Il y a vingt ans, Monseigneur Lefebvre menait l’ « opération survie » de la Tradition en sacrant quatre évêques sans mandat pontifical. Vingt ans déjà, vingt ans seulement. C’est peu et c’est beaucoup. C’est bien peu car la situation de l’Eglise n’a guère changé[1]. Elle est toujours dirigée par des autorités modernistes réfractaires à la Tradition. Le recul de l’histoire manque donc pour faire un bilan définitif de cette opération. C’est aussi beaucoup car la mouvance traditionaliste a évolué en ce temps. De nouveaux instituts se sont créés, sur les bases de l’accord proposé par Rome et refusé par Monseigneur Lefebvre en mai 1988. De nombreuses discussions ont eu lieu entre d’une part ces instituts et la Fraternité Saint-Pie X et d’autre part les autorités romaines. Leur histoire, succès ou déconvenues nous permettent de vérifier la pertinence des différents arguments avancés à l’époque pour justifier ou, au contraire, réprouver ces consécrations.
L’ « Opération Survie » de la Tradition
La pensée de Monseigneur Lefebvre sur la nécessité des sacres se résume dans l’expression « opération survie » de la Tradition qu’il employa dans son sermon le jour des sacres[2]. Il était convaincu que l’Eglise ne peut se couper de sa Tradition et rester fidèle à sa mission[3]. Elle a donc besoin d’évêques qui, non seulement, enseignent la foi catholique dans toute sa pureté, mais aussi dénoncent les erreurs l’infestant jusque dans ses plus hautes sphères. N’en trouvant malheureusement pas, Monseigneur Lefebvre estima être de son devoir de se donner des successeurs dans cette mission au service de l’Eglise.
Vingt ans après, les quatre évêques sacrés par ses soins sont les seuls à remplir cette mission. Sans l’intervention de Monseigneur Lefebvre, il n’y en aurait plus au grand détriment de l’Eglise.
Une autre raison, complémentaire de la précédente, était la nécessité d’assurer la pérennité d’un mouvement traditionaliste dans l’Eglise en le pourvoyant d’évêques pouvant ordonner ses candidats au sacerdoce et confirmer ses fidèles[4]. La Tradition ne peut pas subsister en théorie seulement, elle doit s’incarner dans des personnes et des œuvres concrètes qui lui donnent une vraie visibilité. Une Fraternité Saint-Pie X forte avec les moyens de se développer, est très utile pour cela. C’est en grande partie grâce à sa solidité et à sa fermeté qu’ont été obtenus tous les gestes de Rome en faveur de la Tradition, dont, entre autre le Motu Proprio Sommorum Pontificum du 4 juillet 2007.
La Fraternité Saint-Pierre doit en partie sa création à la volonté des autorités romaines de montrer qu’elles étaient vraiment prêtes à faire un accord avec les Traditionalistes et que c’est l’entêtement de Monseigneur Lefebvre qui a fait échouer les discussions avec la Fraternité Saint-Pie X. Depuis, elle a, ainsi que les autres instituts Ecclesia Dei, souvent été utilisée par les évêques pour éloigner les fidèles Traditionalistes de la Fraternité Saint-Pie X. La disparition ou l’affaiblissement de celle-ci serait un coup très dur pour la Tradition et affecterait grandement la situation de tout le mouvement Ecclesia Dei.
