Analyse de l’abbé Gaudron, prêtre de la FSSPX, à propos du positionnement de Mgr Gerhard Ludwig Müller

Mgr Gerhard Ludwig Müller, ancien évêque de Ratisbonne, en Allemagne, vient d’être nom­mé pré­fet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi par le pape Benoît XVI. M. l’ab­bé Matthias Gaudron, un prêtre de la FSSPX spé­cia­liste de la théo­lo­gie dog­ma­tique et auteur du livre, Catéchisme de la crise dans l’Eglise, a récem­ment publié quelques remarques sur le site de la FSSPX du dis­trict d’Allemagne concer­nant cer­taines décla­ra­tions faites par Mgr Müller dans le pas­sé. L’abbé Gaudron conclue son com­men­taire par une demande à Son Excellence…

L’Église a tou­jours consi­dé­ré que l’une de ses tâches les plus impor­tantes était de gar­der fidè­le­ment le dépôt de la Foi, que lui a confiée le Christ et les Apôtres, et de le défendre contre les erreurs afin de le trans­mettre exac­te­ment aux géné­ra­tions à venir. Par consé­quent, à juste titre, la fonc­tion du Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est l’une des plus hautes dans l’Église.

C’est donc avec stu­pé­fac­tion que la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X en Allemagne a appris la nomi­na­tion à ce poste de l’é­vêque de Ratisbonne, Mgr Gerhard Ludwig Müller. La FSSPX se demande quelle apti­tude pour cette fonc­tion a pu être trou­vée dans un homme qui s’est mani­fes­té en de nom­breuses reprises contre la doc­trine catho­lique, à la fois dans ses écrits et ses dis­cours publics.

On doit mentionner les points suivants :

Mgr Müller nie dans son livre Die Messe : Quelle christ­li­chen Lebens [La messe : Source de la vie chré­tienne] la véri­table trans­for­ma­tion du pain et du vin au Corps et au Sang du Christ. Le pain et le vin demeurent, selon lui, ce qu’ils sont, mais ils deviennent des outils pour inté­grer les fidèles dans la com­mu­nau­té vivante avec le Père et le Fils. Cela res­semble à l’en­sei­gne­ment cal­vi­niste, selon laquelle le pain et le vin ne sont pas trans­for­més, mais deviennent des outils de la grâce.1

Contrairement à la doc­trine catho­lique, selon laquelle la trans­for­ma­tion des oblats a lieu quand sont pro­non­cées les paroles de la consé­cra­tion, « Ceci est mon corps … Ceci est le calice de mon sang »2, Monseigneur Müller affirme que la ques­tion du moment de la trans­for­ma­tion « n’a pas de sens ».3

Mgr Müller nie dans son livre « Dogmatik » [un ouvrage de réfé­rence pour le Dogme aujourd’­hui en Allemagne] le dogme de la vir­gi­ni­té de Marie lors de l’ac­cou­che­ment4, et, par consé­quent, l’en­sei­gne­ment selon lequel Marie a don­né nais­sance à son fils sans que son inté­gri­té phy­sique en soit vio­lée.5

Dans un éloge a l’é­vêque pro­tes­tant, le Professeur Johannes Friedrich, Monseigneur Müller décla­ra le 11 Octobre 2011 :

« Les chré­tiens qui ne sont en pleine com­mu­nion avec l’Église catho­lique quant à la doc­trine, les moyens de salut et l’é­pis­co­pat apos­to­lique, sont cepen­dant jus­ti­fiés eux aus­si par la foi et le bap­tême, et ils sont entiè­re­ment (!) incor­po­rés /​inté­grés à l’Église de Dieu, étant le Corps du Christ.

Ceci contre­dit la tra­di­tion catho­lique inté­grale et spé­cia­le­ment l’en­sei­gne­ment de Pie XII dans Mystici Corporis.

Contre la doc­trine catho­lique de la néces­si­té d’une conver­sion à l’Église catho­lique, comme encore pro­cla­mée dans l’en­sei­gne­ment de Vatican II6), Monseigneur Müller, dans le même dis­cours, qua­li­fie comme étant « erro­né » ce qu’ils appellent « l’œ­cu­mé­nisme de retour ».

La Fraternité Sacerdotale Saint Pie X lance un appel pres­sant à Monseigneur Müller pour qu’il com­mente ces décla­ra­tions contro­ver­sées, ou qu’il les cor­rige.

Ce n’est pas une aver­sion per­son­nelle qui motive cette atti­tude de la Fraternité, mais seule­ment le désir d’une pro­cla­ma­tion inal­té­rée de la doctrine.

Comme l’é­vêque Müller n’a pas caché, dans le pas­sé, son atti­tude néga­tive envers la Fraternité, elle ne per­çoit pas au pre­mier abord cette nomi­na­tion comme un signe posi­tif de pré­pa­ra­tion pour la dis­cus­sion de sa recon­nais­sance cano­nique.

Néanmoins, elle espère que le nou­veau pré­fet – au vu des dis­cus­sions dans l’Église uni­ver­selle – puisse arri­ver à une atti­tude plus posi­tive envers la FSSPX.

Abbé Matthias Gaudron, in pius​.info du 5 juillet 2012

  1. En réa­li­té, le corps et le sang du Christ ne signi­fient pas les élé­ments maté­riels de la per­sonne humaine de Jésus durant sa vie ou dans sa forme cor­po­relle trans­fi­gu­rée. Ici, corps et sang signi­fient la pré­sence du Christ dans les signes du moyen [du] pain et [du] vin. Nous avons … « main­te­nant une com­mu­nau­té avec Jésus-​Christ, moyen­nant le man­ger et le boire du pain et du vin. Même dans la sphère pure­ment per­son­nelle de l’homme, quelque chose comme une lettre peut repré­sen­ter l’a­mi­tié entre des per­sonnes et, c’est-​à-​dire, mon­trer et incar­ner la sym­pa­thie de l’ex­pé­di­teur pour celui qui la reçoit. « Ainsi seule­ment le pain et le vin deviennent « des sym­boles de sa pré­sence sal­vi­fique ». (Die Messe : Quelle Christlichen Lebens, Augsbourg : St. Ulrich Verlag:. 2002, p 139). []
  2. Catéchisme de l’Église catho­lique, n. 1375, n.1377 []
  3. Die Messe : Quelle Christlichen Lebens, p. 142. []
  4. Catéchisme de l’Église catho­lique, n. 499, n. 510 []
  5. « Il ne s’a­git pas tant de cer­taines pro­prié­tés phy­sio­lo­giques dans le pro­ces­sus natu­rel de la nais­sance (comme le canal de la nais­sance qui n’a pas été ouvert, l’hy­men qui n’a pas été bri­sée, ou l’ab­sence de dou­leurs de l’en­fan­te­ment), mais de l’in­fluence cura­trice et sal­va­trice de la grâce du Sauveur sur la nature humaine, qui avait été bles­sée par le péché ori­gi­nel .… il ne s’a­git tant de détails soma­tiques phy­sio­lo­gi­que­ment et empi­ri­que­ment véri­fiables. »(Katholische Dogmatik für Studium und Praxis, Freiburg 52003, p. 498) En fait, la doc­trine tra­di­tion­nelle est pré­ci­sé­ment concer­née par de tels détails phy­sio­lo­giques. []
  6. « Quiconque, donc, sachant que l’Église catho­lique a été ren­due néces­saire par le Christ, refu­se­rait d’en­trer ou de demeu­rer en elle, n’a pas pu être sau­vé. » (Lumen Gentium, 14 []