Lettre n° 55 de Mgr Bernard Fellay aux Amis et Bienfaiteurs de la FSSPX d’octobre 1998

Chers Amis et Bienfaiteurs,

a joie et la fier­té se lisaient sur tous les visages en ce 10 octobre sur le par­vis de l’église du sémi­naire d’Écône. Oui, enfin, le ber­ceau de notre Fraternité pos­sède ce que Monseigneur Lefebvre lui dési­rait dès le début : l’élément cen­tral du sémi­naire où sont for­més les futurs prêtres, une église, une vraie, et en pierre du pays. Après vingt ans de pro­vi­soire, vingt ans de ten­ta­tives et de tra­cas admi­nis­tra­tifs, s’élèvent, au milieu des vignes, une église et un clo­cher ; un doigt de Dieu qui lance les regards vers les réa­li­tés éter­nelles et réjouit les cœurs de la voix carillon­nante de ses quatre cloches.

Le nou­veau temple de Dieu abrite faci­le­ment 400 fidèles et son tran­sept 140 sémi­na­ristes. Si du côté des fidèles, il ne leur est pas dif­fi­cile de rem­plir la nef, cepen­dant, côté sémi­na­ristes, plu­sieurs bancs sont encore vides, atten­dant ces futurs can­di­dats au sacer­doce que vous obtien­drez, chers fidèles, par vos prières ins­tantes. Cet automne, nous comp­tons 21 nou­veaux sémi­na­ristes à Flavigny, 10 à Zaitzkofen, 7 à Winona ! Chaque voca­tion s’achète à coups de sacri­fices et de prière, ne l’oublions pas ! Et redou­blons d’ardeur pour implo­rer cette manne du Souverain Prêtre ! Que la jeu­nesse ose répondre à l’appel, que les cœurs se laissent tou­cher, enflam­mer par le zèle du Seigneur : « J’ai pitié pour cette foule » qui n’a plus rien à manger…

Les 17 jeunes prêtres ordon­nés cette année ont été envoyés aux quatre coins de la terre, ils ont rejoint leurs aînés qui ne suf­fisent pas à la tâche. Le sémi­naire d’Argentine nous don­ne­ra quatre prêtres sup­plé­men­taires en décembre, ce qui por­te­ra le nombre de nos prêtres à plus de 370. Tout en dési­rant davan­tage, nous sommes bien heu­reux, et les coups qu’on essaie de nous por­ter le confirment, de voir le bien que Dieu fait par nos mains sacer­do­tales. Sa misé­ri­corde, ses grâces se répandent pour for­ti­fier dans la ver­tu, sou­te­nir dans la peine, encou­ra­ger dans les com­bats de la vie, comme le dit Job. Les familles chré­tiennes refleu­rissent, une nou­velle jeu­nesse demande un soin encore plus atten­tif pour nos écoles où nous inves­tis­sons beau­coup d’énergie ; len­te­ment un tis­su de foi se régé­nère dans la socié­té. Un tel renou­veau de vie sociale chré­tienne, même embryon­naire, n’est pas sans inquié­ter ceux qui appellent au com­bat contre le retour de l’ordre moral ! Oui, ceux qui entendent bâtir la cité sans Dieu voci­fèrent de plus en plus effron­té­ment, les pro­jets d’institutionnaliser une coha­bi­ta­tion contre nature va bien dans ce sens.

« …Si les maux et les attaques des méchants vont se mul­ti­pliant, le zèle de tous les hommes de bien doit éga­le­ment aug­men­ter… [1] »

Cette remarque de Pie XII nous invite à l’action, une action mul­ti­forme, mais d’abord celle que nous pro­pose l’Église.

