Le Pape François a déclaré récemment que les gouvernements avaient le devoir de calculer avec prudence leur capacité d’accueil vis-à-vis des étrangers. « Les gouvernants doivent être très ouverts à recevoir les réfugiés, mais aussi faire des calculs sur leur accueil, parce qu’on doit non seulement accueillir un réfugié, mais aussi l’intégrer ».
Et il a ajouté : « Il n’est pas humain de fermer les portes et les cœurs, et à la longue, cela se paie politiquement. Tout comme peut se payer politiquement une imprudence dans les calculs, en recevant plus de personnes qu’on ne peut en intégrer ».
Il aura donc fallu plus de deux ans au Pape pour arriver à prononcer cette parole de simple bon sens : c’est aux gouvernements qu’il revient, dans une vue de prudence politique, de réguler l’immigration et de trouver des solutions à la fois sages, humaines et viables pour faire face à un afflux soudain d’immigrés.
Mais, pendant ces deux ans, le Pape n’a cessé d’encourager à accueillir sans limite, n’a cessé de faire des reproches à ceux qui, à ses yeux, n’accueillaient pas suffisamment [Voir photo ci-dessus]. Le résultat le plus tangible est que même des pays connus pour une large tradition d’accueil ont fermé brutalement leurs portes aux arrivants, sous la pression d’une population exaspérée.
Le Pape n’est malheureusement pas le seul à admonester les hommes politiques et la société civile : les évêques français s’en sont fait eux aussi une spécialité, comme le manifeste leur récent document intitulé Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique. Les évêques y dissertent gravement sur « le contrat social, le contrat républicain permettant de vivre ensemble sur le territoire national », y appellent à « gérer la diversité dans notre société », etc.
Ce « prêchi-prêcha » politico-moral n’a qu’un inconvénient, mais il est de taille : ceux qui l’assènent aux hommes politiques et à la société civile sont, au sens propre, des « irresponsables ». Ces bons apôtres de « l’accueil de l’autre » ne se confrontent absolument pas à la réalité politique, sociale, économique qu’impliquerait la mise en œuvre effective de leurs conseils utopiques.
L’Église a certes quelque chose à dire en politique. Mais d’abord, elle doit le faire sur la base de la foi catholique. Ensuite, elle doit le faire en respectant l’ordre de la charité, qui implique qu’on s’occupe d’abord du prochain le plus proche avant de s’occuper (sans le négliger) du prochain le moins proche.
Enfin, elle doit le faire en tenant compte des réalités objectives (plus d’un million d’immigrés sont arrivés en Europe en quelques mois, et ce n’est certes pas anodin) auxquelles doit faire face tout dirigeant politique qui entend prendre au sérieux ses responsabilités politiques vis-à-vis de la communauté des citoyens.
Abbé Christian BOUCHACOURT, Supérieur du District de France de la de la FSSPX
Sources : Lettre à nos frères prêtres n° 7