dès l’o­ri­gine par les apôtres. Voilà la véri­table notion de la Tradition. Une véri­té abso­lue et immuable prê­chée dès l’o­ri­gine par les apôtres et qui s’est trans­mise par la suc­ces­sion de l’é­pis­co­pat jus­qu’à nous, la suc­ces­sion des évêques catho­liques ».

Avec le pape Pie IX qui régna au XIXème siècle : « Je pro­fesse que la doc­trine de la foi - c’est bien actuel ! - la doc­trine de la foi que Dieu a révé­lée n’a pas été pro­po­sée comme une décou­verte phi­lo­so­phique que le génie humain pût amé­lio­rer ou faire pro­gres­ser, mais que cette doc­trine de la foi est un dépôt divin qui a été confié à l’Epouse de Jésus-​Christ pour qu’elle la garde fidè­le­ment et l’ex­pose infailli­ble­ment ». Voilà les paroles du pape Pie IX.

Avec le pape Pie IX éga­le­ment au sujet de la vraie reli­gion, unique : « Il n’y a qu’une seule reli­gion vraie et divine – il n’y en a pas d’autres – fon­dée et ins­ti­tuée par le Christ Seigneur lui-​même. Mère et nour­rice des ver­tus, exter­mi­na­trice des vices, libé­ra­trice des âmes, indi­ca­trice du vrai bon­heur, elle s’ap­pelle catho­lique, apos­to­lique et romaine ».

Au sujet de l’œ­cu­mé­nisme, chers fidèles, je pro­fesse avec tous les papes en par­ti­cu­lier le pape Pie XI que l’u­nion des chré­tiens ne peut être pro­cu­rée autre­ment qu’en favo­ri­sant le retour des dis­si­dents à la seule et véri­table Église du Christ qu’ils eurent pas le pas­sé le mal­heur d’a­ban­don­ner. Le retour des dis­si­dents à la seule et véri­table Église du Christ, l’Église catho­lique. Il n’y a pas d’autres moyens.

Et enfin, au sujet de la liber­té reli­gieuse, je pro­fesse avec le pape Pie XII : « Parmi les droits humains, intan­gibles, se trouve la pleine liber­té d’exer­cer le vrai culte divin ». Point. C’est clair et net. Pie XII. Le droit à la pleine liber­té d’exer­cer le vrai culte divin. Quel est le vrai culte divin, chers fidèles ? Vous deman­dez aux enfants du caté­chisme, ils répon­dront, c’est facile, c’est le culte catho­lique. Et par consé­quent, les parents catho­liques, les parents catho­liques ont un droit strict à des écoles qui cor­res­pondent à leurs convic­tions, c’est-​à-​dire à la foi catho­lique. Voilà quelle est ma petite pro­fes­sion de foi en ce temps où nous avons besoin de pro­fes­ser notre foi catho­lique face aux adver­saires, aux fils du concile qui tiennent d’autres for­mules qui sont dif­fé­rentes, qui ne cor­res­pondent pas à la foi catholique.

Ce Cœur imma­cu­lé que nous fêtons est un Cœur, et par consé­quent est un Cœur aimant qui nous aime, qui se penche sur nous, avec com­pas­sion mais pour nous rele­ver, pas avec la fausse misé­ri­corde que l’on pro­fesse aujourd’­hui dans l’Église. Le Cœur imma­cu­lé se penche sur nous, pécheurs, pour nous rele­ver, pour nous faire sor­tir du péché, pour nous méri­ter la grâce, pour nous éta­blir dans l’é­tat de grâce. Voilà le Cœur imma­cu­lé de Marie qui veut que ses enfants lui res­semblent en toute pure­té de l’âme. C’est sous ce Cœur imma­cu­lé que le Cœur de Jésus a bat­tu quand il était dans le sein de sa mère. C’est auprès de ce Cœur imma­cu­lé que Jésus a eu le Cœur per­cé et que ce Cœur imma­cu­lé fut per­cé, mora­le­ment, par la lance du sol­dat au pied de la croix. Eh bien, c’est donc auprès de ce Cœur imma­cu­lé et à l’u­nis­son de ce Cœur que nous devons battre nous aus­si. Et pour cela, nous devons nous consa­crer au Cœur imma­cu­lé de Marie.