L’ Accord du 5 mai 1988
Le 5 mai 1988, après un an de discussion avec Rome, Mgr Lefebvre signait un protocole d’accord avec le Cardinal Ratzinger[5]. Mais, dès le lendemain, il émettait des réserves qui devaient aboutir à son abolition. Il est communément affirmé que c’est Mgr Lefebvre qui a dénoncé unilatéralement ce protocole ; ce n’est pas tout à fait exact. Dans une entrevue accordée à Fideliter (N°70), le prélat déclare :
« C’est là, qu’après avoir signé le protocole qui devait ouvrir la voie à un accord, j’ai réfléchi. Cette accumulation de méfiance et de réticence, m’a poussé à exiger la nomination d’un évêque pour le 30 juin, parmi les trois dossiers que j’avais déposés le 5 mai. C’est cela, ou je fais des évêques. C’est cette mise en demeure qui a fait que le cardinal Ratzinger a dit : « Si c’est comme cela, le protocole est aboli. C’est fini, il n’y a plus de protocole. Vous rompez les relations. » C’est lui qui l’a dit, ce n’est pas moi. »
On a ensuite prétendu que la Fraternité Saint-Pierre avait obtenu pour elle-même cet accord d’abord proposé à la Fraternité Saint Pie X. Cela aussi est inexact. D’abord, aucun membre de la commission Ecclesia Dei n’est issu du milieu de la Tradition. Ensuite, elle n’a toujours pas d’évêque. Toujours est-il que Monseigneur Lefebvre expliqua ses réserves sur le protocole d’accord par trois raisons : l’impossibilité d’obtenir la majorité des membres dans la commission ; l’incertitude sur l’octroi d’un évêque pour lui succéder et la demande, après coup, d’une lettre d’excuse de sa part[6].
La commission Ecclesia Dei
Monseigneur Lefebvre craignait qu’une commission où les Traditionalistes n’auraient pas la majorité ne soit pas vraiment au service de la Tradition. N’est ce pas le moins qu’on puisse dire de la commission Ecclesia Dei ? Depuis sa création, elle ne cesse de souffler le chaud et le froid sur les instituts qu’elle chapote. Parfois, elle prend leur partie en compatissant aux problèmes qu’ils ont avec les évêques ou en les défendant contre d’injustes accusations ; d’autres fois elle fait pression sur eux pour les amener à des concessions. Mais, il faut bien constater qu’elle n’obtient de résultats que dans le deuxième sens. Combien de fois n’a‑t-elle pas souhaité un meilleur accueil des évêques pour ces instituts ? Cependant, concrètement, elle ne fait rien pour les défendre. Ainsi, les évêques de Versailles, Lyon et Orléans ont récemment renvoyé la Fraternité Saint-Pierre de leur diocèse tout en débauchant certains de ses prêtres sans que la commission Ecclesia Dei ne veuille ou ne puisse intervenir. Par contre, elle n’a pas hésité à peser de tout son poids sur les élections au superiorat de la Fraternité Saint Pierre, allant même jusqu’à imposer son candidat en la personne de l’abbé Arnaud Devillers en l’an 2000 (Cfr lettre/document du Cardinal Castrillon Hoyos, président de la Commission Ecclesia Dei du 29 juin 2000).
On en vient à se demander si le seul but de cette commission n’est pas d’amener ces instituts petit à petit à se rallier aux idées modernistes. Elle les a d’ors et déjà neutralisés. Non seulement, ils ne s’élèvent plus publiquement contre les erreurs enseignées par les autorités de l’Eglise, mais bien souvent ils cherchent à les excuser voir même les justifier, quand ils ne les partagent pas. On pourra s’en convaincre en lisant en annexe la liste des compromis doctrinaux faits par ces différents instituts. Face à ce bilan, les déclarations affirmant lors des accords passés qu’aucune concession n’avait été faite sur la doctrine, apparaissent bien dérisoires.
