En ce mois qui lui est dédié, voici donc ce divin Cœur à tout jamais ouvert, voici cette plaie que le Ressuscité voulut garder et nous montrer.
Lorsque le 27 décembre 1673, Notre-Seigneur manifesta son Sacré-Cœur à Sainte Marguerite-Marie Alacoque dans la chapelle de Paray-le-Monial, Il le fit sous des traits bien précis, et désormais célèbres. La couronne d’épines l’enserrait, la croix le surmontait, la plaie du côté béait. Le tout apparaissait comme en un trône de flammes. Et Notre-Seigneur d’ajouter que partout où cette image serait exposée pour y être honorée, Il répandrait ses grâces et ses bénédictions. Honorer cette image réclame d’en saisir la signification, ô combien parlante.
Le premier trait qui apparaît, quoiqu’encore extérieur au Sacré-Cœur, est la couronne d’épines. Ces épines, symboliques de la malédiction héritée du premier péché (cf. Gn 3, 17–18), manifestent combien Notre-Seigneur s’est incarné afin de se faire malédiction pour nous (Ga 3, 13), c’est-à-dire en vue de se charger de nos fautes, afin de les expier en lui. Honorer le Sacré-Cœur réclame donc en premier lieu, comme Madeleine la pénitente, de lui remettre nos péchés, de s’en détacher à ses pieds, le cœur rempli de regrets et de confusion. « Donne-moi tes péchés », implorait Notre-Seigneur à saint Jérôme…
Une telle perspective n’effrayait guère la petite Thérèse de Lisieux : « Comment, lorsqu’on jette ses fautes avec une confiance toute filiale dans le brasier de l’Amour, comment ne seraient-elles pas consumées sans retour ? » Et tel est bien le trait le plus caractéristique du Sacré-Cœur de Jésus : un brasier d’amour ! Oppressé, étreint par nos péchés jusqu’à l’agonie, il en jaillit non la justice vengeresse, mais son plus beau joyau, le secret ultime qui l’habite : un amour infini, tout à la fois de justice pour son Père et de miséricorde à notre endroit. Telle est la signification des flammes et de la croix qui s’y dresse. En offrant à son Père toute la piété filiale que nous lui avions outrageusement refusée, en vivant cette obéissance d’amour infini jusqu’à la mort, Jésus détruit la cédule de notre condamnation (Col 2, 14), nous méritant un divin pardon sans autre limite que celle de notre réelle contrition.
Quant à la plaie du côté, elle est la blessure que Jésus reçut alors que déjà II était mort (Jn 19, 33- 34). Là encore, quel sublime symbole ! car une blessure faite sur un défunt ne cicatrise jamais. Voici donc ce divin Cœur à tout jamais ouvert, voici cette plaie que le Ressuscité voulut garder et nous montrer. Il nous indique ainsi que, même glorifié, son Cœur nous reste à tout jamais accessible, pour que nous puissions nous y réfugier. Que désire-t-Il plus pour nous, sinon que nous venions nous y jeter comme en un océan d’amour, pour nous y purifier et nous laisser transfigurer par lui ? Beaucoup plus que nos péchés, c’est encore notre propre cœur qu’il importe de Lui donner.
Ô admirable charité de Dieu ! Jésus est venu sur cette terre pour faire régner le feu de sa charité. Sainte Marguerite-Marie est formelle : le Sacré-Cœur lui apparut sur un trône de flammes, Jésus voulant établir son règne d’amour ici-bas. Puisse-t-II trouver en nos âmes et en nos familles une terre propice à se règne ! L’intronisation du Sacré-Cœur dans les foyers n’a pas d’autre but que de répondre à ce grand désir de Notre-Seigneur : Je suis venu mettre le feu sur la terre, et que désiré-je, sinon qu’il brûle ? (Lc 12, 49).
Source : Lou Pescadou n° 222