Les francs-​maçons et l’Église conciliaire, par John Kenneth Weiskittel

Publié par The Athanasian, Vol. XIV, n° 4, 1er juin 1993. Éditeur : Abbé Francis E. Fenton, STL. Publication des Catholiques tra­di­tio­na­listes d’Amérique. Traduit du texte ori­gi­nal anglais.

Lorsqu’à l’au­tomne der­nier, le Mexique et le Vatican sont conve­nus d’é­ta­blir des rela­tions diplo­ma­tiques entre eux, la nou­velle a fait le tour du monde. Un tel inté­rêt n’a rien de sur­pre­nant, étant don­né l’his­toire des rela­tions ten­dues qui ont tou­jours exis­té entre les deux par­ties. Malgré son riche patri­moine catho­lique romain, le Mexique a subi une série de gou­ver­ne­ments anti­ca­tho­liques, maçon­niques et com­mu­ni­sants depuis la pro­mul­ga­tion en 1855, par le gou­ver­ne­ment de Benito Juarez, de lois très dures contre l’Église. Le pire est arri­vé dans les années vingt, avec la per­sé­cu­tion san­glante des catho­liques, qui avaient cou­ra­geu­se­ment ten­té de ren­ver­ser leurs oppres­seurs. Jusqu’à une époque récente, le droit civil inter­di­sait aux prêtres de por­ter l’ha­bit reli­gieux dans la rue. Aujourd’hui encore, le Mexique demeure un État maçon­nique et anticatholique.

C’est pour­quoi, pen­dant un siècle, aucun échange de diplo­mates n’a eu lieu entre le Saint-​Siège et le gou­ver­ne­ment mexi­cain. Il est inutile de pré­ci­ser que le Vatican de 1992 ne pré­sente qu’une res­sem­blance super­fi­cielle avec celui de 1892. Qui, connais­sant l’é­ten­due de l’a­po­sta­sie de l’Église « catho­lique » conci­liaire, pour­rait s’é­ton­ner de cette récente tra­hi­son ? Après tout, cela n’est que natu­rel compte tenu des cir­cons­tances. Les appa­rences masquent cepen­dant bien des choses.

Mary Ball Martinez, une conci­liaire qui penche pour la tra­di­tion (auteur de From Rome Urgently et de The Undermining of the Catholic Church ) et qui vit au Mexique, a publié, avant sa tour­née de confé­rence de l’an der­nier en Californie, un com­mu­ni­qué de presse dans lequel elle tenait des pro­pos fort révé­la­teurs sur la réac­tion des francs- maçons mexi­cains aux nou­velles rela­tions diplo­ma­tiques, au deuxième Concile du Vatican et à la poli­tique de l’Église conci­liaire en géné­ral. La source de ces révé­la­tions n’est autre que Proceso , l’une des prin­ci­pales revues poli­tiques du pays, qui a publié une inter­view de Carlos Vazquez Rangel, Grand Commandeur du Conseil suprême des Maçons du Mexique.

Dans cette inter­view, Vazquez tient des pro­pos sur­pre­nants. Il déclare à Proceso , indique Martinez, que « le nou­vel Ambassadeur auprès du Saint-​Siège, Enrique Olivares Santana, [est] un frère de loge, un « mili­tant d’hon­neur » du Rite écos­sais et « le plus émi­nent Maçon de ces der­nières années ». Ancien Gouverneur de l’État d’Aguascalientes et ancien ministre de l’Intérieur, Olivares pré­side le Comité d’ac­tion poli­tique du par­ti au pou­voir, le FRI » (Front révo­lu­tion­naire ins­ti­tu­tion­nel). Vazquez dit craindre que l’am­bas­sa­deur ne ren­contre à Rome des « réac­tion­naires », mais ajoute qu’il y trou­ve­ra aus­si des Maçons, car « dans les huit pâtés de mai­sons qui consti­tuent l’État du Vatican, il ne fonc­tionne pas moins de quatre loges du Rite écos­sais… Beaucoup des plus hauts digni­taires du Vatican sont des Maçons, et dans cer­tains pays où l’Église n’est pas auto­ri­sée à opé­rer, ce sont les loges qui conduisent clan­des­ti­ne­ment les affaires du Vatican. »

Il déclare en outre qu’au Concile, un évêque mexi­cain (secrè­te­ment franc-​maçon), Sergio Mendez Arcea, avait lan­cé un appel urgent pour la « révo­ca­tion de la Bulle In emi­nen­ti apos­to­la­tus du pape Clément V [ sic ; il s’a­gis­sait en fait du pape Clément XII , lequel a publié sa condam­na­tion de la franc-​maçonnerie en 1738], qui inter­di­sait aux catho­liques d’adhé­rer à la franc-​maçonnerie sous peine d’ex­com­mu­ni­ca­tion ». En outre, sou­ligne Vazquez, cet appel de Mendez a fina­le­ment abou­ti (puisque le Code de Droit canon « révi­sé » de 1983, dû à Jean-​Paul II, pré­tend sup­pri­mer cette peine d’excommunication).

Lors des recherches effec­tuées en vue de la pré­sente étude, nous avons consul­té quelques ouvrages sur le Concile afin d’é­ta­blir le rôle que Mendez y avait joué. Aucun ne men­tionne l’ap­par­te­nance de ce der­nier à une loge ni l’ap­pel qu’il aurait lan­cé comme indi­qué ci-​dessus. Mais dans son livre Le Rhin se jette dans le Tibre [1] (Augustine Publishing Co., 1978, en ver­sion anglaise), l’ab­bé Ralph Wiltgen fait état d’une inter­ven­tion tout à fait conforme à la pen­sée maçon­nique : au cours de la deuxième ses­sion, Mendez a argu­men­té contre l’emploi de l’ex­pres­sion « Mère de Dieu » comme titre pour la Bienheureuse Vierge Marie (voir p. 240).

Mais l’im­pen­sable est à venir dans les pro­pos de Vazquez :

« Le même jour, à Paris, le pro­fane (« non-​maçon » dans le jar­gon maçon­nique) Angelo Roncalli (Jean XXIII) et le pro­fane Giovanni Montini (Paul VI) ont été ini­tiés aux augustes mys­tères de la Fraternité. Ainsi s’avère-​t-​il qu’une grande par­tie de ce qui a été accom­pli au Concile repo­sait sur les prin­cipes maçonniques ».