La commission n’a pas non plus renoncé à leur faire célébrer la liturgie nouvelle. Ainsi tout dernièrement, le 30 mai, lors d’ordinations aux Etats Unis, le cardinal Castrillon Hoyos a déclaré dans son sermon :
« En tant que président de la Commission pontificale Ecclesia Dei, je porte un regard particulier sur ces jeunes hommes qui célébreront le Saint Sacrifice de la Messe et les Sacrements principalement selon les livres liturgiques de la forme extraordinaire du Rite romain qui est un trésor pour l’ensemble de l’Eglise. Cela répond à un désir d’un bon nombre de fidèles. Comme je suis heureux de promouvoir la volonté exprimée par notre Saint-Père dans son Motu Proprio Summorum Pontificum et d’encourager la mise en œuvre de ce document important, je vous invite aussi, mes chers fils et frères, à vous efforcer à faire partie intégrante des diocèses dans lesquels vous allez servir, frères de vos frères prêtres, en montrant un profond respect pour la forme ordinaire du rite romain, en concélébrant avec vos évêques à la messe chrismale et quand ce signe de la communion sacerdotale est spécialement approprié. »
Un évêque pour la Tradition
Face à la mauvaise volonté de Rome pour fixer la date du sacre d’un évêque pour lui succéder, Monseigneur Lefebvre douta d’en obtenir jamais un. De fait, la Fraternité Saint-Pierre, fondée sur les bases du protocole d’accord du 5 mai, n’a jamais obtenu d’évêque ; de même que les autres instituts Ecclesia Dei. Seule exception, l’institut Saint Curé d’Ars de Campos, mais son cas est un peu différent car c’est un institut diocésain. Ces instituts nous rétorqueront sans doute ce que Rome tenta de faire accepter à Monseigneur Lefebvre : en fait, ils n’en ont pas besoin ; ils arrivent à trouver des évêques pour ordonner leurs membres. Cependant il faut bien reconnaître que nombre d’évêques s’y refusent et que ceux qui acceptent ne partagent pas ouvertement leurs idées. Ils le font pour faire plaisir ou par calcul politique. Résultat : ces instituts dépendent totalement de Rome et des évêques pour l’ordination de leurs membres, ordinations dont dépend leur survie. Voilà qui ne doit pas faciliter la résistance quand ceux-ci exercent des pressions indues.
Une lettre d’excuse
Il ne s’agissait pas seulement pour Monseigneur Lefebvre de s’excuser pour quelques écarts de langage ou attitudes qui auraient pu blesser le Pape. Il ne s’y serait certainement pas refusé. On lui demandait de s’excuser pour sa soi-disant rébellion contre les autorités romaines, de reconnaître en fait qu’il avait eu tort d’entrer en résistance contre l’auto-démolition de l’Eglise[7].
Comment aurait-il pu faire cela alors qu’il avait agi en son âme et conscience, persuadé que cela était son devoir d’évêque catholique ? Un telle incompréhension de sa position de la part des autorités romaines ne pouvait que renforcer son inquiétude devant les difficultés rencontrées dans la composition de la commission et l’obtention d’un évêque pour la Fraternité Saint-Pie X. Comme il l’écrivit lui-même, Rome donnait à penser qu’elle n’avait d’autre but dans ces discussions que celui qu’elle avait toujours eu jusque là :
« faire accepter à la Fraternité Saint-Pie X le concile et les réformes et lui faire reconnaître son erreur » (Monseigneur Lefebvre dans un texte datant du 19 juin 1988)[8]
N’est ce pas ce qui est arrivé à tous les instituts Ecclesia Dei ralliés à Rome ces vingt dernières années ? Ils n’émettent plus de réserves sur le concile et les réformes quand ils n’en arrivent pas à les approuver et les défendre.
Un Acte Schismatique ?
Certains se sont opposés aux sacres en affirmant que sacrer un évêque sans l’autorisation papale est contraire à la constitution divine de l’Eglise et constitue donc un acte schismatique. Les déclarations ( Décret du Cardinal Gantin du 1er juillet 1988 et Motu Proprio Ecclesia Dei Aflicta du 2 juillet 1988) du Saint-Siège sont venues appuyer leurs dires. Sur de telles questions dogmatiques le temps n’a pas de prise et vingt ans n’ont rien changé aux arguments exposés des deux côtés. Ils ont, par contre, permis de constater que, dans l’Eglise « conciliaire » elle-même, les avis sont partagés. Beaucoup ne croient pas que la Fraternité Saint-Pie X et ses fidèles soient schismatiques. Donnons quelques exemples :
Dans une lettre datée du 3 mai 1994, le cardinal Cassidy, président du Conseil Pontifical pour l’Unité des chrétiens, écrit à un correspondant étranger :
« En ce qui concerne votre demande, je voudrais faire remarquer tout de suite que le Dicastère sur l’oecuménisme n’est pas concerné par la Fraternité Saint-Pie X. La situation des membres de cette Société est une affaite interne de l’Eglise Catholique. La Fraternité Saint-Pie X n’est pas une autre Eglise ou Communauté ecclésiale dans le sens qu’utilise ce Dicastère. Bien sûr, la messe et les sacrements administrés par les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X sont valides. »
On ne saurait être plus clair.
