Un concile est une réunion des évêques d’un territoire donné en vue de prendre certaines décisions. Les conciles œcuméniques (du grec oikouménê, « univers »), ou généraux, réunissent, en des occasions extra-ordinaires ( un concile par siècle en moyenne), les évêques du monde entier, pour arbitrer des questions relatives à la doctrine ou à la discipline.
Ce terme s’oppose à celui de concile particulier ; les conciles particuliers, qui ne peuvent se réunir qu’avec l’assentiment du pape, comprennent les conciles nationaux, rassemblant les évêques d’une même Conférence épiscopale aujourd’hui, et les conciles provinciaux, rassemblant ceux d’un territoire plus restreint.
Un Concile œcuménique est convoqué par le pape, qui le préside lui-même ou le fait présider par un de ses légats. Il peut le transférer, le suspendre ou le dissoudre. Il doit également en approuver les décrets. Les actes du concile revêtent un caractère d’infaillibilité s’ils concernent la définition d’une vérité de foi. Le pape choisit les sujets de discussion du concile, mais les évêques peuvent en proposer d’autres avec son approbation.
Le premier concile de l’histoire du Christianisme (proto-concile) avait rassemblé à Jérusalem, vers les années 50, les Apôtres et des « Anciens » autour de Pierre et Jacques, pour déterminer le rapport du christianisme naissant au judaïsme et à ses prescriptions (Actes des Apôtres, XV, 2–29). Mais le premier concile au sens propre du terme fut le concile de Nicée I, convoqué par Constantin en 325 après la reconnaissance de l’Église.
L’Église catholique reconnaît depuis vingt-et-un conciles œcuméniques, dont voici un tableau synthétique :
Le schisme de l’Église d’Orient en 1054 sépare historiquement ces 21 conciles en 2 grandes périodes :
- 1. Les huit premiers conciles (de Nicée I, à Constantinople IV en 869–870), sont reconnus par les deux Églises ; parmi ceux-ci :
- les quatre premiers conciles (jusqu’à Chalcédoine inclusivement) sont reconnus par toute la Chrétienté ;
- les 4 suivants (de Constantinople II à Constantinople IV) sont reconnus par l’Église et par les orthodoxes, mais pas par les Églises protestantes (y compris l’Église anglicane).
- 2. Les conciles à partir du IXème (Latran I, en 1123) sont propres à l’Église catholique.
1. Les huit premiers conciles
Ces huit conciles se tinrent en Orient. Ils furent convoqués par l’empereur avec l’accord ou à la demande du pape.
Les quatre premiers conciles.
Les quatre premiers conciles sont reconnus par l’Église catholique, les orthodoxes, les protestants et les anglicans. Ils constituent le fondement de la foi chrétienne.
I. Premier Concile de Nicée (325) . Ce premier concile convoqua 250 évêques pour arbitrer le conflit arien sur l’identité de nature de Jésus-Christ. Principaux résultats (canons) de ce concile :
- Le symbole de Nicée, qui définit le Fils comme consubstantiel au Père, sans subordination. Arius était excommunié.
- la célébration de Pâques fut décalée au dimanche qui suit la Pâque juive.
- L’évêque d’Alexandrie reçut sur l’Orient une autorité semblable à celle du pape de Rome, mais cependant inférieure (telle fut l’origine des divers patriarcats).
II. Le Concile Constantinople I (381). Cent cinquante évêques participèrent au concile. Principaux résultats :
- Condamnation comme hérétiques de plusieurs sectes, notamment les ariens (à nouveau) et les manichéens.
- Achève la rédaction du credo, notamment en définissant le Saint-Esprit comme consubstantiel au Père et au Fils
- Affirmation du dogme de la Trinité, composée de trois Personnes d’égale dignité : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.
- Le canon 3 du concile déclare que l’évêque de Constantinople vient en second après l’évêque de Rome dans l’ordre de préséance.
III. Le concile d’Éphèse (431). Ce Concile rassembla près de 200 évêques pour résoudre la controverse suscitée par la doctrine hérétique de Nestorius, patriarche de Constantinople (nestorianisme). Sous la direction de saint Cyrille, patriarche d’Alexandrie, le concile déclare que Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, a deux natures (l’une humaine et l’autre divine) réunies en une seule personne. Par extension, le concile approuve le titre de « mère de Dieu » accordé à Marie. Il démet Nestorius de ses fonctions et condamne sa doctrine.
