Chartres-Paris 2013 : « Allez à Joseph ! »
Père adoptif de Jésus, chaste époux de Marie, saint Joseph est sans doute la personne la plus près de Dieu après ceux-ci.
Sa proximité avec Jésus, le Dieu fait homme, et Marie immaculée, ne pouvait que lui assurer la plus grande sainteté et aussi un rôle incomparable d’intercesseur auprès d’eux.
Durant sa vie terrestre, il fut chargé de subvenir aux besoins de sa sainte famille en dépit de toutes sortes de difficultés (dont la pauvreté et les persécutions). Son immense confiance en Dieu, sa foi débordante et les vertus qu’il a pratiqué en font un modèle pour tous et le patron de bien des causes. Mort avant la vie publique, la passion et la résurrection du Christ, il est le symbole de la Foi tenace dans l’obscurité.
C’est pour toutes ces raisons que l’Eglise en a fait définitivement son patron universel (par proclamation de Pie IX le 8 décembre 1870), en sus de toutes les raisons pour lesquelles elle l’invoquait déjà (soutien des familles, gardien des âmes consacrées, recours pour toutes sortes de difficultés matérielles, protecteur au moment de la mort, gardien des vocations religieuses mais aussi des fiancés, saint parton invoqué pour obtenir la pureté, le courage, la patience, ou encore être protégé des attaques du démon).
« Je ne me souviens pas d’avoir jamais rien demandé à saint Joseph jusqu’à ce jour, qu’il ne me l’ait accordé (…) je le sais par expérience il étend son pouvoir à tous nos besoins. » Ste Thérèse d’Avila
Editorial du Directeur de Pèlerinages de Tradition
Chers pèlerins,
Pour la Pentecôte 2013, nous serons guidés par l’époux de la mère de Dieu. C’est en effet saint Joseph qui nous conduira de Chartres à Paris, comme il a conduit la Vierge Marie de Nazareth à Bethleem avant Noël, comme il a conduit la sainte famille vers l’Egypte pour échapper à la persécution du roi Hérode. Sa vie modeste et cachée contient des richesses inexplorées. N’attendons pas la Pentecôte pour la découvrir. Le dossier spirituel vient d’être publié. Il décrit d’abord les vertus de saint Joseph, puis son rôle de chef de la sainte famille. A ce titre, il est le modèle des pères de famille et de tous ceux qui sont investis d’une autorité. Enfin, le dossier développe la mission de protecteur de l’Eglise confiée à saint Joseph.
Aujourd’hui, plus que jamais, dans la crise terrible que nous traversons, son intercession est nécessaire.
Nous menons tous une vie très active. Nous sommes souvent débordés, au point de croire que nous ne sommes pas appelés à une vie intérieure profonde. C’est alors que saint Joseph est un modèle indispensable. Il nous donne l’exemple d’une vie à la fois active et contemplative. Tout en exerçant son métier de charpentier, comme l’explique le Père Garrigou Lagrange, il a su pratiquer à un degré éminent les vertus théologales et l’union à Dieu.
La foi vive de saint Joseph fut à certains jours douloureuse à cause de son obscurité, obscurité dans laquelle il pressentait quelque chose de trop grand pour lui : en particulier lorsqu’il ignorait encore le secret de la conception virginale, que l’humilité de Marie tenait caché. La parole de Dieu transmise par l’ange fit la lumière, en annonçant la naissance miraculeuse du Sauveur. Joseph aurait pu hésiter à croire une chose si extraordinaire ; il y croit fermement dans la simplicité de son cœur, et cette grâce insigne, loin de l’enorgueillir, le confirme pour toujours dans l’humilité. Pourquoi, se dit-il, à moi Joseph, plutôt qu’à tout autre homme, le Très-Haut a‑t-il donné ce trésor infini à garder ? Il voit avec évidence qu’il n’a certes pas pu mériter un pareil don. II comprend toute la gratuité de la prédilection divine à son égard, c’est le bon plaisir souverainement libre, qui est à lui-même sa raison ; en même temps s’éclairent les prophéties, et la foi du charpentier grandit dans des proportions prodigieuses.
Pourtant l’obscurité ne tarde pas à reparaître, Joseph doit cheminer à travers les rayons et les ombres. Il était déjà pauvre avant d’être l’objet des prédilections divines, avant d’avoir reçu le secret de Dieu ; il devient plus pauvre encore lorsque Jésus vient au monde. II n’y a point de place pour le Sauveur dans la dernière des auberges de Bethléem, il faut se retirer dans une étable. Dans la délicatesse de son cœur, Joseph dut souffrir de n’avoir rien à donner à Marie et à son fils. Lorsque Jésus vient dans une âme, disent les saints, il y entre avec sa croix, il la détache de tout pour l’unir à lui. Joseph et Marie le comprirent dès le premier jour, et la prophétie du vieillard Siméon vint confirmer leur pressentiment.