Le 1er mai 1991, Mgr Ferrario, évêque d’Hawaii, excommunia 6 laïcs au motif qu’ils avaient « accompli un acte schismatique, non seulement en se procurant « les services » de Mgr Williamson pour administrer le sacrement de confirmation à la chapelle Notre-Dame de Fatima, mais aussi par leur association même avec l’évêque susmentionné ». Ceux-ci firent appel et obtinrent gain de cause. Dans une lettre datée du 28 juin 1993, le nonce apostolique aux Etats-Unis, Mgr Cacciavillan déclara de la part du cardinal Ratzinger : « Suite à l’examen de votre cas conduit sur la base de la loi de l’Eglise, il ne résulte pas que les faits mentionnés dans le dit décret soient formellement schismatiques dans un sens strict, car ils ne constituent pas l’offense de schisme. Par conséquent la congrégation tient que le décret du 1er mai 1991 manque de fondement et donc de validité. »
Le 13 novembre 2005, le Cardinal Hoyos a affirmé devant la télévision italienne TV Canal 5 :
« Nous ne sommes pas face à une hérésie. On ne peut pas dire en termes corrects, exacts, précis qu’il y ait schisme. (…) Ils sont à l’intérieur de l’Eglise. Il y a seulement ce fait qu’il manque une pleine, une plus parfaite communion, parce que la communion existe. »
On aimerait bien savoir comment il faut comprendre ces différents degrés dans la communion. Retenons seulement pour l’instant ce qui nous intéresse d’abord : le cardinal Castrillon Hoyos a affirmé publiquement qu’on ne peut pas dire qu’il y a schisme et que nous sommes à l’intérieur de l’Eglise. Le tribunal romain de la Sainte Rote qui juge en dernière instance les cas de nullité de mariage n’hésite pas à déclarer nuls les mariages célébrés par des prêtres de la Fraternité Saint-Pie X au motif que la forme canonique n’a pas été respectée. Or le Droit Canon dispense du respect de la forme canonique les schismatiques (can. 1117). Donc, en toute bonne logique, en jugeant ainsi, ce tribunal reconnaît indirectement que les prêtres et le fidèles de la Fraternité Saint-Pie X ne sont pas schismatiques [9].
On pourrait continuer encore longtemps cette liste qui renforce les arguments avancés par le Fraternité Saint-Pie X pour se défendre de l’accusation de schisme. IL serait trop long de reprendre tous ces arguments ici ; notons seulement que l’Eglise « conciliaire » elle-même, est divisée sur le sujet, et ce même au plus haut niveau.