Quatre loges du Rite écos­sais (la branche la plus ouver­te­ment anti­ca­tho­lique de la maçon­ne­rie) au Vatican ? Des digni­taires du Saint-​Siège appar­te­nant à la franc-​maçonnerie ? Celle-​ci et le Vatican col­la­bo­rant ? Un évêque franc- maçon à Vatican II ? Et deux « papa­bi­li » deve­nant francs-​maçons ? Que croire de tout cela ?

Afin de répondre à ces ques­tions, pour autant qu’on puisse y répondre (une éven­tuelle appar­te­nance de Jean XXIII et de Paul VI aux loges exi­ge­rait qu’on apporte d’elle des preuves abso­lues), il est pos­sible de suivre plu­sieurs pistes d’in­ves­ti­ga­tion. Les hypo­thèses sug­gé­rées ci-​dessus doivent être com­pa­tibles avec et cor­ro­bo­rées par :

1. ce que d’autres francs-​maçons disent de Vatican II et de ses suites ;
2. la preuve de l’exis­tence d’un plan maçon­nique d’in­fil­tra­tion de l’Église et celle de sa réus­site, le cas échéant ;
3. les réac­tions pro-​maçonniques des membres du Concile ;
4. la preuve que les « réformes » du Concile vont dans le sens des objec­tifs de la franc-maçonnerie.

Or, mal­heu­reu­se­ment, il est pos­sible de démon­trer tout cela.

Le Grand Commandeur Vazquez déclare triom­pha­le­ment qu”«une grande par­tie de ce qui a été accom­pli au Concile repo­sait sur les prin­cipes maçon­niques ». Or, la doc­trine de la franc-​maçonnerie est dia­mé­tra­le­ment oppo­sée à celle de l’Église : l’Église enseigne qu” Elle est la vraie Foi, alors qu’à en croire la franc-​maçonnerie, toutes les reli­gions sont éga­le­ment valables (indif­fé­ren­tisme, salut uni­ver­sel, uni­ver­sa­lisme) ; l’Église enseigne que tous les hommes sont tenus d’ac­cep­ter la seule vraie Foi, alors que la franc-​maçonnerie pro­meut la « liber­té de conscience » (liber­té reli­gieuse) ; l’Église enseigne qu” Elle seule , de par sa mis­sion divine, pos­sède l’au­to­ri­té néces­saire pour ensei­gner sur les ques­tions de morale, alors que la franc-​maçonnerie pré­sente la mora­li­té comme une affaire pri­vée… Et ain­si de suite.

Il y a très long­temps que la franc-​maçonnerie a décla­ré sa haine constante de l’Église et de tout ce qui est catho­lique. Et les papes l’ont maintes fois condam­née dans les termes les plus vifs : le pape Pie IX l’ap­pe­lait « la Synagogue de Satan », et le pape Pie XI a décla­ré « La franc-​maçonnerie est notre mor­tel enne­mi » (cité par Mgr E. Jouin dans Papauté et franc-​maçonnerie.

Les défen­seurs de Vatican II nous doivent plus d’ex­pli­ca­tions que n’en donne Vazquez. Les « réformes » ont sus­ci­té des réac­tions si posi­tives de la part des loges (et d’autres enne­mis du catho­li­cisme : Juifs, pro­tes­tants et com­mu­nistes), même avant la clô­ture du Concile, que Mgr Marcel Lefebvre était fon­dé à dire : « Les décla­ra­tions sont nom­breuses, les enne­mis tra­di­tion­nels de l’Église se réjouissent de voir des membres émi­nents de l’Église abon­der dans les idées qu’ils [ces enne­mis – JKW] ont tou­jours défen­dues » (V.S.M. Fraser, trad., Un évêque parle , Una Voce d’Écosse – sans date – p. 36 à 37). Et la franc-​maçonnerie n’é­tait pas en reste pour les louanges.

« Le sen­ti­ment d’u­ni­ver­sa­lisme qui règne à Rome en ce moment est très proche du but de notre exis­tence », a écrit Yves Marsaudon, diri­geant du Conseil suprême fran­çais des francs-​maçons de Rite écos­sais ; « ain­si, nous ne pou­vons igno­rer le deuxième concile du Vatican et ses consé­quences […] De tout notre cœur, nous sou­te­nons la « Révolution de Jean XXIII » […] » (cité par le Dr Rama Coomaraswamy, The Destruction of Christian Tradition , Perennial Books, 1981, p. 179). Non content d’exal­ter le triomphe de la liber­té reli­gieuse et de l’in­dif­fé­ren­tisme pro­fes­sés au Concile, il prend un plai­sir per­vers à ne pas lais­ser les catho­liques de Tradition perdre de vue l’une et l’autre en leur rap­pe­lant leur ori­gine : « Les catho­liques, sur­tout les conser­va­teurs, ne doivent pas oublier que toutes les voies mènent à Dieu [ sic – JKW]. Ils doivent accep­ter cette cou­ra­geuse idée de liber­té de conscience qui – et l’on peut vrai­ment par­ler ici de révo­lu­tion –, par­tie de nos loges maçon­niques, s’est magi­que­ment répan­due au-​dessus de la doc­trine de Saint-​Pierre » (cité par Mgr Lefebvre, p. 182). Les choses vont bien­tôt aller « mieux » : « Née dans nos loges maçon­niques, la liber­té d’ex­pres­sion s’est main­te­nant répan­due sur le dôme de Saint-​Pierre […] C’est la Révolution de Paul VI. Il est clair que Paul VI, non content de se bor­ner à suivre la poli­tique de son pré­dé­ces­seur (Jean XXIII), va en fait beau­coup plus loin […] (cité par Coomaraswamy, p. 179). Le plus inquié­tant, dans ces cita­tions, c’est leur source : le chef du Rite écos­sais de France, orga­nisme anti­ca­tho­lique le plus ouver­te­ment mili­tant qui se puisse concevoir.