IV. Le concile de Chalcédoine (451). Objectif : annuler les décisions d’un prétendu synode tenu à Éphèse en 449 et mettre un terme à la controverse monophysiste. Quelques six cents évêques participèrent aux dix-sept sessions du Concile, qui dura un mois. Le concile condamna le monophysisme (soutenu par le faux synode), doctrine d’Eutychès selon laquelle Jésus-Christ n’aurait possédé qu’une seule nature, divine, et n’aurait pas de nature humaine. La définition chalcédonienne, fondée sur la formulation du pape Léon et les lettres synodales de saint Cyrille d’Alexandrie à Nestor, affirma que le Christ possède une nature à la fois divine et humaine, inséparables en Lui.
De Constantinople II (553) à Constantinople IV (870)
V. Le Concile Constantinople II (553). Contre le nestorianisme. Objectif : étudier les Trois Chapitres des nestoriens, tirés de trois ouvrages de théologiens grecs (Théodore de Mopsueste, Théodoret de Cyr et Ibas d’Édesse). Le concile condamna les Trois Chapitres et jeta l’anathème sur leurs auteurs. Il réaffirme l’union hypostatique des deux natures, divine et humaine, dans le Christ.
VI. Le Concile Constantinople III (680–681). Condamne le monothélisme, une doctrine qui prétendait que Jésus-Christ n’avait qu’une seule volonté, la volonté divine, même s’il avait deux natures (humaine et divine).
VII. Second Concile de Nicée (787). Il attira 350 évêques, byzantins pour la plupart, pour trancher la question de l’iconoclasme. La crise iconoclaste opposait alors deux conceptions théologiques à propos des images du Christ : selon les iconoclastes (en grec : « ceux qui brisent les images », c’est-à-dire les icônes du Christ, de la Vierge et des saints), les images étaient nécessairement hérétiques, puisqu’elles séparaient ou confondaient les deux natures humaine et divine du Sauveur. Leurs opposants, les iconodules, considèrent les icônes comme des signes visibles de la sanctification de la matière rendue possible par l’incarnation du Christ. Contre les iconoclastes, et tout en se montrant clément envers eux, le concile reconnut le bien-fondé de la vénération des images et ordonna leur rétablissement dans toutes les églises de l’Empire romain.
VIII. Le Concile Constantinople IV (869–870). Approuvé par le pape Nicolas Ier, ce concile a aborda les questions suivantes :
- La relation entre l’âme et l’esprit,
- La Tradition considérée comme règle de foi.
Il condamne aussi le schisme oriental de Photios, ce qui rétablit (provisoirement) l’entente entre Rome et Constantinople.
2. Les conciles d’après le schisme de 1054
IX. Le concile de Latran I (1123). Il ratifia le concordat de Worms (1122) entre le pape et l’empereur, contre l’investiture laïque (nomination des évêques et des abbés par les rois). Il s’efforça de lutter contre la simonie (trafic des fonctions ecclésiastiques et des actes du culte), contre le nicolaïsme (mariage des prêtres), et contre l’inféodation (aliénation de biens d’Église à une autorité).
X. Le concile de Latran II (1139). Il liquida le schisme de l’antipape Anaclet II et lutta à nouveau contre le nicolaïsme.
XII. Le concile de Latran III (1179). Il fut provoqué par le schisme de l’antipape Calixte III. Il ratifia la Paix de Venise (1177) entre le pape et l’empereur, et traita du mode d’élection des papes. Il vit aussi la condamnation des cathares. Les cathares étaient les héritiers d’une vieille croyance dualiste, issue du manichéisme. Selon eux, deux puissances ou principes se livrent une lutte implacable dans le monde : d’un côté, le Bien d’où procède tout ce qui est lumière et esprit, de l’autre, le Mal d’où vient tout ce qui est matière. Pour se libérer du mal, il faut se libérer du monde, en particulier du corps.