Conclusion
Il y a vingt ans, Monseigneur Lefebvre estima de son devoir de consacrer quatre évêques sans mandat pontifical pour assurer la survie de la Tradition dans l’Eglise catholique. Un an de discussions avec les autorités romaines n’avait pu rétablir sa confiance ébranlée par trente années d’errements conciliaires et vingt ans de persécution subie de leur main. Dans une lettre au pape datée du 2 juin 1988, il concluait :
« Etant donné le refus de considérer nos requêtes, et étant évident que le but de cette réconciliation n’est pas du tout le même pour le Saint-siège que pour nous, nous croyons préférable d’attendre des temps plus propices au retour de Rome à la Tradition. C’est pourquoi nous nous donnerons nous-même les moyens de poursuivre l’œuvre que la Providence nous a confié, assuré par la lettre de Son Eminence le Cardinal Ratzinger datée du 30 mai, que la consécration épiscopale n’est pas contraire à la volonté du Saint-Siège, puisqu’elle est accordée pour le 15 août. »
Vingt ans après, les faits lui ont donné raison. Personne n’a signé avec Rome l’accord proposé dans le protocole du 5 mai 1988. Malgré des concessions toujours plus importantes sur l’usage de la liturgie traditionnelle, aucun institut Ecclesia Dei n’a obtenu de sièges à la Commission du même nom, ni d’évêques. Tous ont cessé de dénoncer les erreurs du concile Vatican II et s’y rallient petit à petit. Tel est, nous disent-ils, le prix à payer pour rester catholique. Pourtant la Fraternité Saint-Pie X n’a jamais cessé de l’être. Plus que tout autre, elle a gardé la pureté de la foi qui fait le vrai fils de l’Eglise. Monseigneur Lefebvre écrivait en 1989 :
« Je pense donc qu’il n’y a aucune hésitation, ni aucun scrupule à avoir vis-à-vis de ces consécrations épiscopales. Nous ne sommes ni schismatiques, ni excommuniés, nous ne sommes pas contre le Pape. Nous ne sommes pas contre l’Eglise catholique. Nous ne faisons pas d’Eglise parallèle. Tout cela est absurde. Nous sommes ce que nous avons toujours été, des catholiques qui continuent. C’est tout. » (Mgr Lefebvre, entrevue publié dans Fideliter, N°70, juillet-août 1989).
Ces paroles n’ont jamais été plus pertinentes. Il y a presque un an, le processus de réhabilitation de Mgr Lefebvre a commencé avec la reconnaissance du fait que la messe de Saint Pie V n’a jamais été abrogée (Motu Proprio Summorum Pontificum du 4 juillet 2007). N’est ce pas, en effet, le refus obstiné de Monseigneur Lefebvre de célébrer la nouvelle messe qui fut à l’origine de ses problèmes avec les autorités romaines ? Ce processus pourrait bien aboutir tout prochainement.
Ces derniers jours de juin, les médias font état d’une possible levée de l’excommunication de Monseigneur Lefebvre, de Monseigneur de Castro Mayer et des quatre évêques consacrés par eux. Les cinq conditions posées par Rome pour cela sont très révélatrices. Aucune n’aborde de point doctrinal : pas un mot sur la reconnaissance du Concile Vatican II et de la nouvelle messe[10]. Rome reconnaît donc qu’on peut avoir des réserves sur ces deux points cruciaux tout en étant catholique en communion avec le Pape. N’est ce pas là ce que Monseigneur Lefebvre a toujours soutenu ?
Abbé François Castel
Source : La Sainte Ampoule
- « (…) rien n’a changé dans la volonté de Rome de poursuivre les orientations conciliaires, malgré quarante années de crise, malgré les couvents dépeuplés, les presbytères abandonnés, les églises vides. Les universités catholiques persistent dans leurs divagations, l’enseignement du catéchisme reste une inconnue alors que l’école catholique n’existe plus comme spécifiquement catholique : c’est devenu une espèce éteinte… » Monseigneur Fellay, Lettre aux amis et bienfaiteurs, N° 72, avril 2008.[↩]
- « Aujourd’hui cette journée c’est l’ « opération survie » et si j’avais poursuivi avec Rome, en continuant les accords que nous avons signés et en poursuivant la mise en pratique de ces accords, je faisais « l’opération suicide ». Je ne le peux pas. Il n’y a pas de choix. Je suis obligé, car nous devons survivre. C’est pourquoi aujourd’hui, en consacrant ces évêques, je suis persuadé de continuer à faire vivre la Tradition, c’est-à-dire à servir l’Eglise catholique. » Monseigneur Lefebvre dans son sermon des sacres, dans Fideliter, N°64, juillet-août 1988, p. 6.[↩]
