L’installation des Sœurs Bénédictines à Perdechat (63)

Les sœurs béné­dic­tines du Monastère Notre-​Dame-​de-​Toute-​Confiance sont le pen­dant fémi­nin de la branche mas­cu­line qui fleu­rit si joli­ment au monas­tère de Bellaigue. Implantée depuis plu­sieurs décen­nies à Saint-​Loup (Lamairé), cette fon­da­tion reli­gieuse a béné­fi­cié l’an der­nier de l’aide du dis­trict de Suisse pour se rap­pro­cher de Bellaigue.

Le Rocher : Ma sœur, il y a un an, les fidèles du dis­trict de Suisse n’ont-​ils pas répon­du géné­reu­se­ment à votre demande d’aide pour votre démé­na­ge­ment à Perdechat ?

Mère Prieure : Oui, et je tiens à remer­cier les chers fidèles de Suisse qui ont été si géné­reux. En fait, nous n’a­vions pas com­pris tout de suite d’où venait un tel vire­ment, il a fal­lu aller à la banque pour avoir plus de ren­sei­gne­ments et ils nous ont juste dit : « Rickenbach ». Nous ne pou­vions en croire nos yeux.

Avec une aide de 80’000.- chf, la Suisse a bat­tu tous les records, que Dieu lui rende au cen­tuple ! Nous devons la grâce de notre démé­na­ge­ment à la bon­té de Dieu et à la Providence qui s’est mani­fes­tée si clai­re­ment depuis l’a­chat de Perdechat près de Bellaigue et durant ces trois années de tra­vaux, au milieu de bien des difficultés.

Grâce à Dieu, au dévoue­ment inlas­sable de nos frères béné­dic­tins et grâce aux fidèles, qui sont les ins­tru­ments de Sa grande Bonté, nous voi­là arri­vées au but, qui était de nous ins­tal­ler à proxi­mi­té des moines de Bellaigue.

Le Rocher : Arrivées au but, certes, mais j’i­ma­gine qu’un tel évé­ne­ment ne se pro­duit pas sans quelques péri­pé­ties. Pouvez-​vous nous racon­ter votre déménagement ?

Mère Prieure : Lors de sa visite à Lamairé le 30 mai 2008, Mgr de Galarreta nous avait dit avec force : « Il faut par­tir fin août ! ». Nous avons obéit avec joie et orga­ni­sé le départ. La départ étant fixé, les bras se trouvent plus allègres pour rem­plir les car­tons. Le camion com­man­dé depuis deux mois est arri­vé le lun­di 25 août 2008. Tous les meubles du monas­tère atten­daient dehors, sous un beau soleil, l’honneur d’être embar­qués pour une si belle aven­ture. Le char­ge­ment s’est pour­sui­vit jusqu’à 11h du soir. Le len­de­main fut une jour­née de ménage, de ran­ge­ment et de grand feu. Il res­tait cepen­dant encore la moi­tié des affaires à empor­ter : le camion devra donc reve­nir. La jour­née s’est ache­vée une fois encore peu avant minuit.

Le Rocher : Le mobi­lier étant dans le camion, j’i­ma­gine qu’il y eut ensuite le départ des religieuses ?

Mère Prieure : En effet, nous sommes par­ties le mer­cre­di 27 août, lais­sant le monas­tère à demi plein, une camion­nette en panne et les clés aux parents et amis dévoués venus nous aider à démé­na­ger. Nous étions invi­tées à faire halte à Ruffec, au novi­ciat des sœurs de la FSSPX, pour le déjeu­ner. L’accueil y fut cha­leu­reux : les sœurs nous ont chan­té la poly­pho­nie « dans le cœur de l’Eglise ma Mère je serai l’Amour ». Cette ami­tié entre com­mu­nau­tés de la Tradition est pré­cieuse et bien conso­lante dans la crise actuelle.

Le Rocher : C’est d’ailleurs une autre com­mu­nau­té reli­gieuse de la Tradition qui occupe désor­mais après vous la mai­son de Laimairé ?

Mère Prieure : Oui, et c’est ain­si que per­dure le carac­tère reli­gieux de cette mai­son. A la faveur du démé­na­ge­ment, nous avons retrou­vé un « inven­taire du linge, de la lite­rie et des meubles » de 1932, qui porte en pre­mière page : Lamairé, mai­son fon­dée en 1892 par M. le curé Linassier ; sœur Elise, + 1917, 1ère supé­rieure. Cette mai­son est ensuite deve­nue école du vil­lage, puis a été rache­tée par les « Ancelles de Jésus Marie », puis par notre fon­da­trice en 1980. Depuis octobre 2008, elle est reprise par les sœurs de la Fraternité de la Transfiguration, à l’é­troit à Mérigny.

Le Rocher : Vous n’a­vez fait qu’une halte à Ruffec ; le soir même vous arri­viez à Perdechat ?