XIII. Le concile de Latran IV (1215). Il prolongea la lutte contre les hérésies, notamment contre les cathares. Il mit également au point une discipline des sacrements, notamment la confession, l’eucharistie et la communion annuelle. Il contribua aussi à la lutte contre l’islam.
XIV. Le concile de Lyon I (1245). Il s’inscrivit dans la lutte entre la papauté et le Saint Empire romain germanique. Il excommunia et tenta (sans succès) de déposer l’empereur germanique Frédéric II, adversaire redoutable par son intelligence et son cynisme. Après le concile, les empereurs abandonnèrent la prétention au caractère sacré qu’Othon et ses successeurs, fascinés par Charlemagne, avaient constamment ambitionné de se voir reconnaître. Le concile demanda également que soit défendue la Terre Sainte.
XV. Le concile de Lyon II, convoqué en 1274 peu après une longue vacance du Saint-Siège, régla l’élection pontificale (institution du conclave). Il réalisa aussi la première union (éphémère) entre l’Église catholique latine et l’Église grecque depuis le Schisme, et œuvra pour la reconquête de la Terre Sainte.
XVI. Le concile de Vienne (1311–1312). Il se réunit pour discuter principalement de l’avenir de l’Ordre du Temple. Après moult tergiversations, il décida la suppression de l’ordre des Templiers, mais sans les condamner.
XVII. Le concile de Constance (1414–1418). Il mit fin au Grand Schisme d’Occident (1378–1417) par l’élection en 1417 du pape Martin V après l’abdication du pape Grégoire XII, en déposant successivement les antipapes Jean XXIII de Pise (en 1415) puis Benoît XIII d’Avignon (en 1417). En 1415, il condamna Jean Huss, réformateur religieux tchèque. Ce concile déclara avoir pleine autorité pour vivre sans le pape. Il professa qu’il tenait cette autorité du Christ et qu’il disposait d’une juridiction universelle, y compris sur le pape, en matière de foi : ce que refusa Martin V, qui rétablit en 1418 la supériorité du pape sur le concile.
XVII. Le concile de Bâle (1431–1437) – Ferrare (1437–1439) – Florence (1439–14442) – Rome (1443). Il fut réuni pour poursuivre l’œuvre du concile de Constance (lutte contre l’hérésie, et réforme de l’Église). Il proclama de nouveau que le concile est au-dessus du pape, et réalisa une nouvelle union éphémère avec l’Église d’Orient. Il fut aussi à l’origine de la Pragmatique Sanction de Bourges (1438).
XVIII. Le concile de Latran V (1512–1517). Il condamna définitivement les thèses conciliaristes : le pape fut reconnu comme l’autorité première dans l’Église. Le concordat de Bologne (1516) fut en outre signé avec François Ier .
3. Les conciles après la réforme
XIX. Le concile de Trente (1545–1563). Il fut le concile de la réforme catholique, dite Contre-Réforme, en réaction à la Réforme protestante.
- 8 premières sessions (1545–1547) : traitèrent essentiellement de questions théologiques. Parmi les nombreux décrets, retenons un décret sur le péché originel, un décret sur la justification, un décret sur les sacrements. Le concile fut ensuite transféré à Bologne pour échapper à l’influence trop pressante de Charles Quint.
- Sessions 9 à 11 (1547–1549) : y furent examinées les erreurs de Luther.
- En sept. 1549, Paul III suspendit le Concile sous la pression de Charles Quint. Le travail conciliaire ne reprit, à Trente, qu’en sept. 1551.
- 13ème Session : y fut consacré le terme de transsubstantiation.
- 14ème Session : y furent promulgués les canons concernant les sacrements de la pénitence, de l’extrême-onction et de l’ordre.
- Le concile fut à nouveau suspendu en 1552 par Jules III (successeur de Paul III, mort en 1549), inquiet des succès protestants. Le Concile ne put reprendre (à Trente) qu’en janv. 1562.
- La dernière période (sessions 17 à 25) dura 2 ans (1562–1563), et fut présidée par le pape Paul IV (successeur de Jules III, mort en 1555) : on lui doit l’institution des Séminaires, l’organisation des Synodes diocésains, etc. Retenons aussi une doctrine sur la messe, une doctrine du sacrement de mariage, un décret sur la vénération des saints.