Mais Vazquez et Marsaudon ne sont pas les seuls maçons à se féli­ci­ter de Vatican II. Jacques Mitterrand, ancien Grand Maître du Grand Orient de France, après avoir com­pa­ré Pie XII, pape « réac­tion­naire », à Jean XXIII et Paul VI, papes « pro­gres­sistes », tient des pro­pos ouver­te­ment élo­gieux sur la nou­velle men­ta­li­té postconciliaire :

« Quelque chose a chan­gé dans l’Église. Les réponses don­nées par le Pape [ sic ; Paul VI – JKW] à des ques­tions aus­si brû­lantes que le céli­bat du cler­gé et le contrôle des nais­sances sont vio­lem­ment contes­tées au sein de l’Église. Certains évêques, prêtres et laïcs ont mis en ques­tion la parole du Souverain Pontife lui-​même. Or, aux yeux d’un franc-​maçon, [celui] qui dis­cute le dogme est déjà un franc-​maçon sans tablier » (cité par Mgr Lefebvre, p. 182)

Ces résul­tats « posi­tifs » de Vatican II sont salués aus­si de l’autre côté de l’Atlantique par Henry Clausen, Souverain Grand Commandeur du Conseil Suprême des Francs-​maçons de Rite écos­sais, Juridiction du Sud, États-Unis :

« Beaucoup de nos amis qui sont membres de cette secte [la « secte » catho­lique ! – JKW] rejettent comme étran­gères à l’Amérique les ful­mi­na­tions médié­vales contre notre Fraternité, réa­lisent com­bien nous avons de choses en com­mun [sic] , acceptent les normes de la démo­cra­tie amé­ri­caine, recon­naissent que nous avons […], une forme nou­velle et défi­ni­tive de rela­tion entre la reli­gion et le gou­ver­ne­ment, et demandent aux diri­geants de leur église de ne plus s’en prendre à la maçon­ne­rie et aux céré­mo­nies maçon­niques. Ils espèrent voir se lever des vents de liber­té capables de créer en Amérique une atmo­sphère ami­cale et tolé­rante […] à laquelle les maçons aspirent en tant qu’­hommes de bonne volon­té [ sic – Bien que les francs-​maçons des degrés infé­rieurs puissent être de bonne volon­té, en va-​t-​il de même de ceux des degrés supé­rieurs, tels Clausen lui-​même , qui s’a­donne à des rituels consis­tant, notam­ment à poi­gnar­der un crâne cou­ron­né d’une tiare papale ? ]. (Clausen, Commentaries on Morals & Dogma , The Supreme Council, 1976, deuxième édi­tion, p. 190).

Ces cita­tions sont frap­pantes, car elles viennent de la franc-​maçonnerie fran­çaise et (ou) du Rite écos­sais, qui ont tou­jours haï l’Église. Il est hau­te­ment signi­fi­ca­tif que de tels auteurs n’é­prouvent qu’ad­mi­ra­tion pour le Concile et ses « réformes ».

Les apo­logues de Vatican II pour­ront tou­jours pré­tendre qu’on ne peut faire confiance à des francs-​maçons s’ex­pri­mant sur des ques­tions d’Église ; en atten­dant, qu’ils réflé­chissent aux remarques sui­vantes de ce Grand Maître fran­çais sur l’en­cy­clique anti­ma­çon­nique du pape Léon XIII Humanum Genus (1884) :

« Quel ter­rible texte contient cette ency­clique ! […] On reste confon­du devant son ton véhé­ment, les vio­lentes épi­thètes, l’au­dace des accu­sa­tions, la per­fi­die des appels à la répres­sion sécu­lière […]» (cité par Léon de Poncins, tra­duit du fran­çais par Timothy Tindal- Robertson, Freemasonry & the Vatican , Christian Book Club of America, 1968, p. 33).

Cet indi­vi­du, lui aus­si , ne voulait-​il pas vrai­ment dire ce qu’il a dit là ? Bien sûr que si ! Mais pour­quoi , dans ces condi­tions, dou­ter du reste ? Avec le Concile, le mal inhé­rent à la franc-​maçonnerie va sem­bler dis­pa­raître, mas­qué par les éloges. L” impos­sible a eu lieu. Tout catho­lique ne devrait-​il pas se deman­der com­ment une telle trans­for­ma­tion a pu se pro­duire, en quoi des enne­mis mor­tels semblent être deve­nus des amis intimes ?

Le complot contre l’Eglise

Certains défen­seurs moder­nistes de Vatican II pré­tendent que ses « réformes » consti­tuent une très néces­saire « mise à jour » de l’Église. D’autres, de même, sou­tiennent que « le chan­ge­ment était dans l’air » et que les Pères du Concile ont eu bien rai­son d”«ouvrir les fenêtres » comme ils l’ont fait. Les cri­tiques du Concile, en revanche, sont enclins à dénon­cer dans Vatican II l’exemple même de la manière dont des pré­lats peuvent se lais­ser cap­ter par les opi­nions libé­rales dominantes.

Un tel point de vue n’est pas dénué de per­ti­nence. Des opi­nions fausses ont en effet péné­tré le Concile, mais d’où venaient-​elles ? Vatican II n’ayant pas été conduit en milieu étanche, elles sont for­cé­ment venues de quelque part . Mais venaient-​elles d’ec­clé­sias­tiques ? La réponse trou­blante, mais par­fai­te­ment logique à cette ques­tion est : oui, de quelques-​uns des hommes qui avaient juré de défendre l’Église ! Bien que ni la tota­li­té, ni même la majo­ri­té des hommes d’Église qui ont pris part au concile Vatican II ne fussent des conspi­ra­teurs, ceux d’entre eux qui l’é­taient effec­ti­ve­ment ont réus­si à ins­til­ler l’er­reur dans ses décrets.

Les Pères de l’Église avaient été aver­tis . Avant l’ou­ver­ture du Concile, des exem­plaires d’un ouvrage de près de 700 pages inti­tu­lé Le com­plot contre l’Église avait été dis­tri­bué à chaque évêque. L’auteur, répon­dant au nom de plume Maurice Pinay , était un prêtre mexi­cain cou­ra­geux, l’ab­bé Joaquín Saenz y Arriaga, assis­té de plu­sieurs autres per­sonnes. Dans la pre­mière édi­tion (en ita­lien) figure un pas­sage qui, avec le recul, semble presque prophétique :

« La conspi­ra­tion la plus infâme est à l’œuvre contre l’Église. Les enne­mis de celle-​ci tra­vaillent à détruire les plus saintes tra­di­tions et, dans ce but, à intro­duire des réformes aus­si dan­ge­reuses que mal inten­tion­nées […] Ils mani­festent un zèle hypo­crite pour moder­ni­ser l’Église et l’a­dap­ter à la situa­tion actuelle ; mais en réa­li­té, ils ont pour inten­tion secrète d’en ouvrir les portes au com­mu­nisme, de hâter l’ef­fon­dre­ment du monde libre et de pré­pa­rer la future des­truc­tion de la Chrétienté. Tout cela doit être mis en œuvre lors du pro­chain concile du Vatican. Nous avons des preuves de la manière dont ces plans sont éta­blis en accord secret avec les forces diri­geantes du com­mu­nisme, de la franc-​maçonnerie mon­diale et du pou­voir secret qui les mène ». (St. Anthony Press, 1967, p. 15.)