Déjà la persécution commence. Hérode cherche à faire mourir le Messie. Le chef de la sainte Famille, averti par un ange, est contraint de fuir en Égypte avec Marie et l’enfant Jésus. Pauvre artisan, sans autre ressource que son travail, il part pour ce pays lointain, où nul ne le connaît ; il part, fort de sa foi en la parole de Dieu transmise par l’ange. C’est là sa mission : il doit cacher Notre Seigneur, le soustraire aux persécuteurs, et il ne reviendra à Nazareth que lorsque le danger aura disparu. Joseph est le ministre et le protecteur de la vie cachée de Jésus, comme les apôtres sont les ministres de sa vie publique.
En cette vie cachée, au milieu même des épreuves, la nuit obscure de la foi s’éclaire à la lumière toujours plus radieuse et plus douce, qui vient de la sainte âme du Verbe fait chair. De retour à Nazareth, pendant les années qu’y vécut la sainte Famille, le recueillement et le silence ont régné dans la petite maison du charpentier, véritable sanctuaire, plus sacré que le saint des saints du temple de Jérusalem. C’était un silence plein de douceur, la contemplation toute aimante du mystère infini de Dieu venu parmi nous et encore ignoré de tous. De temps en temps quelques paroles traduisaient l’état profond des âmes ; mais dans cette atmosphère d’innocence et d’amour les âmes étaient transparentes l’une à l’autre et se comprenaient d’un regard sans avoir besoin de paroles.
Après la contemplation de la bienheureuse Vierge, y en eut-il ici-bas de plus simple et de plus aimante que celle de l’humble charpentier, lorsqu’il regardait Jésus ? Par grâce il avait reçu pour lui les sentiments du père protecteur le plus dévoué et le plus délicat, et il était aimé par Jésus, enfant et adolescent, avec une tendresse, une reconnaissance et une force qui ne se peuvent trouver que dans le cœur même de Dieu. Un regard de Joseph sur Jésus rappelait à l’humble artisan le mystère de Bethléem, l’exil d’Égypte, le grand mystère du salut du monde. Comme dans le prophète Joseph de l’Ancien Testament, Joseph vendu par ses frères et figure du Christ, c’était la plus haute contemplation dans les formes les plus simples, la contemplation divine, toute pénétrée du pur amour de charité. Il portait en son cœur le secret le plus grand, celui de l’Incarnation rédemptrice ; l’heure n’était pas encore venue de le révéler. Les Juifs n’auraient pas compris, n’y auraient pas cru ; beaucoup d’entre eux attendaient un Messie temporel couvert de gloire, et non un Messie pauvre et souffrant pour nous. La présence de Joseph voilait ce mystère : on appelait Jésus le fils du charpentier. Le pauvre artisan avait dans sa maison le Verbe de Dieu fait chair, il possédait le Désiré des nations, annoncé par les prophètes, et il n’en disait mot. Il était témoin de ce mystère, et il le goûtait en secret en se taisant.
Cette contemplation très aimante était très douce pour Joseph, mais elle lui demandait aussi la plus grande abnégation, abnégation qui allait jusqu’au plus douloureux sacrifice, lorsqu’il se rappelait ces paroles de Siméon : « Cet enfant sera un signe en butte à la contradiction », et celles dites à Marie : « et vous un glaive vous transpercera la poitrine ». L’acceptation du mystère de la Rédemption par la souffrance apparaissait à Joseph comme la consommation douloureuse du mystère de l’Incarnation, et il avait besoin de toute la générosité de son amour pour offrir à Dieu, en sacrifice suprême, l’enfant Jésus et sa sainte Mère, qu’il aimait incomparablement plus que sa propre vie. Il n’a pas offert le sacrifice eucharistique, mais il a souvent offert l’enfant Jésus à son Père pour nous. Ne voyant que la volonté de Dieu, saint Joseph reçoit d’elle, avec la même simplicité, et les joies les plus profondes et les épreuves les plus cruelles.
A peine pouvons-nous soupçonner ce que furent en l’âme de Joseph les progrès admirables de la foi, de la contemplation et de l’amour. Autant l’humble charpentier a eu une vie cachée sur la terre, autant il est glorifié dans le ciel. Celui à qui le Verbe de Dieu a obéi ici-bas conserve au ciel sur le cœur sacré de Jésus une puissance d’intercession incomparable. Comme il veillait sur la maison de Nazareth, il veille aujourd’hui sur les foyers chrétiens, sur les communautés religieuses, sur les vierges consacrées à Dieu, il est leur guide, dit sainte Thérèse, dans les voies de l’oraison ; il est aussi, comme le disent les litanies, la consolation des malheureux, l’espoir des malades, le soutien des mourants, la terreur des démons, le Protecteur de la sainte Église, grande famille de Notre- Seigneur. Demandons-lui de nous faire connaître le prix de la vie cachée, la splendeur des mystères du Christ, et l’infinie bonté de Dieu, telle qu’il l’a vue lui-même dans l’Incarnation rédemptrice. Et pour mieux nous pénétrer de ses exemples, dès à présent, lisons et méditons le dossier spirituel. C’est le meilleur moyen de préparer notre âme au pèlerinage de Pentecôte 2013.
Abbé Bernard de Lacoste, Directeur des Pèlerinages de Tradition