Ô combien familière à tout chrétien digne de ce nom, la dévotion envers la très sainte Vierge Marie interroge celui qui franchit depuis peu la porte d’une église, habité par une soif encore confuse de Dieu. Pourquoi, demande-t-il, prier ainsi la sainte Vierge ?
À lui seul, le récit de l’Annonciation (Lc 1, 26–38) décrit la mission première de la sainte Vierge, et donc la première raison de notre prière à son endroit : à Marie, il revient d’introduire Dieu dans le monde. L’ange Gabriel, messager divin, ne lui demande rien de moins ! Il lui annonce le plan divin de salut, combien Dieu veut prendre chair de sa chair, pour en sa chair expier le péché du monde. À cet instant, le Ciel et la terre sont comme suspendus à l’acceptation de Marie. Et voici que son oui retentit en termes magnifiques : Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole. Aussitôt elle devient mère de Dieu, engendrant en quelque sorte Dieu dans le monde.
Loin de relever d’un simple épisode ponctuel, sa mission d’engendrement de Dieu au monde se perpétue à travers tous les siècles. Debout au pied de la croix, Marie voit sa mission maternelle s’étendre à tous les hommes de bonne volonté (cf. Lc 2, 13). Le Christ en effet, lui désignant le disciple qu’il aimait – et donc chacun d’entre nous – lui dit : Voici ton fils (Jn 19, 26). Depuis ce jour, la Très Sainte Vierge est notre mère du Ciel. Il lui revient donc, en tant que mère, de faire entrer Dieu dans notre vie, et de nous faire entrer toujours plus avant dans la vie de Dieu. Un enfant ne découvre-t-il pas le monde à travers le regard de sa mère ? Voici donc le premier motif, fondamental, de notre prière à la Vierge : par son intercession, Dieu se donne à nous, tandis qu’elle nous apprend à nous donner à Dieu.
Le second motif de notre dévotion mariale trouve son fondement dans les premières pages de la Genèse. Par leur péché, Adam et Eve se retrouvaient vaincus par le démon, désormais établi « prince de ce monde ». Adam, pour être au principe de l’humanité, avait en effet entraîné cette dernière dans son asservissement au mal dont, effaré, il découvrait la réalité. C’est alors que Dieu promettait en sa miséricorde que cette même humanité, loin de rester ainsi asservie au péché, serait un jour victorieuse du démon, précisément à travers une femme et un homme : Je poserai une inimitié radicale entre toi et la femme, fut-il dit au démon, entre ta descendance et sa descendance (Gn 3, 15). Et Dieu d’ajouter aussitôt combien ce redressement d’une partie de l’humanité passerait par de terribles combats : elle t’écrasera la tête, et tu la meurtriras au talon (Gn 3, 15). En ces combats, que tous les jours nous avons à mener pour compter, dans le Christ, parmi la race de Dieu, la sainte Vierge a donc une place toute particulière, en union avec son divin Fils : elle écrasera la tête du démon ! Précisément parce qu’elle est notre mère, la très sainte Vierge est notre force en ce combat chrétien : ne relève-t-il pas d’une mère de protéger son enfant contre tout danger ? Aussi saint Bernard n’hésitait pas à dire, parlant de la très sainte Vierge : « Si elle te tient par la main, tu ne tomberas pas. Si elle te protège, tu ne craindras pas. Si elle est avec toi, tu es sûr d’arriver au but ».
Puissions-nous, en ce mois d’octobre qui les est consacré, développer une dévotion mariale aussi vraie qu’efficace !
Source : Lou Pescadou n° 247