Ces ter­ribles aver­tis­se­ments, qui ne retinrent pas l’at­ten­tion des pré­lats, se sont en grande par­tie réa­li­sés depuis. Les portes du com­mu­nisme se sont ouvertes ; le monde libre s’ef­fondre ; la des­truc­tion de la Chrétienté se pour­suit quo­ti­dien­ne­ment . Et l’Église conci­liaire a joué un rôle dans tous ces évé­ne­ments . L’abbé Arriaga était mani­fes­te­ment au cou­rant de quelque chose que la plu­part des catho­liques igno­raient. Comment l’a-​t-​il appris ? Étant don­né qu’il n’a jamais pré­ten­du avoir été favo­ri­sé d’une révé­la­tion, sa connais­sance des faits en ques­tion devait pro­ve­nir d’une étude appro­fon­die de la ques­tion. Nous pour­rons faire le même tra­vail ici, quoique à une échelle plus modeste.

Ce qui pousse la franc-​maçonnerie à agir, on le trouve sur une ins­crip­tion visible au Suprême Conseil du Grand Orient de France : « La lutte qui a lieu entre le Catholicisme et la Franc-​maçonnerie est une lutte à mort, inces­sante et sans mer­ci » (cité par Mgr Jouin, p. 3). En 1895, les loges affirment avec audace : « Nous, les Francs-​maçons, devons accom­plir la démo­li­tion défi­ni­tive du Catholicisme » (cité par Gustave Combes et l’ab­bé Augustin Stock, O.S.B. (tra­duc­tion), Revival of Paganism , B. Herder, 1950, p. 223 et 224). De son côté, le Congrès inter­na­tio­nal maçon­nique orga­ni­sé en 1904 à Bruxelles déclare : « La lutte contre la papau­té est une néces­si­té sociale et consti­tue le devoir constant de la maçon­ne­rie » (cité par Mgr Jouin, p. 4).

La pre­mière décla­ra­tion de guerre publique a été le fait du Vatican, avec l’en­cy­clique In Eminenti publiée en 1738 par Clément XII (en réac­tion à la guerre non décla­rée dans laquelle la franc-​maçonnerie s’é­tait déjà lan­cée contre le Christ). La condam­na­tion du pape Clément et toutes les autres prises de posi­tion de Rome s’ap­pliquent aux loges du monde entier, car ces der­nières consti­tuent un corps unique et sont donc éga­le­ment anathématisées .

Le pape Pie IX a écrit dans Etsi Multa (1873) : « Ce n’est pas seule­ment le corps maçon­nique de l’Europe qui est visé, ce sont aus­si les asso­cia­tions maçon­niques d’Amérique et de toute autre par­tie du monde où il peut y en avoir » (cité par l’ab­bé Edward Cahill, Freemasonry & the Anti-​Christian Movement , M.H. Gill & Son, 1949, troi­sième édi­tion, p. 126). Le 20 avril 1949 (sym­bo­li­que­ment, soixante-​cinq ans jour pour jour après la publi­ca­tion d’Humanum Genus par Léon XIII), la Sacrée Congrégation du Saint-​Office du pape Pie XII a répon­du en ces termes à une ques­tion des évêques ita­liens : « Comme rien ne s’est pro­duit qui motive le moindre chan­ge­ment dans les déci­sions du Saint-​Siège sur cette ques­tion, les dis­po­si­tions du Droit Canon res­tent plei­ne­ment en vigueur pour toute sorte de franc-​maçonnerie, quelle qu’elle soit » (cité par Paul Fisher, Their God is the Devil , American Research Foundation, 1991, p. 54) [c’est nous qui sou­li­gnons]. Le Canon 2335 du Code de 1917 menace d’ex­com­mu­ni­ca­tion majeure (dont l’ab­so­lu­tion est donc réser­vée au Saint-​Siège) les catho­liques qui adhèrent à « la secte des Francs-​maçons » ou à des groupes simi­laires ; aucune dis­tinc­tion n’est faite selon qu’une loge a son siège à Rome, Bonn, Paris, Londres, New York ou Tombouctou. Il s’a­git là d’une inter­dic­tion uni­ver­selle . Or, rien n’a chan­gé depuis, sauf la per­cep­tion des « catho­liques » cré­dules. À qui­conque ne serait pas d’ac­cord avec ce qui pré­cède, nous lan­çons un défi : pro­dui­sez un seul docu­ment du Vatican pré­con­ci­liaire qui exclue nom­mé­ment la franc-​maçonnerie anglo-​américaine de la cen­sure, et nous le publie­rons dans ces colonnes. Mail il s’a­git là d’un pari sûr, car aucun docu­ment de ce genre n’existe !

La guerre dans la guerre

De même que l’Église catho­lique est l’or­ga­nisme uni­ver­sel­le­ment char­gé d’ap­por­ter l’Évangile à l’hu­ma­ni­té, la franc- maçon­ne­rie est l’or­ga­nisme s’ef­for­çant de pri­ver du Christ les âmes et les socié­tés. Le dan­ger est si grand que dans une lettre de 1892 au peuple ita­lien, le pape Léon XIII aver­tis­sait les catho­liques qu’ils devaient évi­ter la franc-​maçonnerie, sous peine de « res­ter sépa­rés de la com­mu­nion chré­tienne et de perdre leur âme main­te­nant et pour l’é­ter­ni­té » (cité par Fisher, p. 58) ; c’est lui qui sou­ligne). Dix ans après, il décla­rait : « La franc-​maçonnerie est la per­son­ni­fi­ca­tion per­ma­nente de la Révolution [c’est-​à-​dire la Révolution fran­çaise – JKW], dont l’u­nique rai­son d’être est de faire la guerre à Dieu et à Son Église » (cité par de Poncins, p. 45).