- « [la] Tradition est la seule source de sanctification et de salut pour les âmes, et la seule possibilité de renouveau pour l’Eglise. » Monseigneur Lefebvre dans un texte du 19 juin 1988.[↩]
- « Vous savez bien qu’il ne peut y avoir de prêtres sans évêques. Tous ces séminaristes qui sont ici présents, si demain le Bon Dieu me rappelle –ce sera sans doute sans tarder- de qui recevront-ils le sacrement de l’ordre, des évêques conciliaires dont les sacrements sont tous douteux parce que l’on ne sait pas exactement quelles sont leurs intentions. Ce n’est pas possible. « Or quels sont les évêques qui ont gardé vraiment la Tradition, qui ont gardé les sacrements tels que l’Eglise les a donnés pendant vingt siècles jusqu’au Concile Vatican II ? Eh bien c’est Mgr de Castro Mayer et moi-même. Je n’en puis rien. C’est comme ça. Donc beaucoup de séminaristes se sont confiés à nous et ont senti qu’il y avait là la continuité de la Tradition. Ils sont venus dans nos séminaires malgré les difficultés qu’ils ont rencontrées, pour recevoir une véritable ordination sacerdotale et pour pouvoir offrir le vrai sacrifice du Calvaire, le vrai sacrifice de la messe et vous donner les vrais sacrements et la vraie doctrine, le vrai catéchisme. Voilà le but de ces séminaires. « Alors, je ne puis en conscience laisser ces séminaristes orphelins et je ne puis pas vous laisser vous non plus orphelins en disparaissant sans rien faire pour l’avenir. Ce n’est pas possible. E serait contraire à mon devoir. » Monseigneur Lefebvre, sermon du 30 juin 1988, dans Fideliter, N°64, juillet-août 1988, p. 6.[↩]
- Extraits du texte du protocole d’accord du 5 mai 1988 : « 2. COMMISSION ROMAINE.
« Une commission romaine pour coordonner les rapports avec les divers Dicastères et les évêques diocésains, ainsi que pour résoudre les problèmes éventuels et les contentieux, sera constituée par les soins du Saint-Siège, et pourvue des facultés nécessaires pour traiter les questions indiquées ci-dessus (par exemple l’implantation à la demande des fidèles d’un lieu de culte là où il n’y a pas de maison de la Fraternité, « ad mentem » can. 383 §2). « Cette commissions sera composée d’un Président, d’un Vice-Président, et de cinq membres, dont deux de la Fraternité. « Elle aurait en outre la fonction de vigilance et d’appui pour consolider l’œuvre de réconciliation et régler les questions relatives aux communautés religieuses ayant un lien juridique ou moral avec la Fraternité. (…)
« 5.PROBLÈME DE L’ÉVÊQUE.
« 5.1. Au niveau doctrinal (ecclésiologique), la garantie de stabilité et de maintien de la vie et de l’activité de la Fraternité est assurée par son érection en Société de vie apostolique de droit pontifical et l’approbation des Statuts par le Saint-Père.
« 5.2. Mais, pour des raisons pratiques et psychologiques apparaît l’utilité de la consécration d’un évêque membre de la Fraternité. C’est pourquoi, dans le cadre de la solution doctrinale et canonique de la réconciliation, nous suggérons au Saint-Père de nommer un évêque choisi dans la Fraternité, sur présentation de Mgr. Lefebvre. En conséquence du principe indiqué ci-dessus (5.1.), cet évêque n’est pas normalement Supérieur Général de la Fraternité. Mais il paraît opportun qu’il soit membre de la commission romaine. » On peut trouver le texte complet de ce protocole dans Fideliter, numéro hors série, 29–30 juin 1988.