L’œuvre de ce concile majeur fut complétée par un certain nombre d’initiatives pontificales, dont la publication du Catéchisme romain.
XX. Le concile de Vatican I (1869–1870). Il procéda à l’adaptation de la législation ecclésiastique datant du concile de Trente. Il réfléchit au lien entre raison et foi et condamna le rationalisme tout comme le fidéisme. Il s’efforça également de lutter contre le modernisme. Il proclama le dogme de l’infaillibilité pontificale dans la constitution conciliaire Pastor aeternus du 18 juillet 1870. Le concile fut interrompu le 20 octobre 1870 alors que les troupes piémontaises envahissent Rome.
XXI. Le concile de Vatican II (1962–1965) [pastoral, et non pas dogmatique]. Il se prétendait le concile du renouveau (en italien aggiornamento : mise à jour) de l’Église. Ouvert par le pape Jean XXIII le 11 octobre 1962, il se divisa en quatre sessions :
- La première session (11 oct.-8 déc. 1962) fut un temps de travail ; (mort de Jean XXIII le 3 juin 1963)
- La deuxième session (29 sept.-4 déc. 1963) rédigea la Constitution Sacrosanctum Concilium sur la « rénovation » de la liturgie.
- La troisième session (14 sept.-21 nov. 1964) termina la constitution dogmatique sur l’Église, Lumen Gentium, discuta de la question de la liberté religieuse et du lien avec le judaïsme. Un « décret sur l’œcuménisme », Unitatis Redingratiofut voté à la majorité des voix.
- La quatrième session (14 sept.-8 déc. 1965) publia la Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, et un « décret sur les religions non chrétiennes », Nostra aetate. Selon le concile, la foi repose sur des actes intérieurs que nul ne peut contraindre. La dignité humaine fonde la liberté religieuse. Un certain nombre d’évêques autour de Mgr Lefebvre s’opposèrent courageusement à ce funeste Concile qui s’oppose frontalement au Magistère des papes précédents.
Le concile Vatican II est un concile pastoral. A ce titre, il n’a pas voulu affirmer de dogme, mais simplement s’adresser au monde présent, et définir de nouvelles relations avec les « frères séparés ». Sur bien des points, Vatican II s’éloigne dangereusement de l’enseignement passé, voire le contredit directement, notamment avec la nouvelle doctrine de liberté religieuse. Voyez notre dossier sur le sujet.
Récapitulatif des 21 Conciles Œcuménique
N° | Année(s) | Concile | Convoqué par |
---|---|---|---|
1 | 325 | Nicée I | Constantin Ier, empereur de Rome |
2 | 381 | Constantinople I | Théodose Ier, empereur Romain |
3 | 431 | Éphèse | Théodose II, empereur d’Orient & Valentinien III de Rome |
4 | 451 | Chalcédoine | Saint Léon Ier & l’empereur Marcien |
5 | 553 | Constantinople II | Justinien Ier, empereur byzantin |
6 | 680–681 | Constantinople III | Constantin IV, empereur byzantin |
7 | 787 | Nicée II | Constantin VI et Irène, impératrice d’Orient |
8 | 869–870 | Constantinople IV | Basile Ier, empereur byzantin |
9 | 1123 | Latran I | Calixte II |
10 | 1139 | Latran II | Innocent II |
11 | 1179 | Latran III | Alexandre III |
12 | 1215 | Latran IV | Innocent III |
13 | 1245 | Lyon I | Innocent IV |
14 | 1274 | Lyon II | Grégoire X |
15 | 1311–1312 | Vienne | Clément V |
16 | 1414–1418 | Constance | L’antipape Jean XXIII avec l’empereur Sigismond Ier |
17 | 1431–1443 | Bâle-Ferrare-Florence-Rome | Martin V († 1431) ; présidé par Eugène IV |
18 | 1512–1517 | Latran V | Jules II |
19 | 1545–1563 | Trente | Paul III |
20 | 1869–1870 | Vatican I | Pie IX |
21 | 1962–1965 | Vatican II | Ouvert par Jean XXIII, et clos sous Paul VI |