Lettre n° 19 de Mgr Lefebvre aux Amis et Bienfaiteurs de la FSSPX d’octobre 1980

Chers Amis et Bienfaiteurs,

ette dix-​neuvième lettre semes­trielle coïn­cide avec le dixième anni­ver­saire de l’approbation offi­cielle don­née à notre Fraternité par S.E. Mgr Charrière, Evêque de Fribourg, le 1er novembre 1970.

Que d’événements ont depuis cette date mar­qué l’histoire de l’Eglise aux prises avec une véri­table occu­pa­tion moder­niste ! De nom­breux livres ont décrit d’une manière bou­le­ver­sante les résul­tats de cette péné­tra­tion dans les dicas­tères romains et dans les curies épiscopales.

Devant ce spec­tacle dou­lou­reux qui s’aggrave d’année en année pour ne pas dire de mois en mois, nous renon­çons à expri­mer à la fois notre indi­gna­tion et notre tris­tesse. Nous pour­rions aus­si décrire la per­sé­cu­tion dont sont l’objet les prêtres les plus dignes et les plus véné­rables comme ce cher cha­noine Catta, aumô­nier des Visitandines de Nantes depuis 40 ans, doyen du cha­pitre. Agé de plus de 80 ans, il a été des­ti­tué peu de temps avant sa mort de sa fonc­tion de doyen de Chapitre. Maltraité par ses confrères de la mai­son de repos, il cherche refuge pour ses repas chez les Visitandines, qui finissent par lui deman­der de retour­ner à la mai­son de repos où, le cœur meur­tri, il suc­combe à une crise car­diaque, et cela parce qu’il per­sé­vé­rait à célé­brer la Sainte Messe de son ordi­na­tion. Son enter­re­ment fut tout à fait contraire à ce qu’il avait deman­dé. Ainsi les tra­di­tio­na­listes sont pour­sui­vis jusqu’après leur mort, pour crime de fidélité.

Sur les tombes de ces saints prêtres, sur celles de tant de fidèles décé­dés pré­ma­tu­ré­ment à cause de cette dou­lou­reuse per­sé­cu­tion, nous devons faire notre ser­ment de fidé­li­té, ser­ment qui n’est autre que la pro­fes­sion de foi et le ser­ment anti-​moderniste de Saint Pie X, der­nier Pape canonisé.

Appuyés sur vingt siècles de foi et de Tradition, nous pou­vons et devons per­sé­vé­rer sans crainte, avec la per­sua­sion que la Vérité ne peut que triom­pher, car elle est divine. Notre Seigneur l’affirme : « Je suis la Vérité ».

Au lieu de nous plaindre et de nous décou­ra­ger, ren­dons grâces à Dieu qui par­tout bénit les efforts de ceux qui per­sé­vèrent dans la foi et la Tradition.

Il nous est impos­sible de noter dans le détail ces béné­dic­tions innom­brables dont nous sommes les témoins, ou qui nous sont confiées par ceux qui les ont reçues.

Les nom­breuses voca­tions qui rejoignent la Fraternité ou les nom­breuses com­mu­nau­tés fidèles à la Tradition ont cha­cune leur his­toire émou­vante. Ce sont des fleurs qui se sont épa­nouies au milieu des ronces et des épines.

Les pré­di­ca­teurs des exer­cices spi­ri­tuels de la Fraternité pour­raient faire des livres pour racon­ter les conver­sions dont ils sont témoins. Les prêtres qui suivent les camps de vacances nous racontent avec une pro­fonde émo­tion les retours extra­or­di­naires à la foi et à la pra­tique reli­gieuse retrou­vées par le contact avec la Tradition et sur­tout le Saint Sacrifice de la Messe.

Les fon­da­tions d’œuvres comme les écoles, les facul­tés uni­ver­si­taires, les sémi­naires ont toutes une his­toire qui mani­feste les inter­ven­tions du ciel. Et toutes les œuvres fidèles à la Tradition pour­raient témoi­gner dans le même sens. Un petit exemple le mon­tre­ra : l’Evêque de Kansas City aux USA mit en vente une grande et spa­cieuse église, gar­nie d’un bel autel, de l’orgue, des bancs où pou­vait prendre place un mil­lier de per­sonnes. Le Père char­gé du dis­trict sud s’efforça de l’acquérir par inter­mé­diaire, mais à l’Evêché on eut vent de la qua­li­té de l’acquéreur, de ses liens avec Mgr Lefebvre. Ce fut un « non » caté­go­rique. Un évêque noir angli­can se pré­sen­ta alors. Non seule­ment on fut heu­reux d’accueillir cet ache­teur, mais par œcu­mé­nisme on dimi­nua le prix de moi­tié. Or, pour des rai­sons incon­nues, cet évêque s’empressa de revendre cette église à notre supé­rieur de dis­trict, qui béné­fi­cia ain­si de la réduc­tion. Ainsi la Fraternité peut désor­mais réunir de nom­breux fidèles et faire de belles céré­mo­nies dans une splen­dide église au cœur de la ville de Kansas City.

Gardons confiance et cou­rage, comme le dit Saint Paul : « Puisque Dieu est avec nous, qui peut être contre nous ? ». En ce mois d’octobre, prions la Vierge Marie de déli­vrer la Sainte Eglise de ses enne­mis de l’intérieur, comme Elle l’a fait du temps de Saint Pie V pour les enne­mis de l’extérieur.

Aidez-​nous de vos prières et de votre géné­ro­si­té à pour­suivre l’œuvre de régé­né­ra­tion de l’Eglise par de vrais et saints prêtres.

Que Dieu vous bénisse.

+ Marcel Lefebvre
Rickenbach, le 1er octobre 1980.

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Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.