C’est dans la librairie d’une gare ou d’un aéroport, je ne me souviens plus, que j’ai remarqué l’inquiétant moine qui fait la une de ce numéro. Il illustrait la couverture d’un « best-seller international », comme le proclamait l’éditeur, intitulé Le complot des Franciscains.
D’après ce roman les franciscains auraient caché durant sept siècles la tombe de saint François d’Assise, car l’Église y voyait une grave menace, en raison d’un complot, lui-même fondé sur des intrigues de pouvoir et des violences diaboliques, avec un secret, mais aussi un amour caché, et un jeune moine qui poursuit une quête initiatique, etc.
Dans ce délire à la Da Vinci code, l’unique accusée est évidemment l’Église catholique, coupable de tous les crimes et de toutes les turpitudes.
Or, en examinant de près ce roman, j’ai découvert que cette illustration de couverture provenait en réalité…du Saint François d’Assise au tombeau réalisé par le peintre Francisco de Zurbaran (1598–1664). Ainsi, une ouvre d’inspiration catholique, certes assez austère, était retournée contre l’Église.
Dans la campagne internationale que nous voyons se développer, l’Histoire est donc recyclée, subvertie, manipulée, utilisée pour nourrir les plus infâmes calomnies contre l’Église.
Ce n’est malheureusement pas nouveau : dès la naissance de l’Église, la vérité historique fut déformée pour combattre la foi. Sans parler des pharisiens et des prêtres du Temple, les Celse, les Julien l’Apostat et autres ne se privèrent pas d’instrumentaliser l’Histoire au service de leurs passions.
« Plus que jamais, écrivait Léon XIII, l’art de l’historien paraît aujourd’hui être une conspiration contre la vérité. Les anciennes accusations contre l’Église ont été remises en circulation ; on voit le mensonge se glisser audacieusement dans de volumineuses compilations et dans de petits pamphlets, et même dans le théâtre » ou le roman.
L’Histoire est donc une arme de guerre contre « Eglise. Mais elle peut, mais elle doit devenir, entre les mains des disciples du Christ, une arme de guerre pour l’Église, pour le salut des âmes, pour le règne du Christ-Roi.
Ce n’est pas qu’il faille déformer ou instrumentaliser l’Histoire. Comme nous le rappelle Léon XIII, reprenant la remarque d’un ancien païen,
« la première règle de l’Histoire est de ne pas oser mentir ; la seconde, de ne pas craindre de dire vrai ; en outre, il faut que l’historien ne prête au soupçon ni de flatterie, ni d’animosité ».
De plus, dans toute Histoire vraie, selon ce que saint Pie X fit écrire par le cardinal de Lai aux évêques d’Italie,
« la narration des faits ne doit pas être distincte de ces hautes considérations philosophiques dont saint Augustin, Dante, Bossuet furent les maîtres ».
Mais alors, quel immense champ d’investigation s’ouvre aux historiens honnêtes ! Ceux-ci n’ont certes pas manqué au cours du temps, et notre dossier a pour ambition de rappeler le nom de quelques-uns des plus récents.
Et ne croyons pas que les offensives destinées à rétablir la vérité historique soient systématiquement vouées à l’échec. Au contraire ! Car si le mensonge historique contre l’Eglise bénéficie de l’appui de toutes les passions déréglées le travail de l’historien honnête trouve un appui solide à l’intérieur de l’homme lui-même.
Notre intelligence, notre raison est en effet faite pour le vrai, et elle entre en résonance avec la vérité lorsqu’elle la découvre. C’est pourquoi, avec l’aide de la grâce, nécessaire pour surmonter l’ignorance et la faiblesse, ces fruits du péché originel, le travail de l’historien honnête touche les âmes et remet l’ar- me perfide de l’Histoire au service de l’Église et du Christ.
Abbé Régis de Cacqueray †, Supérieur du District de France
Source : Fideliter n° 173