Troisième chef d’accusation contre la FSSPX : la négation de l’indéfectibilité de l’Église. Suite des réponses au dossier de La Nef.
L’argument du refus de la réforme liturgique
Matthieu Lavagna réitère ici les mêmes arguments déjà développés à l’encontre du Courrier de Rome. La sophistique de son propos repose sur la confusion entre : l’indéfectibilité de l’Eglise et celle des actes de l’autorité. Le maître mot « Eglise » lui sert de paravent pour éviter les distinctions qui eussent dissipé le bien-fondé de ses attaques.
L’argumentation est simple :
Majeure (MJ) – Quiconque affirme que l’Eglise promulgue un rite au moins dangereux pour la foi des catholiques nie l’indéfectibilité de l’Eglise
Mineure (MN)– Or la FSSPX affirme que l’Eglise a promulgué un rite au moins dangereux pour la foi des catholiques
Conclusion (CCL)– Donc la FSSPX nie l’indéfectibilité de l’Eglise
« Une Église indéfectible ne peut tout simplement pas promulguer des rites qui mènent ses fidèles vers l’enfer (ce qui n’empêche pas que l’on puisse critiquer certains aspects du Novus Ordo Missae) » (p. 20).
La FSSPX nierait donc l’indéfectibilité de l’Eglise en dénonçant la réforme liturgique de Paul VI comme dangereuse pour la foi des catholiques.
La confusion qu’il commet se situe au niveau du moyen terme de son raisonnement : « L’Eglise promulgue ». L’Eglise ne promulgue rien du tout. L’Eglise est une société, au sein de laquelle les hommes revêtus de l’autorité usent du pouvoir à eux confié par Dieu pour indiquer les règles à suivre dans la profession de foi et de culte. L’indéfectibilité de l’Eglise se situe dans l’indéfectibilité de cette double profession, non dans tous les actes de l’autorité qui sont censés la régler. L’Eglise est indéfectible lorsqu’elle ne cesse pas de professer la vraie foi et de célébrer le vrai culte, ordinairement grâce à l’exercice de l’autorité et extraordinairement en dépit d’un exercice abusif de l’autorité.
Quant à la MJ : nier l’indéfectibilité de l’Eglise, ce n’est pas nier que les actes présents de l’autorité ne règlent plus comme il faut la profession de foi et de culte ; c’est affirmer que cette profession de foi et de culte disparaît et c’est nier qu’elle ne cesse pas.
Quant à la MN : la FSSPX ne nie pas que la profession de foi et de culte ne cesse pas ; elle affirme au contraire qu’elle ne disparaît puisqu’elle-même – et d’autres qu’elle-même, grâce à elle – contribue à la maintenir indéfectible par ses propres actes ; la FSSPX constate seulement que les actes présents de l’autorité ne règlent plus comme il faut la profession de foi et de culte et mettent en danger la foi des catholiques.
Monsieur Lavagna raisonne comme si l’Eglise s’identifiait à la Papauté ou, pour reprendre l’expression du Père Calmel, comme si l’Eglise était le corps mystique du Pape.
Lorsque la FSSPX observe que, en raison de la réforme de Paul VI, les sacrements administrés selon les nouveaux rites peuvent s’avérer ou sont même douteusement valides, Matthieu Lavagna se récrie :
« Comment la FSSPX concilie-t-elle cela avec l’indéfectibilité de l’Église ? Comment une Église indéfectible pourrait-elle laisser disparaître presque tous ses sacrements de manière quasi généralisée ? » (p. 21).
La FSSPX ne dit pas que les sacrements disparaissent tous de manière généralisée dans l’Eglise, ce qui serait affirmer un fait. La FSSPX dit que les sacrements administrés selon les nouveaux rites peuvent s’avérer ou sont même douteusement valides, ce qui est affirmer une possibilité, et non un fait : possibilité de l’invalidité des sacrements. Et il s’agit de la possibilité de l’invalidité non de tous les sacrements mais de quelques-uns : possibilité de l’invalidité des sacrements célébrés selon le nouveau rite. Mais cette invalidité possible de quelques sacrements est compatible avec la validité certaine de quelques autres sacrements, ceux célébrés selon l’ancien rite. Or nier l’indéfectibilité de l’Eglise serait nier la validité de tous les sacrements, et pas seulement celle de quelques sacrements. Les propos de la FSSPX, même s’ils sont graves, n’équivalent pas à nier l’indéfectibilité de l’Eglise. Et ils ne sont pas prononcés à la légère, comme en témoignent de nombreuses et sérieuses études, au nombre desquelles figure le Bref Examen Critique du Novus Ordo Missae, jusqu’à ce jour jamais réfuté.
L’argument des notes de l’Eglise
Matthieu Lavagna s’en prend aussi à la conférence de septembre 1988 où Mgr Lefebvre argumente à partir des notes de l’Eglise, pour faire la distinction entre Eglise visible et Eglise officielle :
« Rappelons aussi que la FSSPX affirme être la seule à détenir les quatre notes de l’Église. En effet, Mgr Lefebvre disait en juin 1989 : « C’est nous qui avons les notes de l’Église visible : l’unité, la catholicité, l’apostolicité, la sainteté. C’est cela qui fait l’Église visible » (p. 22).
Outre l’erreur de datation (juin 1989 pour septembre 1988), il faut surtout signaler que Mgr Lefebvre commence par bien préciser de quoi il parle en faisant les distinctions nécessaires :
« Je crois qu’il faut vous convaincre de cela : vous représentez vraiment l’Église catholique. Non pas qu’il n’y ait pas d’Église en dehors de nous ; il ne s’agit pas de cela. Mais ces derniers temps, on nous a dit qu’il était nécessaire que la Tradition entre dans l’Église visible. Je pense qu’on fait là une erreur très très grave. Où est l’Église visible ? L’Église visible se reconnaît aux signes qu’elle a toujours donnés pour sa visibilité : elle est une, sainte, catholique et apostolique. Je vous demande : où sont les véritables marques de l’Église ? Sont-elles davantage dans l’Église officielle (il ne s’agit pas de l’Église visible, il s’agit de l’Église officielle) ou chez nous, en ce que nous représentons, ce que nous sommes ? ».
La distinction n’est pas faite entre la FSSPX et l’Eglise. Elle est faite, à l’intérieur de l’Eglise, entre la FSSPX et ce qui est désigné comme une Eglise officielle et qui correspond à l’invasion du modernisme dans l’Eglise. Mgr Lefebvre veut seulement distinguer entre partie saine et partie malade.
L’argument de « l’Eglise conciliaire »
On pourra se reporter aux numéros de février et de septembre 2013 du Courrier de Rome. Certaines expressions extrapolées et isolées de notre fondateur peuvent donner le change. Mais … « soyons rationnels » !