Si la franc-​maçonnerie a été un com­bat­tant aus­si for­mi­dable, cela tient à deux rai­sons. D’abord, loin d’être une simple héré­sie, elle est un ensemble com­plexe d’hé­ré­sies qui a réus­si à ras­sem­bler les forces anti­ca­tho­liques du monde entier pour les ame­ner à lut­ter ensemble contre le Christ et Son Église. (Malheureusement, beau­coup de diri­geants catho­liques laïcs – ain­si que pas mal d’é­vêques et de prêtres – ont contri­bué à la recherche de cet objec­tif en igno­rant les plai­doyers répé­tés des papes pour que la peste maçon­nique soit éra­di­quée de leurs terre). Ensuite, fidèle en cela à son secret, la franc-​maçonnerie ne s’est pas conten­tée d’at­ta­quer ouver­te­ment et de manière san­glante l’Église et l’ordre social chré­tien, mais avec une ruse infer­nale, elle a conçu le des­sein de péné­trer l’Église et de la détruire de l’in­té­rieur en lui fai­sant pour­suivre sans le savoir (sur le biais d’in­fil­trés ecclé­sias­tiques ou de leurs dupes) la réa­li­sa­tion de son plan antichrétien.

Il existe bien des preuves de ce com­plot, qui remonte à avant la révo­lu­tion de 1789 en France. La place nous manque pour le démon­trer inté­gra­le­ment, mais les lec­teurs inté­res­sés trou­ve­ront près de cin­quante pages de preuves dans « The Bugnini File » (le dos­sier Bugnini), publié dans l’é­di­tion de mars-​avril 1993 de Catholic Restauration. Aux alen­tours de 1908, la franc-​maçonnerie décla­rait : « Le but n’est plus de détruire l’Église, mais plu­tôt de se ser­vir d’elle en l’in­fil­trant » (cité par Michael Davies, Pope John’s Council , Vol. 2 : Liturgical Revolution , Angelus Press, 1977, p. 165). Un siècle aupa­ra­vant (en 1806), un pieux prêtre « papiste », l’ab­bé Augustin Barruel, qui avait émi­gré de France pen­dant la révo­lu­tion, com­mu­ni­qua au pape Pie VII les conclu­sions alar­mantes tirées de ses contacts avec un ancien franc-​maçon ita­lien. Sa Sainteté, consta­tant la néces­si­té d’en aver­tir les fidèles, ordon­na la publi­ca­tion d’une ana­lyse, dans laquelle on peut lire ceci : « Sur notre propre sol ita­lien, ils [les francs-​maçons – JKW] ont déjà recru­té comme membres plus de 800 ecclé­sias­tiques , tant sécu­liers que régu­liers, par­mi les­quels de nom­breux prêtres, pro­fes­seurs, pré­lats, ain­si que cer­tains évêques et car­di­naux…» (cité par Arriaga, p. 394)

Cette infil­tra­tion mas­sive s’est pro­duite un siècle avant que le pape saint Pie X ne se plai­gnît, dans son ency­clique Pascendi , du nombre « de prêtres, qui [sont] impré­gnés […] jus­qu’aux moelles d’un venin d’er­reur pui­sé chez les adver­saires de la foi catho­lique », et plus d’un siècle et demi avant la révo­lu­tion de Vatican II ! En 1819, la Haute Vente (Alta Vendita) – organe direc­teur des loges maçon­niques d’Europe – adop­ta un rap­port interne, l” Instruction per­ma­nente , qui sou­li­gnait les moyens à employer dans la pour­suite de ses des­seins sub­ver­sifs. L’existence du rap­port en ques­tion ne fut dévoi­lée qu’en 1846, une fois ce der­nier publié avec l’au­to­ri­sa­tion du pape Pie IX après per­qui­si­tion des bureaux de la secte par le gou­ver­ne­ment pontifical.

On n’y trouve rien de moins qu’un plan de bataille en vue de la vic­toire de la Franc-​maçonnerie sur l’Église : « la des­truc­tion défi­ni­tive du Catholicisme, et même de l’i­dée Chrétienne » (cité par Cahill, p. 101). Les méthodes pré­vues pour y par­ve­nir sont les sui­vantes : ins­tal­la­tion dans l’Église d’une « tête de pont » com­po­sée d’a­gents infil­trés ; cam­pagnes de dif­fa­ma­tion menées par ceux-​ci contre tout fidèle – en par­ti­cu­lier s’il est membre du cler­gé – connu pour s’op­po­ser à la Franc-​maçonnerie ; cor­rup­tion des prêtres par les élé­ments infil­trés, en vue de la cor­rup­tion des laïcs ; enga­ge­ment de res­ter en place aus­si long­temps que pos­sible « afin de por­ter l’Église dans la tombe » (voir Cahill, p. 101 et 103, et Monsignor George F. Dillon, D.D., Grand Orient Masonry Unmasked , Briton éd., 1965, p. 89 et 90, 93 et 94). Selon la Haute Vente, la clé du suc­cès tenait à ce que ses agents soient capables de feindre la pié­té et l’or­tho­doxie en vue de gagner la confiance, voire la haute estime des catho­liques ! Cette admi­ra­tion dépla­cée, enseignait-​elle, serait le com­men­ce­ment de la fin de l’Église catho­lique, car :

« Cette répu­ta­tion don­ne­ra accès à nos doc­trines au sein du jeune cler­gé, comme au fond des cou­vents. Dans quelques années, ce jeune cler­gé aura, par la force des choses, enva­hi toutes les fonc­tions : il gou­ver­ne­ra, il admi­nis­tre­ra, il juge­ra, il for­me­ra le conseil du sou­ve­rain, il sera appe­lé à choi­sir le pon­tife qui doit régner, et ce Pontife, comme la plu­part de ses contem­po­rains, sera plus ou moins imbu des prin­cipes ita­liens et huma­ni­taires que nous allons com­men­cer à mettre en cir­cu­la­tion […] Que le cler­gé marche sous votre éten­dard en croyant tou­jours mar­cher sous la ban­nière des Clefs apos­to­liques. Tendez vos filets comme Simon-​Barjona ; tendez-​les au fond des sacris­ties, des sémi­naires et des cou­vents plu­tôt qu’au fond de la mer ; et, si vous ne pré­ci­pi­tez rien, nous vous pro­met­tons une pêche plus mira­cu­leuse que la sienne […] Vous aurez prê­ché une révo­lu­tion en tiare et en chape, mar­chant avec la croix et la ban­nière, une révo­lu­tion qui n’au­ra besoin que d’être un tout petit peu aiguillon­née pour mettre le feu aux quatre coins du monde ». (Cité par Dillon, p. 94.)