Mère prieure : Le soir, nous sommes arri­vées à Bellaigue pour vêpres et nous avons pu saluer Dom Ange, de loin, par une prière à son tom­beau, où nous lui deman­dâmes de bénir notre arri­vée. De l’é­ter­ni­té, il semble com­men­cer à tenir sa pro­messe : « Je vous serai désor­mais plus utile du haut du ciel que de la terre ». Le Père Matthieu nous don­na sa béné­dic­tion au moment du sou­per, qu’il trou­va un peu ori­gi­nal : un pique-​nique dans la cour de l’hôtellerie. Mais nous, nous en avons l’habitude.

Le Rocher : Perdechat est une vieille mai­son à quelques kilo­mètres du monas­tère de Bellaigue, et comme toute vieille mai­son déla­brée, elle n’a pas été bien chère à l’achat, mais… on s’en doute, la remise en état coûte beau­coup et en éner­gie et en finance. Les tra­vaux étaient-​ils fini à votre arrivée ?

Mère Prieure : Non, les tra­vaux n’é­taient pas ache­vés. Nous nous sommes donc ins­tal­lées pour quelques mois chez une géné­reuse dame de Virlet : une cha­pelle, une cui­sine, deux dor­toirs com­par­ti­men­tés en cel­lules grâce à un habile agen­ce­ment de clous et de draps. Un peu ser­rées à douze, mais tout est grâce et occa­sion de rire ! Trois pos­tu­lantes sont arri­vées en sep­tembre (une bré­si­lienne, une néo­zé­lan­daise, une fran­çaise) et la gaie­té était au rendez-vous.

Le Rocher : En clô­ture à Lamairé est enter­rée votre fon­da­trice. Avez-​vous aus­si pré­vu le trans­fert de sa dépouille mor­telle à Perdechat ? Quand aura lieu ce « démé­na­ge­ment » exceptionnel ?

Mère Prieure : Evidemment que ce trans­fert a été pré­vu. Il a d’ailleurs déjà eu lieu, le 24 sep­tembre 2008. Cérémonie simple et tou­chante, à l’issue de laquelle notre Mère Gertrude de Maissin, depuis un champ un peu en sur­plomb du monas­tère, conti­nue de veiller sur nous. C’est le jour du troi­sième anni­ver­saire de ses funé­railles, le 24 novembre 2008, que nous avons pu réel­le­ment démé­na­ger et rece­voir ce si beau cadeau du bon Dieu : un monastère !

Le Rocher : Mgr de Galarreta, qui vous a for­te­ment encou­ra­gées à démé­na­ger à Perdechat sans attendre la fin des tra­vaux, est-​il déjà venu vous visiter ?

Mère Prieure : Bien enten­du. Il est venu le 27 sep­tembre pour l’inauguration du monas­tère et la jour­née « portes ouvertes ». Il pré­si­da d’ailleurs une pro­fes­sion et une vêture. Dans son ser­mon, il encou­ra­ga l’assistance à dési­rer la sain­te­té, car « celui qui a le désir de la sain­te­té a déjà obte­nu la plus grande par­tie de la vic­toire », et seule la sain­te­té pour­ra sau­ver l’Eglise de cette crise pro­fonde. Le soir, le Père Matthieu bénit les lieux régu­liers du monas­tère, mais il nous fal­lut repar­tir car il y avait encore trop de tra­vaux (pas de chauf­fage, pas d’électricité, sauf celle du chan­tier, pas de portes dans la cave, etc.).

Le Rocher : Pour la belle fête de Noël, vous étiez donc défi­ni­ti­ve­ment ins­tal­lées dans votre nou­veau monastère ?

Mère Prieure : Oui, et à l’oc­ca­sion de ce pre­mier Noël à Perdechat, nous avons dépo­sé dans la crèche nos grands dési­rs de vie reli­gieuse et les inten­tions de tous nos bien­fai­teurs. Le len­de­main, le 26 décembre, notre archi­tecte est pré­sente pour fixer le plan de l’église. Nous avons dépo­sé le per­mis de construire et espé­rons com­men­cer les tra­vaux au prin­temps, si Dieu veut. Comme vous le voyez, l’aventure conti­nue… et ce pour de nom­breuses années !

Le Rocher : La vie monas­tique peut-​elle y être véri­table quand il y a encore tant de tra­vaux et d’aménagement ?

Mère Prieure : Même si les tra­vaux doivent se pour­suivre encore long­temps pour éta­blir un vrai monas­tère avec clô­ture, cloître et église, un grand pas est déjà fait, qui nous per­met de mener notre vie contem­pla­tive, c’est-à-dire une vie tour­née vers Dieu dans l’attitude de l’orante et char­gée d’offrir à Dieu la louange et l’action de grâces au nom de toute l’humanité. Les Pères de Bellaigue conti­nuent à nous des­ser­vir avec beau­coup de cha­ri­té : messes, confé­rences, ser­mons, nous n’en finis­sons pas de remer­cier la Providence !

Remerciements de LPL à l’ab­bé Henry Wuilloud, Supérieur du District de Suisse et à l’ab­bé Claude Pellouchoud , rédac­teur en chef, pour cet entre­tien qui a paru dans « » n° 58 de mars-​avril 2009.