Edito. n° 3 de sept. 2010 : L’injuste position du « Christ-Roi »

L’injuste position du « Christ-Roi »

Le jour­nal Ouest-​France a annon­cé la nou­velle au grand public le 17 juillet der­nier : un prêtre de l’Institut du Christ-​Roi Souverain Prêtre assu­re­ra désor­mais la messe « motu pro­prio » le dimanche, dans la basi­lique Notre- Dame d’Espérance à Saint-​Brieuc. Après une courte pré­sen­ta­tion de la messe saint Pie V, l’article répond à trois ques­tions : Pourquoi (une messe saint Pie V) ? Qu’est-ce qui change aujourd’hui ? Pourquoi le Christ-​Roi ? L’article conclut en ras­su­rant ceux que cette nou­velle pour­rait inquié­ter : tout se fera sous le contrôle de l’évêché et en confor­mi­té avec l’esprit du concile Vatican II.

Les deux para­graphes qui répondent aux ques­tions « Pourquoi » sont pleins d’enseignements pour ceux qui se pose­raient encore des ques­tions sur le Christ-Roi.

Pour le dio­cèse, il s’agit de satis­faire les fidèles atta­chés à la litur­gie tra­di­tion­nelle « sans aller cher­cher du côté de l’intégrisme » (lisez : « du côté de la Fraternité Saint-​Pie X », puisqu’il n’y en a pas d’autres sur Saint-​Brieuc). C’est clai­re­ment dit et par­fai­te­ment conforme aux direc­tives de la Conférence des Evêques de France : l’Institut du Christ-​Roi est ins­tru­men­ta­li­sé pour détour­ner les fidèles de la Fraternité Saint-​Pie X. Et c’est bien se qui se passe en France, au Gabon et dans d’autres pays : le Christ-​Roi n’intervient que là où la F.S.S.P.X est déjà implan­tée. Il y aurait tel­le­ment de lieux en Bretagne où faire connaître les beau­tés de la litur­gie tri­den­tine ! Il y a tel­le­ment à faire pour répandre par­tout la Messe de tou­jours… Mais non, cette implan­ta­tion répond sim­ple­ment aux besoins de la guerre que nos évêques mènent contre la Tradition. L’Institut du Christ-​Roi se prête à ce sinistre jeu : c’est leur pre­mière injus­tice. Peut-​être sont-​ils uti­li­sés contre leur gré ? Hélas, non. Il suf­fit de lire leurs décla­ra­tions publiques : « la prin­ci­pale ques­tion à leur endroit [NDLR : à l’endroit de la FSSPX] est de savoir si l’on sou­haite oeu­vrer au maxi­mum pour la récon­ci­lia­tion des fidèles [NDLR : leur réunion à l’église conciliaire] ».

Cet Institut, dans la ligne du motu pro­prio Ecclesia Dei Adflicta, s’est bien consti­tué dans le but, entre autres, de récu­pé­rer les fidèles qui suivent la Fraternité Saint-​Pie X et de leur faire rejoindre l’église conciliaire !

La réponse à l’autre « Pourquoi » – Pourquoi le Christ- Roi ? – confirme ce qui vient d’être dit : c’est parce que l’Institut « reste ouvert à l’esprit conci­liaire », parce que ses prêtres « acceptent de célé­brer la messe avec le mis­sel du concile Vatican II et du Pape Paul VI », parce qu’ils acceptent « de concé­lé­brer avec l’évêque à l’occasion des grands évé­ne­ments de la vie du dio­cèse ». Et pour faire bonne mesure, l’article conclut en notant que le jeune prêtre du Christ-​Roi pour­sui­vra sa for­ma­tion à l’Institut Catholique de Paris, « lieu emblé­ma­tique de l’esprit du concile Vatican II ». Et voi­là ! Tout est dit. C’est la deuxième injustice.

Pour se faire accep­ter, dans les dio­cèses, il leur a fal­lu accep­ter les erreurs de Vatican II et la nou­velle messe. « Pas tout le temps ! … Rarement ! … Exceptionnellement même ! » me direz-​vous. Hélas ! Même excep­tion­nel­le­ment, ce serait le grain d’encens bru­lé aux idoles modernes. Les pre­miers chré­tiens auraient été accep­tés à Rome aus­si, s’ils avaient sacri­fié de temps en temps aux idoles …

Cette accep­ta­tion des erreurs de Vatican II est ouver­te­ment affi­ché par leur fon­da­teur, Mgr Wach : « …jeune prêtre … je consta­tais déjà les fruits posi­tifs du pon­ti­fi­cat de Jean-​Paul II ».

Il affir­mait encore (en sep­tembre 2002) : « Le pon­ti­fi­cat de Jean-​Paul II est mar­qué par un grand rayon­ne­ment … et par des actes solen­nels du Magistère qui consti­tuent un rem­part pour l’avenir ».

Voilà qui n’est certes pas un silence timo­ré sur les erreurs modernes mais bien leur accep­ta­tion enthou­siaste. Le seul silence timo­ré de l’Institut est celui concer­nant cette accep­ta­tion des erreurs modernes pour ne pas effrayer les fidèles tra­di­tion­na­listes qu’ils essayent de récu­pé­rer. Enfin, on entend dire par­fois, et c’est vrai, que tous les prêtres du Christ-​Roi n’acceptent pas les erreurs de Vatican II, ni la nou­velle messe. Que font-​ils alors ? Ils se taisent, évi­tant les sujets qui fâchent lorsque ceux-​ci sont abor­dés, lisant leur bré­viaire durant les concé­lé­bra­tions aux­quelles ils doivent se rendre…

Leur poli­tique, conforme aux ensei­gne­ments de leur fon­da­teur, est de se taire pour ne pas avoir d’ennuis, se taire pour conti­nuer d’exister. C’est, peut-​être (?), sub­jec­ti­ve­ment com­pré­hen­sible, mais cela reste objec­ti­ve­ment un aban­don de leur devoir de pas­teur, et même de simple catho­lique.

Se taire quand la Foi est mise en cause, dans les cir­cons­tances actuelles, c’est tra­hir cette Foi. Se taire habi­tuel­le­ment, de manière déli­bé­rée, c’est refu­ser à Dieu l’honneur qui Lui est dû : voi­là leur troi­sième injustice !

Alors, le Christ-​Roi, est-​il un Institut pour infu­ser la Tradition dans l’église conci­liaire ? Non certes, mais bien plu­tôt pour détour­ner les fidèles de la Tradition doc­tri­nale par le biais de la Tradition liturgique !

Alors, non : nous ne pour­rons pas dire aux fidèles qu’ils peuvent sans injus­tice grave vis-​à-​vis de la Foi et de l’honneur dû à Dieu, sou­te­nir de quelque manière cet injuste Institut.

Abbé Jean-​Baptiste Frament

Extrait duSainte Anne n° 221 d’août-​septembre 2010