Cette infil­tra­tion était cen­sée durer cin­quante ans, cent ans ou davan­tage, aus­si long­temps qu’il fau­drait pour créer une nou­velle « Église catho­lique », une église à l’i­gnoble image de la franc-maçonnerie.

Les « amis » catholiques des loges

Dans l’ou­vrage cité supra , Léon de Poncins écrit en sous-​titre Une lutte pour la recon­nais­sance , afin de sou­li­gner qu”«il existe à pré­sent dans les milieux catho­liques une cam­pagne constante, sub­tile et déter­mi­née en faveur de la franc- maçon­ne­rie » (p. 7). Et il ajoute ceci :

« Son objet avoué est d’ob­te­nir du Vatican, et du Concile pen­dant qu’il est en ses­sion, la révi­sion ou, mieux encore, l’an­nu­la­tion des diverses condam­na­tions pro­non­cées par les papes contre la franc-​maçonnerie depuis 1738 […] ( Ibid. ) »

Cette cam­pagne a com­men­cé au plus tard dès les années 1920, lors­qu’un « jésuite alle­mand, le père Gruber, expert des ques­tions maçon­niques, a pris contact avec trois francs-​maçons haut pla­cés […] ( Ibid. ) Bien que son pré­nom ne soit pas men­tion­né, il s’a­git sans doute du père Hermann Gruber, S.J., éru­dit autri­chien , qui a écrit des articles sur des sujets maçon­niques pour L’Encyclopédie Catholique . Ces études, quoique exactes en géné­ral, contiennent des obser­va­tions hau­te­ment sus­pectes. Son article sur les Illuminati rejette (« au vu de nos connais­sances actuelles ») des ouvrages liant ce mou­ve­ment à la Révolution fran­çaise (et écrits par des hommes tels que l’ab­bé Barruel ou encore John Robinson, auteur de Proofs of a Conspiracy ), dont le conte­nu lui semble « sou­vent erro­né » et « extrê­me­ment impro­bable » (Vol. XII, édi­tion de 1913, p. 662 et 663). Mais l’ab­bé Cahill, cher­cheur minu­tieux, n’hé­site pas, lui, à dis­cer­ner l’exis­tence d’un lien entre les Illuminati et la Révolution fran­çaise. Quant aux francs-​maçons fran­çais, ils ne se lassent jamais de pro­cla­mer la par­ti­ci­pa­tion des loges au sou­lè­ve­ment de 1789. Dans ces condi­tions, com­ment quel­qu’un contri­buant à la rédac­tion d’un ouvrage de réfé­rence catho­lique peut-​il for­mu­ler une telle affir­ma­tion ? Nous n’a­vons pas de réponse à cette ques­tion, mais on constate depuis lors qu’un effort crois­sant est accom­pli pour encou­ra­ger l’Église à favo­ri­ser la maçonnerie.

Les « catho­liques » pro-​maçonniques réagirent pru­dem­ment dans leur manière d’ex­pri­mer les choses, mais n’en adres­sèrent pas moins un mes­sage à leurs alliés francs-​maçons. L’une des vic­toires les plus glo­ri­fiées des socié­tés secrètes a été la révo­lu­tion de 1789 en France, au cours de laquelle le cri de ral­lie­ment des insur­gés était « Liberté, Égalité, Fraternité ». Cette révo­lu­tion, diri­gée tout autant contre l’Église que contre la Royauté, fut condam­née en tant que telle par Rome. Un défen­seur « catho­lique » de Vatican II énu­mère ain­si quelques-​unes de ses réussites :

« Cette libé­ra­tion de la pen­sée catho­lique […] per­met à l’Église de reprendre la ban­nière de la Révolution fran­çaise, qui a fait le tour du monde laïc avant de venir repo­ser dans le catho­li­cisme, d’où elle était issue [ sic – JKW]. Liberté, éga­li­té, fra­ter­ni­té : ce glo­rieux slo­gan aura été la quin­tes­sence de Vatican II […]» (Henri Fesquet, Bernard Murchland, trad., The Drama of Vatican II , Random House, 1967, p. 815)

Le Concile a éta­bli un lien entre les ex-​catholiques et les francs-​maçons. Fisher (cité ci-​dessus), auteur conci­liaire et anti­ma­çon­nique pen­chant vers la tra­di­tion, note que les Chevaliers de Colomb et les francs-​maçons entre­tiennent à pré­sent des « rela­tions de tra­vail » et ajoute :

« Dès 1968, le car­di­nal Richard Cushing, de Boston, le car­di­nal John Cody, de Chicago, l’é­vêque Leo A. Pursley, de Fort Wayne-​South Bend, et l’évêque Robert Joyce, de Burlington (VT) pre­naient la parole devant des assem­blées maçon­niques, tan­dis que le maga­zine America enga­geait une vaste cam­pagne de presse pour obte­nir la révi­sion de la loi de l’Église inter­di­sant l’adhé­sion de catho­liques à la Fraternité secrète inter­na­tio­nale ». (p. 55)

En 1973, l’ab­bé John A. O’Brien, de Notre-​Dame, inter­ve­nant lors du déjeu­ner offert par le Lawyers Shrine Club de Chicago (loge maçon­nique d’a­vo­cats de cette ville), s’est expri­mé en ces termes :

« En tant que catho­lique romain, maître de recherches en théo­lo­gie à l’Université de Notre-​Dame et prêtre depuis plus d’un demi-​siècle, je tiens à rendre aux francs-​maçons l’hom­mage qui leur est dû depuis trop long­temps pour l’é­mi­nente contri­bu­tion qu’ils ont appor­tée à la vie civique, com­mer­ciale, scien­ti­fique, cultu­relle et spi­ri­tuelle de notre nation […]. Si une contri­bu­tion aus­si riche et aus­si variée devait dis­pa­raître, notre nation s’en trou­ve­rait très appau­vrie. [Beaucoup de] mes amis les plus proches et les plus chers sont des francs-​maçons, et leur ami­tié est sans prix à mes yeux » (cité par Henry Clausen, Clausen’s Commentaries on Morals & Dogma , Supreme Council, 33 ème Degré, édi­tion de 1976, p. 55).

