Une lettre intéressante du Pape aux évêques

Le Pape a envoyé une longue lettre (10mars 2009) aux évêques où il se plaint de l’hostilité de beau­coup d’entre eux « d’une véhé­mence telle qu’on n’en avait pas connue depuis très long­temps » parce qu’il a déci­dé de lever les excom­mu­ni­ca­tions de nos quatre évêques. Aussi veut-​il leur expli­quer le motif de sa démarche. Il est inté­res­sant de consta­ter que c’est un motif de foi : « A notre époque où dans de vastes régions de la terre la foi risque de s’éteindre comme une flamme qui ne trouve plus à s’alimenter, la prio­ri­té qui pré­do­mine est de rendre Dieu pré­sent dans ce monde et d’ouvrir au monde l’accès à Dieu » . Il dit plus loin son éton­ne­ment de leur mau­vaise réac­tion et il en prend note « Que l’humble geste d’une main ten­due soit à l’origine d’un grand tapage, deve­nant ain­si le contraire d’une récon­ci­lia­tion, est un fait dont nous devons prendre acte. » Il pose aus­si une ques­tion simple aux évêques pour remuer leur conscience « Pouvons-​nous sim­ple­ment les exclure, comme repré­sen­tants d’un groupe mar­gi­nal radi­cal, de la recherche de la récon­ci­lia­tion et de l’unité ? ». Auparavant il avait dit que la FSSPX n’est pas si mépri­sable qu’on veuille le pen­ser ou le faire croire : « une com­mu­nau­té dans laquelle se trouve 491 prêtres, 215 sémi­na­ristes, 6 sémi­naires, 88 écoles, 2 ins­ti­tuts uni­ver­si­taires, 117 frères, 164 sœurs oblates et des mil­liers de fidèles peut-​elle nous lais­ser tota­le­ment indif­fé­rente ? » Il se plaint amè­re­ment de leur atti­tude méchante ( le pape vient de faire l’expérience dou­lou­reuse pen­dant quelques jours de « la haine des hommes d’Eglise » : c’est un petit échan­tillon de ce que la FSSPX res­sent depuis trois décen­nies) et il le dit en des termes vigou­reux et magni­fiques même si on peut lui repro­cher un petit côté inté­res­sé qui motive sa réac­tion : « Parfois on a l’impression que notre socié­té a besoin d’un groupe au moins, auquel ne réser­ver aucune tolé­rance ; contre lequel pou­voir tran­quille­ment se lan­cer avec haine. Et si quelqu’un ose s’en rapprocher- dans le cas pré­sent le Pape- il perd lui aus­si le droit à la tolé­rance et peut lui aus­si être trai­té avec haine sans crainte ni réserve »

On peut certes faire une autre lec­ture de cette lettre com­plè­te­ment dif­fé­rente. Mgr Bouilleret évêque d’Amiens a fait savoir qu’il compte bien s’en ser­vir pour refu­ser la moindre ouver­ture à la com­mu­nau­té Traditionnelle qui assiste depuis bien­tôt deux ans, dehors dans le froid et les intem­pé­ries, à la messe célé­brée par la Fraternité Saint-​Pie X. Il se dira sans scru­pule ni dif­fi­cul­té « en pleine com­mu­nion avec le Saint-Père ».

On le sait, la plu­part des évêques ne por­te­ront aucune atten­tion aux paroles fortes et res­pec­tueuses du Pape qui ne les ménage pour­tant pas. Pourquoi une telle affir­ma­tion ? Leur oppo­si­tion à la Tradition est trop col­lé­giale et trop enra­ci­née et ils ne veulent plus d’une cer­taine forme d’Eglise qu’ils ont pié­ti­née pen­dant qua­rante ans. Aussi le Pape peut s’attendre au pire dès qu’il fera quelque chose dans le sens de la fidé­li­té à la Tradition (dogme et morale). Il n’y a aucune rai­son qu’il soit mieux trai­té que la FSSPX. Aura-​t-​il la force d’âme d’aller au bout de sa mis­sion ou va-​t-​il se déro­ber ? Il n’est pas inter­dit de prier pour qu’il suive la logique du Saint-​Esprit et non pas la logique de la collégialité.

Cet aveu­gle­ment des évêques se véri­fie aus­si dans notre région. En ce qui concerne notre pèle­ri­nage à Pontmain nous consta­tons une volon­té affi­chée de dur­cis­se­ment des rela­tions de la part du nou­vel évêque, Mgr Scherrer.

Croyez-​le, ce ne sont pas ceux qui disent « dia­logue », « dia­logue » qui sont vrai­ment prêts à écou­ter et à débattre avec séré­ni­té selon les cri­tères objec­tifs de la doc­trine catho­lique. Si nous publions ici la lettre de l’évêque de Laval et notre réponse c’est pour mieux illus­trer la situa­tion actuelle dans l’Eglise en France. Il faut être sans illu­sion, le démon n’a pas dit son der­nier mot contre nous. Nous publions aus­si le com­mu­ni­qué de notre supé­rieur géné­ral qui constate les mêmes pro­blèmes en Allemagne.

On peut dire que la col­lé­gia­li­té porte main­te­nant plei­ne­ment ces fruits : les évêques se sou­mettent à la loi du nombre ( ils sont aux ordres des Conférences épis­co­pales tou­jours mani­pu­lés par des moder­nistes déter­mi­nés à limi­ter le plus pos­sible l’influence de la Tradition ) et non plus à la foi qui seule en défi­ni­tive peut légi­ti­mer leurs actes d’autorité.

Abbé Pierre Barrère, in Le Sainte Anne n° 208