Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent : un exemple venu du Viêt-Nam

Une église de maison au Vietnam. Crédit : Portes Ouvertes

Ho Ca Dau, viet­na­mien de 27 ans, com­pare sa conver­sion à celle de saint Paul. Durant dix ans, il a cher­ché à faire arrê­ter les chré­tiens de son vil­lage : il les consi­dé­rait comme une « force réac­tion­naire » mena­çant le gou­ver­ne­ment com­mu­niste. « Un jour, je me suis éva­noui au bord de la route à cause de la faim. Un pas­sant catho­lique m’a emme­né à l’hôpital et a cou­vert mes frais médi­caux », raconte Ho, bap­ti­sé cette année à Pâques.…

Ho Ca Dau s’est conver­ti au catho­li­cisme après avoir tra­vaillé pen­dant près d’une décen­nie à faire arrê­ter les chré­tiens, qu’il accu­sait de « mettre en dan­ger la socié­té » car oppo­sés au com­mu­nisme. Le jeune Vietnamien, âgé de 27 ans, est né d’une famille athée dans un vil­lage de la pro­vince cen­trale viet­na­mienne de Quang Tri. Dans son vil­lage, il y trai­tait les chré­tiens comme une « force réac­tion­naire » com­bat­tant le gou­ver­ne­ment com­mu­niste. Son père, un sol­dat et membre du Parti com­mu­niste, lui avait dit que les forces reli­gieuses telles que le chris­tia­nisme étaient une insulte contre les vil­la­geois indi­gènes, et por­taient atteinte aux causes révo­lu­tion­naires. « Il n’y a pas de Dieu dans le monde, et les humains peuvent faire toutes choses », lui disait aus­si son père.

Ho Ca Dau a étu­dié dans un inter­nat public où il a rejoint une orga­ni­sa­tion socio­po­li­tique locale (Ho Chi Minh Communist Youth Union), for­mant ses jeunes membres aux idéaux com­mu­nistes. Après avoir ter­mi­né le lycée en 2015, il s’est por­té volon­taire comme mili­cien afin de main­te­nir l’ordre social et la sécu­ri­té dans son vil­lage. Il fit de son mieux pour plaire à ses supé­rieurs en « filant, foui­nant et espion­nant les gens » qui venaient au vil­lage depuis d’autres régions. Des per­sonnes venues pour essayer de vendre du pois­son séché, du sucre, du lait, de l’huile de cuis­son et des vête­ments, ou encore des cahiers, aux habi­tants du village.

« Je les sus­pec­tais de répandre illé­ga­le­ment le catho­li­cisme. Je les accu­sais de mettre en dan­ger la sécu­ri­té de la socié­té. » En 2016, il en fit arrê­ter cinq parce qu’ils trans­por­taient « des croix et des copies de la Bible dans leurs sacs ». Ils furent déte­nus durant une jour­née avant d’être libé­rés. Ho Ca Dau voyait la croix comme une force « mau­vaise » et empê­chait acti­ve­ment les catho­liques du vil­lage de se ras­sem­bler pour prier.

« Je vou­lais prier Dieu de les bénir »

Aujourd’hui, il estime que son pas­sé fai­sait par­tie du plan de Dieu pour les sau­ver, lui et sa famille, et de faire d’eux des exemples pour beau­coup. En 2022, son père fut diag­nos­ti­qué d’un can­cer du foie. Sa famille, qui compte quatre frères et sœurs dont Ho Ca Dau, s’est retrou­vée sans rien après avoir ven­du leur bétail pour cou­vrir le trai­te­ment médi­cal. Toutefois, plu­sieurs catho­liques de la région vinrent les voir pour appor­ter un sou­tien psy­cho­lo­gique et maté­riel à leur père, et ce jusqu’à son décès. Parmi ces volon­taires se trou­vaient les cinq per­sonnes qui avaient été arrê­tées sur les accu­sa­tions de Ho Ca Dau.

Ce der­nier est deve­nu pauvre et mal­heu­reux, d’autant plus que ses cultures dépé­ris­saient. Il essaya de trou­ver de quoi vivre en trans­por­tant des mar­chan­dises sur son vélo dans la ville voi­sine de Dong Ha. « Un jour, raconte-​t-​il, je me suis éva­noui à cause de la faim et j’étais allon­gé sur le côté de la route. Un pas­sant catho­lique m’a emme­né à l’hôpital et a cou­vert tous mes frais médi­caux ». Ce pas­sant s’appelait Thaddée Vu Duc Vinh. Ho Ca Dau, souf­frant d’un syn­drome ves­ti­bu­laire et d’hypotension, fut hos­pi­ta­li­sé trois jours.

Thaddée Vu Duc Vinh l’a aus­si aidé à ache­ter une moto d’occasion et à se pro­cu­rer un per­mis de conduire. Rapidement, il put ain­si tra­vailler comme taxi moto, gagnant 300 000 dongs par jour (11 euros). Thaddée Vinh, membre d’un groupe cari­ta­tif basé dans la paroisse de Thach Han, l’a aus­si invi­té à res­ter chez lui. Thaddée affirme que Ho Ca Dau était durant cette période « un homme hon­nête et tra­vailleur qui essayait de s’en sor­tir ». Peu à peu, Ho a com­men­cé à rejoindre les catho­liques pour la prière du soir et la messe du dimanche, dans l’église locale. « Quand il a com­men­cé à se mêler aux autres catho­liques, il est deve­nu très inté­res­sé par le catho­li­cisme », raconte Thaddée Vinh. Ho explique qu’il se sen­tait rede­vable envers les catho­liques pour toute leur cha­ri­té et leur sou­tien. « Je vou­lais prier Dieu de les bénir », explique-t-il.

Une devise : Aimez vos enne­mis et priez pour ceux qui vous persécutent

Sa propre famille et ses proches se sont mis à l’éviter et sa conver­sion les a mis en colère. Un de ses oncles s’est moqué de lui, en lui disant qu’il vou­lait deve­nir catho­lique pour obte­nir de la nour­ri­ture. Mais Ho Ca Dau affirme que les catho­liques sont de « bons citoyens » qui par­tagent leurs res­sources avec les autres. « Ils ne mani­pulent pas la reli­gion et ils ne poussent pas les gens à s’opposer au gou­ver­ne­ment ». Il reçut la grâce bap­tis­male le 30 mars der­nier, durant la veillée pas­cale. Il prit pour par­rain Thadée Vu Duc Vinh, celui-​là même qui l’avait secou­ru sur la route. La devise qu’il choi­sit pour vivre dans la foi catho­lique est : Aimez vos enne­mis et priez pour ceux qui vous per­sé­cutent (Mt 5, 43). « Une fois que vous sen­tez la pré­sence divine dans votre cœur, vous ne crai­gnez plus rien au monde », assure-t-il.

Témoignage rap­por­té par le site des Missions Étrangères de Paris, Mars 2024

Source : Lou Pescadou N° 245 /​Missions étran­gères de Paris.