Ces pro­pos scan­da­leux et sacri­lèges montrent com­bien le ferment pro-​maçonnique était déjà pré­sent – quoique dis­si­mu­lé – au sein de l’Église des dizaines d’an­nées avant Vatican II, et com­bien le Concile a don­né le feu vert à cette forme d’a­mi­tié ouverte avec la franc-​maçonnerie. Deux faits sont par­ti­cu­liè­re­ment inquié­tants : celui, pour un prêtre, de par­ler d’une contri­bu­tion maçon­nique de la Franc-​maçonnerie à la vie spi­ri­tuelle de notre pays et celui de l’en­tendre dire : « beau­coup de mes amis les plus proches et les plus chers sont des francs-​maçons » (sans oublier qu’il ose pré­sen­ter cette ami­tié comme étant « sans prix », ce qui déforme de manière impie les paroles du Christ au sujet du Royaume des Cieux ! – cf. saint Matthieu XIII , 44–46). Et Henry Clausen, qui cite de telles paroles, n’é­tait autre que le chef du Rite écos­sais (Juridiction du Sud), la plus ouver­te­ment et féro­ce­ment anti-​catholique de toutes les obé­diences maçon­niques d’Amérique.

Clausen écrit : « une ouver­ture […] a été faite jus­qu’au sein du Vatican » (p. 191). Il cite l’al­lo­cu­tion pro­non­cée par le « car­di­nal » John Willebrands (s’ex­pri­mant au nom du Secrétariat conci­liaire pour l’Unité des Chrétiens) lors de la célé­bra­tion du cin­quan­tième anni­ver­saire du groupe maçon­nique de gar­çons DeMolay, qui se tenait au Vatican même . Cette allo­cu­tion a ceci de sin­gu­lier que son auteur y tait la véri­té catho­lique, y loue un orga­nisme maçon­nique et y défend l’in­dif­fé­ren­tisme. Après avoir sou­hai­té la bien­ve­nue aux par­ti­ci­pants, il cite les Écritures (Deutéronome VI , 5, et saint Marc XII , 29) : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est seul Seigneur. Tu aime­ras donc le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et de toute ta force », et « tu aime­ras ton pro­chain comme toi-​même ». Il féli­cite DeMolay pour sa « noble tâche », qui repose sur ces com­man­de­ments, et exprime « gra­ti­tude et joie » pour [le fait que cet organe] ras­semble des catho­liques et des pro­tes­tants ain­si que des Juifs en une vaste coopé­ra­tion tour­née vers le bien de l’hu­ma­ni­té » (cité p. 191 et 193) [c’est nous qui sou­li­gnons]. C’était sans doute la pre­mière fois qu’un porte-​parole du Saint-​Siège louait des francs-​maçons. Or, rien n’in­dique que Paul VI ait jamais condam­né cette allo­cu­tion men­son­gère. Tout ignoble qu’eût été le dis­cours d’O’Brien, il n’é­tait pas le fait de quel­qu’un qui se trou­vait au ser­vice direct du Vatican. Il est révé­la­teur que la pre­mière cita­tion biblique de Willebrands – « Le Seigneur est Un » – soit accep­table par les Juifs, les musul­mans et les francs-​maçons incroyants, qui ont en com­mun de nier que le Christ est le Fils de Dieu. En outre, Willebrands men­tionne en termes favo­rables l’ap­par­te­nance de catho­liques à un groupe tout à fait capable de détruire leur foi .

Appel au réveil des catholiques

Lorsqu’en 1975 parurent des docu­ments l’ac­cu­sant d’être franc-​maçon, l”«archevêque » Annibale Bugnini, maître d’œuvre du Novus Ordo Missae (c’est-​à-​dire la nou­velle « messe »), vit sa car­rière tom­ber en chute libre. Paul VI le rele­va de ses fonc­tions de chef de la Congrégation conci­liaire pour le Culte Divin et l’ex­pé­dia en Iran ( non pas – selon la doc­trine conci­liaire – parce que les musul­mans ont besoin d’être conver­tis , mais parce que – prétend-​elle – ils plaisent déjà à « Allah » et sont même sau­vés par leur foi islamique).

Plus de cent pré­lats devaient ensuite être accu­sés d’a­voir des attaches avec la franc-​maçonnerie, ce qui est cho­quant, alar­mant, ahu­ris­sant… mais plau­sible compte tenu des preuves d’in­fil­tra­tion de l’Église qu’a­vaient déjà four­nies l’ab­bé Barruel et d’autres his­to­riens. Les effets de Vatican II et de la nou­velle « messe » offrent du reste des preuves cir­cons­tan­cielles convain­cantes qu’un coup de force a bel et bien eu lieu.

Voici d’ailleurs trois de ces effets, extraits d’une longue liste :

1 – Profanation galo­pante des églises ancien­ne­ment catho­liques au nom de la « réforme » (mise au rebut des autels, des calices, des sta­tues et autres objets du culte catho­lique, aux­quels la nou­velle reli­gion ne recon­naît pra­ti­que­ment aucune valeur). Aux yeux des conspi­ra­teurs, ce van­da­lisme offi­ciel abou­tit à deux résul­tats posi­tifs : d’a­bord, la satis­fac­tion maligne que leur pro­cure le fait d’as­sis­ter ain­si à la des­truc­tion d’ob­jets saints ou sacrés, non par des lou­bards anti­ca­tho­liques, mais par ceux qui cherchent à « mettre à jour » leurs églises dans la ligne de Vatican II ; ensuite, et ceci est encore plus cru­cial, une pro­fonde dimi­nu­tion du res­pect pour les tra­di­tions de l’Église, qui per­met à la secte maçon­nique de trans­for­mer encore plus faci­le­ment les catho­liques en conciliaires.