« Nous n’hésiterons donc pas à le répé­ter : nous met­tons une grande espé­rance dans le Rosaire pour la gué­ri­son des maux qui affligent notre époque. Ce n’est pas avec la force, ni avec les armes, ni avec la puis­sance humaine, mais avec l’aide divine obte­nue par cette prière que l’Église, forte comme David avec sa fronde, pour­ra affron­ter, intré­pide, l’ennemi infer­nal… [2]»

Dans la même lettre, par­lant de la famille, le sou­ve­rain pon­tife ajoutait :

« Mais c’est sur­tout au sein des familles que Nous dési­rons que la pra­tique du Rosaire soit répan­due, reli­gieu­se­ment conser­vée et sans cesse déve­lop­pée. C’est en vain qu’on s’efforce d’enrayer le déclin de la civi­li­sa­tion si on ne ramène pas à la foi de l’Évangile la famille, prin­cipe et fon­de­ment de la socié­té. Nous tenons à le décla­rer : la réci­ta­tion du Rosaire en famille est un moyen des plus effi­caces pour réa­li­ser une entre­prise si dif­fi­cile… [3] »

Nous pour­rions mul­ti­plier à satié­té les cita­tions des papes qui recom­mandent et même ordonnent la réci­ta­tion du Rosaire à cause des temps dif­fi­ciles que tra­verse la sainte Église, et la socié­té. Ils confirment les appels de Notre-​Dame elle-​même, qui, à la Salette, à Lourdes, à Fatima insis­tait « Priez le Rosaire ». Le Cœur de notre Mère du ciel nous demande et nous donne cette pro­tec­tion. Allons-​nous res­ter sourds ?

Il nous semble oppor­tun de rap­pe­ler ces indi­ca­tions tant du ciel que de la terre : la situa­tion du monde et de l’Église est incom­pa­ra­ble­ment plus mau­vaise qu’alors. Il n’y a pas de place pour l’illusion, même si dans la plu­part des pays du globe on jouit actuel­le­ment d’une appa­rente tranquillité.

Tant au niveau des idées, des prin­cipes qui gou­vernent la socié­té actuelle qu’au niveau des mœurs et des habi­tudes qui s’ancrent dans la vie de tous les jours, la des­truc­tion du chris­tia­nisme avance à grands pas. L’attitude confuse ou com­pro­mise de nom­breux gar­diens de la foi et des mœurs, le rap­pro­che­ment de l’Église avec le monde ne fait qu’accélérer le mouvement.

En ce mois d’octobre, mois du Rosaire, qui nous rap­pelle les pré­oc­cu­pa­tions de l’Église devant une situa­tion qui, depuis déjà plus de 100 ans, ne fait que s’aggraver, Nous vous invi­tons ins­tam­ment à la prière. Que dans toutes les familles on prie le cha­pe­let et si cela se fait déjà qu’on le prie encore mieux, en don­nant toute son atten­tion et tout son cœur à la médi­ta­tion des mys­tères de la vie de Notre-​Seigneur et Notre-​Dame. Davantage, nous lan­çons une nou­velle croi­sade du Rosaire. Prier le Rosaire et vivre en consé­quence, dans l’imitation des ver­tus contemplées.

Une croi­sade du Rosaire pour la socié­té chré­tienne en péril, pour la famille chré­tienne, pour l’Église. Que la chape de plomb néo-​moderniste qui étouffe notre Mère soit déchi­rée, que le saint Sacrifice retrouve ses droits, les prêtres leur iden­ti­té et leur idéal de sain­te­té pour le bien de tous, que la grâce à nou­veau répan­due abon­dam­ment fasse refleu­rir le beau visage sur­na­tu­rel de l’Église !

Nous sommes inti­me­ment per­sua­dé que notre bonne Mère du ciel, si atten­tive à nos besoins, aux dan­gers qui nous menacent, se lais­se­ra tou­cher et que sa toute puis­sante inter­ces­sion obtien­dra de son divin Fils les grâces de pro­tec­tion, de cou­rage, de force, la conser­va­tion de la foi, l’ardeur d’une cha­ri­té que rien ne peux éteindre, jusqu’au triomphe com­plet de Notre Roi et Seigneur Jésus-​Christ, par le Cœur Immaculé de Marie.

Menzingen, le 7 octobre 1998, en la fête de Notre-​Dame du Rosaire

+ Bernard Fellay

Supérieur géné­ral

[1] Pie XII, Enc. Ingruentium malo­rum, 19 sep­tembre 1951, n. 307.
[2] Op. Cit. n° 306.
[3] Op. Cit. n° 304.

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FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.