C’est la Foi dans la présence réelle qui a été attaquée, et l’effondrement de la pratique religieuse n’en a été, hélas, qu’une conséquence logique.
Les profonds bouleversements du nouveau rite lors de la communion font certainement partie des éléments qui ont le plus choqué les fidèles. Tout d’abord le rite de la paix : tous ceux qui ont assisté à une nouvelle messe se rappellent en général cet instant mémorable. Comme dit le texte officiel de la nouvelle messe : « Les fidèles implorent la paix et l’unité pour l’Eglise et toute la famille des hommes et s’expriment leur amour mutuel avant de participer au pain unique » (n°56 de la Présentation générale du Missel Romain, édition de 1969). Mieux encore, ce rite pourra varier au gré des conférences épiscopales « selon la mentalité et les mœurs des différents peuples » (n°56)… Un peu comme une anticipation du parvis, on assiste alors ici à des poignées de main chaleureuses, des embrassades, des grands sourires : autant de gestes qui ne favorisent pas tellement le recueillement mais qui dissipent plutôt l’esprit quelques instants avant de communier. Dans le rite traditionnel, le rite de la paix est donné seulement lors de la messe solennelle entre les membres du clergé, avec une attitude sobre et digne.
La communion du côté du prêtre
Ici il faut mentionner la forte réduction des prières de préparation à la communion. Dans le rite traditionnel le prêtre récite 3 prières avant de communier. Dans le nouveau rite, l’une des trois a été supprimée, et le prêtre récite au choix l’une des deux restantes. Par ailleurs on est frappé de l’attitude du prêtre et des éventuels concélébrants (d’autres prêtres) après avoir communié : « Il distribue la communion aux fidèles ou bien se retire à son siège » (n° 201) ; « Les concélébrants (…) prennent le Précieux Sang et reviennent à leur siège. » (n° 201). Allez s’asseoir après la communion, est-ce là une attitude harmonieuse avec l’immense grâce que l’on vient de recevoir ? Est-ce une attitude qui édifiera les fidèles ? Et puis, si le prêtre a le choix entre donner la communion aux fidèles et aller s’asseoir, qui donnera la communion ? La suite va nous le dire.
Mais ce qui est saisissant, c’est que le rôle du prêtre dans la communion s’estompe : il est rendu facultatif dans la distribution de la communion. Cela va dans le sens de l’égalité des membres du peuple de Dieu, au sein duquel tous sont prêtres, d’après le Concile Vatican II (Lumen Gentium n°10). Dans la doctrine traditionnelle au contraire, le prêtre est absolument irremplaçable pour réaliser le sacrement d’Eucharistie, et seul un diacre peut lui venir en aide (pour une raison sérieuse) dans la distribution de la communion. Les mains du prêtre ne sont-elles pas consacrées par l’évêque, afin « que tout ce qu’elles béniront soit béni, et que tout ce qu’elles consacreront soit consacré et sanctifié, au nom de Notre Seigneur Jésus-Christ » ? (Rituel de l’ordination des prêtres).
La communion du côté des fidèles
Mentionnons tout de suite l’ouverture d’une porte par le Concile Vatican II (Sacrosanctum concilium n°55) : la communion à l’hostie et au calice pour les fidèles, dans certaines circonstances qui vont s’élargir au fil des années et au gré des conférences épiscopales. En parallèle la communion dans la main fit son apparition de sorte que dès 1965, en France, en Belgique et en Allemagne, cette pratique était déjà installée par endroit : un abus que des évêques couvraient sans difficulté. Volant incidemment à leur secours, l’instruction Memoriale Domini du 29 mai 1969 rappelait la règle de la communion traditionnelle sur la langue, mais permettait aux conférences épiscopales d’en décider autrement. La grande majorité des conférences épiscopales approuva sans surprise la communion dans la main. Les innombrables sacrilèges qui découlèrent de cette mesure et qui scandalisèrent le peuple chrétien devinrent monnaie courante.
L’abus engendrant l’abus, il apparut aussi que le prêtre (ou exceptionnellement le diacre) n’était plus le seul à donner la communion. En fait la pratique de la communion donnée par des laïcs avait déjà commencé à se répandre dès avant le nouveau rite, et la présentation du Missel de 1970 lui ouvre discrètement la porte en parlant de « ceux qui donnent la communion comme ministres extraordinaires » (n°68) sans préciser comme auparavant que seuls les diacres sont les ministres extraordinaires de la communion. Une omission évidemment calculée, afin d’ouvrir une porte : l’instruction Immensæ caritatis du 29 janvier 1973 entérina la faculté pour les laïcs de donner la communion, avec quelques vagues restrictions qui ne seront de toutes façons presque jamais observées.
Finalement il est aujourd’hui évident que le respect pour la sainte communion s’est complètement effondré dès 1969, et cela n’a pas changé jusqu’à aujourd’hui. C’est donc la Foi dans la présence réelle qui a été attaquée, et l’effondrement de la pratique religieuse n’en a été, hélas, qu’une conséquence logique.
Abbé Guillaume Scarcella
Source : Apostol n°136