Et j’en vien­drai à cela, la consé­cra­tion à Marie, plus exac­te­ment à son Cœur imma­cu­lé puisque c’est la der­nière révé­la­tion, appa­ri­tion, publique qui nous parle de la Sainte Vierge sous l’as­pect de son Cœur imma­cu­lé. Notre consé­cra­tion à Marie doit être par consé­quent une consé­cra­tion à son Cœur imma­cu­lé.

En quoi consiste la consé­cra­tion au Cœur imma­cu­lé de Marie ? Elle peut consis­ter dans la consé­cra­tion mont­for­taine ou toute autre for­mule pour­vu que ce soit une appar­te­nance entière à ce Cœur imma­cu­lé, une dépen­dance entière de ce Cœur imma­cu­lé. Nous deve­nons comme la pro­prié­té de la Sainte Vierge, par cette consé­cra­tion afin que nous puis­sions faire tout par Marie, avec Marie et pour Marie. Avec tout pour son Cœur imma­cu­lé pour la conso­ler, tout par son Cœur imma­cu­lé, comme ses ins­tru­ments, tout pour son Cœur imma­cu­lé pour son triomphe que nous devons dési­rer. Et la Sainte Vierge en retour, car cette consé­cra­tion est un contrat, nous don­nons et la Sainte Vierge se donne. Voilà, nous allons nous don­ner à la Sainte Vierge et la Sainte Vierge va se don­ner à nous. Il y a donc un échange, c’est un contrat entre deux par­ties. Et la Sainte Vierge en échange par consé­quent va nous accep­ter comme son ins­tru­ment, son ins­tru­ment de choix par lequel elle va faire ses actions mer­veilleuses et son apos­to­lat à elle car cette consé­cra­tion au Cœur imma­cu­lé doit être une consé­cra­tion apos­to­lique afin que nous deve­nions des apôtres de ce Cœur imma­cu­lé. Ainsi, nous deve­nons des ins­tru­ments du Cœur imma­cu­lé pour son apos­to­lat à elle et pour faire ses volon­tés à elle. Ses volon­tés qu’elle est peut-​être seule à connaître et que nous devons suivre. 

C’est une grande misé­ri­corde, bien chers fidèles, que ce Cœur imma­cu­lé daigne se ser­vir de nous, en par­ti­cu­lier pour œuvrer au redres­se­ment de l’Église. Je vous dirai que chaque jour, je pro­fesse ma foi entière dans le redres­se­ment de la Sainte Église. Il est impos­sible que cette apos­ta­sie dure indé­fi­ni­ment. Il est cer­tain que l’Église va se redres­ser, c’est à nous à y coopé­rer par les voies de la Sainte Vierge, par les voies du Cœur imma­cu­lé, par ses moyens à elle et nous nous pla­çons sous son entière dépen­dance et dans une entière confiance en ce Cœur immaculé. 

Ainsi soit-​il.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

Mgr Bernard Tissier de Mallerais

Sources : Saint-​Nicolas-​du-​Chardonnet /​Traduction de Y.B. pour LPL /​La Porte Latine du 2 mars 2017

Pour conser­ver à ce ser­mon son carac­tère propre, le style oral a été maintenu.

FSSPX Évêque auxliaire

Mgr Bernard Tissier de Mallerais, né en 1945, titu­laire d’une maî­trise de bio­lo­gie, a rejoint Mgr Marcel Lefebvre dès octobre 1969 à Fribourg et a par­ti­ci­pé à la fon­da­tion de la Fraternité Saint-​Pie X. Il a assu­mé d’im­por­tantes res­pon­sa­bi­li­tés, notam­ment comme direc­teur du sémi­naire d’Ecône. Sacré le 30 juin 1988, il est évêque auxi­liaire et fut char­gé de pré­pa­rer l’ou­vrage Marcel Lefebvre, une vie, bio­gra­phie de réfé­rence du fon­da­teur de la Fraternité.