2 – Rejet de l’Évangile au pro­fit d’un « évan­gile social ». Une étape déci­sive aura été la sup­pres­sion de la Messe tri­den­tine, per­çue comme l’obs­tacle s’op­po­sant le plus à ce que soient révo­lu­tion­nés les esprits des fidèles, d’où l’im­po­si­tion du Novus Ordo Missae . Au dix-​neuvième siècle, l’ab­bé Roca, excom­mu­nié pour son appar­te­nance à des socié­tés occultes et secrètes, avait déjà pré­sen­té un plan dans ce sens. Il écri­vait : « Je pense que le culte divin, tel qu’il est réglé par la litur­gie, les céré­mo­nies, les rites et les juge­ments de l’Église catho­lique, subi­ra une trans­for­ma­tion bien­tôt, lors d’un concile œcu­mé­nique. Ce der­nier ramè­ne­ra l’Église à la véné­rable sim­pli­ci­té de l’âge d’or apos­to­lique et l’har­mo­ni­se­ra avec le nou­veau stade de la conscience et de la civi­li­sa­tion modernes » (cité par Arriaga, p. 194). Or, les décla­ra­tions du Concile et de Bugnini pré­sentent de nettes simi­li­tudes avec ce point de vue. Dans sa consti­tu­tion sur la litur­gie, Sacrosanctum Concilium , Vatican II pré­co­nise « une res­tau­ra­tion géné­rale de la litur­gie » (attaque voi­lée contre la Messe de saint Pie V), parce que cer­tains aspects de la Messe « non seule­ment peuvent, mais doivent être chan­gés avec le temps » et que les rites « réfor­més » doivent être empreints de « noble sim­pli­ci­té » (Walter M. Abbot, S.J., édi­teur géné­ral, The Documents of Vatican II , American Press, 1966, p. 146 et 149). De son côté, Bugnini, dans ses mémoires, défend les chan­ge­ments dans ces termes : « La redé­cou­verte de l’es­prit […] et l’ef­fort accom­pli pour faire par­ler aux rites le lan­gage de notre temps afin que les hommes et les femmes puissent com­prendre le lan­gage des rites, qui est à la fois mys­té­rieux et sacré » (tra­duit en anglais par Matthew J. O’connell, The Reform of the Liturgy : 1948–1975 , Liturgical Press, 1990, p. 45).

L”«évangile social », prô­né pour la pre­mière fois il y a deux cents ans par Adam Weishaupt, chef des Illuminati, est main­te­nant popu­laire dans la secte conci­liaire comme moyen de pro­mou­voir le socia­lisme de type « État-​providence » et de jeter des ponts vers le fémi­nisme, l’oc­cul­tisme, le mili­tan­tisme en faveur des « droits des gays », le Nouvel Ordre Mondial maçon­nique, etc. Sa forme la plus extrême, qui est la « théo­lo­gie de la libé­ra­tion », enseigne l’er­reur du « mar­xisme catho­lique ». La Rome moder­niste pro­meut ouver­te­ment une grande par­tie de ce pro­gramme et en tolère le reste. Tout cela appa­raît cepen­dant fort logique si l’on se rap­pelle que cette pseudo-​Église catho­lique repose sur les ensei­gne­ments maçon­niques de la liber­té reli­gieuse, de l’hu­ma­nisme (l’homme étant cen­sé rem­pla­cer Dieu comme centre de l’exis­tence) et l’in­dif­fé­ren­tisme (tous les sys­tèmes reli­gieux, moraux, sociaux et poli­tiques étant tenus pour se valoir plus ou moins).

3 – Mépris des ensei­gne­ments catho­liques authen­tiques sur des ques­tions telles que le divorce, le contrôle des nais­sances, l’a­vor­te­ment et l’ho­mo­sexua­li­té par une grande par­tie de l’Église conci­liaire, et pro­li­fé­ra­tion des prêtres (vrais ou faux) mora­le­ment dépra­vés, adul­tères, homo­sexuels, voire vio­leurs d’en­fants . Une « planche » essen­tielle de l” Instruction Permanente de l’Alta Venta pré­sente le plus grand inté­rêt à cet égard : « Rendez les cœurs des hommes vicieux et cor­rom­pus, et vous n’au­rez plus de catho­liques. Éloignez les prêtres des autels et de la pra­tique de la ver­tu. Efforcez-​vous d’oc­cu­per leur temps avec d’autres choses […] c’est la cor­rup­tion des masses que nous avons entre­prise – la cor­rup­tion des gens par le cler­gé, et du cler­gé par nous – la cor­rup­tion qui devrait nous per­mettre un jour de por­ter l’Église dans la tombe » (cité par Cahill, p. 103).

Conclusion

Le pré­sent article n’a fait qu’ef­fleu­rer la sur­face d’un pro­blème depuis long­temps négli­gé. Par la sub­ver­sion inter­na­tio­nale, les enne­mis de l’Église ont enva­hi celle-​ci, occu­pant abu­si­ve­ment ses sièges épis­co­paux (y com­pris le Saint-​Siège) et pro­vo­quant la muta­tion d’une immense majo­ri­té de ses anciens membres en « catho­liques » conciliaires.

Les conspi­ra­teurs sont très peu nom­breux, mais les ravages qu’ils ont pro­vo­qués dans la Chrétienté, et qui sont consi­dé­rables, nuisent à la vie spi­ri­tuelle de mil­lions de per­sonnes, voire à l’exis­tence même des nations. C’est cette situa­tion qui doit prendre fin… et qui pren­dra fin, car la vic­toire ultime de l’Église catho­lique romaine est un fait garan­ti par le Christ dans les Écritures (« voi­ci que je suis avec vous tous les jours jus­qu’à la fin du monde » – saint Matthieu, XXVIII , 20) comme par Sa très Sainte Mère à Fatima (« à la fin, mon Cœur Immaculé triomphera »).

Mais humai­ne­ment par­lant, cela ne se pro­dui­ra que lorsque l’Église mili­tante – désor­mais réduite à un petit reste de catho­liques tra­di­tio­na­listes – aura fait entendre sa voix. Dieu nous demande de nous lever pour faire clai­re­ment et crâ­ne­ment oppo­si­tion à cette inva­sion insi­dieuse de Son Église. La nou­velle cap­ti­vi­té de Babylone dure depuis beau­coup trop long­temps ; main­te­nant, avec la grâce de Dieu, l’heure est venue de bri­ser nos fers .

Notes de bas de page
  1. Le Rhin se jette dans le Tibre,de R‑M. Wiltgen, DMM, à com­man­der chez Clovis-​Fideliter : chro­nique com­plète du IIe concile du Vatican, ce livre doit son titre à Juvénal. Il y a deux mille ans le grand sati­riste déplo­rait que la culture syrienne imprègne celle de Rome – que l’Oronte se jette dans le Tibre. Au Concile, les car­di­naux, les évêques et les théo­lo­giens des pays que tra­verse le Rhin ont eu une influence domi­nante : les eaux du Rhin ont cou­lé dans le Tibre.[]