[↩] - « Les colloques qui ont suivi en avril et mai nous ont bien déçu. On nous remet un texte doctrinal, on y ajoute le nouveau Droit Canon, Rome se réserve 5 membres sur 7 dans la commission romaine, dont le président (le card. Ratzinger) et le vice-président. La question de l’évêque est solutionnée avec peine : on insistait pour nous montrer que nous n’en avions pas besoin. Le Cardinal nous fait savoir qu’il faudrait laisser célébrer une messe nouvelle à Saint Nicolas du Chardonnet. Il insiste sur l’unique Eglise, celle de Vatican II. Malgré ces déceptions, je signe le protocole le 5 mai. Mais déjà la date de la consécration épiscopale fait problème. Puis un projet de lettre de demande de pardon au Pape m’est mis entre les mains. Je me vois obligé d’écrire une lettre menaçant de faire les consécrations épiscopales pour arriver à avoir la date du 15 août pour la consécration épiscopale. Le climat n’est plus du tout à la collaboration fraternelle et à une pure et simple reconnaissance de la Fraternité. Pour Rome le but des colloques est la réconciliation, comme le dit le Cardinal Gagnon, dans un entretien accordé au journal italien L’Avvenire, c’est-à-dire le retour de la brebis égaré dans la bergerie. C’est ce que j’exprime dans la lettre au Pape du 2 juin : « Le but des colloques n’est pas le même pour vous que pour nous ». » Monseigneur Lefebvre dans un texte du 19 juin 1988.[↩]
- « … en même temps que je donnais la signature pour le protocole, à la même minute, l’envoyé du cardinal Ratzinger qui m’apportait ce protocole à signer, me confiait ensuite une lettre, dans laquelle il me demandait de solliciter le pardon pour les erreurs que je faisais. « Si je suis dans l’erreur, si j’enseigne des erreurs, il est clair qu’on va me remettre dans la vérité, dans l’esprit de ceux qui m’envoie cette feuille à signer. C’est-àdire, si vous reconnaissez vos erreurs, nous vous aiderons à revenir dans la vérité… » Monseigneur Lefebvre, sermon du 30 juin 1988, dans Fideliter, N°64, juillet-août 1988, p. 5.[↩]
- « Nous n’avons pas la même façon de concevoir la réconciliation. Le cardinal Ratzinger la voit dans le sens de nous réduire, de nous ramener à Vatican II. Nous, nous la voyons comme un retour de Rome à la Tradition. On ne s’entends pas. C’est un dialogue de sourds. » Mgr Lefebvre dans une entrevue donnée à Fideliter, N°66, novembre- décembre 1988, p. 12.[↩]
- Il est vrai que nous ne respectons pas la forme canonique dans la célébration de nos mariages. Ils sont cependant valides en raison du canon 1116 (1098 dans l’ancien Code) : §1. S’il n’est pas possible d’avoir ou d’aller trouver sans grave inconvénient un assistant compétent selon le droit, les personnes qui veulent contracter un vrai mariage peuvent le contracter validement et licitement devant les seuls témoins : 1° en cas de danger de mort ; 2° en dehors du danger de mort, pourvu qu’avec prudence il soit prévu que cette situation durera un mois. §2. Dans les deux cas, si un prêtre ou diacre peut être présent, il doit être appelé et être présent avec les témoins à la célébration du mariage, restant sauve la validité du mariage devant les seuls témoins. La déclaration d’intention demandée par la Fraternité aux futurs époux mentionnent trois graves inconvénients : « Je reconnais pleinement que la situation dans l’Eglise ne me permet pas de me marier dans ma paroisse, ni une paroisse de mon diocèse.
- tant en raison des risques pour la foi que les modernistes dissolvent dans l’œcuménisme,
- qu’en raison de la morale, particulièrement de la morale conjugale quant à l’obligation de procréer
- qu’en raison de la liturgie nouvelle. »[↩] - Nous donnons ici, sous réserves, les cinq conditions tel que communiquées par I. Media le 24 juin. « 1 – Engagement à une réponse proportionnée à la générosité du pape.
2 – Engagement à éviter toute intervention publique qui ne respecte pas la personne du pape et qui puisse être négative pour la charité ecclésiale.
3 – Engagement à éviter la prétention d’un magistère supérieur à celui du Saint Père et de ne pas désigner la Fraternité en opposition à l’Eglise.
4 – Engagement à démontrer la volonté d’agir honnêtement dans la pleine charité ecclésiale et dans le respect de l’autorité du vicaire du Christ.
5 – Engagement à respecter la date – fixée à la fin du mois de juin – pour répondre positivement. Celle-ci sera une condition requise et nécessaire comme préparation immédiate à l’adhésion pour avoir la pleine communion. »[↩]